mardi 5 mars 2013

La guerre continue


L’émir de la Katiba Tarek Ibn Zeyad, Abdel Hamid Abu Zeyd est bien mort. Vraisemblablement dans un raid aérien de l’Armée française. Mais c’est le Tchad qui a eu droit à crier victoire, une façon pour ce pays de compenser les lourdes pertes au sein de ses effectifs. C’est cette explication qui est retenue officieusement. Et si c’était autre chose ? Et si les avions français avaient bombardé «une colonne de terroristes» ignorant qu’il n’y avait pas que les combattants de AQMI ? Il n’y aurait pas d’autre choix pour eux que laisser passer le temps et se répandre le doute sur les conditions de destruction de la colonne.
Qu’en est-il de Belawar ? On fait circuler une photo qui serait celle de l’émir de la Katiba «El Moulathamoune» devenue «les signataires par le sang». Un guide de l’Armée tchadienne aurait formellement reconnu le corps de Belawar. Mais tout concourt à ne pas croire à sa mort.
D’abord, il s’agit d’un Emir qui plus est trafiquant notoire et peu porté sur les combats et le sacrifice de sa vie. Abu Zeyd est le chef d’une unité combattante et a dirigé quelques batailles dont celle de Djabali qui lui a permis d’occuper cette ville alors que l’Armée française était déjà passée à l’action. La seule bataille que Belawar a dirigé jusqu’au bout, est celle de Lemghayti en juin 2005. Il a par contre des hommes qui sont prêts à mourir pour lui et qui le protègent. Ses relations, tissées pendant de longues années de trafics de tous genres aux frontières des pays du champ, lui permettent de se mouvoir sans être forcément répéré par les armées officielles.
L’intervention française a coûté cher aux Jihadistes qui ont perdu des centaines d’hommes et une grande partie de leur matériel de guerre amassé ces dernières années. C’est ce qui explique les déchirements que le mouvement Ançar Eddine vit depuis la forte réaction française et africaine qui fait suite à l’offensive lancée vers le sud par le mouvement et ses alliés jihadistes, offensive qui a pris la forme d’une provocation de la communauté internationale.
Rappelons que la Katiba «Tarik Ibn Zeyad» est responsable de l’attaque de Tourine le 15 septembre 2008. En plein ramadan, la brigade de Abu Zeyd tue, décapite et mine les corps de 12 Mauritaniens en plein territoire mauritanien. C’est son groupe qui a enlevé les deux Italiens en décembre 2009.
L’assassinat des Français à Aleg, l’enlèvement des Espagnols, les projets d’attentats à Nouakchott, celle d’établissement à Wagadu, l’attaque de Lemghayti… sont le fait de la Katiba de Belawar. L’attaque de Bassiknou, en 2011, est le résultat d’un regroupement de toutes les forces de AQMI sous le commandement de Nabil Makhloufi, avec la participation directe de Abul Hamam, celui qui allait devenir l’Emir du Sahara, et d’éléments envoyés par Abu Zeyd et Belawar.
Ce ne sont pas des enfants de chœur, mais ils savent se replier devant les contre-attaques quand elles sont efficaces et déterminées. Ce fut le cas des campagnes de l’Armée mauritanienne en 2010 et 2011. Depuis, la peur a changé de camp.
Quoi qu’il en soit, la guerre continue avec moins de risques de dommages collatéraux car les Jihadistes se sont réfugiés dans des zones reculées et inhabitées. L’un des plus grands risques pour la France et ses alliés, c’est de laisser l’Armée malienne sévir contre les populations. A ce moment, l’hostilité des populations locales sera tel qu’il sera difficile de se préserver des attaques fulgurantes des groupes armés.
Il va falloir aussi trouver un rôle pour les pays du champ – Algérie, Mauritanie et Niger – afin de les obliger à s’impliquer d’avantage pour garantir la stabilisation et la sécurisation de la zone sahélo-saharienne.