lundi 9 avril 2018

Politique : Le dilemme du FNDU


Il y eut le Front des Partis d’Opposition (FPO), puis la coalition des forces du changement démocratique (CFCD), puis la Coalition de l’Opposition Démocratique (COD) et enfin le Front national pour la démocratie et l’unité (FNDU). Tous ces regroupements ont rassemblé les partis d’opposition décidés à en découdre avec le pouvoir en place. Mais chaque fois, ces regroupements n’ont pas survécu aux échéances électorales.
Aujourd’hui encore le FNDU tente d’envisager les échéances prochaines dans la perspective d’une alliance. Mais comment et sur quelle base ?
Le FNDU qui rassemble des partis et des organisations de la société civile, semble s’acheminer vers une coordination de ses actions. Le plus grand de ses composantes est sans doute Tawassoul qui est déjà présent sur l’échiquier institutionnel avec 16 députés et quelques mairies. La participation de ce parti est déjà assurée pour les élections locales et les législatives prévues pour 2018. Cependant, dans l’une des déclarations, de son ancienne direction, il a été affirmé qu’il ne sera pas sur la ligne de départ de la présidentielle. A-t-il intérêt à ce que ses partenaires participent ? Et dans quelles conditions, il le souhaite ?
Pour sa part, l’Union des forces du progrès (UFP) a déjà, par la voie de son président Mohamed Ould Maouloud, déclaré sa volonté d’y aller. L’homme qui préside aux destinées du FNDU actuellement a même affirmé qu’ils sont prêts à soutenir toute candidature consensuelle, même si elle vient du dehors. Entendez par là, «même si le candidat n’appartient pas aux partis du FNDU». On peut aller plus loin pour dire «surtout si le candidat n’appartient pas aux composantes du FNDU», tellement l’accord semble impossible entre eux.
Cette disponibilité à vouloir soutenir un candidat extérieur, si elle l’emporte, voudra dire que ce conglomérat a été incapable de trouver une personnalité consensuelle en son sein. Ce qui est grave pour des formations politiques dont certaines ont existé depuis des décennies.
On se rappelle qu’en 2007, deux personnalités sont sorties du lot pour s’affronter au deuxième tour : Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi et Ahmed Ould Daddah. Tous deux furent les plus jeunes ministres du gouvernement de feu Moktar Ould Daddah renversé le 10 juillet 1978. Le passage des deux hommes signifiait obligatoirement la faillite des groupuscules politiques, les deux hommes n’ayant de passé politique autre que celui d’avoir été ministre au moment de leur engagement (Ould Daddah en 1991 et Ould Cheikh Abdallahi en 2007).
Au sein du FNDU, les débats auraient déjà commencé. Parmi les personnalités «candidatées » à la candidature, on peut compter : Cheikh Sid’Ahmed Ould Babamine, ancien président de la CENI de la période de transition, membre du groupe des personnalités indépendantes et bénéficiant d’une aura indiscutable ; Me Ahmed Salem Ould Bouhoubeyni, ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats, ancien président du FNDU, un moment candidat à la présidentielle de 2014, membre lui aussi du groupe des personnalités indépendantes ; Mohamed Ould Maouloud, président de l’UFP et, en exercice du FNDU, leader incontesté du Mouvement national démocratique ; Saleh Ould Hanenna, président du parti Hatem, proche des Islamistes qui l’avaient soutenu en 2007…
En dehors du FNDU, la commission désignée pour réfléchir à la question aurait pensé à Cheikh Ould Hanenna, membre de l’ancien Sénat, chef de file des frondeurs qui ont constitué un bureau du Sénat qu’ils estiment légitime. Il a été question pour eux de prendre langue avec des personnalités comme Moulaye Ould Mohamed Laghdaf, Mohamed Salek Ould Heyine, Ahmedou Ould Abdalla…
Toutes les démarches et les débats actuels semblent occulter un fait simple : l’année 2018 et ses défis déterminent nécessairement ce qui va suivre. Donc…

Editorial 749


Il s’appelle Seif Kousmate. Il est franco-marocain. Pour Reporters sans Frontières (RSF), il s’agit d’un «journaliste photographe» qui aurait subi de mauvais traitements en Mauritanie avant d’être expulsé. Pour les Mauritaniens, il s’agit d’un marocain entré «clandestinement» au pays pour s’y adonner à un travail qu’il a fini par effectuer dans le noir.
En situation «normale», on n’aurait pas hésité à lui reprocher la méthode, celle de venir faire un reportage dans un pays sur une question au centre de grandes controverses, sans prendre la précaution de faire les démarches prévues pour s’assurer de travailler en toute légalité. Mais…
La même semaine, je recevais ici des amis dont une photographe qui voulait prendre des images de la vie économique, culturelle et sociale en Mauritanie. Il s’agissait pour nous de rassembler des images d’une Mauritanie qui marche et qui avance en vue d’alimenter un site en préparation. Tout cela a été expliqué dans une lettre adressée au ministère des relations avec le Parlement et la Société civile.
Une semaine d’attente, puis deux jours, puis… on nous expliqua qu’il fallait avoir le visa de quelque part… ailleurs… parfois avec le geste pour comprendre qu’il s’agit de la Présidence et souvent pour comprendre qu’il s’agit plutôt du Premier ministère. Mais quelque soit l’Autorité qui fait ombrage à l’exercice d’une profession déjà en proie à de nombreuses difficultés, des remarques s’imposent.
Vue de l’extérieur, la Mauritanie est un pays qui donne une idée de la Géhenne. Terre d’esclavage, son peuple croupit sous une dictature violente. Le pays est sous l’emprise des trafiquants de drogue et d’arme, s’il n’est pas la terre de refuge des terroristes jihadistes. Passage obligatoire de l’immigration clandestine, la Mauritanie reste la patrie de l’exploitation de l’homme par l’homme.
Pas de liberté d’expression. Pas de liberté d’association. Pas de liberté de culte. Pas de liberté individuelle encore moins collective.
Le racisme comme pratique institutionnelle et comme doctrine sociale. La prostitution comme religion. Le vandalisme comme méthode de gouvernement.
Les sites d’informations, les acteurs politiques mécontents, les opérateurs économiques insatisfaits… tous participent consciemment ou inconsciemment à fabriquer une telle image.
Et quand il y a une volonté qui se manifeste quelque part pour essayer de renverser l’image au moins de l’atténuer, c’est le gouvernement qui la torpille.
Refuser à un journaliste d’avoir les accréditations nécessaires pour mener son travail en toute légalité, c’est faire preuve de bêtise incommensurable. Et ouvrir la voie aux excès et au travail clandestin.
Du coup, le gouvernement confirme ainsi sa volonté d’en découdre avec les espaces de liberté, de remettre en cause ses engagements et, de fait, de prendre les airs d’une dictature. Parce qu’un(e) ministre et/ou un Premier ministre ne respecte pas les institutions, parce qu’il profite de sa position pour régler des comptes, pour faire mal à ceux qu’il a décidé de traiter en ennemis, c’est tout un système qui se retrouve dans la ligne de mire des défenseurs de droits.
Ce gouvernement aurait dû déployer ses efforts en vue de donner la meilleure image du pays, de son système politique et de son président. Mais non. Il est occupé à se battre pour confirmer ce que les excès d’opposition ont construit ces dernières années.
Après avoir échoué à accompagner la vision de son chef, après avoir saboté le processus de refondation par les choix incongrus, après avoir ridiculisé le processus référendaire, après avoir occupé l’espace public par les guerres claniques… ce gouvernement s’ingénue à donner la plus mauvaise image qui puisse être de la Mauritanie…
Nous nous apprêtons à vivre le plus positif de nos tournants, celui d’une alternance au sommet de l’Etat.
Le Président Mohamed Ould Abdel Aziz qui a sauvé le pays de la banqueroute en 2005, qui a redressé la barre en août 2008, a refusé de céder à la tentation de remettre en cause la limitation des mandats. De lui-même.
Et contre la volonté affichée de ses «faux amis» et de ses vrais ennemis.
«Dieu, gardez-moi de mes amis, mes ennemis je m’en charge». Jamais une telle affirmation n’a été aussi pertinente. Rien n’est plus préjudiciable au Président Ould Abdel Aziz que son gouvernement actuel.