mercredi 14 novembre 2012

Barrage à la rumeur


Quand on sort de Nouakchott, on rattrape les rumeurs d’il y a une semaine. Il y a une semaine qu’on a parlé du retour du Président Ould Abdel Aziz dans un hôpital parisien, c’est maintenant que cette rumeur arrive en Assaba et dans les Hodh’s. Je ne crois pas que ce «décalage» est le résultat de l’éloignement : aujourd’hui aucune contrée n’est loin grâce aux moyens modernes de communication (téléphone, internet).
Mais en fait, les groupes de travail qui construisent, diffusent et entretiennent ces rumeurs ne visent pas les populations de l’intérieur. Pour eux, ces populations n’entrent pas dans le schéma visant la déstabilisation du pouvoir en place. Dans les milieux qui «producteurs» de la rumeur, le peuple est sorti depuis longtemps des calculs visant à ouvrir la voie vers la prise de pouvoir.
En désespoir de cause et dans l’incapacité de faire adhérer la masse aux projets qu’ils fomentent – ce terme sied mieux aux méthodes utilisées -, les «sorciers» politiques ont recours à un genre d’occultisme particulier. Il faut d’abord semer le trouble, ensuite la zizanie, de quoi perturber le cours normal des choses et intoxiquer les relations au sein du système, en espérant que cela aboutira à le faire ronger de l’intérieur pour le faire écrouler de lui-même. C’est ce qui a été essayé tout u long de ces interminables semaines d’absence du Président de la République. Cela n’a pas réussi, maintenant passons à autre chose…
Mais en attendant revenons aux rumeurs et aux cibles qu’elles visent. C’est d’abord à Nouakchott, dans le quartier chic de Tevraq Zeina que tout se conçoit. C’est d’ici que tout part. Autour d’un thé, dans un café ou dans un salon huppé, quelques individus bien nourris, blanchis par l’habitude de la climatisation, rasés de près, sentant les meilleurs parfums de Paris, s’asseyent et décident. Les informations qu’ils vont produire et faire circuler doivent d’abord viser les éléments du régime les plus établis, ceux qui sont sensés faire barrage à tous les projets ou encore ceux qui pourraient être victimes de manipulations. Cela va du chef d’Etat Major des Armées au Premier ministre, au directeur du Cabinet présidentiel, aux chefs de corps, au président du parti au pouvoir, aux hommes d’affaires proches ou lointains soutiens de Ould Abdel Aziz… en fait à tous ceux qui, dans l’entendement de ces esprits, pourraient peser de leurs poids dans le cours des événements. Machiavélique : la rumeur arrive de partout et prend l’allure d’une vraie information. Elle finit par intoxiquer ses producteurs qui vont désormais travailler dans la perspective qu’ils ont cru ouvrir…
On finit par revenir à la réalité. Une fois de plus, le système Ould Abdel Aziz – on doit désormais parler d’un système – a tenu devant les assauts de ses détracteurs. Comme quand son avion tombait au milieu de nulle part et qu’il perdait tout contact avec l’extérieur (juin 2009)… Le moment de savoir qui gagne dans ce jeu.
D’abord les opérateurs de téléphonie mobile. Ils ont battu tous les records un certain soir de samedi 28 octobre. Ensuite le pouvoir de Ould Abdel Aziz lui-même. Tout ce qu’on a raconté sur son compte lui attire plus de sympathie que ses détracteurs ne peuvent imaginer. Quand il reviendra dans les jours qui suivent, il aura vaincu des épreuves, virtuelles certes parce qu’elles sont restées du domaine du supposé, réelles cependant dans les esprits parce qu’on les a martelées tout au long de ces longues semaines. Ce qui lui donnera cette image de «chef invincible», du moins «dur à cuire», de «çou’louk», de guerrier intrépide déjouant tous les calculs et arrivant à bout de toutes les misères que lui concoctent ses adversaires.
C’est ça, tout ce qui a été fait (dit et écrit) va dans l’intérêt de Ould Abdel Aziz et de son système. A lui d’en profiter calmement à son retour.