mercredi 11 avril 2012

La presse chez Tawaçoul


C’est un dîner-débat que Tawaçoul a organisé hier soir au profit de la presse mauritanienne indépendante. Après les artistes-griots, les artistes-cinéastes et d’autres pans de la société, le parti islamiste a rassemblé la presse autour de sa direction pour discuter de ses points de vue, de ses positionnements, de ses lectures du futur proche…
C’est naturellement le président de Tawaçoul, Mohamed Jamil Ould Mansour qui ouvert le bal, juste après que le dîner a été servi. Il a expliqué que c’est là l’occasion non seulement de poser des questions, mais aussi d’entendre les critiques, les remarques des journalistes sur son parti. Ce n’est pas une conférence de presse, mais une séance d’échanges qu’il espère fructueux.
Il a rappelé l’ancrage de son parti dans le référentiel islamique, l’option nationale et le choix de la démocratie. Référentiel islamique qui est la source première d’inspiration du programme et du projet social de Tawaçoul ; la recherche de l’unité nationale et pour ce faire, la traduction de la diversité et du pluralisme en Mauritanie dans le discours et dans l’action du parti ; le choix démocratique qui part du principe que la gestion des hommes relève de leur compétence, et qui se base sur le respect de l’autre.
Mohamed Jemil Ould Mansour a répondu à deux salves de questions et de commentaires. Elles tournaient autour du positionnement actuel du parti Tawaçoul, lequel, après avoir été le premier à reconnaitre les résultats de l’élection de 2009, et adopté en conséquence une attitude plutôt conciliante voire «coopérante» vis-à-vis du régime, s’est subitement retrouvé dans l’opposition radicale. Pourquoi ces revirements ? pourquoi ce discours chargé d’excès ? pourquoi l’interférence des Ulémas qui devaient être «le bien» de tous ? est-ce le processus du coup d’Etat qui est envisagé ou la révolution ? dans l’un ou l’autre des cas, quelles sont les chances du parti ? et si le pouvoir actuel «dégageait», qui prendrait sa place ? quelle position vis-à-vis de l’application de la Chari’a ? comment régler le passif humanitaire ? que fait le parti pour la lutte contre l’esclavage ?
L’occasion, dans ses réponses de faire l’historique des positionnements récentes du parti, d’expliquer pourquoi il a présenté son propre candidat au lendemain de l’accord de Dakar, pourquoi il a choisi de reconnaitre immédiatement les résultats qui donnaient Mohamed Ould Abdel Aziz gagnant, avoir adopté pour cela la position de «l’opposant-conseil», pourquoi le revirement pour une position de «l’opposant-frontal»… Les événements de Tunisie y ont joué un grand rôle parce que «le 14 janvier 2011, nous avons appris que quel que soit le degré de ‘gentillesse’ des peuples arabes, ils étaient capables de chasser les dictateurs les mieux installés».
Le coup d’Etat n’est pas la solution même si les conditions le laissent prévoir. «Notre position est claire : nous croyons qu’il faut mettre fin à la présence de l’Armée dans l’exercice du pouvoir politique. Pas besoin d’une transition militaire non plus». Alors ? «Le Président Ould Abdel Aziz doit tirer lui-même les conclusions de ses échecs et l’impossibilité pour lui de continuer à gouverner. Appeler les forces politiques en présence et déterminer avec elles les modalités du passage à une véritable ère démocratique». Aussi simplement !
Bien sûr que les syndicats qui bougent, les étudiants qui entretiennent la tension dans les campus, les organisations de jeunes qui marchent…, tout ce foisonnement politique et social n’est pas du fait des Islamistes ni de leur parti. «C’est le pouvoir qui crée une crise sociale propice à de tels mouvements et qui vient s’ajouter à la crise politique». Et les slogans radicaux ? et la désinformation utilisant des mots excessifs pour désigner une réalité somme toute normale ? et les délais fixés pour le départ ?
«Nous avons choisi d’être une partie prenante de la crise et au lieu de rester dans une position médiane. Cela nécessite un radicalisme que nous adoptons en vue d’instaurer une véritable démocratie. Nous ne sommes pas pressés et nous tenons encore à ce que le changement soit pacifique et démocratique. Nous saurons, au moment opportun, ce qu’il faut faire si ce choix ne suffit pas…»
Et Cheikh Mohamed el Hacen Ould Dedew dans tout ça ? est-il un membre de Tawaçoul ? «Non ! L’Erudit est appelé, de part sa notoriété et la place qu’il occupe, à se prononcer sur la gestion de la chose publique. C’est un devoir moral et un service rendu à la communauté. C’est dans ce cadre qu’il faut comprendre la démarche de Cheikh Dedew…»
Et c’est aussi le justificatif de tous les Ulémas qui entrent en scène pour se positionner sur l’arène et adopter des discours partisans. Mais ça c’est une autre histoire…