dimanche 14 septembre 2014

Quel weekend pour nous ?

Autant vous dire toute de suite, je n’ai aucune prétention à traiter le bienfondé juridique (Charia) de la décision de remettre le repos hebdomadaire au dimanche au lieu de vendredi. Je ne prends pas le temps d’être précis dans les dates des décisions ultérieures concernant le weekend par le passé.
Je ne suis pas sûr si c’est sous la présidence du colonel Mohamed Khouna Ould Haidalla que la décision a été prise de fixer les journées de vendredi et samedi comme jours de repos. Je crois que oui, parce que c’est bien à cette période que la tendance islamiste avait pu forcer la main au pouvoir jusqu’à l’amener à organiser un simulacre d’application de la Charia : il y a eu exécution, lapidation et amputation sur la place publique. Les images existent encore et avec elles l’horreur du moment. Cela participait aux tendances autoritaristes violentes du régime de l’époque.
Trois fois, les autorités revinrent sur la décision depuis les années 80. La dernière fois, c’était en 2008 sous le régime civil qui avait estimé que le coût était exorbitant pour le pays. C’est bien sous l’actuel Président, alors chef de l’Etat et du Haut Conseil d’Etat, que l’on reviendra à vendredi. Ce qui entrait dans le cadre d’une démarche politicienne qui visait à exploiter un sentiment dit «national». avec la rupture des relations diplomatiques avec Israël – même si cette décision était autrement plus courageuse, plus significative et plus porteuse -, celle de ramener le weekend au vendredi plaisait à une frange de la société. Le tollé que la décision actuelle suscite, mérite qu’on s’y arrête pour faire quelques remarques :
  • Le weekend a longtemps été fixé par simple arrêté parce qu’il couvre l’organisation du travail. En 2004, il a été introduit dans le Code du travail alors que tout le monde savait que cela ne devait pas relever du domaine de la loi. Cette infraction n’a pas été relevée et n’a pas été corrigée. Elle est donc restée.
  • Chaque fois que le pays a voulu changer les jours de repos, les autorités ont fait appel aux Ulémas et Exégètes du Fiqh malékite. Chaque fois, les élites religieuses ont répondu dans le sens que voulaient les autorités. Parce que toutes les interprétations sont possibles.
  • Le Khalife Omar Ibn Al Khattab est le premier à instituer un repos hebdomadaire au profit des élèves des écoles coraniques. Ce repos a été fixé du mercredi après-midi à vendredi en milieu de journée. Donc l’après de mercredi, la journée de jeudi et la matinée de vendredi. Rien à voir avec ce que nos élites religieuses prétendent aujourd’hui.
  • Le Khalife Omar dont le règne coïncide avec l’apogée du premier Etat musulman – en termes d’épanouissement, d’organisation, de structures étatiques fonctionnelles, de centralisation, de gestion, de rigueur, de probité, de justice, d’équité -, ce Khalife n’a pas pensé instituer un repos hebdomadaire pour l’administration de l’Etat qui fonctionnait tout le temps sans relâche.
  • Le travail dans la matinée de vendredi n’enlève en rien le côté sacré (ou studieux) de cette journée. Cela dérange seulement les personnes qui concluent que parce que les Juifs ont un jour de repos qui est le samedi et les Chrétiens le dimanche, les Musulmans doivent obligatoirement avoir un jour de repos qui ne peut être que le vendredi. Discutable, même très discutable…
  • Nous appartenons à un environnement, à une région où il existe d’autres pays musulmans comme nous : le Sénégal, le Mali, l’Algérie, le Maroc, la Tunisie pour ne citer que les plus proches de tous les points de vue, ont tous leur weekend samedi et dimanche. L’alignement sur l’Arabie Saoudite, l’Egypte, le Qatar ou la Jordanie ne fera pas de nous autre chose que ce que nous sommes : un pays partagé entre un Maghreb Arabe et une Afrique de l’Ouest qui s’imposent à nous malgré les réticences des plus idiots d’entre nous.
Last but not least, quand l’Etat moderne est sorti des sables et qu’il a fallu lui définir ses fondements, ce pays était peuplé de Ulémas autrement plus pieux, autrement plus pourvus, autrement plus authentiques, autrement moins portés sur leurs intérêts personnels, autrement plus engagés et plus courageux à défendre les préceptes religieux, autrement moins aigris, autrement plus tolérants, plus intelligents, plus humains… Est-ce que feu Mohamed Ali Ould Addoud a récusé le weekend d’alors ? feu Abbe Ould Khtour, el Haj Ould Vahfou (que Dieu le préserve), Bouddah Ould Bouçayri, Meyeye Ould Bebbaha, Guerraye Ould Ahmed Youra, Abdoul Aziz Sy… qui des dizaines d’une élite véritablement détachée des choses de la vie ici-bas, qui de cette élite a trouvé que cela méritait un tollé ? Personne. Alors que ceux qui nous empestent aujourd’hui et qui ne sont rien par rapport à ceux-là, qu’ils se taisent, qu’ils soient au moins plus mesurés dans leurs appréciations. On ne peut pas se taire, parfois justifier, les crimes, les exactions, le pillage des ressources nationales (y contribuer parfois), l’exercice de l’arbitraire, le racisme, le népotisme, le déni du droit…, et s’offusquer de la manière pour une affaire de jour de repos. Ce n’est pas essentiel et ce ne le sera jamais.    

samedi 13 septembre 2014

La réponse de Ould Tah

Elle ne pouvait pas être formulée autrement la réponse du ministre Sidi Ould Tah à l’ancien chef de l’Etat de l’époque du Comité militaire pour la justice et la démocratie (CMJD). Juste ce qu'il faut. D’abord savoir à quoi devait répondre Ould Tah.
Dans l’une de ses sorties médiatiques récentes – sur Radio Nouakhchott-info – l’ancien colonel s’est défendu d’avoir trempé dans une quelconque combine concernant l’ocrtoi d’une troisième licence à l’opérateur soudanais Sudatel, ce qui donnera Chinguitel. Il a affirmé que l’investisseur a été ramené en Mauritanie par l’actuel ministre du développement, que les négociations ont menées par l’ancien président de l’Autorité de régulation, Moustapha Ould Cheikh Mohamedou et sous l’égide du Premier ministre de l’époque Sidi Mohamed Ould Boubacar. «Demandez à trois personnes, ce qu’elles diront de l’affaire, je l’entérine». On était loin de croire que l’une de ces personnes allait répondre. Toutes trois ont un grand sens de la responsabilité et savent ce qu’est un devoir de réserve. Toutes trois aussi n’ont jamais vraiment été impliquées par l’opinion publique dans cette affaire.
Finalement, c’est sous la pression des journalistes venus cueillir les impressions après le dernier Conseil que le ministre Ould Tah s’est trouvé dans l’obligation de répondre. Il a d’abord précisé qu’il était à l’époque des faits un simple citoyen mauritanien travaillant pour le compte d’un établissement étranger au Soudan. Ses relations personnelles avec les milieux d’affaires soudanais lui ont permis de les intéresser à la Mauritanie. Mais dès leur arrivée ici ils furent «récupérés» par l’autorité en place qui confia le dossier «à un proche». Bien après la conclusion de l’octroi de la licence, indique le ministre Ould Tah, «je fus contacté par le Président Eli Ould Mohamed Val qui m’annonça qu’il avait eu 10% du capital de la nouvelle société et qu’il m’en cédait 0,5%. J’attends depuis de formaliser ce généreux geste».
Pour beaucoup d’observateurs, c’est bien pour faire passer la pilule que le Président du CMJD fit appel à Sidi Ould Tah comme Chargé de mission à la présidence à la fin de la transition.
La réponse de Sidi Ould Tah, si elle est entérinée comme promis par Ould Mohamed Val, nous donne des renseignements supplémentaires sur l’affaire de la licence accordée à Sudatel et qui était ressentie d’abord comme un coup contre le premier opérateur mobile du pays, la MATEL.
Il faudra donc pour l’ancien chef d’Etat, Ould Mohamed Val plusieurs sorties pour apurer définitivement cette question avant de passer à autre chose.

vendredi 12 septembre 2014

Pour le prix d’un asile

J’ai lu la semaine dernière un récit qui m’a choqué. C’était la reprise d’une information parue dans un journal français (La Montagne ?) concernant un Mauritanien. «P., un jeune mauritanien, est venu chercher la sécurité en France. Il y a atterri en février 2014». Je ne sais pas pourquoi on choisit de donner seulement l’initiale de son nom (ou prénom) dans la mesure où il est déjà en France où il semble être en sécurité.
L’article – de quel journal ? – nous raconte  que «P. est arrivé en France avec un pied nécrosé, une blessur à la matraque infligée par les militaires». Le récit rapporté site la personne : «Il y a eu des problèmes. Si tu n’as pas les papiers de ta mère et de ton père, tu ne peux plus être Mauritanien». Qui a dit ça et depuis quand c’est comme ça ?
Et le journal d’expliquer en se référant aux propos du personnage : «il s’agissait d’exclure une partie de la population, les Maures noirs, à l’approche des élections». Parce que «P. fait partie de ceux qui ont été déchus de leur nationalité». P. raconte : «Chez nous, beaucoup n’ont pas les certificats de décès. Ma mère est morte en 2000, mon père, en 1989 (les dates choisies sont bien sûr significatives). Le journal reconnait quand même que le récit de la fuite de P. de son pays «pourrait figurer dans un film d’espionnage». Et de décrire qu’il était sorti de prison «vêtu de vêtements militaire», avec «une voiture qui l’attend dehors» et le «départ en bateau». Bien sûr que P. ne savait pas où il allait, «un type m’a mis dans une petite chambre ; il m’a dit de ne pas sortir». Dans le bateau ou ailleurs ?
«(Mon) pays d’origine, c’est fini. Ici, au moins, je suis moi», affirme P. qui selon le journal est «arrêté lors des manifestations, en 2011, liées au recensement national, qu’il couvrait pour une chaine de télévision». TVM, peut-être ?
C’est à la fin qu’on comprend le pourquoi de ce tissu décousu de mensonges : P. a entrepris le processus de recherche d’un statut d’exilé politique en France. Le journal nous apprend enfin : «L’Etat français n’a pas encore statué sur son dossier. P. attend toujours sa convocation». Si c’est un article pareil, même repris par un organe mauritanien, qui va permettre le traitement judicieux de son dossier, il faut reconnaitre que l’Office français chargé des réfugiés et apatrides (OFPRA) n’a aucune faculté de discernement. Au-delà de l’OFPRA, il y a tout le système français et européen en général qui est pourri par des démarches pareilles. Ne parlons pas des Etats Unis où les jeunes mauritaniens affluent ces derniers temps sous prétexte qu’ils sont persécutés pour raisons religieuses (des Chrétiens ou Juifs menacés) ou sexuelles (menace d’homophobie). Tout ça passe. Tant pis.

jeudi 11 septembre 2014

La folie qui provoque la folie

On ne peut pas résister à la tentation de commémorer l’évènement. De se rappeler ce coup porté au cœur de l’Amérique. Même si l’on se remémore les milliers de morts des tours newyorkaises, on n’a pas le droit d’oublier les centaines de milliers de morts à la suite de l’expédition punitive américaine en Afghanistan, en Irak, au Yémen, en Syrie, partout dans le monde. Je ne parle pas ici des combattants des organisations terroristes, mais des civils qui ont fini par se compter en centaine de milliers. Mais qui s’en occupe ?
Il est sûr que la folie meurtrière des Jihadistes d’Al Qaeda a provoqué la folie guerrière d’une Amérique au summum de son arrogance et de sa force destructrice.
Treize ans après, nous sommes en droit de nous demander si le Monde va mieux depuis que l’Amérique a mené cette guerre. Ce ne sont pas les assassinats ciblés de dirigeants d’Al Qaeda qui ont mis fin à son activité. Encore moins la mort de son chef historique, Usama Ben Laden. Ce n’est pas la destruction de l’Afghanistan, puis de l’Irak qui ont circonscrit l’action des groupes terroristes. Pas un lieu dans le monde qui ne soit sous la menace aujourd’hui. Pas un ressortissant américain ou occidental en général n’est véritablement en sécurité en son fort intérieur. En plus de foyers de tensions multiples.
En Europe, le reflux des combattants jihadistes revenus de Syrie et du Levant pose un sérieux problème. Il peut même entrainer la remise en cause des principes de liberté parce qu’il entraine des excès. Dans la plupart des pays Balkans, dans les républiques islamiques de l’ancienne URSS, dans les minorités nationales, les frustrations sont telles qu’elles ne peuvent que s’exprimer avec violence. Un jour ou l’autre.
En Afrique, il y a eu les Shebabs de Somalie, Al Qaeda au Maghreb Islamique, aujourd’hui Boko Haram… toutes ces organisations sèment la mort et la désolation. Il faut y ajouter des foyers qui ne manqueront pas d’alimenter les organisations extrémistes de nouvelles recrues (Centrafrique, Kenya, Libye, Egypte…). Nous allons vers une guerre globale qui intéresse peu dans la mesure où elle se déroule en terre africaine. Certes il y a eu les réactions françaises au Mali et en Centrafrique. Mais ces réactions ont compliqué les donnes au lieu de trouver des solutions aux problèmes posés.
Mais le plus significatif est ce qui se passe au Moyen-Orient, avec cette guerre que livre le nouvel Etat Islamique d’Iraq et du Levant (EIIL). N’est-ce pas là la preuve de l’échec patent de la politique américaine dans la région ? Après des années d’occupation, de lutte contre les groupes terroristes, l’Armée américaine s’est retirée en laissant derrière elle un pays éclaté, divisé en mille factions. En laissant surtout un groupe qu’elle a soutenu et armé dans un premier temps, et qui nargue aujourd’hui la communauté internationale. Ce groupe, l’EIIL n’a dérangé que quand il a commencé à s’attaquer aux minorités chrétiennes et yazidies. Pourtant, il a commencé par assassiner les Sunnites et les Chiites d’Irak. Mais cela ne dérangeait personne. Il a tué en Syrie où il a bénéficié d’une complicité certaine des alliés des Etats Unis.
Treize après les premières expéditions punitives des Tuniques bleues, la situation n’a fait qu’empirer. Moins de deux ans après leur retrait historique d’Irak, les «boys» sont obligés de revenir sur les lieux pour soi-disant finir le travail. Un cercle vicieux, très vicieux d’ailleurs. Tant que les Américains sont là, les guérillas se nourriront de cette présence.
La même logique qui a fait intervenir une nouvelle fois les Américains en Irak, devait ramener l’OTAN en Libye. Ce pays dont la destruction a été assurée par l’organisation militaire occidentale sous la pression de la France. Ce pays aujourd’hui en proie à la guerre civile et au bord de l’effondrement. où est passé le Messie Bernard-Henry Lévy ? où sont passées les envolées lyriques de l’époque ? où est passé l’amour pour la Libye et son peuple ?
…Le 11 septembre 2001, quelques dix-neuf personnes – toutes formées en Occident – orchestrent un coup sans précédent. Leur acte inconsidéré allait servir à l’Amérique de George W. Bush, en mal de légitimité, pour imposer un nouvel ordre qui s’avérera un désordre, une sorte de dérèglement du Monde et de ses mécanismes.
Cet acte a aussi été une catastrophe pour les Musulmans. Ces gens ont tué plus de Musulmans que de Chrétiens ou de Juifs. Ils ont mis en quarantaine une communauté, contribuant à la stigmatiser partout où elle se trouve.
Ces gens n’avaient rien à proposer, n’ont toujours rien à proposer que la mort comme projet. Ils ne pouvaient pas, ne peuvent toujours pas incarner l’espoir. Ils sont juste une justification de légitimation d’une violence aveugle exercée par les plus forts, les plus riches, ceux qui, depuis trois siècles pillent, tuent, exploitent, détruisent sans discernement.  

mercredi 10 septembre 2014

Nouvelle stratégie de la pêche

La reconduction de Nani Ould Chrouqa à la tête du département des pêches et de l’économie maritime a au moins permis de passer immédiatement à l’action. Au premier Conseil des ministres, il a fait adopter une note conceptuelle de la nouvelle stratégie de la ressource halieutique. Cette stratégie sera élaborée à l’issue d’un processus de concertations qui inclura tous les intervenants aux côtés du ministère. Après avoir dressé un diagnostic précis de la situation, la nouvelle vision se déploiera autour de la ressource, du système d’exploitation, du système de transformation et de la valorisation, des affaires maritimes pour aborder enfin la gouvernance du secteur.
Le secteur représente aujourd’hui 30% du budget national, 20% des ressources du Trésor et 6% du PIB. Il permet d’employer environ 40.000 personnes. Cela aurait pu être beaucoup mieux si la ressource avait été exploitée de manière plus efficiente, à même de permettre son intégration effective à l’économie nationale et d’en faire un levier social (emploi). Mais on peut dire que les politiques menées jusqu’à ces dernières années, faisaient profiter les autres de cette manne économique et des opportunités sociales qu’elle procurait. Ce sont les Européens, les Chinois, les Japonais, les Russes… qui pompaient la ressource, chacun selon les arrangements trouvés avec les autorités par l’intermédiaire de ses partenaires privés sur place. Tandis que c’est le Sénégal qui a le plus employé dans le secteur.
La nouvelle stratégie couvrira la période 2015-18 et fera la distinction entre les composantes des pêches et de l’économie maritime. Dans la mesure où il faudra d’abord axer sur le système de production, les moyens, les types de navires, les types de captures industrielles, côtières et artisanales, sur les capacités de stockage et leur suivi. Ensuite engager une politique volontariste de développement des infrastructures de base, de promotion de l’industrialisation pour la création de valeur ajoutée.
La parfaite connaissance de l’état de la ressource détermine tout le reste. C’est effectivement à partir de là qu’on pourra savoir quel système d’exploitation il nous faut. Pour ce faire tenir compte des modes et des moyens d’accès à la ressource, indique le document. L’intérêt étant de «réaliser l’équilibre tant recherché entre les exigences de préservation de la ressource et celles de la maximisation de ses retombées sur la Collectivité nationale».
Sans le développement de la transformation et la valorisation du produit, on ne peut espérer son intégration effective à l’économie nationale. Cela passe par ce que le document appelle «la domestication de la production». Le document d’expliquer : «l’absence d’investissement public dans les infrastructures de services de base, tout au long de nos côtes, associée à la vision rentière de l’exploitation de la ressource constituent un frein important dans la domestication et la transformation de la ressource, gage de création de valeur ajoutée et d’intégration du secteur à l’économie nationale».
Le document définit un objectif global déployé en cinq axes :
1.      Promouvoir une approche scientifique garantissant la préservation et la diversification des ressources exploitables ;

2.      Proposer un système d’exploitation rénové qui réajuste les modes et les moyens d’accès aux potentiels exploitables des ressources ;

3.      Déterminer une approche réaliste et opérationnelle permettant une réelle domestication des captures gage d’une intégration du secteur au tissu économique nationale et la génération des retombées socioéconomiques qui en sont attendues ;

4.      Développer de nouveaux mécanismes pour une meilleure gestion des affaires maritimes qui favorise la préservation du milieu marin et l’exploitation du potentiel économique des activités maritimes ;

5.      Concevoir un modèle de gouvernance qui garantit une exploitation durablement responsable et optimale des ressources halieutiques et une gestion saine et rentable de l’espace maritime national.

Le secteur de la pêche a été un haut-lieu de trafics, de mauvaise gestion, de laisser-aller, de corruption…  Il a longtemps symbolisé l’état de déliquescence morale et économique dans lequel le pays a vécu jusqu’en 2005. On n’oubliera jamais : les bateaux clonés, ces bateaux (un, deux ou même trois) fonctionnant avec la même licence ; les flottes dites nationales alors qu’elles appartenaient à des opérateurs chinois, espagnols et qui fuyaient quand elles ont tout pillé ; ces accords de pêches avec l’Union Européenne et autres partenaires, conclus à la va-vite, avec des dessous de table certains et octroyant tout au partenaire tout en privant le pays du profit maximal de sa ressource ; ces méventes de produits qui sont plus l’effet d’ententes entre usiniers nationaux, intermédiaires et acheteurs étrangers ; tout ce que le secteur a coûté à l’économie nationale pendant des décennies… on n’oublie rien, rien de rien… même pas ce produit financier de la pêche dilapidé dans les casinos de Las Palmas, de Vegas et d’ailleurs. On dit à Nouadhibou que Las Palmas doit en partie son développement à Nouadhibou… n’est-ce pas ?
Heureusement pour les anciens prédateurs (dont certains sont toujours actifs et cherchent à perpétuer le système d’antan), le diagnostic que les autorités entendent réaliser se limitera à évaluer :
§    Le contexte économique, afin de situer le secteur dans le cadre macroéconomique du pays et d’apprécier son apport au développement;
§    Le contexte géographique et socioculturel, en vue de cerner les rapports de la société avec le secteur et d’évaluer le niveau d’adéquation de ses retombées aux attentes de celles-ci ;
§    Le cadre organisationnel, institutionnel et réglementaire pour juger les niveaux de performance, d’efficacité et d’efficience ;
§    Les opportunités et les risques liés au développement du secteur qui sont à prendre en compte pour garantir la cohérence des politiques à proposer avec son environnement général ;
§    Les stratégies antérieures et leurs impacts, avec comme objectif d’en relever les acquis à capitaliser les échecs à éviter dans la stratégie future ;

§    Les investissements dans  le secteur : évolution, répartition, niveau d’adaptation aux besoins de développement, ...

mardi 9 septembre 2014

Pourquoi chercher aussi loin ?

J’étais en train de lire un discours officiel quand je suis tombé sur le mot «irréfragable». Je n’avais jamais entendu ce mot. Ce n’est pas extraordinaire tant il est vrai que mon lexique reste très limité. Je fais partie de ceux qui savent juste ce qu’il leur faut pour pouvoir exprimer leurs idées et comprendre l’autre pour échanger avec lui. A l’école, on m’a appris très tôt à ne pas aller chercher trop loin pour dire ce que j’ai à dire. Bref, mon lexique est très, très limité.
Mais je ne sais pas comment on peut aller chercher un mot comme «irréfragable» pour dire certaines banalités. A toutes fins utiles, je partage avec vous le fruit de mes recherches pour comprendre ce mot qui sonnait comme un barbarisme.
J’apprends que c’est un mot «emprunté du bas latin irrefragabilisirréfutable»), dérivé du latin classique refragarivoter contre, s’opposer à»)». En droit, l’adjectif est utilisé pour qualifier «une présomption légale à laquelle on ne peut pas apporter de preuve contraire». Dans une circulaire de 2005 relative à l’épargne salariale, on note : «En application de l’article L. 132-2, seuls les représentants d’organisations syndicales représentatives sont habilités à conclure un accord. Conformément aux dispositions de cet article, cette représentativité peut résulter soit de la présomption irréfragable établie au bénéfice des syndicats affiliés aux organisations représentatives au plan national (arrêté du 31 mars 1966)». J’apprends aussi qu’en didactique, cela qualifie la chose «qu’on ne peut contredire, qu’on ne peut récuser», exemples : «Un témoignage irréfragable ; une autorité irréfragable». Comme synonymes, on propose «irréfutable» et «irrécusable».
La définition donnée par les dictionnaires de droit – c’est un qualificatif utilisé surtout dans le droit – est beaucoup plus explicite : «L’adjectif ‘Irréfragable’ qualifie certaines présomptions de droit lorsque la loi y attache un caractère absolu. L’irréfragabilité rend irrecevable l’offre d’administrer la preuve contraire. Par exemple l’autorité de la chose jugée au pénal sur le juge civil, soit quant à l’existence des faits qui constituent la base commune de la poursuite pénale et de l’action civile, ce caractère empêche l’adversaire de celui qui se prévaut d’un fait établi par une décision pénale d’offrir, de démontrer que ce fait n’a pas eu lieu. Lorsque les présomptions ne sont pas irréfragables, elles sont dites ‘simples’ ou ‘relatives’, ce qui permet à celui qui y a intérêt, d’obtenir du tribunal qu’il puisse apporter la preuve contraire. Exemple, la présomption de bonne foi ou encore la présomption de véracité qui s’attache à l’aveu ou au serment judiciaire».

Tout ce qui précède ne justifie pas le recours à un tel mot pour dire «la volonté politique irréfragable du Président de la République…» Il faut attendre peut-être, le quatrième niveau de compréhension qui dit que «la preuve irréfragable se distingue de la preuve péremptoire en ce que la première est conçue par rapport à une autre preuve, laquelle, lui étant contraire, serait inadmissible si elle était rapportée, tandis que la preuve péremptoire n’est conçue par rapport à aucune autre preuve qu’elle-même. La preuve est irréfragable quand elle ne laisse aucune place à un doute raisonnable ; elle est certaine. Elle devient réfragable quand elle peut être réfutée au moyen d’éléments de preuves contraires». Qui dit mieux ?

lundi 8 septembre 2014

Merci TV Sahel

La vulgarité de «ceux-là» fait qu’il suffit d’en parler pour prendre l’air de les insulter ou de les calomnier. Alors on a peur de parler de «ceux-là». Parce qu’on veut bien croire que «ceux-là» peuvent faire et défaire la notoriété, qu’ils peuvent participer ou non à la promotion, qu’ils détiennent l’arme qui peut faire de chacun ce qu’il n’est pas…
«Ceux-là», ce sont ces bouffons-crieurs publics qui emplissent les espaces de leurs youyous qu’ils accompagnent de leurs formules toutes faites mais qui ne veulent souvent rien dire. Ils sont là devant les portails, à l’entrée des salles de conférences, des maisons où doivent se retrouver les convives, ils sont partout où ils peuvent espérer «faire tomber quelque chose de quelqu’un».
Leur méthode est simple et bien huilée : ils se mettent à crier à la vue de la victime, «wanni, wakhyart, yaash, eski, dickooh…», autant d’exclamations utilisées d’habitude pour exprimer l’enthousiasme devant la vue de quelqu’un, c’est en contrepartie de cette célébration que la victime se voit dans l’obligation de «faire un geste». «Ekheyr minnak» (c’est toujours mieux que toi) entend-on souvent ces gens prononcer après avoir déplumé la personne, comme pour dire la faiblesse de celui qui fait le geste.
Le phénomène fait partie de l’héritage PRDSien (du Parti républicain, démocratique et social de l’ère Taya). A l’époque, quelques individus avaient trouvé la voie pour quémander sans paraitre le faire. Certains d’entre eux sont allés jusqu’à se présenter en censeurs moraux. «Je sui là pour dire au Président de la République qui est voleur qui ne l’est pas, qui le sert le mieux et qui le dessert», m’avait dit l’un d’eux à la fin des années 90. La théâtralité et la violence utilisée souvent participaient de cette volonté d’humilier les hauts cadres de l’administration qui se trouvaient obligés d’acheter leur notoriété. Cela participait aussi de la justification morale de la prédation instituée en forme de gouvernement.
Le cadre qui n’a aucune fierté à être ce qu’il est, le politique qui n’a aucune raison de prétendre à une quelconque notoriété recourent souvent à ces «faiseurs d’opinion» pour se donner des forces. Parfois, ces crieurs sont utilisés pour attaquer l’ennemi publiquement, une façon de déstabiliser celui qu’on prend pour le protagoniste.
Le plus grave dans la présence de ces «mouchards», c’est qu’ils sont tolérés et même traités avec considération par les officiels. Si quelques éléments assurant la sécurité d’un officiel ont une fois essayé de les écarter, ils ont subi pour cela d’énormes pressions, comme si dégager ces sangsues équivalait à un délit.
Plus grave encore le fait que cette présence n’ait jamais suscité la désapprobation et/ou l’intérêt des journalistes. Dans l’un de ses derniers journaux télévisés, Sahel TV a justement présenté ces bouffons sous leur plus mauvais jour. Il faut l’en remercier.