vendredi 26 décembre 2014

Ould Baya, président de l’Association des Maires

Ce soir les 219 Maires élisent le nouveau président de l’Association des Maires de Mauritanie et en même temps le bureau exécutif et le bureau permanent. L’Union pour la République (UPR) qui a une majorité absolue soit 147 maires, a préféré associer tous les partis politiques présents dans le collège électoral. C’est ainsi que cette élection a été le fruit d’un véritable consensus même si l’on a remarqué au finish 10 votes contre la proposition. Alors qu’elle a été adoptée par 209 maires présents.
L’Association créée en 1987 est une structure apolitique qui regroupe quand même tous les maires du pays. Ce qui en fait un excellent cadre d’échanges et d’entraide entre les communes de Mauritanie. Elle est aussi une interface entre le pouvoir exécutif et les structures locales, avec cette possibilité pour elle de promouvoir la décentralisation qui est une option fondamentale du développement en Mauritanie. L’un de ses objectifs étant de coordonner les actions des collectivités locales en vue de faciliter et de rendre plus efficient l’apport des ressources mobilisées à l’effet de les développer.
Mais le rôle le plus important de l’Association est celui de porter la voix de la Mauritanie à l’extérieur, de drainer, d’orienter les financements à travers les jumelages et la coopération internationale. L’Association des Maires de Mauritanie joue donc un rôle dans l’assainissement de l’image du pays au niveau de l’extérieur.
En choisissant Cheikh Ould Baya comme nouveau président, l’Assemblée générale des Maires de Mauritanie, a opté pour la redynamisation et la continuité de l’élan de modernité entamé par son prédécesseur Ahmed Ould Hamza qui a pu sortir l’AMM d’une longue léthargie.
Le mandat du Maire de Zouérate sera celui du travail en profondeur afin de faire quelques grands pas en avant dans le programme de décentralisation qui devra se concrétiser par plus de pouvoir aux collectivités locales. Cela permettra certainement aux communes de jouer un meilleur rôle dans l’éducation, la santé, la lutte contre la pauvreté…
Le mandat sera certainement aussi celui de l’ouverture sur l’extérieur et une plus grande association de tous les acteurs. Les aptitudes du nouveau président à discuter et à avoir des partenaires le maximum, son sens de l’intérêt général et du sacrifice sont des atouts dans le programme qu’il entend mettre en œuvre. Il sera soutenu par une équipe de Maires ayant expérience et compétence pour mener à bien la mission qui est la leur.
L’intensité du tir de barrage opéré à la veille de cette élection par ses détracteurs qui auront mobilisé plumes et voix en vue de déstabiliser le processus de l’élection – comme celui des négociations -, ce tir de barrage n’aura servi à rien. Cheikh Ould Baya a été élu haut la main président de l’Association des Maires de Mauritanie dans une atmosphère consensuelle (tous les partis étaient associés) et fraternelle, avec 209 voix sur les 219 inscrites. 

jeudi 25 décembre 2014

Abderrahmane Sissako nous donne le sourire

Ce matin, sur MEDI-1, la radio méditerranéenne, notre compatriote et son film «Timbuktu» sont célébrés par le chroniqueur du cinéma. Le journaliste rappelle que «la Mauritanie est toujours dans la course des Oscars grâce à ce film qui en a ébloui plus qu’un».
Entre le 9 et le 11 janvier 2015, le Jury de Los Angeles décidera de quels cinq films étrangers resteront parmi les neuf nominés pour les Oscars. La décision sera rendue le 15. Toutes les chances donnent Timbuktu parmi les heureux nominés.
D’abord la qualité du film, aussi bien sur le plan technique qu’au niveau du récit et donc du scénario. Le jeu excellent des acteurs et la musique extraordinaire venant ajouter à cette qualité incontestée.
Ensuite l’actualité du film qui raconte la vie sous le régime du Jihadistan dans le Nord du Mali. On vit avec les populations le profond trauma qu’elles ont subi et qui est merveilleusement rendu par cette scène où l’on voit des jeunes jouer au football sans ballon. On vit aussi la résistance et l’espoir de voir pointer une aurore éblouissante après une longue nuit d’oppression. On apprécie mieux le rôle de la femme dans des sociétés segmentaires comme les nôtres et qui arrivent à lui accorder une place de choix. On apprend comment de pieux Musulmans refusent le diktat des Jihadistes.
Une actualité qui met en évidence l’horreur que vivent les populations d’Irak et de Syrie, mais aussi de Libye sous le joug des hordes de l’Etat islamique. En Occident, on ne voit d’eux que les séquences de décapitation de quelques otages ressortissants de ces pays. Des zooms sont faits sur la souffrance réelle des Chrétiens d’Orient. Quid des Musulmans – Sunnites et Chiites - qui résistent, qui souffrent le martyr, qui fuient leurs terres ?
Timbuktu donne une idée de cette souffrance partagée, de cette Espérance toujours plus forte que l’oppression. C’est un mélange de fiction et de réalité, une sorte de téléréalité des pauvres… celle qui ne se joue pas contre de l’argent et qui n’a pas vocation à aller en-deçà du vécu quotidien des hommes et des femmes qui ont subi cet arbitraire-là.
Après Cannes et bien d’autres scènes du cinéma, Abderrahmane Sissako s’apprête à entrer dans un espace réservé aux meilleurs. Son film est déjà parmi les neuf nominés. Tant mieux et mille fois merci à celui qui oppose ainsi une dose de fierté aux prophètes de malheurs qui nous inondent en ces temps. Ceux-là veulent nous décourager de nous-mêmes, veulent nous marquer à jamais du poids de l’indignité, nous désespérer à toujours… Le succès de Timbuktu nous enseigne que nous avons encore quelque chose à offrir au Monde, quelque chose à faire partager et qui peut servir. Nous en sommes fiers.

mercredi 24 décembre 2014

Qu’attend-on des deux procès ?

Deux procès s’ouvrent en même temps en Mauritanie. Le premier à Nouadhibou où l’on juge le jeune auteur de l’article jugé blasphématoire pour le Prophète (PSL). Le second se tient à Rosso. Là on juge Birame Ould Dah Ould Abeid, président d’un mouvement anti-esclavagiste, arrivé deuxième à la dernière élection présidentielle avec plus de 8% des voix. Chacun des deux procès est lourd de conséquences pour la Mauritanie, pour le pouvoir en place, mais aussi et surtout pour le débat sociétal qui prend toute son ampleur avec l’éclosion de la liberté d’expression.
Le procès de Nouadhibou prend déjà l’aspect d’une Inquisition car le niveau de ceux qui jugent et de ceux qui défendent fait qu’on bloque autour de la question du repentir. Le repentir du jeune Ould Mkhaytir est-il sincère ou non ? est-il suffisant quand il s’agit d’atteinte à la personne de Mohammad, Paix et Salut sur Lui (PSL) ?
Le débat sur la loi mauritanienne est ainsi occulté. Nous apprenons ce soir que le jeune a été condamné à mort. Il ne pouvait en être autrement quand on a été incapable de s’extraire à la pression de la rue. La loi mauritanienne est pourtant claire.
Dans sa section IV intitulée «Attentats aux mœurs de l’Islam, Hérésie, apostasie, athéisme, refus de prier, adultère», le Code pénal mauritanien dit en son Article 306 : «Toute personne qui aura commis un outrage public à la pudeur et aux mœurs islamiques ou a violé les lieux sacrés ou aidé à les violer, si cette action ne figure pas dans les crimes emportant la Ghissass ou la Diya, sera punie d'une peine correctionnelle de trois mois à deux ans d'emprisonnement et d'une amende de 5.000 à 60.000 UM.
Tout musulman coupable du crime d'apostasie, soit par parole, soit par action de façon apparente ou évidente, sera invité à se repentir dans un délai de trois jours. S'il ne se repent pas dans ce délai, il est condamné à mort en tant qu'apostat, et ses biens seront confisqués au profit du Trésor. S'il se repent avant l'exécution de cette sentence, le parquet saisira la Cour suprême, à l'effet de sa réhabilitation dans tous ses droits, sans préjudice d'une peine correctionnelle prévue au 1er paragraphe du présent article.
Toute personne coupable du crime d'apostasie (Zendagha) sera, à moins qu'elle ne se repente au préalable, punie de la peine de mort. 
Sera punie d'une peine d'emprisonnement d'un mois à deux ans, toute personne qui sera coupable du crime d'attentat à la pudeur.
Tout musulman majeur qui refuse de prier tout en reconnaissant l'obligation de la prière sera invité à s'en acquitter jusqu'à la limite du temps prescrit pour l'accomplissement de la prière obligatoire concernée. S'il persiste dans son refus jusqu'à la fin de ce délai, il sera puni de la peine de mort.
S'il ne reconnaît pas l'obligation de la prière, il sera puni de la peine pour apostasie et ses biens confisqués au profit du Trésor public. Il ne bénéficiera pas de l'office consacré par le rite musulman.»
Ce Code pénal qui date de juillet 1983 (Ordonnance 83-162 du 09 juillet 1983) n’a jamais été revisité. Devant la pression de la rue, les Ulémas – dont certains avaient participé à la rédaction de ce texte – ont préféré se taire pour laisser la scène à des barbus de pacotille.
Le deuxième procès qui s’est ouvert ce matin ne peut que se transformer en procès politique. Procès du régime, de la société inégalitaire, probablement de la communauté Bidhâne… on ne peut plus éviter qu’il en soit ainsi dès lors que les mobilisations se sont faites sur la base des appartenances partisanes : c’est un peu l’Union pour la République (UPR) qui se dresse face à IRA qui bénéficie du coup du soutien plus ou moins annoncé des protagonistes du parti au pouvoir.
Il ne sera probablement pas question de la question de l’esclavage. Les uns et les autres refusant d’aller au fond des problématiques. Restera pour nous l’amère impression qu’on a risqué inconsidérément de ternir l’image du pays en engageant deux procès symboles : celui de Nouadhibou qui renvoie à la liberté d’expression et de culte, l’autre à Rosso qui reste lié aux Droits de l’homme. Des thèmes souvent utilisés par les activistes aux Etats-Unis, en Europe pour viser des pays et/ou des aires culturelles dans le collimateur.

mardi 23 décembre 2014

Les voleurs qui crient «au voleur !»

Je suis chaque fois surpris par l’arrogance de certains acteurs de l’espace médiatique et politique, une arrogance qui se double d’un manque de scrupule évident.
Quand un homme politique réduit l’action de son parti à la défense des intérêts d’une famille. Qu’il avoue, après avoir tourné autour du pot bien longtemps, que son aigreur vis-à-vis du régime s’explique par la volonté de celui-ci de viser une famille, une tribu…
Quand un homme politique s’impose en moralisateur et qu’il bâtit toute sa démarche sur ses ressentiments personnels, ses frustrations personnelles, son rapport personnel à l’Autorité. Quand il veut légitimer son ressentiment personnel, sa mésaventure personnelle, et l’effet de sa disgrâce personnelle, par un engagement soudain dans le combat qui concerne tout un chacun.
Quand un homme politique qui a roulé pour tous les régimes, participé directement et indirectement à la sape du projet démocratique, au pillage des ressources, aux exactions commises sous la dictature…, quand cet homme parle aujourd’hui comme s’il avait, depuis toujours, combattu l’arbitraire.
Quand un journaliste fonde son information sur la rumeur, s’empresse de la donner, de la commenter, d’en tirer les conclusions. Quand il se met au service d’un ou de plusieurs lobbies. Quand il signe des textes écrits par d’autres en vue de servir des intérêts particuliers au détriment de l’intérêt général. Quand il est payé par des services officiels et/ou particuliers (privés, groupes politiques…). Quand il se sert de sa position pour servir sa tribu, sa région, son ethnie…
Quand un religieux – faqih ou autre – justifie les arbitraires, les inégalités, les injustices. Quand il refuse de les dénoncer. Quand il préfère s’en prendre au corps social le rendant responsable de toutes les dérives, de toutes les hérésies. Quand il n’a d’autre combat que celui qu’il dirige contre la femme, contre l’émancipation individuelle et finalement contre la Modernité.
…On ne peut parler de courage mais de couardise. Dire NON ne relève pas obligatoirement du courage. Dire NON ne demande pas toujours – et surtout pas maintenant – du courage. N’importe qui dit aujourd’hui NON à n’importe quoi. Parfois à la chose et à son contraire à la fois.
Dans la bouche de ceux qui nous couvrent d’une cacophonie indescriptible et qui veulent parasiter, intoxiquer, détruire toute espérance en un lendemain meilleur, le NON procède de la lâcheté. Après avoir béni la pire des situations, après avoir participé au sac organisé du pays, après avoir contribué à la corruption des mœurs, à la prédation, aux orgies collectives, après avoir mangé aux râteliers de différents oppresseurs, quelle crédibilité peut-on encore accorder à ce que disent ces gens-là ?
Le courage c’est de rester les yeux ouverts, en tous temps, en tous lieux. De dire exactement ce qu’on pense, de le défendre… comme disent «ceux de par là», de dire ce qu’il faut au moment qu’il faut.
Courage, abnégation, sacrifice… des valeurs que notre élite a cessé de cultiver (si elle n’a pas cherché à les détruire). Des valeurs qui subissent aujourd’hui le coup de grâce. Avec tous ceux qui prétendent moraliser, sauver, dénoncer, révéler, redresser… et qui ne font que décrédibiliser la vérité, trafiquer la réalité, instrumentaliser les causes légitimes…
Dans la culture hassaniya, on évoque souvent «ceux qui volent avec les voleurs et pistent avec les pisteurs». C’est bien de ces gens-là que je parle.

lundi 22 décembre 2014

Revue de la coopération Mauritanie-UE

Lundi s’est ouvert à Nouakchott la première revue du portefeuille de coopération entre l’Union Européenne (UE) et la Mauritanie. A l’image de ce qui se fait avec la Banque Mondiale, les deux parties entendent évaluer plus de trois décennies de coopération dans le cadre des accords de Cotonou.
Les FED – du Fonds européen du développement – se suivent. Nous allons retenir trois chiffres. Le premier est 669,32 millions euros qui est l’enveloppe globale qui a été destinée à la Mauritanie depuis le milieu des années 80. Le deuxième chiffre que nous allons retenir est celui de 191 millions correspondant à l’enveloppe du 9ème FED qui a couvert la période allant de 2001 à 2007. Le troisième est celui du 10ème FED qui a atteint un record avec 209,32 millions pour la période de 2008 à 2014, à 2013 en fait. On peut y ajouter pour comparaison, le chiffre prévu pour le 11ème FED, 195 millions couvrant la période de 2014 à 2020, date de l’expiration des Accords de Cotonou.
Au titre du 10ème FED, 57 millions soit 27,23% sont alloués aux infrastructures et aux réformes du secteur du transport, 46 millions pour l’appui budgétaire et les réformes des finances publiques, 20 millions à la décentralisation et au développement local, 17,22 millions à la sécurité alimentaire, 13 millions à la sécurité et au développement (lutte anti-terroriste), 7 millions pour la Justice et l’Etat de droit, 7 pour la société civile, la culture et les Droits de l’homme, 6 pour la prévention des conflits… pour ne citer que l’essentiel.
Pour comprendre le record du 10ème FED, il faut savoir que l’enveloppe initiale était de 156 millions seulement. A ce montant, se sont ajoutés des financements supplémentaires qui ont concerné surtout la sécurité du Sahel pour 25 millions et d’autres interventions pour 28 millions (interventions européennes à l’occasion de crises d’urgence notamment).
Dans le jargon des techniciens, on dit que la totalité de l’enveloppe a été affectée, mais cela ne veut pas dire que l’argent a été alloué ou transféré au profit de la Mauritanie. La lourdeur des procédures a toujours été décriée par les deux partenaires.
Les Européens arguant la faiblesse d’absorption de la Mauritanie qui s’explique par les lenteurs administratives, le manque de compétence des concepteurs des projets, l’absence d’efficacité…
Les Mauritaniens se plaignant de la complexité des procédures imposées par l’UE pour accéder aux financements. Dont une bonne partie revient souvent à des sociétés européennes qui remportent facilement les marchés, à des experts qu’il faut engager pour des études de validité…
Sur les 209,32 millions du 10ème FED, ce qu’on appelle les «engagements individuels contractualisés», terme qui désigne dans le jargon consacré l’engagement par contrats, ce titre a atteint 144,33 millions soit 68,95% du montant global. Alors que les paiements exécutés n’ont pas dépassé 57,14 millions soit 39,59% de ce montant contractuel.
Il arrive même que des chapitres prévus ne soient pas touchés. C’est l’exemple ici du chapitre de la Sécurité et du développement, de la prévention des conflits (dont les conventions ont été signées seulement le 15 de ce mois), de la Justice et de l’Etat de droit, de la décentralisation et du développement local. Aucun euro n’a été déboursé pour ces secteurs malgré la mise en place de structures de coordination pour les lancer.
Autre reproche fait à la partie européenne, tout ce qui se rapporte à «l’appui sectoriel» dans les Accords de pêche et qui n’a jamais voulu dire grand-chose. Dans le passé, la partie mauritanienne s’est résignée à le voir gonfler sans vraiment en profiter. C’est que le chiffre servait d’argument aux Européens pour rester sur certaines positions, notamment le niveau de la compensation.
La présente revue doit aussi servir à réinventer la philosophie de la coopération entre les deux partenaires. Une coopération qui doit prendre en compte la nécessité d’établir les règles d’un commerce équitable et l’urgence d’introduire des mécanismes de préservation de la ressource.

dimanche 21 décembre 2014

Elections en Tunisie

C’est, nous l’espérons, la fin d’un processus en Tunisie et le début d’un autre. Le processus qui doit nécessairement finir est celui de la révolution et de ses convulsions. Celui qui doit commencer est celui de la stabilisation et de la refondation de l’Etat de droit.
Depuis cet acte d’immolation qui a déclenché les soulèvements populaires de décembre 2010 à janvier 2011, depuis ce temps, bien des secousses ont failli perturber la marche de la Tunisie vers la démocratie. Mais deux atouts au moins allaient éviter au pays de sombrer : les acquis du Bourguibisme (de Habib Bourguiba, le premier Président de la Tunisie indépendante) qui vont de la scolarisation à l’émancipation des femmes en passant par le développement d’une société civile active surtout d’un mouvement ouvrier dynamique ; et le sens de la mesure adoptée par les Islamistes modérés au lendemain de la chute de Ben Ali, en refusant de chercher à accaparer le pouvoir à eux seuls, les Islamistes de Ennahda ont donné une chance à la démocratie en Tunisie.
Au deuxième tour d’une élection présidentielle pluraliste chaudement disputée, deux hommes s’affrontent : Béji Caid Essebsi, 88 ans, ancien premier ministre, homme ayant appartenu à tous les régimes, et Moncef Marzouki, Président sortant, ayant appartenu à l’opposition à Ben Ali. Le premier est un peu le candidat de l’expérience, celui qui rassure les Tunisiens quant à la méthode de gouvernement pour le futur. Le second se présente comme le candidat du renouveau de la Tunisie pour ce qu’il symbolise en termes d’opposition à l’ancien régime.
Le premier défi pour les deux hommes est d’être capables d’accepter le verdict des urnes. Il est demandé au gagnant d’aller au-delà des dérives verbales de la campagne électorale, de rassurer, de s’imposer comme le Président de tous les Tunisiens, d’éviter de confirmer l’image régionaliste qu’a donnée la campagne, de s’approprier les avancées faites pendant la longue transition et de se rappeler que le danger de l’extrémisme frappe déjà son pays.
Pour le perdant, il s’agira d’accompagner le Destin qui se dessine pour la Tunisie en imposant un système de veille démocratique. Le retour de la bête n’est jamais à exclure dans nos pays qui sont fragiles et peuvent à tout moment basculer dans le chaos.
Dans nos pays, le péché originel des acteurs politiques a été de ne jamais considérer que la démocratie est le fruit d’un long cheminement, d’une longue transition, d’une grande accumulation qui se fait le temps… qui se fait à travers heurts, échanges… un foisonnement qui fait pointer une lueur à l’horizon jusque-là assombri.

Le cheminement démocratique est une recherche constante de l’établissement d’un système de valeurs à même d’assurer une meilleure utilisation des ressources dans l’intérêt général des populations, une sorte de rénovation de l’Etat qui devient effectivement celui de tout le monde, l’Etat qui émancipe, qui contribue au bonheur de chacun et de tous, qui assure l’égalité, la justice, l’équité…  

samedi 20 décembre 2014

Le G5 du Sahel est lancé

La réunion des Chefs d’Etats du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie, du Niger et du Tchad a permis le lancement effectif du G5 du Sahel. Un regroupement qui vise la mutualisation des efforts et des stratégies déployées en vue d’éradiquer le crime organisé sévissant dans la région.
Le sommet a permis l’adoption des textes fondateurs du Groupe et du Programme d’investissement prioritaire chiffré à 15 milliards de dollars environ, ainsi que la désignation d’un Secrétaire Permanent en vue de la mise en œuvre des décisions prises.
La convention est le fondement juridique du regroupement. Elle se fonde sur «les liens séculaires et multiformes qui unissent les peuples du Sahel» et a pour objectif de «faire du Sahel un espace de paix, de prospérité et de concorde». Elle part du principe qu’il n’y a pas de sécurité sans développement, et vice versa.
La convention énumère les défis que le regroupement des Etats devra relever : «a. Le renforcement de la paix et la sécurité, la lutte contre le terrorisme et la criminalité transfrontalière ; b. Le besoin d’institutions démocratiques stables et pérennes avec une forte implication des populations ; c. La nécessité de promouvoir les zones les moins développées ; d. Le déficit en infrastructures et services de base (transport, énergie, hydraulique et  télécommunications) ; e. La sécurité alimentaire et le pastoralisme ; f. Le développement humain (démographie, santé, éducation, formation technique et professionnelle) ; g.  Les changements climatiques et la gestion de l’eau».
A travers cette convention, les Chefs d’Etats présents «réaffirment la priorité qu’ils accordent à la sécurité et au développement de la région et réitèrent leur plein engagement à promouvoir la démocratie, les droits de l’Homme, et la bonne gouvernance». Ils s’engagent aussi à coopérer et à négocier ensemble avec les partenaires techniques et financiers, publics et privés en vue de réaliser leurs objectifs fixés d’un commun accord.
L’article 4 de la convention indique : «Le G 5  Sahel  a pour objet : (i) de garantir des conditions de développement et de sécurité dans l’espace des pays membres ; (ii) d’offrir un cadre stratégique d’intervention permettant d’améliorer les conditions de vie des populations ; (iii) d’allier le développement et la sécurité, soutenus par la démocratie et la bonne gouvernance dans un cadre de coopération régionale et internationale mutuellement bénéfique et (iv) de promouvoir un développement régional inclusif et durable».
L’article 5 quant à lui stipule : «Le G 5 Sahel contribue à la mise en œuvre des actions de sécurité et de développement dans les Etats membres grâce notamment : Au renforcement de la paix et la sécurité dans l’espace du G 5 Sahel ; Au développement des infrastructures de transport, d’hydraulique, d’énergie et de télécommunications ; A la création des conditions d’une meilleure gouvernance dans les pays membres ; Au renforcement des capacités de résilience des populations en garantissant durablement la sécurité alimentaire, le développement humain et le pastoralisme».
Les Chefs d’Etats ont évalué positivement la situation au Mali avant de demander la mise en place d’une patrouille composée des forces africaines présentes dans le cadre de la MINUSMA et de l’Armée malienne. Ils ont demandé au Conseil de Sécurité des Nations Unies d’entrevoir la possibilité d’une intervention militaire en Libye avec l’assentiment de l’Union Africaine. Ils ont aussi salué les efforts des Etats riverains du Lac Tchad en vue de lutter contre Boko Haram. Ils ont enfin exprimé toute leur solidarité avec les pays ravagés par l’épidémie Ebola.