samedi 12 octobre 2013

Kinross révise ses ambitions

Kinross fut une véritable manne les années 2009-10-11. Le cours augmentait continuellement et les valeurs de la société montaient avec. L’usine s’agrandissait et la société recrutait à tour de bras. On nous promettait alors «la plus grande exploitation d’Afrique».
Aujourd’hui tout semble remis en cause. Dans un communiqué publié par le service de communication de Kinross, la société annonce la suppression de quelques trois cents postes entre son siège à Las Palmas et ses installations en Mauritanie. Arguant la chute du cours de l’or passé de 1675$ l’once en janvier dernier à 1300$ actuellement, la société révise ses ambitions.
«En conséquence directe de cette concentration accrue sur la réduction des capitaux et la préservation des liquidités, Kinross n’envisage pas de prendre une décision sur l’opportunité d’agrandir l’usine de Tasiast avant 2015 au plus tôt». Révision à la baisse de l’optimisme de l’année passée qui situait cet agrandissement pour début 2014. Aucune date n’est plus précise : «2015 au plus tôt» !
Le communiqué explique que «les sociétés minières ont entrepris des mesures afin de réduire leurs coûts et préserver les flux de trésorerie, y compris le report de projets d’exploitation minière, des compressions des effectifs et la fermeture de bureaux». Et comme pour rassurer les Mauritaniens, le communiqué nous apprend que «les coûts ont donc été réduits dans tous les secteurs d’exploitation de Kinross, y compris l’exploitation internationale et les dépenses en capital, avec des compressions des effectifs au siège social à Toronto, la fermeture d’un bureau à Vancouver et d’un bureau d’exploitation au Mexique, ainsi que d’importantes réductions du personnel expatrié à Tasiast». Les Mauritaniens ne doivent pas se plaindre parce que tout le monde est touché, ne pas se demander aussi si les coûts de réduction du personnel sont les mêmes partout. Est-ce qu’un ouvrier ou un administratif touche la même somme et bénéficie des mêmes traitements selon qu’il est au Canada, au Mexique ou en Mauritanie ?
Kinross rassure aussi en annonçant qu’après cette compression, «environ 3000 salariés et sous-traitants demeureront à Tasiast». En plus, «la société continuera de soutenir un grand éventail d’initiatives d’investissements communautaires, y compris le développement d’une nouvelle école minière». Est-ce suffisant ? Et si Kinross quittait demain pour une raison ou une autre, qu’est-ce qui resterait à la Mauritanie ? des routes ? des cités ? des usines de dessalement de l’eau ? des puits forés dans la zone ? des zones de développement ?
Le communiqué promet quand même : «la réduction des effectifs est toujours une décision difficile pour une entreprise, et Kinross soutiendra son personnel durant cette période de transition».

vendredi 11 octobre 2013

La voix du cœur l’emporte

C’est finalement la voix du cœur qui l’a emporté dans le dénouement de la crise qui a secoué l’Union des forces du progrès (UFP). La voix du cœur, c’est celle qui a privilégié le maintien de la ligne de la direction historique du mouvement devenu parti, celle que défendaient le Président Mohamed Ould Maouloud et ses proches compagnons. Dans le rapport que nous avons eu des discussions qui auront duré trois jours, pas de trace de Mohamed Ould Khlil, le vice-président, l’ancien Wali notamment de Nouakchott. Lui qui soutenait fermement le boycott ne semble pas avoir pris la parole pendant cette dernière réunion où ce sont les dirigeants qui ont développé leurs arguments. Deux thèses.
La première, la «participationniste», a été défendue par Moustapha Bedredine, secrétaire général du parti et actuel député du parti. L’option de la participation découle de la ligne originelle du parti. Elle se justifie amplement par la nécessité pour le parti de rester dans le jeu, de pouvoir offrir à ses cadres la possibilité de s’exprimer publiquement et de se donner quelques moyens pour mener à bien son action. La démocratie étant un combat perpétuel, elle ne peut souffrir l’absence du terrain de la contestation. Et de rappeler toutes les fois où le parti a eu à choisir de s’impliquer ou de se rapprocher de pouvoirs avec lesquels il n’avait rien à partager, rien que pour pousser vers plus d’ouverture, plus de progrès. Pour ce qui est de la question de la «trahison des compagnons de la COD», il ne faut pas s’en faire parce que tous ont trahi l’UFP et ses leaders à un moment donné : ces partis n’ont pas de leçon à donner en la matière d’autant plus qu’ils ne sont pas d’accord sur la décision de boycott.
La deuxième ligne était défendue par le Professeur Lô Gourmo Abdoul et le Président Mohamed Ould Maouloud. Elle s’articule autour de l’opportunité de la décision prise par le Comité permanent alors que le Président était mandaté pour diriger la délégation de la COD pour le dialogue et qu’il devait s’en tenir à la décision collégiale de cette même COD. Pour ce qui est de la situation qui a toujours prévalu, elle était dictée par les menaces qui pesaient sur les pouvoirs : le parti aurait rallié Ould Cheikh Abdallahi parce qu’il craignait un coup d’Etat ; il se serait rapproché de Ould Taya pour éviter les déchirements qui menaçaient le pays. Alors que le pouvoir actuel ne risque rien. Allant même jusqu’à reconnaitre que «quelque chose» a été fait dans les domaines de la liberté et des infrastructures. Ce qui donne au pouvoir de Ould Abdel Aziz un répit qui peut durer le temps nécessaire pour arriver aux présidentielles sans accrocs. L’objectif stratégique du parti ne doit pas être de renforcer le camp de ce pouvoir, mais de maintenir la pression sur lui pour lui arracher le maximum de concessions d’ici là. La meilleure façon de faire est de maintenir le climat de crise politique en boycottant les futures élections.
Un second développement va viser les «élus» du parti qui semblaient être les plus engagés pour la participation. Rappel de leur «indiscipline» qui les a poussés à continuer à venir au Parlement et à toucher leurs salaires de députés alors que le parti avait jugé «illégale» l’Assemblée présente. Rappel aussi de la nécessité de maintenir le cap de l’engagement qui fait que les plus anciens cadres du parti n’ont jamais été portés sur les avantages que pouvaient procurer telle ou telle situation.
Un troisième volet du développement concernera les rapports avec les autres composantes de la COD. Reconnaissant les trahisons dont l’UFP et ses leaders ont été victimes par le passé, le discours a opposé que rien moralement ne peut justifier de se comporter de la même façon. L’UFP n’a pas le droit de faire volte-face.
Un dernier volet a traité de la nécessité de maintenir l’unité du parti et son leadership. La direction ne doit pas éclater et le leader Mohamed Ould Maouloud ne doit pas être désavoué. Pour ce faire une commission est désignée pour faire une proposition qui sera soumise au vote. Composée de cinq membres dont son président Mohamedou Nagi, supposé neutre, elle rendra son verdict vers cinq heures du matin. Elle propose le boycott et le soumet au vote : «Par 31 voix, 6 contre et 3 abstentions, le BE du Parti réuni depuis le 8 octobre a réaffirmé dans la nuit du jeudi 10 au vendredi 11 octobre, sa décision de ne participer qu’à des élections démocratiques, transparentes et consensuelles, ce qui n’est pas le cas pour celles dont l’agenda a été imposé unilatéralement par le régime. En conséquence, les listes déposées actuellement au nom du parti devront être retirées. L’UFP réitère la position commune de la COD et demande la réactivation du dialogue suspendu en vue de trouver une formule de compromis sur une gouvernance électorale transparente et juste.» (déclaration du Professeur Lô Gourmo Abdoul largement reprise sur le net).
C’est ainsi que les voix du cœur l’auront emporté sur celles de la Raison. Reste à savoir comment la décision de boycott va être appliquée, surtout si les mandataires des listes vont se plier ou non à l’exigence du parti et/ou s’ils vont aller se présenter ailleurs.

Jusque-là la discipline du parti a toujours été respectée par ses cadres et militants, mais on a vu comment ce différent a été étalé avec violence sur la voie publique. De quoi affirmer que quelque chose est en train de rompre dans la «superstructure» des camarades.

jeudi 10 octobre 2013

Participation «acceptable»

Selon un communiqué rendu public par la Commission électorale nationale indépendante (CENI), 1.132 listes candidates aux municipales ont déposé leurs dossiers avant expiration des délais (4 octobre à minuit). 59 partis politiques et 4 coalitions de partis sont en course pour le scrutin dont le premier tour se déroulera le 23 novembre prochain.
Seul l’Union pour la République (UPR) a déposé dans les 218 communes du pays. Suivi par le parti islamiste Tawaçoul qui a déposé pour 151 communes, l’Alliance populaire progressiste (APP) avec 149, El Wiam avec101 listes, le Sursaut (le parti des jeunes dont la présidente est la ministre de la culture) avec 96 listes, l’Union pour la démocratie et le progrès (UDP) est dans la course avec 62 listes, arrive Sawab avec 39 listes, El Vadila avec 34 listes, Ravah avec 25 listes, l’Union des forces du progrès (UFP qui pourrait se retirer) avec 24 listes, le Renouveau démocratique (RD) avec 22 listes, le Parti républicain pour la démocratie et le renouveau (PRDR) avec 21 listes, le Parti de l’unité et du développement (PUD) avec 21 listes, l’Alliance pour la justice et la démocratie (AJD/MR) avec 19 listes, Karama avec 16 listes, le Front populaire avec 11 listes, Ribat avec 10 listes, Içlah avec 9 listes, Congrès avec 8 listes, le PDA avec 8 listes, le PEJD avec 7 listes, le PDP avec 7 listes, le RDS avec 7 listes, Choura avec 6 listes, l’UCD avec 5 listes, le RU avec 4 listes, l’ADM avec 3, Inma avec 3 listes, UCM avec 3 listes, Unité et développement avec 3 listes, ADEMA avec 2 listes, ADR avec 2 listes, Construction mauritanienne avec 2 listes, Construction nationale avec 2 listes, PUJD avec 2 listes, Coalition pour la Mauritanie avec 1 liste, Concertation démocratique avec 1 liste, Al Moustaqbal (pourtant membre de la COD) avec 1 liste, GAD avec 1 liste, MC avec 1 liste, MDD avec 1 liste, PCDEV avec 1 liste, PCPR avec 1 liste, PDD avec 1 liste, PEM avec 1 liste, PMDP avec 1 liste, PMJD avec 1 liste, PPD avec 1 liste, PRJN avec 1 liste, PTE avec 1 liste, PTG avec 1 liste, PUCM avec 1 liste, RDU (pourtant membre de la COD) avec 1 liste, Tejdid avec 1 liste, UDD avec 1 liste, UFS avec 1 liste, UNDD avec 1 liste et Wefa avec 1 liste.
Pour les coalitions, il faut compter avec : APP-Tawaçoul avec 1 liste en Assaba, El Wiam-UFP avec 1 listeau Gorgol, El Wiam-Sawab avec 1 liste au Trarza, El Wiam-APP avec 1 liste au Trarza, APP-UFP avec 1 liste au Brakna et Ribat-PTG avec 2 listes à Nouakchott.
Nous remarquons que la première région en nombre de candidatures est naturellement Nouakchott avec 173 listes en concurrence, suivent le Gorgol avec 147 listes, le Hodh Echergui avec 125 listes, le Hodh el Gharby avec 114, le Brakna 108, le Trarza 105, le Guidimakha avec 103, l’Assaba 100, l’Adrar 51, le Tagant 41, Nouadhibou 34, Tiris Zemmour 17 et Inchiri 14 listes. La moyenne est de 5 listes environ par commune sur l’ensemble des dépôts.

Si l’UFP décide de boycotter, il faudra retirer ses listes sauf si leurs mandataires refusent ou si la décision tombe en dehors des délais.

mercredi 9 octobre 2013

Nominations à l’Armée

Un décret nommant un nouveau chef d’Etat Major des Armées en la personne du Général de Brigade Hanenna Ould Sidi qui est remplacé au poste d’Inspecteur Général des Forces armées et de sécurité par le Général de Brigade Mohamed Znagui Ould Sid’Ahmed Ely. La restructuration décidée en avril dernier est concrétisée à l’occasion de ce décret. C’est ainsi que le Général de Brigade Mohamed Cheikh Ould Mohamed Lemine (Brour) est nommé à la tête de l’Armée de terre, l’Amiral Isselkou Cheikh El Weli à la tête de la Marine nationale et le colonel Mohamed Mohamed Salem Lehreytani à la tête de l’Armée de l’air. Tous font partie de l’élite de cette Armée qui a connu des moments difficiles par le passé.
Dans un posting daté du 3 avril 2013, j’écrivais ici :
«Le décret créant deux nouveaux Etats Majors, celui de la Marine et celui de l’Air, a été signé. Il transforme ces deux directions en structures d’Etat Major. Du coup le Général de Division Mohamed Ould Cheikh Ahmed Ould Ghazwani devient le Chef d’Etat Major des Armées de Mauritanie. C’est donc à l’ancien Etat Major de l’Armée et à ses structures qu’échoit la direction centrale de toutes les Armées. C’est un peu si la Mauritanie avait désormais une Armée de terre, une Armée de l’Air et une Armée de «mer» (Marine). Le commandement des opérations sera toujours entre les mains de l’Etat Major des Armées. Alors que l’administration et la gestion quotidienne seront décentralisées au profit des nouvelles structures.
La création de ces Etats Majors intervient au moment où le tableau d’avancement fait état de la promotion de plusieurs colonels au rang de généraux. Au total sept nouveaux promus, à ajouter aux dix anciens. Ce qui répond à une demande légitime des officiers d’une Armée qui a quand même évolué de façon notable depuis quelques années.
Les effectifs ont certes doublé, mais c’est surtout la transformation de l’Armée, par une remise à niveau et par la mise à disposition de moyens nouveaux, qui impose de tels changements.
Reste que si les autorités ont pu faire évoluer rapidement cette Armée, elle reste à construire sur des bases privilégiant la compétence et le cursus. Il est vrai qu’un grand effort a été consenti pour palier aux injustices dans les avancements, les traitements et les affectations des officiers. Ces injustices qui ont été à la base de l’opération de sape entreprise deux décennies durant par un pouvoir qui avait visiblement comme option de détruire l’Armée qu’il percevait – il a peut-être raison – comme une menace pour son pouvoir. Il fallait donc la déstructurer, lui enlever tous ses moyens et l’affaiblir pour l’instrumentaliser dans les jeux politiques PRDSiens.
Quand vint le moment de défendre le pays, c’était une Armée exsangue qui n’avait pas les moyens de faire face à la menace terroriste. Au lendemain de l’attaque de Lemghayti, les autorités ont dû faire appel aux privés pour mobiliser un millier de soldats pour aller à la poursuite des assaillants. Voitures, équipements, logistique et même une partie de l’armement ont été «gracieusement offerts» par les groupes financiers qui, non contents d’avoir déjà assujetti le politique et l’administratif, ont, pour l’occasion, cru pouvoir contrôler l’Armée.
Les coups d’Etat de 2005 et 2008, devaient permettre de reprendre les choses en main. L’Armée a été dotée de moyens à même de lui permettre d’assurer la réalisation de ses missions. Elle est même devenue l’une des meilleures armées de la région.»

Toutes les occasions sont bonnes pour rappeler d’où vient cette armée qui a subi, des années durant, cette opération de sape qui a réduit à néant toutes ses capacités. Une Armée qui s’est relevée depuis pour se reconstruire et pour donner l’image d’un pays, non pas «incapable de se défendre par lui-même», mais «indispensable dans la stabilisation et la sécurisation de la région». Un «pôle de stabilité», en somme dans une région qui bout.

mardi 8 octobre 2013

Grande victoire du Petit Poucet

C’est aujourd’hui que la Mauritanie a gagné la bataille engagée autour de l’Accord de pêche avec l’Union européenne. Bataille engagée depuis juillet 2012, date de la conclusion des accords entre les négociateurs des deux parties.
Grand jour. Parce que c’est la première fois de l’histoire récente du pays qu’un accord, quel qu’il soit, est l’objet de négociations sérieuses et déterminées dont l’objectif est d’en faire profiter le pays. En effet, tous les accords précédents ont été signés rapidement, sans confrontation et dans une atmosphère quelque peu suspicieuse quant à l’engagement du négociateur mauritanien. On a même parlé de «corruption», sinon de «je-m’en-foutisme» des négociateurs mauritaniens. Pendant très longtemps, l’important est de rapporter un document signé, pas ce qu’il y a là-dedans.
Au terme de cet Accord – rappelons-le -, la compensation versée à la Mauritanie sera de 110 millions d’euros dont 70 supportés par la Commission et 40 par les armateurs. Les captures sont désormais débarquées dans les ports mauritaniens, ce qui, au-delà du contrôle du produit, donnera un plus d’emplois et permettra aux usines à terre de tourner en plein régime. 62% de personnels mauritaniens obligatoirement embarqués et bien d’autres avantages dont le moindre est une (re)limitation des zones de pêche visant à limiter les dégâts causés par la flotte européenne. Mais le plus grand «acquis» du nouvel accord est sans doute la fermeture du secteur des céphalopodes devant les étrangers. Ce produit est désormais réservé aux seuls nationaux. Quand on sait que la pêche artisanale emploie 30.000 personnes environ sur les 36.000 que compte le secteur, quand on prend en considération la menace qui pèse sur cette ressource jusque-là surexploitée, on comprend alors la portée d’une telle décision. Et c’est principalement ce volet de «nationalisation» de la ressource qui a provoqué l’ire des Espagnols.
Dans le bras de fer qu’ils engageront, les Espagnols réussiront à embarquer avec eux les Portugais, les Hollandais, les Lituaniens… Pas pour longtemps. Les arguments développés par le négociateur mauritanien et la mobilisation de certains des acteurs (les artisanaux) vont permettre de «casser» l’alliance contre l’Accord. La partie européenne reconnait désormais que «le protocole servira mieux les besoins alimentaires des populations locales, notamment parce que la flotte européenne devra redistribuer une partie de sa pêche. Il prévoit également davantage d’offres d’emplois pour les marins mauritaniens.»
Sur son blog, le député européen Alain Cadec qui se trouve être le vice-président de la commission de la pêche du Parlement européen, explique : «J’ai voté en faveur de ce protocole que je considère comme juste et satisfaisant. La contrepartie financière payée à la Mauritanie a augmenté afin de permettre le développement du secteur mauritanien de la pêche. Les quotas de thon, crevettes et merlu noir sont satisfaisants pour la flotte européenne. Enfin, les conditions techniques de l’accord négociées pour les armateurs européens sur place sont elles aussi meilleures que celles du protocole précédent (…) Le rejet de cet accord aurait été un mauvais signal donné à la Mauritanie et aurait entraîné l’arrêt des activités de pêche pendant au moins trois ans. Je me félicite du vote du Parlement qui a largement adopté cet accord». Tandis que le rapporteur Gabriel Mato Adrover, le député espagnol qui avait tout fait pour bloquer l’Accord préfère porter son regard sur l’avenir : «Nous devons désormais nous préparer au renouvellement de cet accord, qui devrait expirer fin 2014, afin de garantir que le prochain protocole améliore les conditions actuelles et que les négociateurs de la Commission européenne veillent à ce qu’il inclue le secteur dans son ensemble». L’ambiance sera chaude quand s’ouvriront les discussions en 2014…
En attendant comprenons que le processus a réussi parce que, les négociateurs, s’appuyant sur une volonté politique déterminée, ont cherché à défendre réellement les intérêts du pays. Les interférences «politiques» et «diplomatiques» n’ont pas fait plier les autorités mauritaniennes qui ont confié le traitement de la question à des techniciens qui avaient la compétence nécessaire et qui étaient à l’abri des tentations.

La conclusion de l’Accord nous enseigne que ce n’est pas parce qu’un pays est faible qu’il ne doit pas défendre ses droits et croire à la victoire. Comme elle nous enseigne qu’il n’est pas nécessaire d’avoir des accords avec nos partenaires s’ils ne profitent pas à tous. Leçon destinée à nos négociateurs qui sont toujours prompts à signer tout pourvu qu’on puisse faire une dépêche sur telle ou telle convention.

lundi 7 octobre 2013

Chronique d’un déchirement inévitable

Il y a quelques semaines, l’Union des forces progressistes (UFP) réagissait à l’annonce par la CENI de la date du 12 octobre comme date du scrutin : elle décidait de boycotter si les conditions consensuelles ne sont pas fixées pour garantir la régularité optimale des élections. Il (le parti) suivait en cela la décision de la Coordination de l’Opposition Démocratique (COD), dont il fait partie.
Entretemps, le report des élections a été décidé et un dialogue a été ouvert entre la Majorité et la COD. C’est d’ailleurs le Président de l’UFP, Mohamed Ould Maouloud qui a dirigé la délégation de la COD à ce dialogue.
Alors qu’il était plongé dans ces pourparlers qui semblaient s’enliser, le Comité Permanent de son parti tenait une réunion et décidait, à la majorité des présents, de participer aux élections. Cette réunion s’est tenue sous la présidence de Mohamed Ould Khlil, l’un des vice-présidents. Elle entérinait ainsi un processus de préparation aux élections lancé bien avant quand le parti avait demandé à ses structures de terrain – celles qui sont directement concernées par la préparation des candidatures – de se préparer à toutes éventualités. Certaines de ces structures avaient effectivement préparé les dossiers dans la perspective, inévitable pour elles, de la participation du parti qui a toujours fait de ce principe, celui de la participation, l’une de ses options stratégiques fondamentales. Devant la décision de report et l’ouverture d’un dialogue, il était plus qu’évident que le parti allait décider la participation.
Devant l’urgence, le Comité Permanent a donc décidé de participer malgré les protestations de Mohamed Ould Khlil qui dira plus tard que le vote s’est déroulé alors qu’il était sorti prier (?). Lui, le chef de file des «boycottistes» a expliqué que le Comité Permanent n’est pas habilité à prendre la décision et n’a pas voulu entendre ceux pour lesquels, les derniers développements sur la question méritaient une nouvelle appréciation du parti et de ses structures dirigeantes. Cette appréciation devait mener à leurs yeux vers la participation qui permettrait au parti de rester dans le jeu, de consolider ses acquis en matière d’animation du jeu démocratique et de mobiliser ses bases autour de ses principes fondamentaux. Les «participationnaistes» réussissent à faire passer la décision de participer en mettant en minorité le président Mohamed Ould Maouloud revenu diriger la réunion du Comité Permanent entre deux rencontres de la COD. Au cours de cette réunion, Ould Maouloud sera obligé de parler le langage du cœur en prétextant «la honte» pour le parti de devoir «trahir la COD». Rien à faire.
Alors, dernier recours, le Bureau Exécutif, instance politique dirigeante du parti devra se prononcer dans les 24 heures qui viennent après le report de la réunion qui devait se tenir dimanche. C’est finalement ce mardi que la réunion doit décider d’entériner ou non le dépôt des listes. Ce report de la réunion doit donner du temps pour que les pressions s’exercent afin de trouver une solution n’exigeant pas un vote qui sera certainement en faveur de la participation.
Quoi qu’il en soit, le parti UFP traverse sa première grande crise. Une décision de boycott va nécessairement exclure le parti dans le moyen et long terme, en plus du fait qu’elle pourrait entrainer dans l’immédiat une indiscipline en son sein (refus des candidats de retirer les listes).  Les tergiversations seront plus coûteuses en termes de cohérence et de cohésion que toutes les attaques dont le parti pourrait faire l’objet le parti à la suite d’une décision de participation de la part de ses détracteurs à l’intérieur ou à l’extérieur de la COD.
Si par contre la décision est d’entériner la décision de participer, ce serait désormais une façon de désavouer le président et son choix. Auquel cas, Mohamed Ould Maouloud pourrait recourir à la menace de la démission.
Dans l’un ou l’autre des cas, l’UFP se trouve à un tournant de son histoire : ni le parti, ni son président ne s’en sortiront indemnes (politiquement). Parce que l’un ou l’autre devra être sacrifié, même temporairement : on peut imaginer une démission du président qui pourra être refusé ultérieurement (pendant ou après les élections). Le parti aura alors fait preuve de «démocratie» en mettant en minorité son chef qui en aura tiré les conclusions, quitte à récupérer plus tard ce chef emblématique et jusque-là indispensable.

N.B : Le texte de base du parti dit : «L’option stratégique de l’Union des Forces de Progrès pour l’accès au pouvoir est celle de la voie pacifique fondée sur une majorité démocratique du peuple.

de contribuer à l’instauration d’une démocratie apaisée, à travers un processus de changements positifs graduels alliant les luttes, le dialogue et les réformes consensuelles ; 
- d’exploiter tous les espaces de liberté et d’expression démocratique, et de faire des circonscriptions gagnées, par le biais des compétitions électorales, des champs d’expérimentation et de diffusion d’un type nouveau de gestion de la chose publique et de relations avec les citoyens ; 
- de rallier à sa politique les forces et les couches sociales les plus larges possible (hommes d’affaires soucieux de l’intérêt national, intellectuels démocrates, personnalités patriotes) afin de renforcer le camp des forces de changement et d’accélérer l’avènement d »une alternance viable. L’union des forces de progrès est une organisation patriotique démocratique et progressiste
»

dimanche 6 octobre 2013

Comment la COD s’est piégée

Il y a eu d’abord l’épisode de la plate-forme commune. Celle qui a vu tous les partis se réunir et définir ensemble les contours d’une plate-forme revendicative rassemblant les sujets autour desquels le dialogue doit s’engager avec la Majorité. C’est à ce moment-là qu’il faut situer aussi la volonté – plus ou moins évidente – de faire «hiberner» l’Institution de l’Opposition en attendant de lui donner la mort («clinique» et dans un deuxième temps «biologique»). Pour la remplacer par un regroupement dont on peut discuter, le moment venu, de la légitimité ou de la légalité.
Suivra l’épisode qui verra une partie de cette Coordination de l’opposition s’affranchir de ses engagements, poser «la réalisation de préalables» pour tout dialogue avec la Majorité et décider de ne pas participer au processus qui s’ouvre en grande pompe au Palais des Congrès. Avec la participation de deux grands partis de la COD : Alliance populaire progressiste (APP) de Messaoud Ould Boulkheir par ailleurs Président de l’Assemblée nationale, et Al Wiam de Boydiel Ould Hoummoid, qui seront rejoints par le parti Sawab des Baaths dirigés par Abdessalam Ould Horma. En fait, les partis qui formaront la Coalition pour une alternance pacifique (CAP).
Vient ensuite l’épisode des «initiatives» qui a vu les groupes, les individus, les partis et même les regroupements de partis s’embarquer dans tentatives de «réconciliation politique». La plus emblématique de ces initiatives était celle proposées par le Président Messaoud Ould Boulkheir. Elle comportait le traitement de vraies questions de fond, mais l’on n’en retiendra que le volet «constitution d’un gouvernement national». Malgré les déclarations publiques du Président Ould Abdel Aziz, de nombreux leaders vont s’accrocher à cette idée de gouvernement de consensus. Cela va occasionner une ruée de petits partis qui se trouvaient à l’étroit ailleurs vers la CAP et, en même temps, encouragera les composantes de la COD à trainer. Alors que l’échéance électorale se rapprochait inexorablement.
Entretemps, il semblait que le pays revenait à cette configuration de 2009 où la scène se divisait en trois «pôles politiques» : la Majorité (qui est la même), la CAP (qui ferait le rôle du FNDD) et la COD (un peu plus que le RFD de l’époque). Comme s’il suffisait d’avoir cette configuration qui rappelle celle d’avant, les leaders ont commencé à croire que le Destin mènera droit vers un accord comme celui de Dakar. Tout semblait aller de soi. Nouvelle source de nonchalance. Le temps passe.
Vint enfin le temps du rabattage. Il faut l’appeler comme ça parce qu’il correspond à une étape où il fallait rabattre le maximum d’acteurs pour légitimer les élections et, éventuellement, laisser se débattre à la marge les plus caciques des protagonistes.
Cela a commencé par les avances faites par le Président de la République à Néma. Mais au lieu de croire à une porte ouverte, la COD est entré dans un cycle de débats internes qui ne menaient visiblement nulle part. Tout le monde savait que ce qui unit ces partis, ce n’est pas une vision commune du monde, ce n’est pas un parcours commun, ce n’est pas une tradition commune du combat, ce n’est même pas une espérance commune d’un avenir commun… Rien que la haine d’un homme qui a commis deux actes fondamentaux : le 3 août 2005 et le 6 août 2008. Les deux actes mettaient fin à l’hégémonie de certains clans dont la grande partie, «blanchie» (comme on blanchit l’argent sale) entretemps, se trouvait dans les premières lignes de la COD.
Le rabattage se fait en deux temps : le temps de la rumeur sur les éventuels reports, les faiblesses du pouvoir qui «est obligé de lâcher du lest face aux pressions occidentales», la mauvaise humeur de ses partenaires de la CAP qui sont «sur le point de casser» et l’ouverture d’une fenêtre avec la décision de composer des délégations en vue de discuter. Un dernier service rendu au pouvoir qui n’en avait déjà plus besoin. Visiblement Ceux qui ont décidé de participer l’avaient préparé bien avant. Sinon comment comprendre que Tawaçoul dépose plus de 150 listes aux communales et l’UFP une quarantaine (dont certaines ont malheureusement été déposées après heure) ? Pourquoi avoir trainé tout ce temps ?
Parce qu’il faut le dire, la question de la participation ne devait jamais être posée. Les leaders islamistes ont raison de le dire. C’est une question de principe qui ne doit jamais être remise en cause. Il fallait donc se concentrer sur les conditions de l’organisation des élections de manière à en assurer la régularité. Avec des propositions concrètes et non des principes généraux comme celui «d’un gouvernement de consensus». Et les préparer comme il faut.

Comme par le passé, les politiques ont cru que le temps aura raison de l’adversaire qui sera obligé de revenir au processus suivant le chronogramme qu’ils auront choisi. Une fois de plus, ils se seront trompés. Tant pis pour eux et dommage pour la démocratie en Mauritanie.