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mercredi 18 septembre 2013

Chambardement, remaniement, recentrage…

Tous les mots sont à chercher pour trouver l’expression qu’il faut pour résumer la décision du Président de la République de limoger cinq de ses ministres et de promouvoir quelques-uns d’autres.
Ce remaniement arrive à un moment où l’attention générale est captée par les conciliabules autour de la participation aux prochaines élections législatives et municipales. La Coordination de l’Opposition Démocratique (COD) prenant tout son temps pour annoncer sa décision de boycotter ou de participer. La presse parlant de plus en plus de report de l’échéance, de dialogue entre la COD et le Pouvoir, de constitution de gouvernement d’union nationale, d’ouverture de la CENI, de mise en place d’un Observatoire des élections… chacun y allant de sa lecture des évènements qui n’ont parfois pas eu lieu.
Première lecture donc : pas de gouvernement d’union, ni de gouvernement élargi. Est-ce qu’il faut en conclure qu’il n’y aura pas de report des élections ? certainement quand on sait que tout report risque de compromettre leur tenue en 2013, alors qu’en 2014 nous avons déjà l’élection présidentielle et on ne voit pas les acteurs politiques accepter de coupler les deux élections.
Le remaniement arrive à un moment où la situation de l’assainissement de la ville de Nouakchott est décriée par tous. C’est, aux yeux de certains ce qui explique le limogeage de Mohamed Lemine Ould Abboye du poste de ministre de l’hydraulique et de l’assainissement. Le ministre des pêches aurait été limogé pour ses contreperformances dans le dossier de l’Accord de pêche UE-Mauritanie. Aghdhavna Ould Eyih serait allé parfois contre la position des négociateurs mauritaniens, offrant aux Européens des arguments pour asseoir leur position. Le ministre de la Justice paierait pour les dernières mesures mal mises en œuvre (libérations sous cautions de détenus ayant été arrêtés en dehors des règles définies par la loi), mais aussi pour ses interférences avérées dans le cours de la Justice, ses conflits avec les Magistrats et les avocats, son incapacité à impulser la réforme tant attendue, son népotisme… Pour descendre un ministre, les raisons ne manqueront pas. Mais pour en choisir ?
En terme de valeur intrinsèque – cursus, stature, expérience, compétence – on peut dire que le gouvernement de Ould Mohamed Laghdaf a largement gagné : les entrants sont beaucoup plus outillés que les sortants. Si l’on excepte au ministère du Pétrole et de l’énergie où Taleb Ould Abdi Val a été plutôt un excellent manager alliant compétence et modernité. Son remplaçant, Mohamed Ould Khouna vient du département de la formation et des nouvelles technologies. On ne peut pas dire qu’il a brillé là où il était, se contentant plutôt de gérer un département qui devait pourtant être la locomotive de la modernisation de l’administration et de la formation technique. Le fait d’être un ancien cadre de la SNIM aurait pu l’amener à l’hydraulique où l’on a envoyé Mohamed Salem Ould Bechir qui, lui a fait ses preuves à la SOMELEC, société qu’il a trouvée à genoux et qu’il a réussi à relever en moins de quatre ans. Son expérience dans le domaine de l’énergie pouvait servir justement au ministère du pétrole et de l’énergie. Surtout que l’un des principaux axes du développement du secteur repose sur l’exploitation des énergies renouvelables. C’est ce genre «d’erreur de casting» qui a fait qu’on a utilisé Hammadi Ould Hammadi aux affaires étrangères, à la défense au lieu de la pêche où il a fait sa carrière et secteur dans lequel il a tout appris. On se résout enfin à l’y envoyer à un moment où le secteur sombre du fait de la mauvaise mise en œuvre de la politique préconisée. Son remplaçant aux affaires étrangères, Ahmed Ould Teguedi, est un diplomate formé pour cela et ayant servi comme ambassadeur, notamment en Israël et dernièrement aux Etats-Unis. Est-ce que ce passage par Israël que certains semblent mettre en avant, est-ce qu’il a pesé dans sa nomination ? si la réponse est oui, c’est certainement un signe d’un recentrage diplomatique qui ne peut vouloir dire le retour à la normalisation avec Israël. Si la réponse est non, ce sera l’occasion de déchainement de passions feintes ou réelles pour la question. L’occasion aussi de rappeler aux détracteurs que celui qui a osé mettre fin à la relation avec Israël, c’est bien le Président actuel, pas son prédécesseur qui avait pourtant bénéficié de la complicité de la plupart de ceux qui contestent aujourd’hui.
La grande inconnue du remaniement est cette Fatima Habib qui est titulaire d’un doctorat de gynécologie et qui reste une énigme pour tous les observateurs qui la découvrent.
Ce qu’il faut souligner quant à l’éducation, c’est non seulement le départ de Ahmed Ould Bahiya, mais la fin du «Ministère d’Etat» qui coiffait les autres secteurs de l’éducation : éducation fondamentale et secondaire. Désormais chaque ministère est autonome et Ould Bahiya est remplacé par Isselkou Ould Ahmed Izidbih qui était jusque-là Directeur de cabinet. L’ancien Recteur de l’université de Nouakchott connait très bien le secteur et y apportera la touche qui lui manquait. Tout comme le professeur Oumar Ould Maatalla qui souffrait tellement de la tutelle du ministère d’Etat, tutelle qui l’empêchait d’entreprendre les réformes qu’il faut. Aujourd’hui l’excuse a disparu.
Bâ Ousmane hérite de l’enseignement fondamental et quitte le secrétariat général du gouvernement qui revient à Malal Dia. Une permutation qui s’explique par les compétences «politiques et sociales» de Ba Ousmane qui aura à diriger un département où s’expriment toutes les sensibilités et qui a besoin plus d’un expert en «mauritanités» que d’un expert dans l’éducation.
Mohamed Ould Boilil s’en va battre campagne pour l’UPR, soit à Keur Macène où il avait été élu en 2006 député RFD, soit à Nouakchott où il pressenti candidat au poste de Président de la Communauté urbaine (CUN) pour l’UPR. Il est remplacé par quelqu’un de la maison, Mohamed Ould Ahmed Rare, plusieurs fois Wali de région, préfet de département…

L’ancien Conseiller du Premier ministre Sidi Ould Zeine est nommé à la Justice. Cadre de la BCM, grand spécialiste de l’économie mauritanienne, Ould Zeine est aussi un grand politique pour le rôle qu’il joue sur le plan national. Homme d’ouverture, il fait partie d’une élite qui a su dire non quand il le fallait, qui a dénoncé les arbitraires de 1989, 90 et 91 et qui a accompagné la démocratisation sans zèle destructeur. Homme de modernité, il pourra être, si telle est sa mission, l’homme des grandes réformes de la Justice. Un secteur qui a besoin de retrouver une quelconque dignité pour rétablir un lien de confiance avec les citoyens.

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