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dimanche 5 mai 2013

Une histoire bien de chez moi


Dans les années 80, le Wali du Trarza était un homme du Nord qui se déplaçait sous tous les prétextes pour aller à Mederdra dont on soupçonnait les habitants d’être sympathisants du 16 mars 1981. Une fois, le Wali avait quitté Rosso avec un escadron de la Gendarmerie pour venir à Mederdra où avait surgi un problème lié au renouvellement du bureau des parents d’élèves du département. L’ancien bureau refusant de se démettre, les enseignants avaient exigé l’élection d’un nouveau bureau. Le Wali avait jugé la question de grande importance pour justifier un déplacement.
Sitôt arrivé, il convoqua une réunion générale dans la grande cour des locaux de l’administration (buroh el hakim). Quelques trois cents personnes firent le déplacement. Essentiellement des notables et dignitaires de la ville.
Le Wali fit un discours où il insinua que l’autorité était là pour «imposer la loi et la bonne marche des choses». Tout refus de l’ordre et de se conformer à ce que dira l’autorité sera considéré comme une rébellion.
Il désigna trois grandes figures de la ville dont l’inspecteur du fondamental, à l’époque le poète et homme de lettres Mohamed Ould Ahmed Ould Meydah. La commission se retira et désigna un bureau que le Wali s’empressa de lire devant le public.
«Que ceux qui sont d’accord sur cette proposition se lèvent», clama le Wali avec un brin de fierté d’avoir enfin trouvé ce qui devait unifier «les gens de Mederdra» (Ehl el Medheredhra). Personne ne se leva. Un silence gêné. Puis le Wali qui demande à tout le monde de se lever. L’air contrarié. A Mederdra, on obéit toujours à ceux qui ont l’air contrarié pour ne pas leur donner le prétexte d’aller plus loin.
«Maintenant je vais relire la proposition pour le nouveau bureau. Que ceux qui sont d’accord s’assoient, et qu’on en finisse». L’air à bout. Le Wali finit sa lecture et leva les yeux en rappelant : «que ceux qui sont d’accord, s’assoient». Personne ne s’assit. «Que ceux qui sont contre, s’assoient». Personne ne s’assit.
Excédé, le Wali se tourna vers l’inspecteur Mohamed : «Qu’est-ce qu’il faut comprendre de cette attitude de refus de coopérer ?» et celui-ci de lui répondre : «Rien d’autre que la volonté de vous dire que la question ne mérite pas toute cette mise en scène…»
Si le Wali trouve qu’il s’agit d’un problème qui ne peut être réglé que par sa présence au milieu d’un escadron de gendarmerie et au terme d’un grand déploiement d’autorité, s’il estime que l’élection d’un bureau de parents d’élèves demande tant de dépense de moyens et d’énergie, «les gens de Mederdra» ne trouve pas qu’elle mérite l’expression d’une quelconque attitude…
…à bon entendeur…

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