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lundi 9 avril 2018

Editorial 749


Il s’appelle Seif Kousmate. Il est franco-marocain. Pour Reporters sans Frontières (RSF), il s’agit d’un «journaliste photographe» qui aurait subi de mauvais traitements en Mauritanie avant d’être expulsé. Pour les Mauritaniens, il s’agit d’un marocain entré «clandestinement» au pays pour s’y adonner à un travail qu’il a fini par effectuer dans le noir.
En situation «normale», on n’aurait pas hésité à lui reprocher la méthode, celle de venir faire un reportage dans un pays sur une question au centre de grandes controverses, sans prendre la précaution de faire les démarches prévues pour s’assurer de travailler en toute légalité. Mais…
La même semaine, je recevais ici des amis dont une photographe qui voulait prendre des images de la vie économique, culturelle et sociale en Mauritanie. Il s’agissait pour nous de rassembler des images d’une Mauritanie qui marche et qui avance en vue d’alimenter un site en préparation. Tout cela a été expliqué dans une lettre adressée au ministère des relations avec le Parlement et la Société civile.
Une semaine d’attente, puis deux jours, puis… on nous expliqua qu’il fallait avoir le visa de quelque part… ailleurs… parfois avec le geste pour comprendre qu’il s’agit de la Présidence et souvent pour comprendre qu’il s’agit plutôt du Premier ministère. Mais quelque soit l’Autorité qui fait ombrage à l’exercice d’une profession déjà en proie à de nombreuses difficultés, des remarques s’imposent.
Vue de l’extérieur, la Mauritanie est un pays qui donne une idée de la Géhenne. Terre d’esclavage, son peuple croupit sous une dictature violente. Le pays est sous l’emprise des trafiquants de drogue et d’arme, s’il n’est pas la terre de refuge des terroristes jihadistes. Passage obligatoire de l’immigration clandestine, la Mauritanie reste la patrie de l’exploitation de l’homme par l’homme.
Pas de liberté d’expression. Pas de liberté d’association. Pas de liberté de culte. Pas de liberté individuelle encore moins collective.
Le racisme comme pratique institutionnelle et comme doctrine sociale. La prostitution comme religion. Le vandalisme comme méthode de gouvernement.
Les sites d’informations, les acteurs politiques mécontents, les opérateurs économiques insatisfaits… tous participent consciemment ou inconsciemment à fabriquer une telle image.
Et quand il y a une volonté qui se manifeste quelque part pour essayer de renverser l’image au moins de l’atténuer, c’est le gouvernement qui la torpille.
Refuser à un journaliste d’avoir les accréditations nécessaires pour mener son travail en toute légalité, c’est faire preuve de bêtise incommensurable. Et ouvrir la voie aux excès et au travail clandestin.
Du coup, le gouvernement confirme ainsi sa volonté d’en découdre avec les espaces de liberté, de remettre en cause ses engagements et, de fait, de prendre les airs d’une dictature. Parce qu’un(e) ministre et/ou un Premier ministre ne respecte pas les institutions, parce qu’il profite de sa position pour régler des comptes, pour faire mal à ceux qu’il a décidé de traiter en ennemis, c’est tout un système qui se retrouve dans la ligne de mire des défenseurs de droits.
Ce gouvernement aurait dû déployer ses efforts en vue de donner la meilleure image du pays, de son système politique et de son président. Mais non. Il est occupé à se battre pour confirmer ce que les excès d’opposition ont construit ces dernières années.
Après avoir échoué à accompagner la vision de son chef, après avoir saboté le processus de refondation par les choix incongrus, après avoir ridiculisé le processus référendaire, après avoir occupé l’espace public par les guerres claniques… ce gouvernement s’ingénue à donner la plus mauvaise image qui puisse être de la Mauritanie…
Nous nous apprêtons à vivre le plus positif de nos tournants, celui d’une alternance au sommet de l’Etat.
Le Président Mohamed Ould Abdel Aziz qui a sauvé le pays de la banqueroute en 2005, qui a redressé la barre en août 2008, a refusé de céder à la tentation de remettre en cause la limitation des mandats. De lui-même.
Et contre la volonté affichée de ses «faux amis» et de ses vrais ennemis.
«Dieu, gardez-moi de mes amis, mes ennemis je m’en charge». Jamais une telle affirmation n’a été aussi pertinente. Rien n’est plus préjudiciable au Président Ould Abdel Aziz que son gouvernement actuel.

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