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mercredi 10 juillet 2013

Quel rôle pour l’armée ?

Le 10 juillet 1978, l’Armée renversait le gouvernement civil en Mauritanie. Depuis, nous avons eu une dizaine de coups d’Etat ou de tentatives avérées. Il y a eu aussi de «fausses alertes» qui ont quand même été à l’origine d’épurations importantes : le faux coup d’Etat de 90 a été à l’origine de la chasse à la communauté négro-africaine occasionnant des morts. Quelques années avant, les Baathistes furent renvoyés des corps constitués et certains emprisonnés. Plus tard ce sont les Nassériens qui furent accusés de vouloir prendre le pouvoir à travers l’infiltration de l’Armée. Les Islamistes viendront après pour être accusés de mettre sur pieds des groupes armés pour arriver au pouvoir…
Le «complot permanent» fera partie des éléments de gouvernance de l’époque de Ould Taya. La production de la peur fut à la base de sa méthode de gouvernement. Parce qu’il a compris, très tôt, que le danger, le vrai danger pour son pouvoir ne pouvait venir que de l’Armée, et non des tribulations des politiques. Et pour éviter toute surprise, il avait construit une stratégie à double supports : entretenir un climat délétère qui rendait difficile, voire impossible, toute conspiration, et affaiblir l’Armée en la dépossédant de ses moyens et de ses facultés. Ce qui n’a pas empêché le 8 juin, encore moins le 3 août…
Cette politique de sape volontaire aboutit à la clochardisation du commandement et à une accentuation de la misère de la troupe. Ne manquait plus que la volonté de lui imposer de faire partie du dispositif du PRDS qui régnait en maître. Nous assisterons, à partir du milieu des années au «vote militaire contrôlé».
Les Mauritaniens se rendent compte de la catastrophe quand le pays devient la cible des groupes terroristes : le 4 juin 2005, le pouvoir fait appel aux groupes privés pour mobiliser une force de frappe capable de poursuivre l’ennemi. Tout, absolument tout – voitures, équipements, gasoil, armes, munitions et nourriture – est offert par des hommes d’affaires dans un élan de solidarité obligatoire.
Et quand intervient le coup d’Etat du 3 août 2005, la question de savoir «quel rôle pour l’Armée ?» est posée avec force. Mais personne ne tente d’y répondre, les politiques étant aveuglés par la perspective électorale. Parmi eux, ceux qui pensent que l’Armée doit être tenue à l’écart en attendant qu’ils accèdent au pouvoir après la présidentielle. D’autres voudraient bien que la situation reste telle qu’elle est pour pouvoir ensuite manigancer renversements et instabilité. Tous ne croient pas assez aux vertus de la démocratie pour se permettre de se mettre sur le dos le vrai facteur de l’accession et du maintien au pouvoir : l’Armée. Le plus en vue d’entre eux déclara même que «si, demain, l’armée venait à me soutenir, je n’y verrai aucun inconvénient», ouvrant ainsi la voie à l’interférence des militaires qui avaient pourtant promis une neutralité totale. Cette attitude trahissait cette profonde conviction que l’élite garde au fonds d’elle-même : pas de pouvoir sans l’appui de l’Armée. Ce ne sont pas les déclarations politiques faites çà et là qui vont convaincre du contraire. D’ailleurs ceux qui les font sont souvent les mêmes qui appellent, en désespoir de cause, à un soulèvement de l’Armée. Parfois franchement, très souvent par allusion…
Sous les latitudes auxquelles nous appartenons, nous avons vu comment les Armées ont été déterminantes dans les grands bouleversements de leurs sociétés. En Tunisie, en Egypte et même au Sénégal où c’est bien l’attitude de l’Armée qui a interdit au Président Wade de tenter de rester à tout prix. Quand l’Armée ne suit pas, on est obligé dans nos pays de se rétracter. Et quand elle suit, comme ce fut le cas en Tunisie ou en Egypte, le pouvoir abdique carrément quand elle le décide. Par contre, dans des pays comme la Lybie ou la Syrie où elle a été incapable de trancher, on va à la guerre civile.
Dans nos sociétés où les partis politiques sont incapables de fédérer et de faire rêver, l’élément stabilisateur est bien l’Armée. D’autant plus que l’émiettement qui caractérise la société à des heures pareilles, fait qu’elle paraît comme le creuset de l’a Nation, l’ultime creuset.
C’est pourquoi, il faut lui donner les moyens de parvenir à l’Excellence. Son encadrement, son commandement et ses hommes de troupes doivent être triés parmi les meilleurs. Pour ce faire des critères sévères doivent être définis pour l’accès aux grades supérieurs et même pour le recrutement.
Il est temps aussi d’accélérer les mesures prises pour en faire une armée de développement. Si aujourd’hui, le Génie militaire se voit confier la construction d’une route ici, l’alimentation en eau d’un village là, il faut voir son action dans un cadre plus global et y aller au plus vite. Intensifier aussi le rapport utile à la population : cultiver, soigner, enseigner, aider… partout où il le faut.
C’est bien par la professionnalisation et par l’implication dans la construction du pays qu’on pourra lui assurer les compétences qui doivent être les siennes pour préserver l’unité, l’intégrité et la stabilité du pays.

C’est aussi en s’abstenant de toujours chercher à la déstabiliser par les propos inconsidérés et inutiles.

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