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dimanche 30 juin 2013

L’affaire du stade

Les enquêteurs de la Gendarmerie semblent vouloir ratisser large dans cette enquête sur le marché de construction du stade de Nouadhibou. Aujourd’hui, ce fut le tour du président de la commission des infrastructures, Sidi Ould Nemine d’être entendu pour quelques vingt minutes selon nos informations.
En fait tout le monde sait que la commission en question a octroyé le marché dans les normes et personne ne met en doute la régularité de la décision au départ, encore moins l’intégrité des responsables concernés. On sait aussi que c’est en fait à l’Autorité de régulation que revient le devoir d’enquêter sur les cas litigieux comme celui justement du stade. C’est d’ailleurs pour avoir constaté l’usage de faux que l’Autorité a fini par rejeter la première décision. Mais ce qui prêtait à confusion, c’était le fait que tous ceux qui sont censés décider dans le processus du marché en question n’aient pas été entendus. La confusion est levée.
C’est difficile à croire, mais c’est bien le marché du stade de Nouadhibou qui est la cause d tout ce branle-bas.
On attendait aujourd’hui le déferrement des personnes interpellées dans le cadre de l’enquête et dont on ne sait rien depuis que la Gendarmerie les a arrêtées. Ce qui est quand même bizarre pour une affaire de corruption (supposée ou réelle). Officiellement, on n’en sait toujours pas plus que les rumeurs distillées par certains milieux. 

samedi 29 juin 2013

Faire attention

La Mauritanie avait refusé d’intervenir dans le conflit malien, dans sa phase guerrière du moins. Mais elle a toujours exprimé son désir de faire partie des pays qui auront à faire un effort dans le maintien de la paix. Mais au Mali, les appréhensions sont nombreuses.
La récente visite d’une délégation composée du Premier ministre et du chef d’Etat Major des Armées au Mali, entrait dans ce cadre. Un peu pour aplanir quelques difficultés liées aux réticences maliennes.
Récemment, des officiers mauritaniens venant au Mali dans le cadre de la mission des Nations-Unies et de la préparation de la mission de paix, ces officiers ont été maltraités et ont dû se prendre en charge eux-mêmes. La visite a donc été  d’abord l’occasion de régler ces incompréhensions. Et surtout de rappeler le véritable rôle joué par la Mauritanie et ses prédispositions plusieurs fois exprimées devant les autorités maliennes.
La mission a donc réussi si l’on prend en compte la remise à niveau politique des rapports entre les deux pays. La Mauritanie a été accusée par certains milieux d’être derrière les rebelles touaregs, puis ceux arabes. Mais à chaque fois, on a vu que la Mauritanie agissait pour l’intérêt du Mali. Que jamais la Mauritanie n’a accepté de laisser passer les combattants avec armes et bagages, qu’elle détient tout ce qui a été récupéré sur les réfugiés militaires ou non. A plusieurs reprises, la Mauritanie a proposé son concours «discret» pour donner un coup de main ici ou là-bas.
Le problème qui se pose aujourd’hui, c’est que les Mauritaniens ne peuvent envisager d’intervenir ailleurs que dans la région de Tombouctou qui est la plus proche du pays de tous les points de vue. D’autant plus que la seule justification morale d’une éventuelle participation à la force de maintien de la paix, est celle d’apporter assistance et protection des populations des régions qui constituent un prolongement sociologique et historique de la Mauritanie.
On peut comprendre les appréhensions maliennes et leur chercher la possibilité de s’exprimer et de trouver réponse. Mais on ne peut occulter ni agir sans prendre en compte les données sociologiques et historiques.
Et c’est le sens du travail diplomatique et psychologique qui doit être fait maintenant que le Conseil de sécurité a donné son feu vert pour le déploiement des forces de maintien de la paix.
1800 hommes environ devront être envoyés sur place. Un corps d’élite, probablement des policiers et des médecins.
Ce déplacement devrait aussi poser le problème de la relation avec AQMI. Jusque-là AQMI a considéré que la Mauritanie n’est pas entrée en guerre contre elle malgré les propos excessifs de certains politiques qui ont tenu à un moment donné à faire entre en jeu le terrorisme dans un souci de déstabiliser le régime. Mais à partir du moment que le pays envoie des troupes dans le Nord malien, quelle réaction de AQMI et des groupes terroristes ?
C’est la question que nous nous devons de poser.

Rien ne doit être laissé au hasard. La fragilité du pays nous impose une grande prudence et surtout de faire l’effort de garantir la stabilité et la sécurité. Sinon, nous savons qu’une bombe peut nous faire sombrer. Corps et biens. 

vendredi 28 juin 2013

Yacine, l’incompris

Il appartenait à une famille, Ehl Nana, très représentative de ce qu’est la culture traditionnelle (musique et poésie). Par sa mère, Debye Mint Sweidbouh, il appartenait à une autre lignée de maitres de cet art accompli qu’est l’azawane Bidhâne. L’histoire de cette famille ressemble au cheminement des temps anciens. Elle est peut-être la dernière famille de griots – les maitres de la musique et de la poésie, la Mémoire aussi du groupe – à avoir passé de campement en campement, d’aire culturelle en aire culturelle avant de revenir en Mauritanie vers la fin des années 60. Alors que le pays vivait sa première révolution sociale et mentale.
A l’époque, le Nouakchott «chic» savait faire la fête et la faisait tout le temps. Boums, soirées dansantes, cérémonies… tout était prétexte aux habitants de se rencontrer et de laisser libre cours à leurs sentiments. La décennie 70 verra évoluer un Nouakchott moderne qui donnera de belles lettres, de beaux poèmes, de grands poètes, de belles voix, de belles danses, de beaux théâtres, de belles salles de cinéma, de beaux films… Tout y fut beau, y compris l’insouciance générale.
C’est dans cet environnement que la famille Nana s’établit à Nouakchott. Filles et garçons sont alors les idoles de plusieurs générations. Alliant l’ancrage dans la tradition et la soif de changement, cette famille arrive à s’imposer malgré la forte résistance de ses concurrents qui avaient pour eux l’avantage de jouir de toutes les solidarités grégaires (tribales, régionales…). Ehl Nana appartenaient à tout le monde. Donc à personne.
On les opposa d’abord entre eux, entre la partie de la famille qui a gardé ses réflexes et son appartenance tribale et qu’on appelait «Nana traditionnel» et les nouveaux arrivants désignés sous le label «Nana modernes». Dans certains milieux réfractaires aux changements qu’introduisait la famille, on poussait la méchanceté jusqu’à dire «Nana musulmans» vs «Nana catholiques»… alors que la famille Mohamed Ould Nana, celle de Yacine était aussi musulmane qu’on devait l’être à l’époque. Mais il s’agit là d’une manière de les discréditer aux yeux de l’opinion publique. Ce qui d’ailleurs n’a pas réussi.
Rendre hommage à Yacine alors qu’il nous quitte procède pour moi de deux impératifs.
Le premier est de célébrer un artiste accompli et…incompris des siens. Avec le violon (zarka) de sa mère Debye, la guitare de son frère Ali, Yacine a donné le mieux de lui-même en ces années 70, à l’époque où l’on chantait pour se faire plaisir et faire plaisir aux autres. Il aura essayé le disco, les reprises, les créations et/ou la modernisation de quelques partitions authentiques de la musique traditionnelle Bidhane… sans pour autant réussir à faire la paix avec les Marabouts qui sont les véritables censeurs de cette société.
Le deuxième impératif découle du premier, celui de faire remarquer à chacun, au moins à mes lecteurs, combien nous sommes réfractaires aux changements, combien la mentalité, la pensée dominante est résistante… Trois siècles (ou plus, en tout cas au moins) n’auront pas suffi à faire accepter le griot comme élément fédérateur de la conscience commune.
Il est le détenteur de la Mémoire collective, le gardien de l’Histoire du groupe mais on lui refuse le statut d’historien ou même de généalogiste. Il est le facilitateur social le plus apte à réunir autour de lui des générations, hommes et femmes, jeunes et moins jeunes, pour perpétuer en eux ce qui distingue cette société : sa langue, sa poésie, sa musique… Une séance de musique traditionnelle est un moment social et culturel de haut niveau…
…Malgré tout cela (et le reste), nous n’arrivons pas à les célébrer… Rappelez-vous dans quel silence assourdissant sont partis Mokhtar Ould Meydah, Sid’Ahmed el Bekaye Ould Awa, sa sœur Fatma… Regardez dans quelles conditions vivent le peu qui reste des plus authentiques parmi eux…
Me reste cette question : pourquoi la société Bidhane a décidé de faire la guerre à sa culture, à ceux qui l’incarnent ?

jeudi 27 juin 2013

Front anti-Mamère

La visite de l’ancien juge antiterroriste, Jean-Louis Bruguière entre certainement dans le cadre de la préparation du procès en diffamation intenté au député Noël Mamère qui avait accusé le Président Ould Abdel Aziz d’être un parrain de la drogue. On se souvient du passage, il y a quelques semaines, d’un groupe de parlementaires français qui étaient, eux aussi, venus en quelque sorte apporter un soutien à la victime des propos inconsidérés du député européen.
Même s’il a tempéré ses propos en disant qu’il a parlé du Président mauritanien comme il aurait parlé de n’importe quel autre Président africain, le député n’a pas encore accepté de présenter des excuses franches et sans appel. Alors que ses propos étaient diffamatoires et dangereux pour la stabilité du pays et pour sa cohésion. D’ailleurs, ils ont alimenté la polémique politique intérieure donnant un argument à une opposition qui se relevait difficilement des effets du «tir ami» sur le Président Ould Abdel Aziz.
Dès qu’une «affaire» est consommée, en apparait une autre qui enflamme les esprits, donne espoir aux détracteurs du régime qu’il s’agit là de l’occasion rêvée de le faire basculer et occasionne rumeurs et intoxications. Pour finir en «pschitt». La «balle amie», les propos de Mamère sur l’implication du Président de la République dans le trafic de drogue, le «Ghana gate» ou «Accra-gate», cela dépend de qui parle et de quand est-ce qu’il parle, en passant par la relation du Président avec les affaires (Hondon, les nouvelles banques, les nouveaux riches, les cousins…)… tout y fut… nous y reviendrons certainement.
L’ancien Juge Bruguière a été reçu par le Président de la République. Cité par les agences à sa sortie d’audience, il a qualifié de "calomnieux et diffamatoires" les propos "tenus en Europe" dans le but de "nuire à la stabilité du pays considéré, à ses institutions et à son président et à la relation bilatérale entre la Mauritanie et l’Union européenne". Et de préciser que "tous ces propos ne sont pas fondés" et ont été tenus "dans une vision assez partisane et idéologique".
"Les éléments que j’ai pu accumuler dans le cadre de mes activités vont à l’encontre de ces accusations calomnieuses", a dit le juge Bruguière. Et de souligner : "en tant que juge, je suis le premier à dénoncer des excès comme tout un chacun ; par contre, je ne peux que m’insurger lorsqu’il y a, à des fins pauliciennes, partisanes ou idéologiques, des propos calomniateurs infondés".
Il a par ailleurs salué "l’action résolue menée activement par la Mauritanie à la fois contre les réseaux" d’Al Qaida au Maghreb islamique (AQMI) et la "criminalité organisée qui y est associée" voire même "indissociable", qu’il s’agisse de la lutte contre les réseaux de stupéfiants et de tous les trafics dans la région ou des enlèvements de ressortissants étrangers contre des rançons.
"J’observe que la Mauritanie a une vraie stratégie de lutte contre le terrorisme dans un environnement qui est incontestablement fragile", a expliqué Jean-Louis Bruguière qui a considéré que même si la sécurité est revenue et que la zone du Nord Mali est pacifiée, tout reste à solidifier.
L’ancien juge français a estimé que "dans cet ensemble fragile, la Mauritanie constitue un pôle majeur et important de résistance, de résilience et de bonne gouvernance où la sécurité a été restaurée et des efforts considérables de développement" ont été déployés.

Et d’ajouter : "comme observateur relativement éclairé, avec une certaine expérience, et ami de la Mauritanie, je vois que ce pays joue et continue à jouer un rôle important dans l’équilibre régional et la relation" entre la Méditerranée, la zone sahélo-saharienne et l’Europe.

mercredi 26 juin 2013

Cissé Mint Boyde victime ?

L’affaire dont on ne sait encore ni les tenants ni les aboutissants a pris une dimension politique avec le limogeage de Cissé Mint Boyde jusque-là ministre de la culture et des sports. Rappel.
Depuis 72 heures, le microcosme nouakchottois est pris de frénésie suite à l’arrestation de trois personnes qui sont : le mari de la ministre, un jeune officier de la Marine, le président de la Commission des marchés du département de la culture et un entrepreneur, directeur d’une société qui avait bénéficié du marché de la construction du stade de Nouadhibou. Tout le monde a lié ces interpellations à ce marché et à son processus. Et chaque jour qui passe nous permet d’en savoir un peu plus, surtout que l’affaire a pris cette ampleur politique qui a conduit au limogeage d’un membre du gouvernement.
En mars dernier, la ministre de la culture aurait été avertie par le président de la fédération nationale de foot que le marché de construction du stade de Nouadhibou a été octroyé à une société qui a produit de faux documents. Elle écrit au Premier ministère pour signaler la fraude et demander l’enclenchement d’une procédure d’annulation. Naturellement, c’est le ministère de l’urbanisme qui est saisi par le cabinet. Lui-même demande à l’autorité compétente en la matière, l’Autorité de régulation des marchés, de faire le nécessaire. Tout ça se déroule en avril-mai. Et dans les règles.
Dans une première étape, l’Autorité se contente d’exiger les originaux des documents présentés par la société pour répondre à la problématique de l’expérience «spécifique», celle qui a été réalisée dans le domaine du marché. Pour répondre à cette exigence, la société avait fait appel à une entreprise sénégalaise qui a produit photos et certificats de construction de différents stades dans la région. Le concurrent immédiat avait réussi à avoir les preuves qu’il s’agissait de faux documents et avait donc porté plainte. D’abord de façon informel, ensuite formel en suivant les procédures.
D’étape à étape, on arrive enfin à l’annulation du marché. Un marché qui, je vous l’ai dit dans le posting précédent, relève du ministère de l’urbanisme et est octroyé par la commission des marchés couvrant «les infrastructures». Un marché dont le rejet a été provoqué par une lettre du secrétaire général du ministère de l’urbanisme. Donc rien à voir avec la culture et les sports.
Pourtant, dès les premières interpellations, c’est bien la ministre de la culture et des sports qui est visée. Puis, c’est elle qui écope de la sentence la plus extrême : le limogeage. Si les prisonniers doivent (et peuvent) s’expliquer devant les enquêteurs, Cissé Mint Boyde n’a fait l’objet d’aucune enquête, d’aucune sollicitation pour comprendre… et d’ailleurs comprend-on ce qui lui arrive ? sait-on seulement la réalité de ce qu’on lui reproche ?
Ce ne peut être la question du marché de Nouadhibou, parce qu’elle n’a rien à voir là-dedans et parce qu’elle est la première à avoir soulevé l’anomalie. On ne peut non plus croire que des entrepreneurs mauritaniens soient assez naïfs pour tenter de corrompre quelqu’un qui n’a pas autorité en matière d’octroi du marché : Cissé Mint Boyde n’est ni le ministre de l’urbanisme, ni la commission des infrastructures, encore moins l’Autorité de régulation qui a mission de contrôler la régularité de l’adjucation. Par ailleurs, si le marché de construction du stade de Nouadhibou est réellement l’objet de l’affaire, pourquoi l’enquête n’a pas touché l’un des responsables du processus suivi par le marché ?

Conclusion : soit il y a autre chose que les autorités doivent devoir expliquer maintenant que l’affaire a pris une tournure politique, soit il n’y a rien du tout… en tout cas la version servie jusqu’à présent par les média – les mêmes finalement qui nous imposent la culture de la rumeur -, cette version manque de sérieux pour convaincre.

mardi 25 juin 2013

Le début d’une affaire

Trois hommes ont été arrêtés ces dernières 24 heures. Selon les premières informations publiées par la presse électronique, les trois hommes seraient impliqués dans une affaire de marché de construction du stade de Nouadhibou. Mais tout ce qu’on peut lire aujourd’hui sur l’affaire est imprécis et peu crédible.
Le projet de construction du stade relève de l’autorité du ministère de l’urbanisme et non de la culture que toutes les analyses voudraient incriminer. Le marché a été octroyé par la commission traitant des marchés des infrastructures et non celle de l’administration de la culture dont le président fait partie des personnes interpellées. Cette adjucation a été rejetée par l’Autorité de régulation des marchés suite à une plainte déposée par un concurrent qui aurait apporté les preuves de l’usage de faux par la société qui a gagné le marché.
A part l’entrepreneur qui serait directeur exécutif de l’entreprise ayant obtenu le marché, les deux autres n’ont donc rien à voir avec le marché. Alors quoi ?
On ne sait pas. L’enquête est diligentée par la Gendarmerie et semble ne souffrir d’aucune fuite. Mais l’on sait que si le sujet est bien le projet de construction du stade de Nouadhibou, ceux qui ont été arrêtés n’ont a priori rien à voir avec le dossier. De quoi pourrait-il s’agir alors ? Même réponse : on ne sait pas, les autorités ne voulant pas communiquer là-dessus.
Depuis des décennies, toutes les affaires commencent comme ça : une interpellation surprise, un manque de communication qui ouvre la voie à toutes les spéculations y compris les plus saugrenues, une multitude de versions qui alimentent la curiosité ainsi excitée de l’opinion, les unes servant toujours à régler des comptes aux ennemis de leurs commanditaires…
En attendant d’en savoir plus, je vous raconte cette anecdote de chez moi.
C’est un Deymani connu pour ses répliques tranchantes et justes. Notre homme se promenait aux alentours du campement - cette «sortie» nécessaire au milieu de la matinée aux hommes et femmes du campement qui se soustraient un moment aux regards indiscrets pour redevenir ce qu’ils sont, des êtres humains.
Il fut surpris par un fou bien connu des habitants de la région. Malgré son air méchant, sa force et ses gestes violents, ce fou est inoffensif. Tout le monde le sait, mais personne ne peut s’en convaincre totalement, sait-on jamais ?

Le fou portait un grand sac et peu d’habits (pour ne pas dire aucun, nous sommes en terre iguidienne, là où l’on dit les vérités à demi). Il s’adressa à notre ami en l’appelant par son prénom et lui dit : «Peux-tu me dire ce qu’il y a dans ce sac…» Et sans attendre la réponse, il déballa le sac pour laisser tomber la tête d’un âne qu’il avait récupérée sur un cadavre non loin de là. Quand cessa le ricanement agaçant du fou, le sage Deymani lui répondit : «…hadha raaç akhbaar ba’d». Littéralement : «ceci est la tête d’une histoire», mais comprendre : «ceci est le début d’une affaire»…

lundi 24 juin 2013

L’ombre des Chinois

Le Président de la République est à Nouadhibou. Toute la journée sera consacrée au lancement de la Zone Franche et à la mise en place de l’Autorité qui en prend gestion. Avec aussi des inaugurations à la SNIM qui vont se poursuivre au cours du deuxième jour de la visite.
Nous aurons remarqué au cours de cette première journée, que le Président de la République n’ira pas et n’évoquera pas ce qui, en son temps, a été présenté comme LE projet «alternatif» pour le secteur de la pêche. Des options de coopération qui permettaient à la Mauritanie d’envisager la possibilité pour elle d’avoir le plus : des constructions à terre, une industrie, un transfert de savoir-faire technologique, beaucoup plus d’emplois et surtout moins d’efforts sur sa ressource.
Le projet chinois de Polyhondon a occasionné de réelles tempêtes dont la moindre est celle qui a fait dire aux détracteurs du régime qu’il s’agissait d’une affaire dans laquelle le Président Ould Abdel Aziz serait lui-même partie prenante. On a vu depuis, que quand la mise en œuvre de la Convention s’est avérée injuste pour la Mauritanie, les autorités n’ont pas hésité à aller jusqu’à menacer de la remettre en cause si certaines corrections ne sont pas apportées. Ce fut fait.
Mais que le projet qui occupe une bonne partie de la superficie de l’espace portuaire n’intéresse pas au moment où l’on célèbre en grande pompe les perspectives de développement de la ville de Nouadhibou, c’est pour le moins curieux.
Dans tout ce qu’on a vu d’ici, rien n’indique non plus que les populations soient dérangées par cette poussière produite par les usines de farine de poisson, le (ou la) «Moka». Il s’agit de ces usines démantelées au Maroc et ayant trouvé refuge chez nous. Avec une quarantaine d’autorisations dont une dizaine déjà opérationnelles, c’est une véritable menace qui menace l’environnement et la ressource.
L’environnement est empesté par les odeurs pestilentielles que les usines dégagent, mais aussi par les déchets qu’elles produisent. Tandis que ce qui est transformé est, non pas les déchets et restes comme ailleurs, mais le poisson en entier, une partie de ce qui pourrait servir dans la sécurité alimentaire des populations.

Aucune pancarte, aucun slogan, aucun groupe d’individus, personne n’a posé le problème. Pourtant il y a là ceux qui demandent la libération des prisonniers de Guantanamo au nom des habitants de Nouadhibou, certains qui exigeaient le renvoi de l’Ambassadeur syrien… mais pas les usines de farine de poisson…

dimanche 23 juin 2013

Les «médians» manifestent

C’est suite à l’appel de plusieurs partis organisés dans une coalition qu’on appelle désormais «AP/CAP» (AP pour Alliance patriotique comprenant Adil, MPR et RD ; et CAP pour Coalition pour une alternance pacifique de APP, Wiam et Sawab), que des milliers de manifestants ont convergé cette après-midi vers la place Ibn Abbass… Assez de gens pour galvaniser les orateurs dont les discours tournaient autour de la nécessité de faire converger Opposition et Pouvoir vers une table de négociations pour assurer des élections apaisées.
Le dessein est noble et indiscutable : tout ce qui vise à ramener à la Raison et qui peut redresser les torts des politiques, toutes tendances confondues, est le bienvenu. Mais il y a comme une gêne dans ce que nous voyons et entendons.
Tout tourne autour de l’initiative du Président de l’Assemblée nationale, Messaoud Ould Boulkheir, président aussi de l’APP. Une initiative qui a été lancée il y a un an, un peu plus si l’on prend comme date de départ sa sortie médiatique de mars 2012 dans laquelle il exposait son idée de faire rencontrer les principaux protagonistes. C’était au lendemain de la conclusion officielle, quelques semaines avant, du dialogue entre une partie de l’Opposition dont son parti et la Majorité au pouvoir. Lui-même a été le maître d’œuvre de ce dialogue, et interface dans sa première saison, celle qui englobait toute la Coordination de l’Opposition Démocratique (COD).
En effet, depuis octobre 2010, c’est bien le Président Messaoud Ould Boulkheir qui faisait la navette entre le Président de la République et sa Majorité et les leaders de la COD. C’est bien le constat d’échec quant à la possibilité de les faire converger qui l’a amené, lui et ceux qui l’ont accepté (Boydiel Ould Hoummoid du Wiam et Abdessalam Ould Horma de Sawab), à abandonner leurs compagnons et à ouvrir un dialogue qui aura duré le temps qu’il faut pour arriver à un accord annoncé solennellement et dont toutes les conclusions ont fait objet de mise en œuvre, de l’aveu même de Ould Boulkheir.
Il ne s’agit pas aujourd’hui de savoir qui a trainé dans le processus de dialogue politique, qui est responsable de l’exclusion – en fait de la marginalisation, il peut s’agir d’une auto-exclusion – d’une partie de la COD, encore moins s’il y a lieu d’ouvrir un nouveau dialogue… La grande question qui demande réponse est celle-là : pourquoi tout ce temps n’a pas suffi à savoir si cette initiative est réellement «une proposition de sortie de crise» (de quelle crise d’ailleurs ?) ou d’une manœuvre politicienne visant à faire perdre le temps à tout le monde… Car n’oublions pas que la seule échéance qui vaille est celle des futures élections vers laquelle nous avançons inexorablement.
Nous savons, grâce à la CENI mise en place par les partis de la Majorité et ceux de la Coalition (AP/CAP), que les élections législatives et municipales doivent se tenir dans la fourchette entre le 15 septembre et le 15 octobre prochains. La CENI vient de signer avec l’Office national des statistiques (ONS) un accord en vue de l’organisation d’un recensement à vocation électoral qui doit être lancé dans les délais légaux. Toute l’opération électorale relève désormais de la compétence – et uniquement de la compétence – de la CENI. Et c’est le lieu ici de se demander à quoi sert un gouvernement d’union nationale. Surtout que les expériences, ici et ailleurs, nous indiquent qu’une telle démarche de consensus met la démocratie en danger sans assurer la bonne marche des choses.

Nous avons ici souvenance de ce qu’il est advenu au lendemain de la dissolution du gouvernement d’union nationale chargé d’organiser la présidentielle de juillet 2009 : le refus de reconnaitre les résultats pour la plupart des acteurs, de tous à continuer dans le même esprit de convergence. Les inimitiés politiques relèvent ici plus du ressentiment personnel que du positionnement idéologique ou de la vision de propositions pour l’avenir. D’où le sentiment que tous les acteurs s’accrochent au seul aspect «gouvernement d’union» de l’initiative de Ould Boulkheir. Un peu si le souci était de ne pas rester à l’écart, d’être impliqué dans la gestion des affaires publiques… C’est légitime quand on n’a jamais fait que s’acoquiner avec les pouvoirs en place. Ce qui est le cas de la majorité de ceux qu’on entend et voit le plus.

samedi 22 juin 2013

Affaire(s) Tapie(s)

La France est aujourd’hui secouée par une nouvelle «affaire Tapie», du nom de cet homme politique, homme d’affaires… qui n’a jamais su apparemment faire la différence entre les deux statuts. Pour comprendre de quoi il s’agit, je vous propose le résumé dans Wikipédia :
«Fin 1992, Bernard Tapie devenu ministre souhaite vendre Adidas pour éviter tout conflit d'intérêt comme le réclame François Mitterrand. Il confie un mandat de vente à la Société de Banque Occidentale (SdBO), une filiale du Crédit lyonnais. Le Crédit lyonnais vend Adidas pour le compte de Bernard Tapie en février 1993, au prix minimal fixé par Bernard Tapie de deux milliards et quatre-vingt cinq millions de francs (472 millions d'euros d'aujourd'hui après actualisation). Bernard Tapie ne conteste pas la vente.
Mais Bernard Tapie est mis en faillite par le Crédit lyonnais un an plus tard, en mars 1994, le Crédit lyonnais cassant le mémorandum signé avec Bernard Tapie qui prévoyait la vente progressive de toutes ses autres affaires afin de rembourser sa dette restante et de constituer, avec le Crédit lyonnais, un fonds d'investissement commun. Ruiné et ainsi rendu inéligible, Bernard Tapie s'intéresse de près à la vente d'Adidas réalisée pour son compte par le Crédit lyonnais. Il découvre que le Crédit lyonnais a effectué un montage opaque par lequel la banque a revendu Adidas à deux sociétés offshore qu'elle contrôle avec une option de revente à Robert Louis-Dreyfus lui permettant d'engranger une plus-value de 2,6 milliards de francs (396 millions d'euros).
Bernard Tapie estime que le Crédit lyonnais l'a berné en effectuant ce montage opaque, qui a permis à la banque de violer son obligation de loyauté et son obligation de neutralité lors de la vente, et ainsi d'empocher les près de 400 millions d'euros qui auraient dû lui revenir. Mais il ne peut pas attaquer le Crédit lyonnais car du fait de sa mise en liquidation par la banque, il n'est plus le propriétaire de BT Finance, la société qui possédait Adidas, qui est la société lésée dans l'opération, et dont les titres appartiennent désormais en quasi totalité au Crédit lyonnais (qui ne va donc évidemment pas porter plainte contre lui-même). Ce n'est donc pas Bernard Tapie mais le mandataire liquidateur de Bernard Tapie Finance et ses petits porteurs (les particuliers qui avaient conservé des actions BT Finance achetées en Bourse des années auparavant) qui vont entamer les procédures judiciaires qui vont durer quinze ans.
Bernard Tapie obtient de pouvoir se joindre à la plainte, et après plusieurs jugements favorables obtient le 11 juillet 2008, par la décision d'un tribunal arbitral, la somme de 403 millions d'euros (243 millions d'euros de dommages, 115 millions d'euros d'intérêts, et45 millions d'euros de préjudice moral). Les conditions de recours à cette sentence arbitrale ont été très controversées au niveau politique et ont fait l'objet de plusieurs recours en annulation devant les juridictions administratives. Tous ces recours devant les juridictions administratives ont été rejetés.
Par ailleurs, une instruction de la Cour de justice de la République, compétente pour juger les ministres, a été lancée à l'encontre de Christine Lagarde pour établir si elle avait commis d'éventuelles infractions pénales. Celle-ci est auditionnée pendant vingt-quatre heures les 23 et 24 mai 2013, et placée sous le statut de témoin assisté le 24 mai 2013.
Dans un autre volet pénal non ministériel de cette affaire, Pierre Estoup, l'un des trois juges du tribunal arbitral est mis en examen pour «escroquerie en bande organisée».
Fin mai 2013, Pierre Moscovici, ministre des Finances du gouvernement socialiste, affirme qu'il envisage la révision de l'arbitrage de 2008.»
Imaginons un moment que des enquêtes pareilles soient diligentées en Mauritanie… Des banques, des assurances, des sociétés publiques bradées sans scrupules, des projets détournés, des propriétés (meubles et immeubles) publiques cédées, des licences de pêches, des agréments en douanes, en justice… toute une ère de vandalisme organisé sera mis à nu.
Nous saurons alors que les politiques les plus en vue ne sont que des prédateurs de la chose publique, que les hommes d’affaires les plus «respectés» des corrupteurs en force, que les journalistes les plus moralisateurs, les dignitaires les plus «nobles», et même les religieux les plus «détachés»… que tous sont des receleurs consentants. Ce qui aggrave leurs cas.

Et c’est bien pourquoi le procès de la gestion du passé n’a jamais été une demande sociale (ou politique) séreuse. Parce que des affaires Tapie, il y en a ici, et de bien plus dangereuses (et plus flagrantes)… laissons-les…tapies… le seul «consensus national» est autour de la question. Jusqu’à quand ?

vendredi 21 juin 2013

La fête de la musique

La date du 21 juin, tout le monde le sait, coïncide avec le solstice d’été, un peu le début de l’été boréal. L’une des raisons qui ont poussé à la choisir comme «fête de la musique». C’est au lendemain de l’arrivée de la Gauche française au pouvoir, avec la présidence de François Mitterrand, que ce jour est consacré à célébrer la musique en général. La première fête est donnée en 1982… En quelques deux décennies, la fête devient «internationale» : elle est célébrée dans 110 pays et près de 350 villes sur les cinq continents. Parmi ces pays, la Mauritanie qui l’a adoptée à la fin des années 80. Mais en quoi consiste la fête en Mauritanie ?
Elle est restée un fait français parce qu’elle principalement fêtée par le Centre culturel français (aujourd’hui Institut français en Mauritanie) qui permet, tout un soir, à des artistes mauritaniens, parfois étrangers, de se produire sur une scène entièrement dédiée à la fête, devant un grand public de mélomanes. Elle est devenue un rendez-vous de la jeunesse nouakchottoise en mal de fête et de d’occasions de s’exploser. Il y a eu bien sûr quelques tentatives d’impliquer la partie mauritanienne pour l’amener à s’approprier l’évènement, mais des tentatives sans lendemains. La politique et la mauvaise foi (parfois) sont passés par là.
A un moment donné, on a cherché, toujours sous l’impulsion de la coopération culturelle française, à instituer un festival des arts nomades qui est aujourd’hui oublié. Malheureusement.
Tout ce qui est festif semble subir une guerre sans merci dans ce pays. On comprend que les politiques se soucient peu du secteur de la culture : ils ne pensent pas qu’il rapporte en termes de voix et de mobilisation au cours des élections… certains vont même jusqu’à percevoir la musique comme une hérésie, un sous-produit d’un folklore qu’il faut combattre. Tous se retrouvent finalement pour imposer cette attitude dominante dans tout ce qui est institutionnel : le mépris de l’art et de ceux qui le pratiquent.
«Chaque fois que les rythmes de la musique changent, les murs de la ville tremblent», je ne sais pas si la citation est correcte dans sa formulation, mais c’est le sens qui importe. Pour dire la peur des nôtres de tout ce qui bouleverser l’ordre établi, tout ce qui peut susciter les questionnements, tout ce qui peut solliciter l’imaginaire et le libérer des carcans qu’on lui impose…
J’ai lu récemment le cri de cœur de Tahra Mint Hembara, une artiste complète qui a su marier le jeu authentique de l’Ardîne avec les rythmes modernes, accompagnant les plus grands noms comme Jean-Jacques Goldman. Ce cri de cœur qui dénonçait l’état dans lequel se trouve l’Institut national de musiques, une création de l’actuel pouvoir qui l’avait présenté – à juste titre d’ailleurs – comme étant une manière de couper avec la suspicion et le mépris de la musique. Suspicion et mépris qui ont caractérisé le rapport (officiel) à la musique. Mint Hembara a voulu, dans son interpellation de l’opinion publique nationale, mettre à nu la mise à mort lente et certaine de cet Institut qui ne semble pas pouvoir remplir la mission qui est la sienne. Chez nous, ces histoires se terminent mal à cause des acteurs qu’on leur choisit…
Pour revenir à cette fête de la musique, comment amener les groupes des jeunes à se l’approprier pour en faire une fête véritablement «mauritanienne» ? Il s’agira tout simplement d’ouvrir l’évènement à la frange traditionnelle (ou ce qui en reste) pour permettre l’ancrage des nouvelles créations dans ce qui nous a pétris et qui a été – qui est encore – notre âme. Imaginons plusieurs fêtes, dans différents centres de la ville de Nouakchott (ou dans des villes de l’intérieur) avec, ici, les modernes, là les traditionnels, ailleurs les «tradi-modernes» (comme on dit de ceux qui sont passés de l’un à l’autre ou qui essayent de combiner l’un et l’autre)… Le public sera certainement plus nombreux à participer à la fête qui sera totale… peut-être qu’elle participera alors à briser ce carcan totalitaire qui se nourrit de l’obscurantiste et qui tente de nous envelopper pour étouffer en nous ce qu’il y a de beau et de mieux : la créativité.
Et de rappeler cette sentence d’un ami, un peu fou, un peu génie (quelle différence entre les deux et qui percevoir cette différence ?) : «La Mauritanie, notre pays, souffre d’un recule de la joie qui la plonge dans toutes les incertitudes lui faisant courir tous les risques». Et si le salut venait de la réhabilitation de nos sens festifs, de notre désir d’espace et de liberté, de poésie et de musique… ?

jeudi 20 juin 2013

Traduire «Le petit prince»

Certains diront : «une traduction de plus» du «Petit Prince» de Saint-Exupéry. D’autres diront : «enfin une traduction du Petit prince !». Et tous auront tort de marquer leur surprise. Les premiers devraient se rappeler qu’il s’agit là d’une œuvre dont la traduction est toujours un fait nouveau, un fait qui mérite l’attention ; les seconds, que cette œuvre, vendue à 135 millions d’exemplaires, a été traduite en 220 langues et dialectes. Ce qui en fait un véritable phénomène de l’édition. Mais c’est surtout ce qui en fait l’œuvre majeure de l’écrivain Antoine de Saint-Exupéry. Si ce n’est de la littérature française.
Alors pourquoi cette traduction (de plus) ? et pourquoi notre compatriote Mohamed Vall Ould Abdel Latif a-t-il décidé de traduire une œuvre qui n’est pas forcément la plus connue chez nous de ce qui a été écrit par Antoine de Saint-Exupéry ?
Nous connaissons mieux «Terre des hommes» qui a été l’une des appellations de la Mauritanie, ou «Vol de nuit» qui a fait partie des classiques inscrits dans les programmes scolaires des lycées et collèges du pays. Mais Mohamed Vall Ould Abdel Latif a choisi «Le Petit prince»… une façon de rendre hommage à ce conte d’enfants devenu livre de chevet des adultes.
La rigueur et l’austérité de l’administrateur auraient pu empêcher Ould Abdel Latif d’avoir le temps d’apprécier et de pratiquer tout ce qui ne parait pas utile aux gens d’aujourd’hui, tout ce qui n’est pas «nourriture terrestre» et qui n’intervient pas dans la croissance physique de l’individu (et de la communauté).
C’est oublier que Mohamed Vall Ould Abdel Latif est le produit d’une culture ancrée dans la tradition qui a fait de l’héritage gréco-romain l’un de ses fondements. Avec la promotion de l’abstrait et l’enseignement d’une philosophie de soi qui donne plus d’autonomie de pensée à l’individu et lui permet l’utilisation de l’intelligence pour se faire une idée du monde et des interprétations que les autres en font.
C’est ici qu’il faut probablement chercher cette propension à se jouer des mots pour les immortaliser dans des formules qui prennent immédiatement – dès qu’elles sont prononcées – l’allure de sagesses éternelles. C’est ici aussi qu’il faut trouver une des explications à ce qui fait qu’en chacun de ce milieu vit un exégète, un grammairien, un homme de sciences, un mathématicien, un astronome… et bien sûr un poète.  
Mohamed Vall Ould Abdel Latif incarne parfaitement le milieu dont il est issu. Il est une perle, même s’il est une perle parmi d’autres, il reste la plus scintillante de toutes. Dans ce milieu où la fulgurance est cultivée au quotidien, la célébration de la belle œuvre – d’où qu’elle vienne – est une attitude normale.
Il y a deux, trois ans que cet écrivain – on peut dire sociologue, historien, grammairien, poète, journaliste… -, que cet écrivain m’a présenté sa traduction du «Petit prince». Je paraphrase André Gide en disant qu’on se saura jamais les efforts qu’il nous faut faire aujourd’hui pour nous intéresser à la culture, à la culture de l’intelligence, «mais maintenant qu’elle nous intéresse, ce sera comme toute chose – passionnément».
Il s’agit de la traduction à partir du Français vers l’Arabe, deux langues que Ould Abdel Latif maitrise parfaitement. Et parce qu’il maitrise ces deux langues, et parce qu’il apprécie et savoure toutes les facettes de l’écrit, il a réussi une traduction qui n’a pas d’égal dans tout ce que j’ai pu lire depuis.

Et comme dit le héros du conte : «C’est véritablement utile puisque c’est joli».

mercredi 19 juin 2013

La victoire de l’Iran

A voir les commentaires diffusés çà et là dans les media occidentaux et arabes, on ne peut s’empêcher d’esquisser un sourire ironique. Personne ne semble accepter qu’en Iran, l’alternance par les urnes est aussi possible, surtout qu’elle amène au pouvoir un «modéré». Personnellement je ne sais pas ce que «modéré» peut vouloir dire dans le pays des Ayatollahs, mais à partir des commentaires, j’ai cru comprendre qu’il s’agit d’un homme moderne qui pourrait avoir une ouverture sur le reste du monde, notamment occidental. Même si avoir ces prédispositions ne signifie pas nécessairement être un «homme moderne», c’est quand même bien que ce pays ne soit pas dirigé par un guerrier toujours prêt à tenir les propos les plus extrêmes pour satisfaire on ne sait quel relent de violence.
Les «puissances arabes» ne doivent pas apprécier l’issue heureuse de cette élection présidentielle. Dans son environnement géographique arabe, aucun des pays n’a connu une pareille évolution. Même pas en Irak où les Américains sont venus imposer la démocratie… même ici, c’est une oligarchie Chiite qui règne en maître absolu, commanditant assassinats politiques et confessionnels, pillant les ressources, cultivant la haine… Des monarchies, ne parlons pas.
Peu de lumières ont été braqués donc sur l’évènement qui va pourtant bouleverser les cartes de la région.
Tout, absolument tout, s’est construit ces dernières années sur l’opposition à l’Iran nucléaire et guerrière de Mahmoud Ahmadinejad. Les alliances entre certaines monarchies et les Occidentaux, le soutien aux rébellions et aux groupes armés, y compris ceux qui sont proches d’Al Qaeda, les regroupements régionaux…
Dans ce jeu d’influence, les monarchies du Golfe se proposaient – se proposent toujours – d’étouffer l’Iran en attendant l’assaut final que les Etats-Unis et Israël voulaient – veulent encore – entreprendre contre ce pays. En attendant, le théâtre où s’affrontent les protagonistes est celui qui se passe en Syrie.
Avec l’entrée en jeu du Hezbollah libanais du côté du pouvoir et de l’armée régulière, on s’est vite acheminé vers une confrontation entre les véritables belligérants de la zone du Moyen-Orient : Israël et l’Iran. On a vu que les bombardements israéliens répétés contre la Syrie ont eu pour prétexte de prétendues armes qui pourraient être utilisées contre Israël à partir du Sud Liban. En fait le seul «ennemi» que l’Etat hébreux craint et pour lequel il a de la considération, est bien le Hezbollah. Tout affaiblissement du mouvement chiite sert Israël d’abord, ses alliés ensuite.
On est mal à l’aise en Occident et dans le Monde arabe quand on parle de cette élection qui a permis le passage de Hassan Rohani, le plus «modéré» des candidats, le moins attendu visiblement… pour qui ? Seulement pour ceux qui construisaient une image de l’Iran, une image négative d’un pays qui sombre sous la dictature et dont les biens servent à soutenir les économies occidentales par des investissements aussi faramineux qu’inutiles (achat de clubs de football, construction d’immeubles dans les grandes métropoles européennes, acquisition d’îles touristiques, de yachts, de casinos, de harems… dans un pays comme celui qui nous est décrit quotidiennement, on ne peut parler de démocratie, ni d’élection libre et transparente. Même si cela arrive. 

mardi 18 juin 2013

L’Ouguiya célébrée

C’est aujourd’hui que la Banque Centrale de Mauritanie (BCM) a choisi de célébrer les quarante de son existence… un anniversaire qui se confond avec celui de l’Ouguiya, notre monnaie nationale. C’est en mai 1973, alors que le pays vit une sécheresse dont les effets sont catastrophiques sur l’environnement et sur la richesse animale, que la Mauritanie lance sa monnaie nationale : l’Ouguiya qui remplace le Franc CFA.
Le gouvernement de feu Moktar Ould Daddah accomplissait ainsi le troisième objectif de son programme qui vise à faire jouir le pays de l’indépendance politique (avec la révision des accords avec la France), de l’indépendance culturelle (avec l’arabisation du système éducatif) etde l’indépendance  économique (avec la nationalisation des richesses minières et la création de la monnaie nationale). C’était aux temps où les bêtes parlaient… aux temps où les élites avaient des visions qui les orientaient, des objectifs qu’ils voulaient atteindre et une saine lecture du devenir commun.
Comme tout le reste, l’ouguiya commença à se dégrader avec l’économie dans les années 90. La guerre du Sahara, et surtout le cumul des gestions catastrophiques des périodes 1978-80, 1980-84 et 1984-2005, tout cela va entrainer une dépréciation générale du pays, de son économie, de ses hommes… dévaluation, dépréciation, glissement… des mots pour dire une descente aux enfers pour une économie, un pays, un peuple… de «pays en voie de développement», à «pays (d)es moins avancés», à «pays pauvre», à «pays pauvre très endetté»…
Pour éviter de devoir faire l’historique d’un parcours chaotique, je choisis de me contenter du rappel suivant.
C’est en octobre 1992 que la monnaie connait sa première dévaluation officielle : elle perd 42% de sa valeur face au dollar qui est la monnaie de référence ici. Je rappelle que c’est l’occasion de la plus grande arnaque à ciel ouvert dans le pays : les hommes d’affaires (privilégiés, déjà) obtiennent la possibilité d’amasser le maximum de fonds qu’ils se font transférer aux anciens taux. Il leur suffira de remettre les devises sur le marché pour faire les bénéfices les plus faramineux, du jamais vu en Mauritanie.
Depuis cette date, la BCM est devenue l’une des plateformes du «thieb-thiib» officiel. Avec le ministère des finances (parfois du plan devenu «affaires économiques») et le Cabinet présidentiel, la BCM finit par former ce que l’on a appelé à l’époque «le triangle des Bermudes de l’économie mauritanienne». Pour ce qu’il engloutit de fonds noirs (et blancs) destinés à entretenir des renseignements toujours plus gourmands et une clientèle boulimique. Il n’y a pas que les passe-droits et les traitements privilégiés, il y a aussi les délits d’initié, les virements de fonds pour compenser les efforts de tel ou tel groupe dans une campagne électorale, l’octroi des agréments pour de nouvelles banques, le traitement de faveur pour certaines d’entre elles… tout ce qui a fait la gouvernance qui a détruit l’économie du pays toutes ces années. Et sa crédibilité. Parce qu’avec les faux chiffres produits par la BCM (et certains de ses cadres qui vont devenir les sorciers de l’étape), le pays entame un bras de fer avec les institutions financières internationales qui finissent par lui imposer leur diktat.
Il faudra attendre l’arrivée à la tête de la BCM d’un jeune cadre formé à la représentation de la Banque Mondiale pour voir un début de redressement. Avec notamment la reconnaissance de l’usage de faux et l’engagement d’une politique d’assainissement du secteur. Heureusement pour Zeine Ould Zeidane que le coup d’Etat du 3 août 2005 réussit. Il peut alors bénéficier d’un soutien politique franc. Mais il est emporté par la politique. Le processus de réhabilitation était quand même lancé.
Il fallait autonomiser la BCM et son gouverneur, réhabiliter son rôle dans le contrôle bancaire, stabiliser la politique de change, renforcer son rôle de régulateur du marché financier… Sur le plan institutionnel, de réelles avancées ont été faites. Sur le plan pratique, il faut signaler (et souligner) la baisse considérable du taux d’intérêt dans le marché des bons du trésor (qui passe de 11-14% à 2,5-3%), l’existence d’une réserve d’un milliard de dollars pour couvrir les importations (on est loin des périodes où le pays ne pouvait assurer au-delà de quelques semaines), la disparition des fonds noirs, notamment des traitements de faveur dans la disponibilisation des devises…
Manque cependant quelque chose… quoi ? «khammm !!!»
En 2004, la politique dite «d’assèchement monétaire» semble comprise comme une panacée par la BCM qui s’en sert pour tout expliquer. Aux termes d’une mission du FMI, j’écrivais alors dans les colonnes de La Tribune : «La mission met cependant en demeure les autorités dont elle exige «le maintien d’une politique monétaire prudente». Dans le jargon consacré, il s’agit de l’approche dite «assèchement monétaire». Approche qui a été l’explication officielle des problèmes de liquidité survenus en 2002 et 2003.
Pour les économistes, on parle d’assèchement monétaire quand on a choisit de raréfier la monnaie. «Tout ce qui est rare est cher». Partant de ce principe on espère donner de la valeur à la monnaie nationale. Dans un pays où l’économie est fortement privatisée, cela se traduit par la hausse des taux d’intérêt : ceux qui ont l’argent le placent pour gagner plus, ceux qui n’en ont pas font peu d’emprunts. Du coup la masse monétaire en circulation diminue. Dans les économies où l’Etat est encore très présent, la procédure consiste à diminuer de façon drastique, les dépenses de l’Etat. Dans l’un comme dans l’autre cas, le résultat devra se traduire par une maîtrise des prix à l’intérieur et le contrôle de la valeur de la monnaie nationale face à la devise.
Dans le cas de la Mauritanie, l’erreur de la BCM à l’époque, est d’avoir rationné l’alimentation en liquidité des banques primaires. «Il n’a jamais été question d’encourager une politique visant à refuser à un opérateur la jouissance de ses avoirs». Notre interlocuteur fait allusion aux multiples cas de refus des banques d’honorer le versement de chèques émis sur des comptes pourtant provisionnés. C’est la période, heureusement dépassée aujourd’hui, où il fallait faire le pied de grue devant les comptoirs des banques primaires pour avoir son argent !
Cette situation est donc le fruit d’une lecture erronée d’un concept, celui de l’assèchement monétaire.»

Heureusement qu’il est loin ce temps où le pays devait faire appel aux méthodes les moins orthodoxes pour boucler ses programmes et, parfois, ses fins de mois.

lundi 17 juin 2013

Zone franche

Une semaine avant la visite du Président de la République qui sera l’occasion du lancement officiel de la Zone Franche de Nouadhibou, c’est le président de l’Autorité de la zone franche (AZF) qui a eu l’occasion de faire une présentation complète du projet à travers une émission diffusée en direct sur TVM à partir de Nouadhibou.
Ismaël Ould Bodde, centralien ayant été ministre de l’habitat et de l’urbanisme, a exposé les objectifs de l’Autorité dont : la création d’un environnement favorable au développement des affaires pour attirer les investisseurs et encourager le développement du secteur privé ; le développement des infrastructures de base dans la région (routes, aéroport, ports, énergie, hôtellerie…) ; création de nouvelles opportunités d’emploi… faire de Nouadhibou un pôle de compétitivité et un hub régional de classe internationale, en faire une locomotive de développement pour le reste du pays.
Des zones de développement seront créées autour d’activités prioritaires (pêche, mines, services…) auxquelles s’appliqueront des régimes particuliers (douanier, fiscal, foncier, social et de change). Pour alléger les procédures, un guichet unique est mis en place.
Le projet parait dans toutes ses dimensions socio-économiques et se révèle comme une entreprise structurante autour de laquelle une nouvelle dynamique peut être engagée. Il est un passage d’une économie basée sur l’exploitation des ressources naturelles existantes et leur exploitation vers un système beaucoup plus élaboré qui va créer de nouveaux tissus et de nouveaux réflexes. C’est pourquoi la question qui taraude les esprits est bien celle de savoir ce qu’offre l’AZF de plus que les régions ayant les mêmes vocations dans notre environnement immédiat. Il y a aussi la question de savoir si l’administration et la Justice vont suivre en termes de performances et de confiance. Enfin restera la question de la main d’œuvre qualifiée qui reste à former. Le tout étant d’assurer que le coût économique (aménagements nécessaires pour développer les infrastructures, notamment) et politique (abandon d’une partie de la souveraineté ou presque) à payer en vaut la peine. Sans hésiter, le président de l’AZF répond «oui». On va voir…
En attendant, l’Autorité doit compter avec les recrutements abusifs et les nominations inopportunes. Une vague qui l’empêche (déjà) d’être perçue comme un pôle d’excellence appelé à mener à terme un grand projet pour la Mauritanie.

Avec l’agence «Tadamoun» (solidarité) et la CDD (caisse de dépôts et de développement), la Zone franche semble être l’un des axes sur lesquels Ould Abdel Aziz va construire sa vision.

dimanche 16 juin 2013

Liaison fatale

L’Ambassadeur du Soudan en Mauritanie a été rappelé par son gouvernement. Il aurait commis la faute d’être allé au-delà de son rôle de diplomate œuvrant à la promotion des rapports entre les deux pays.
Proche des Islamistes de Tawaçoul, il aurait participé à plusieurs de leurs manfestations et probablement intervenu auprès de Chinguitel pour faire bénéficier certains des organes de presse qui leur sont affiliés des faveurs de l’opérateur soudanais. Ce qui n’aurait pas été du goût des autorités qui ont jugé inamicale l’attitude de l’Ambassadeur.
En tout état de cause, il vient d’être sommé par son gouvernement de rentrer au plus vite. Il sera remplacé ultérieurement.
La convivialité de l’ambassadeur en question rappelle la période où les ambassadeurs d’Irak, de Libye, de France… s’occupaient de politique intérieure de la Mauritanie. chaque fois cela a mal fini. 

samedi 15 juin 2013

Un bout de route

Il y a quelques semaines, le ministre de l’équipement Yahya Ould Hademine rapportait aux téléspectateurs de TVM cette réflexion (acide) des «gens de Mederdra» qui disaient : «Le ministre a bien dit quand est-ce que la construction de la route commence mais n’a pas précisé quand est-ce qu’elle se termine». On pouvait le dire autrement : «On sait combien la construction de la route va durer (18 mois) mais pas quand est-ce qu’elle va commencer». Depuis cette sortie, quelques quatre kilomètres ont été goudronnés alors que les travaux s’accélèrent sans doute pour pouvoir faire le maximum avant le pic de l’hivernage (septembre). On dit là-bas que parce qu’il n’y a pas de voie de dégagement, la société est obligée de finir rapidement ce qu’elle a commencé sinon elle risque de bloquer la circulation.
C’est une route qui a fait couler beaucoup d’encre, qui a même occasionné des heurts inutiles et des polémiques excessives.
Entre ceux des cadres bien repus, installés à Nouakchott, ne venant à Mederdra qu’à des occasions pour parader dans leurs rutilants 4x4 et les jeunes conscients des difficultés quotidiennes des populations, entre eux la fracture a été très forte.
Un jour ou l’autre, les autorités politiques devront se résoudre à comprendre que l’ère de l’intermédiation politique est finie. Depuis que les grands leaders de la politique locale ont abandonné le terrain, il n’y a pas eu de relève. Il ne peut pas y en avoir d’ailleurs. N’importe qui n’est ni Baba Ould Sidi ni Bebbaha Ould Ahmed Youra ou n’est pas Baba Ould Sidi et Bebbaha Ould Ahmed Youra qui veut… je ne sais pas comment dire mais vous aurez compris ce que je veux dire…
On peut sans doute faire sans l’oligarchie traditionnelle locale. Mais pas avec le matériau actuellement utilisé. Le parti au pouvoir n’a aucune chance de gagner une élection si la gestion des affaires locales continue à être confiée à des novices qui plus est sans envergure.
Il en va de Mederdra comme de Kobenni, de Kaédi, de Tintane, de Zouératt, de Boutilimitt, d’Aleg, de M’Bout, de Sélibaby… de partout. La scène politique mauritanienne est «kersha mesloul ‘oud’ha», une sorte de situation chaotique où les déterminants ne sont pas visibles et où les processus de transition sont illisibles. Et comme pour compliquer d’avantage la situation, on refuse l’émergence d’une nouvelle classe ‘activistes autonomes (à Mederdra, on a réprimé les velléités d’une jeunesse qui agit dans un cadre associatif pour sortir des logiques existantes).

Cela risque de profiter fatalement à l’organisation politique la plus structurée, celle qui sait travailler – qui travaille déjà – en sous-terrain et qui mène une action soutenue par des moyens sérieux et un discours plutôt «convenable»…

vendredi 14 juin 2013

Alliances et mésalliances

Au Parlement, les députés passent une grande partie de leur temps à justifier leurs positionnements passés et présents.
Ceux qui expliquent pourquoi ils ont soutenu Ould Abdel Aziz pendant et/ou après son élection en 2009, ceux qui justifient pourquoi ils sont revenus à lui après, ceux qui tentent d’expliquer comment ont-ils «accompagné» son coup d’Etat du 6 août 2008 croyant avoir affaire à «un mouvement de rectification»… on va parfois plus loin pour demander aux Islamistes comment votaient-ils des budgets où apparaissait ce qui était alloué à l’Ambassade de Mauritanie en Israël, à ceux de l’UPR pourquoi étaient-ils allés dans une alliance avec Tawaçoul…
Sur la scène politique, on assiste à la passation entre Jamil Mansour et Ahmed Ould Daddah à la tête de la Coordination de l’Opposition démocratique (COD), et, à côté, à la fusion entre la Coalition pour une alternance Pacifique (CAP) et l’Alliance Patriotique (AP). La première regroupe les partis d’opposition ayant participé au dialogue avec le pouvoir (Wiam, APP et Sawab), la seconde rassemble trois partis de la Majorité ayant participé au dialogue pour finalement prendre le large. Ces partis - Adil, Renouveau démocratique (RD) de Ould Abdeiderrahmane et le Mouvement pour la refondation (MPR) de Kane Hamidou Baba -, ont annoncé leur retrait de la Majorité avant de créer un nouveau pôle (AP) pour finir avec ceux de la CAP.
C’est bien à cause d’alliances et de mésalliances, de nomadisme dans le positionnement général, d’absence de fil conducteur dans le comportement des uns et des autres… que nos politiques sont surprenants, qu’ils peuvent paraitre incohérents.
Quand on sait qu’à l’origine du parti Wiam, le refus de Yahya Ould Ahmed Waqef (et de ses amis) de laisser Boydiel Ould Hoummoid diriger le parti. Qu’à l’origine de la création de la COD, la volonté de limiter le pouvoir (légal et institutionnel) de l’Institution de l’Opposition démocratique et donc d’empêcher Ahmed Ould Daddah de jouir pleinement de son statut de chef de file de l’Opposition démocratique. Qu’à l’origine du processus qui a mené à la création (ou au renforcement) de l’APP (alliance progressiste populaire) et de l’UFP (union des forces du progrès), il y a la volonté de «renverser» l’ordre Ould Daddah. Qu’à l’origine de la légitimation de l’élection de Sidi Ould Cheikh Abdallahi, la trahison de la grande opportunité d’opérer un virage définitif en optant pour le compagnon de route (Ould Daddah) et non pour le joker des militaires (Ould Cheikh Abdallahi). Qu’à l’origine de la défaite de 2009, le refus de s’aligner derrière un candidat unique de l’opposition (pour ne pas avoir à faire courir le «mauvais» cheval). Qu’à l’origine de la rupture du dialogue renoué entre Ould Abdel Aziz et Ould Daddah, entre lui et Ould Maouloud, entre lui et Ould Mansour… qu’à l’origine de cette rupture il y avait la volonté manifeste d’écarter les uns et de circonscrire ce dialogue à une frange déterminée de l’opposition…
Le malheur, c’est qu’on finit fatalement, un jour ou l’autre, par payer la facture de l’incohérence dans la conduite. Chacun de nos politiques paye aujourd’hui pour ne pas avoir su, pu ou voulu anticiper pour voir un peu plus loin que l’immédiat.

jeudi 13 juin 2013

Combien sommes-nous ?

C’est au cours de la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, celle qui s’est tenu ce jeudi après tant d’absence, que le rapport sur le Recensement général de la population et de l’habitat (RGPH) a été présenté. Il s’agit du résultat de l’opération lancée dans le cadre de la stratégie nationale de protection sociale et qui visait à savoir, en quinze jours, combien sommes-nous.
Cela n’a rien à voir avec l’enrôlement qui est une opération beaucoup plus précise, beaucoup lus laborieuse et surtout beaucoup plus étalée dans le temps. Cela n’a rien à voir non plus avec le recensement à vocation électorale qui a fait l’objet d’un accord entre la CENI et l’Office national des statistiques (ONS) et qui doit démarrer bientôt pour permettre aux Mauritaniens en âge de voter de s’inscrire sur la liste électorale en perspective des élections prévues entre le 15 septembre et le 15 octobre prochains.
Le ministre des affaires économiques et du développement qui a présenté le rapport, a déclaré que le RGPH s’est bien déroulé dans sa phase urbaine et qu’il continuait dans les zones rurales jusqu’à la fin du mois de juin.
Il a indiqué que ce recensement a été réalisé par 6000 jeunes dont la plupart des filles. Ont été mobilisés à cet effet 3000 agents de dénombrement et 750 contrôleurs en plus des superviseurs et cadres de l'office National des Statistiques (ONS) et des autorités administratives.
Le ministre a annoncé que, selon ce recensement, la population a atteint 3 millions 387 mille 868 individus dont 50,7% de femmes alors que le taux de la population masculine est de 49,3%. Les habitants de Nouakchott passent de 22% en 2000 à 27% actuellement.
Le ministre qui s’exprimait au cours de la conférence de presse hebdomadaire du gouvernement, a expliqué que les résultats de ce RGPH permettront de mettre en place des plans suivant des données techniques précises en vigueur au niveau international à travers l'analyse des données, l'extrapolation des spécificités démographiques et économiques ce qui aura pour effet de corriger les déséquilibres, de programmer les investissements et d'établir une base de données permettant à l'avenir de faire des enquêtes plus précises.
Le gouvernement mauritanien est en passe de restructurer le système de recensement pour couvrir tous les secteurs. C'est ainsi que des négociations avec les partenaires au développement ont commencé à cette fin.
P.S : C’est au cours de ce Conseil des ministres qu’il a été procédé à la nomination de Pr Outouma Soumaré à la direction de l’hôpital neuropsychiatrique de Nouakchott. Cet éminent neurochirurgien n’est pas à présenter à nos compatriotes qui apprécient sa science et sa technicité, tout comme ses qualités humaines louables.
Le choix d’une telle compétence en dit long sur l’ambition qu’on a désormais pour l’hôpital neuropsychiatrique qui est resté tout ce temps une sorte «d’isoloir» juste bon pour cacher nos malades de ce côté-là. Il s’agit maintenant d’en faire un instrument moderne, utilisant les techniques de pointe pour assurer un service de haut niveau.

Pour résumer, je dirai que la Mauritanie récupère ainsi un technicien qui n’a pas d’égal dans son domaine professionnel et l’arrache à la politique (que n’importe qui fait chez nous). Arracher les grands techniciens à la politique, une entreprise à promouvoir pour sauver une multitude de cadres qui n’ont rien à donner dans ce champ et qui auraient dû servir et bien servir là où ils excellent.