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jeudi 31 janvier 2013

SNIM, de A à Z (8)


L comme Le’gaareb qui fait l’objet d’un accord entre la SNIM et MITTAL. Il fait partie des ensembles de guelbs situés au nord-ouest de Zouératt. On parle des «guelbs de l’est», de ceux de l’ouest, du nord et du sud. Guel El Gheyn qui est le leader d’un groupe déjà exploité. El Aouj qui forme un rassemblement de quelques pitons. Atoumaye, Kediet Leghnem, Guelb El ‘Abd, Aamkhawal, Tizirghane, Oum Aarwagen, Boudarga, Tentekraat… autant de noms que vous allez entendre et qu’on essayera de vous faire voir de là où vous êtes et où la promesse de trouver «quelque chose» est forte. Encore faut-il que la SNIM continue à mettre la main dessus…

M comme magnétite qui est à l’opposé de l’hématite, peu riche en fer (37%). Voici ce qu’en écrit le site de la SNIM : «Guel El Gheyn, le seul gisement de magnétite en exploitation à l’heure actuelle, renferme plusieurs centaines de millions de tonnes de réserves prouvées. La teneur moyenne en fer des magnétites SNIM est de l’ordre de 37%. Ils sont actuellement enrichis par séparation magnétique à sec pour donner un concentré tirant à 65% Fe. L’Usine des Guelbs où sont traités ces minerais dispose d’une capacité annuelle de 5 millions de tonnes (?). L’exploitation de tous les gisements de la SNIM se fait à ciel ouvert, avec des gradins de 12 m (Kédia et M’Hawdatt) et 15 m (El Gheyn). Toutes les opérations minières sont effectuées par la SNIM elle-même : recherche, optimisation des fosses, terrassement, chargement navire, roulage, foration, tir à l’explosif, transport ferroviaire, maintenance, etc

N comme nationalisation… Un tournant dans l’histoire récente du pays : le 28 novembre 1974, le Président Mokhtar Ould Daddah annonce la décision de nationaliser la société MIFERMA. La décision de confier la gestion à la SNIM suit immédiatement. Aujourd’hui, les officiels préfèrent parler du «rachat» de la part des actions de la MIFERMA par l’Etat mauritanien et du «transfert de ses actifs» au profit de la SNIM. A l’époque, c’était «la nationalisation de la MIFERMA» qui était destinée à compléter le mouvement d’émancipation de la Mauritanie vis-à-vis de la tutelle française.
Trois moments dans ce processus d’indépendance : la révision des Accords militaires avec la France en 1972 qui renforçait l’indépendance politique ; l’arabisation du système éducatif dont on voulait faire la base de l’indépendance culturelle ; la création de la monnaie nationale puis la nationalisation des richesses, de la MIFERMA notamment, qui devait servir à renforcer l’indépendance économique pour permettre au pays de soutenir ses efforts par lui-même.
C’est en 1935 que le gisement de la Kédia d’Ijill a été reconnu et seulement en 1963 que son exploitation a démarré. En 1978, le capital de la SNIM est ouvert aux capitaux étrangers et la société change de statut pour devenir une «Société d’économie mixte» (SEM) : 78,35% à l’Etat mauritanien, 7,17% reviennent à l’IBK, institution financière du Koweït, 5,66% à ARMICO, 4,59% à Irak Fund, 2,30% à ONYHM (Maroc), &,79% à la Banque Islamique de Développement, et 0,14% aux privés mauritaniens.
En 2008, le gouvernement de Sidi Ould Cheikh Abdallahi a failli procéder à la vente des actions de l’Etat mauritanien et c’est le géant de l’aciérie MITTAL qui se proposait de les acheter. Cela avait soulevé un tollé général car la relation avec la SNIM est autre que celle d’une simple entreprise «nationale»…

mercredi 30 janvier 2013

SNIM, de A à Z (7)


J comme joint-venture… justement, le joint-venture le plus élaboré est celui qui lie la SNIM à XSTRATA pour l’exploitation de la mine d’El Aouj. Quand on va sur le site de la SNIM, on découvre que le projet El Aouj a été signé le 25 octobre 2010 avec l’entreprise australienne SPHERE Investments Ltd. Qu’il visait à «développer les gisements de magnétite (voir plus loin, ndlr) du Guelb El Aouj (…) dont les réserves sont estimées à plus de 500 millions de tonnes». Que le projet permettra de produire «7 millions de tonnes de petites pellets de haute qualité». Enfin que le financement est de l’ordre de 2,5 milliards dollars.
XSTRATA a racheté SPHERE et reconduit le projet en abandonnant petit-à-petit la production des pellets. Elle veut juste enrichir le minerai et produire du concentré. Même pour cela, elle pose deux conditions : la possibilité d’utiliser les réserves d’eau existant à proximité, ce qui implique le «détournement» d’une eau de qualité vers une utilisation industrielle dans un univers où cette denrée manque cruellement aux êtres vivants (hommes, animaux, végétation…) ; la deuxième condition est la fixation préalable de conditions «acceptables» pour le transport du minerai. Si la pression politique est forte, la SNIM risque de plier sans condition sous la puissance de la multinationale.
Une seconde joint-venture lit la SNIM à MINMETALS de Chine. Après d’âpres négociations, la partie chinoise a accepté de créer une société avec la SNIM qui détient 65% de son capital. Il s’agit de la Tazadit Underground Mine (voir, notre précédente édition). C’est l’occasion pour la SNIM de s’approprier la technologie et le savoir-faire en matière d’exploitation souterraine du minerai. Les Chinois sont attendus en juin prochain.
Avec ARCELOR-MITTAL, c’est le projet autour de Le’gaareb, une série de guelbs au nord-ouest de Zouératt qui a été développé. Après avoir essayé d’acheter la SNIM, le géant indien a accepté de lancer ce projet avec la société nationale. Sans grande conviction visiblement : il met beaucoup de temps à réaliser les études de préfaisabilité. Ce qui fait espérer à tous ceux qui aiment la SNIM, le départ de l’indien qui a de graves problèmes sur d’autres théâtres.
Le plus prometteur de tous les projets communs est celui qui vient d’être signé entre la SNIM et des opérateurs saoudiens. Il s’agit de relancer le projet de production de pellets cette fois-ci à guelb Atoumaay.

K comme Kédia… El Kedya, La Kédia… vous n’avez pas besoin de préciser pour un Mauritanien pour savoir qu’il s’agit de la Kédia d’Ijill, là où culmine la Mauritanie à 910 m d’altitude. C’est ici que s’est implantée la société Mines de Fer de Mauritanie (MIFERMA) qui a exploité les minerais durant les douze premières années de l’indépendance. Cette Kédia est longue d’une quarantaine de kilomètres. Son accès a toujours été difficile avant son exploitation. Elle a inspiré quand même des poètes. Surtout sa guelta. Les experts nous disent que là où se trouve le minerai riche, on trouve toujours de l’eau douce, plus le minerai est pauvre, plus l’eau qui se trouve dans les environs est saumâtre.

mardi 29 janvier 2013

SNIM, de A à Z (6)


H comme hôtellerie… C’est la SOMASERT qui s’occupe de ce secteur. Ses hôtels s’appellent Oasian. Un à Nouadhibou avec une capacité de 40 chambres dont 4 suites. Toujours à Nouadhibou, le projet en cours de réalisation d’un «célibatrium», complexe de 36 studios avec balcons, entièrement équipés pour permettre l’indépendance de leurs occupants. A Zouératt, l’hôtel dispose de 40 chambres et d’un complexe indépendant avec 12 suites et 4 bungalows. Depuis 2011, les capacités de l’hôtellerie de la SOMASERT tournent à 95%. Le service s’est qualitativement amélioré. La société est sollicitée pour les bases de vie des sociétés opérant dans la région de Zouératt et répond parfaitement aux attentes de sa clientèle.

I comme Imishikline, deux ensembles qui affleurent à une quarantaine de kilomètres au sud-ouest de Zouératt : Imishikil Lakhdhar et Imishikil Labyadh, le premier pour la dominance de la pierre dans son relief, le second pour le sable blanc qui le recouvre. Les deux ensembles sont englobés dans un permis octroyé au géant XSTRATA qui a choisi de donner au projet d’exploitation le nom d’un troisième pic situé plus loin, cependant visible d’ici. Il s’agit d’Askaaf qui sonne plus simple pour les étrangers, plus poétique pour les nationaux.
Après avoir monté un projet commun avec la SNIM pour El Aouj, XSTRATA semble opter pour le démarrage de ce projet d’Askaaf où elle est seule. L’engouement de la multinationale est largement justifié par les soupçons d’existence d’importantes réserves de minerais riches. Elle entend donc dicter sa volonté aux autorités mauritaniennes. D’abord en les obligeant à l’autoriser à utiliser l’eau des nappes environnantes pour exploiter le minerai, ensuite à lancer le projet où elle est seul avant celui de la joint-venture avec la SNIM. La pression est énorme sur un petit pays comme la Mauritanie qui se voit menacé par le départ du géant si ses doléances ne sont pas satisfaites.

lundi 28 janvier 2013

SNIM, de A à Z (5)


G comme Guelbs… C’est d’un pluriel qu’il s’agit, même si le mot désigne, dans l’entendement local, Guelb El Gheyn où l’exploitation du minerai pauvre a été envisagée comme une solution de rechange pendant quelques temps. Elle est toujours d’actualité même si l’usine construite au milieu des années 80 n’a jamais tourné comme il faut. La SNIM, loin de se décourager, a lancé le grand Projet Guelb II. Son directeur n’est autre que Mohamed Ould Kreikid qui a dirigé le Guel I.
Le Guel II, nous explique son directeur, est une reprise du premier projet avec le souci de ne pas commettre les mêmes erreurs et de mettre toutes les chances de son côté pour arriver à une teneur de 66% au lieu des 37% naturels. Le procédé d’enrichissement utilise l’eau et donne un produit connu sous son label commercial de GMAB qui désigne le «concentré du Guelb». Comme pour le Guelb I, il s’agit de construire une usine pour l’enrichissement qui va produire 4 millions de tonnes supplémentaires et qui va donner sa première tonne en janvier 2014. Ce qui a demandé à la SNIM de mobiliser de nouveaux engins miniers (pelles, camions…), de procéder à l’extension du chemin de fer et de construire une nouvelle centrale électrique. Tout ce qui se rapporte aux matériels de l’usine est déjà sur place et doit être monté par une société espagnole qui fait travailler déjà environ 500 personnes sur le millier d’emplois prévus. Sur les travailleurs présents aujourd’hui, on compte 100 Espagnols environ et une cinquantaine de Marocains, tout le reste est mauritanien. Le projet Guelb II demande le recrutement de 700 personnes dont 500 sont soit effectivement engagés soit en formation. Et pour assurer la qualité des montages et des matériels, c’est un bureau international qui se charge de suivre le montage du projet. Parce que l’ancienne usine a souffert de la pollution de son environnement, la nouvelle va utiliser 62 dépoussiéreuses pour alléger les effets négatifs sur l’environnement et les hommes.

H comme hématite… C’est la matière – on va dire ça comme ça – la plus recherchée par les géologues de la SNIM. Sur le site de la société, voilà comment est présentée l’hématite : «Les gisements d’hématite sont localisés principalement au niveau de la Kédia d’Ijill et de M’Hawdatt. La Kédia d’Ijill est un massif montagneux s’étalant sur une trentaine de kilomètres dans les environs de Zouérate. Elle a été le centre de l’exploitation minière au début des années soixante. M’Hawdatt est un chaînon de 14 kilomètres situé à 60 kilomètres de Zouérate. Il a été découvert à la fin des années 80. Les principaux gisements d’hématite actuellement en exploitation sont le TO 14 (Kédia) et M’Hawdatt. Ils fournissent 60% de la production totale de la SNIM. D’autres petites mines satellites, le long de la Kédia, fournissent une production d’appointement en cas de besoin».
En termes profanes, nous dirons qu’il s’agit du minerai riche qui est exploité dans la Kédia depuis le début, puis à M’Hawdatt depuis quelques années. On espère en trouver encore dans le sous-sol des fosses de Tazdit (avec les Chinois de MINMETALS), au niveau de F’Dérick et un peu partout.

dimanche 27 janvier 2013

SNIM, de A à Z (4)


E comme EVB, «Entretien, Voirie, Bâtiment», la direction de la SNIM spécialisée dans la construction, la maintenance des bâtiments. Depuis quelques années, EVB travaille réellement pour améliorer le cadre de vie des travailleurs de la SNIM. A Zouératt cela s’est traduit par une belle organisation de l’espace, un effort considérable pour embellir les rues, les orner, les parer de panneaux de circulation, damer les trottoirs, éclairer les rues, assurer la propreté des quartiers, réhabiliter les espaces publics (parcs, maisons de spectacles…), retaper les bâtiments (habitations, bureaux…)… Ce qui donne une ville où il fait mieux de respirer. Exemple que l’on semble vouloir copier à Cansado à Nouadhibou.

F comme F’Dérick… qui se souvient encore que la ville de F’Dérick est la capitale de la région du Tiris Zemmour ? Pas même l’administration qui a fini par élire domicile à Zouératt (30 kilomètres). L’ancien Fort Gouraud n’est plus visible du bas de la Kédia qui s’étende d’ici sur plus de 50 km vers Zouératt et au-delà. Ne subsiste de la ville que des constructions en banco qui donnent l’impression de recevoir bon an mal an une pluviométrie importante. Alors que le délabrement n’est que l’expression des flétrissures du temps. Depuis la fin de l’exploitation de ce côté de la montagne (Kédia), F’Dérick a perdu sa superbe. Mais l’aura des saints qui y sont enterrés peut-elle lui rendre ceux qui l’ont désertée ? Peut-être…
Avec les espoirs nourris de trouver du minerai riche encore enfoui dans la pierre, on envisage désormais de rouvrir la mine fermée en 1982 pour des raisons de sécurité et d’économie : l’exploitation de la mine devenait dangereuse parce qu’elle demandait d’aller encore plus loin dans les parois tout en coûtant de plus en plus cher. Les essais lancés à partir de 2005 ont conclu à l’existence d’une réserve qui pourrait donner entre 20 et 30 millions de tonnes de minerais riches. Ce qui justifie la réhabilitation de l’ancienne manutention et le retour de l’activité sur ce côté de la Kédia.
Non loin de là, les guelbs où s’est engagée la multinationale XSTRATA, El Aouj. La perspective de cet engagement amène déjà la société à faire du social dans la ville non loin de laquelle elle envisage de construire une base de vie. En effet, XSTRATA y a construit un centre de santé dont l’équipement a été financé par la Fondation SNIM.

samedi 26 janvier 2013

SNIM, de A à Z (3)


D comme Développement. A la SNIM, ce mot désigne tout un programme qui a d’ailleurs porté le nom de «Programme de développement et de modernisation» (PDM) et qui consistait à moderniser les infrastructures pour les rendre plus efficientes. Son objectif était d’améliorer la production et de diminuer les coûts de production. Ce programme mis en œuvre à partir de 2006-7 a permis de lancer le projet Guelb II, de réhabiliter et d’agrandir le port minéralier, de moderniser la maintenance de la voie et du système de communication, de modifier la manutention du TO 14 pour permettre l’exportation directe de sa production (en cours de réalisation), d’améliorer les conditions de vie par la réhabilitation des cités et des hôtels et enfin de créer un nouveau centre de formation professionnelle à Zouératt.

E comme eau, la denrée qui manque le plus sur ces terres. De Yaghraf, sur la route Akjoujt-Atar, à Zouératt, c’est la désolation qui marque le visiteur. Les arbres déjà rabougris, sont de noir vêtus. Plus rien n’indique que les hautes pailles, sèches à présent, ont verdi un jour. De temps en temps quelques chèvres, quelques ânes, signes furtifs d’une présence de vie humaine. Puis deux parfois trois taudis (m’baar) d’où sortent des êtres faméliques qui ont quand même la force de faire un signe de main et de tenter de survivre dans des conditions chaque jour plus difficiles.
Dans «le couloir» qui relie Zouératt à Nouadhibou, c’est la SNIM qui supplée à l’absence d’une administration qui a ici démissionné. Pourtant, nous sommes dans une zone frontalière où la disponibilisation de l’eau est un élément essentiel de la sécurisation du territoire. Surtout que cette année, la partie nord du Tiris-Zemmour a été arrosée. D’où la ruée des cheptels alors que les points d’eau sont rares, presqu’inexistants.

vendredi 25 janvier 2013

SNIM, de A à Z (2)


B comme Ben Ameira qui est un bloc de pierre situé à mi-chemin entre Nouadhibou et Zouératt, à 393 km de la capitale économique qui se trouve à 650 km de la capitale minière. C’est un monolithe, troisième du genre dans le monde (Uluru et Mont Augustus en Australie), qui culmine à 550 mètres. Il serait, selon les scientifiques, un morceau de météorite tombé ici il y a des millions d’années. La nature de la roche diffère complètement de ce qui l’entoure. Non loin du pic, un autre de la même nature mais plus petit appelé «Aysha Edhkhira» (Aïcha la prestigieuse). On raconte dans la zone qu’une histoire d’amour aurait lié les deux pics «étrangers», mais que la jalousie avait poussé le mâle (Ben Ameira) à éloigner de lui celle qu’il aimait et à laquelle il tenait pourtant. Ce qui expliquerait la distance qui les sépare et leur positionnement actuel l’un par rapport à l’autre.
Après avoir été une grande attraction pour les touristes étrangers, surtout pour les artistes du monde entier qui ont marqué leurs passages de traces indélébiles gravées sur les parois du monolithe, Guelb Ben Ameira est aujourd’hui un témoin silencieux des vaines tentatives humaines de changer le cours des choses : ici le village qui a voulu être l’une des plus grosses agglomérations de la zone, là la ceinture verte qu’on avait voulu barrage aux vents et au désert… Ben Ameira n’est même pas une étape obligatoire même s’il reste un passage obligatoire pour les trafiquants qui prennent la voie tracée à travers le Tijirit et qui mène d’ici à la route Nouakchott-Nouadhibou, au niveau de là où les humanitaires espagnols avaient été kidnappés un certain 29 novembre 2009…


C comme Choum, sans doute la plus grosse agglomération dans «le couloir», mot qui désigne l’espace traversé par le chemin de fer reliant Zouératt à Nouadhibou. Un arrondissement de l’Adrar qui vit au rythme des passages du train. Il y a quelques années, Choum était un centre d’échanges où débarquaient la majeure partie des voitures volées en Europe et réexportées à travers marchés marocains vers la Mauritanie, le Mali et le Sénégal. De Nouadhibou, les voitures entrées frauduleusement sont embarquées à bord du train et descendent à Choum pour reprendre la route des marchés du sud par Atar et Akjoujt. La route Nouakchott-Nouadhibou a ouvert un axe plus rapide et moins coûteux pour les trafiquants. Les restaurateurs de Choum sont partis s’installer sur cette route. Les mécaniciens, les commerçants d’occasion, les crieurs… tous ont quitté le patelin qui est revenu à sa population d’origine faite de migrants et d’autochtones qui n’ont d’autre choix que celui de rester. La sécheresse des deux dernières années a lourdement affecté le cheptel. Des cas de malnutrition sont signalés ici et là. Les populations d’ici n’ont pas l’habitude de se plaindre, l’Histoire leur a appris à vivre du peu qu’elles ont.
La Fondation de la SNIM contribue considérablement à améliorer leurs conditions de vie. Un abattoir, une centrale, des médicaments, des fournitures scolaires et deux écoles… L’une de ces écoles a été construite dans l’oued de Choum, à quelques kilomètres du village. Là où l’on avait cru un jour pouvoir installer la nouvelle ville. Là où «meurt» a le plateau de l’Adrar pour laisser place à un champ de dunes qui prend possession de la vie, là était «l’oued de Choum», un projet resté à l’étape de projet. La Fondation, sur demande de l’administration et de la Mairie, a implanté une école de …six classes… pour seize élèves pour la plus optimiste des estimations.

jeudi 24 janvier 2013

SNIM, de A à Z

J'ai récemment fait un voyage dans le Nord du pays, un voyage qui m'a conduit de Zouératt à Nouadhibou par le fameux "couloir" que constitue la ligne du chemin de fer qui relier la capitale minière à son port d'exportation. J'en ai rapporté une sorte de reportage qui espère faire la lumière sur certaines activités de la Société nationale industrielle et minière (SNIM) dans le Nord.


A comme ATTM qui est l’une des filiales de la SNIM. C’est celle qui est dédiée aux travaux et génie civil d’où son nom : Assainissement, Travaux, Transport et Maintenance. Elle fait partie du «consortium» (même si ce n’est pas le nom retenu par la SNIM) qui comprend d’autres entités : la SAFA qui produit de l’acier, la COMECA qui s’occupe de la construction mécanique, la GMM qui traite le granite et le marbre, la SAMIA pour les industries métallurgiques et qui a fait du gypse, la SAMMA pour l’acconnage et la manutention, la GIP pour la gestion des installations pétrolières et qui tend à devenir un acteur dans la distribution des hydrocarbures, la DAMANE pour les assurances et la SOMASERT pour le tourisme.
La philosophie au début du lancement des filiales était double : créer des sociétés spécialisées dans des activités que la SNIM ne pouvait plus prendre en charge et pousser l’expertise privée nationale à améliorer ses prestations en lui imposant une concurrence. Mais cette concurrence est devenue à la longue déloyale. Une filiale comme l’ATTM a fini par avoir tous la majeure partie des marchés de construction des routes et des aéroports et ce au moment où elle connaissait une sérieuse baisse dans son régime de travail. Au lendemain de la nomination au poste de ministre de son ancien directeur, Yahya Ould Hademine, son remplaçant, Mohamed Ould Bilal avait cru bon de renouveler tout son personnel d’encadrement, mettant à la marge une grande expérience. Ce qui lui a fait prendre de grands retards sur les marchés qui lui ont été confiés. ATTM peine par exemple sur l’axe Kiffa-Tintane qui était parti pour un délai de deux ans et qui est bientôt à sa quatrième année. Elle a beau sous-traiter à des intervenants privés, ATTM est incapable de résorber ses retards.
Par contre la SOMASERT a connu un processus inverse. Si elle a connu un âge d’or qui a marqué les premières années de son démarrage avec son premier directeur Abderrahmane Ould Douwa, elle va entrer dans une profonde léthargie qui va compliquer sa mission qui est celle de booster l’industrie touristique au moment où la situation sécuritaire crée une véritable crise dans le secteur. Depuis un an et à la suite de la nomination d’un universitaire à sa tête, Dr Ahmed Ould Gawad, la SOMASERT reprend son rôle de leader et améliore sa position et sa situation (voir aussi H comme hôtellerie).

mercredi 23 janvier 2013

Le choix des mots


Ce matin, j’ai entendu le correspondant de France24 à Niono (Mali) dire une phrase comme «…les islamistes ont cherché à se cacher sous ces arbres, ce n’était pas assez pour éviter la puissance de nos forces aériennes…» Le mot «islamiste» revient souvent dans la bouche des reporters – pressés et/ou fatigués – quand ils parlent des groupes armés qui subissent les bombardements de l’Armée française.
Quand on dit «islamisme» cela renvoie désormais à l’activisme politique militant qui est, dans son acception officielle, loin de toute violence. Même si cela couvre plusieurs écoles, le mot désigne d’abord ceux qui ont choisi le terrain politique visible et concurrentiel pour exprimer leurs idées et leurs choix.
Même quand on parle de «Salafisme», on doit savoir qu’il s’agit d’une idéologie qui n’est pas nécessairement violente. Elle peut évoluer vers l’adoption d’une attitude violente qui considère que l’autre est sur la mauvaise voie et qu’il faut le remettre sur la bonne voie même par la force. De là à introduire l’exigence du «Jihad», il n’y a qu’un pas allègrement franchi par les «Salafistes jihadistes» dont se réclament tous ces mouvements qui opèrent au Nord du Mali, mais aussi un peu partout sur les théâtres brûlant de Syrie, de Libye, du Yémen…
En Mauritanie, la presse peut adopter, en tous temps et en toutes circonstances, les positions que lui dictent ses choix idéologiques et ses lignes éditoriales. Pendant que le pays menait la guerre aux bandes armées l’ayant attaqué dans ses frontières, des journaux et des sites ont défendu la cause de l’ennemi en dénonçant les agissements de l’Armée mauritanienne. Ce n’est qu’un exemple…
Ailleurs, la presse est tenue de s’aligner sur les «préférences de la Nation». L’intérêt national permet de limiter les libertés, de les conditionner et de diriger ainsi la presse. D’où le «nous» fréquemment utilisé par les journalistes quand ils parlent des forces de leurs pays. Consultez n’importe quel site mauritanien, il vous dira : «…l’Armée mauritanienne… le Président mauritanien… la Mauritanie…», vous laissant l’impression qu’on parle de la Papouasie-Nouvelle Guinée ou en tout cas d’un pays autre que celui qui est le nôtre…Pourquoi ? Parce que… c’est certainement la conscience que nous avons de nous-mêmes et du rapport que nous entretenons avec cette portion de la terre qui reste étrangère dans le subconscient de la plupart de nos élites… mais ça c’est une autre question.

mardi 22 janvier 2013

Au nom des Musulmans du Mali


Une quarantaine de figures plus ou moins connues du salafisme en Mauritanie ont émis un avis dénonçant la guerre «menée par la France chrétienne» contre «les Musulmans du Mali». Parmi eux se trouvaient certes quelques vénérables Shaykhs comme Mohamed Lemine Ould Hacen, mais cela n’a pas donné une grande ampleur au mouvement. Puis vint la position très tranchée du Conseil mondial dirigé par Youssouf Qaradawi, le Shaykh établi au Qatar dont il cautionne tous les agissements. Et enfin notre vénérable Shaykh Mohamed el Hacen Ould Deddew est entré en ligne pour exprimer la même attitude de condamnation violente d’une «croisade» contre les Musulmans du Mali.
Il se trouve, en plus de ce que nous avons déjà dit, que le Haut conseil islamique du Mali, seul représentant de l’expression musulmane dans le pays, bénit parfaitement l’intervention française. Aujourd’hui, le président de ce Conseil, Mahmoud Dicko qui, faut-il le souligner pour le lecteur mauritanien n’a pas d’équivalent ou de concurrent au Mali, a déclaré devant la presse que cette guerre vise la reconquête et donc la libération d’une partie du Mali occupée par des bandes armées «qui n’ont rien d’islamique» même si elles revendiquent le contraire.
Le porte-parole – légitime et légal – s’est dit outré par l’attitude exprimée par les Salafistes d’Egypte, le Président Mohamed Morsi, le gouvernement de Tunisie, le Shaykh Qaradawi et le Qatar qu’il a accusé d’avoir une position équivoque vis-à-vis des groupes agissant au Nord du Mali.
«Le Haut Conseil islamique du Mali constate avec regrets que depuis le début de la crise du Nord le 17 janvier 2012, le Mali, pays membre fondateur de l’OCI n’a pas bénéficié du soutien de la communauté musulmane». Et de rappeler que c’est le Mali qui a été agressé et que sa population a subi la loi de «bandes de criminels» agissant au nom de l’Islam et bénéficiant visiblement de la complicité de certains pays de la Oumma islamique. Avant de conclure : «Tous les Musulmans du Mali apprécient hautement l’intervention militaire française qui vise à mettre fin à l’occupation d’une partie de leur territoire».
Et comme cela ne suffit pas pour convaincre nos shuyukh (pluriel de shaykh) de revenir sur leurs propos qui sont finalement un encouragement pour les groupes armés, voilà venir le temps des dissensions au sein de l’organisation principale qui justifie cet alignement : Ançar Eddine. Avec la naissance du Mouvement Islamique de l’Azawad, nous avons le premier «coup de gueule» au sein de la nébuleuse créée par Iyad Ag Ghali. La dissidence exprime naturellement sa volonté d’«aller vers une solution pacifique». Le mouvement, «indépendant», «composé exclusivement de nationaux», affirme «de la manière la plus solennelle qu’il se démarque totalement de tout groupe terroriste, condamne et rejette toute forme d’extrémisme et de terrorisme et s’engage à les combattre». Le nouveau groupe dirigé par l’une des figures locales Algabas Ag Intalla qui a participé aux différentes rencontres de Ouagadougou, «lance un appel aux autorités maliennes et à la France pour un arrêt des hostilités dans les zones que nous occupons, à savoir les régions de Kidal et Ménaka (nord-est du Mali) et (pour) créer un climat de paix qui va nous permettre d’aller vers l’établissement d’un dialogue politique inclusif».
A ceux qui se sont empressés pour se ranger du côté des vrais assaillants d’appeler les groupes armés à déposer les armes, de demander aux combattants algériens, mauritaniens, nigériens, nigérians, libyens, égyptiens, tunisiens, européens ou nord-américains, de leur demander de quitter ce pays qui n’est pas le leur et de laisser sa population vivre en paix. Eux qui semblent écoutés par ces jeunes en rupture avec leurs sociétés d’origine, doivent dire la seule bonne parole qui vaille : parce que la solidarité des «frères» (de tous genres) a fait défaut, le Mali avait le droit de faire appel à ses alliés pour continuer à exister et pour refaire son unité. Les criminels, les vrais, sont ceux qui ont mis la région à feu et à sang. Depuis quelques mois déjà et qui ont préparé le coup depuis quelques années déjà.

lundi 21 janvier 2013

Ce qui devait être dit


Ils étaient finalement 32 agresseurs à avoir participé à l’attaque du site gazier de Tiguentourine. 29 d’entre eux ont été tués. Ils appartenaient à sept pays différents : Algérie, Egypte, Tunisie, Mali, Niger, Canada et Mauritanie.
Le Mauritanien du groupe est un jeune du nom de Abdallahi Ould Hmeida. Il a rejoint les groupes au Nord du Mali en 2008 alors qu’il avait 14 ans. Il en a donc 18 aujourd’hui.
Deux des Algériens, Abul Bara qui a un moment été présenté comme le chef du groupe opérant à In Amenas, et Lamine Bouchenab qui en est le véritable cerveau, appartiennent tous deux à un groupe algérien dénommé «les fils du Sahara islamique». Voilà ce que nous en écrivions en avril dernier (édition N° 590 du 8/4/12), après avoir insisté sur l’option du MUJAO de cibler l’Algérie : «Un autre mouvement partage le souci de cibler l’Algérie. Un peu plus marginal que le MUJAO, le «mouvement des fils du Sahara pour la justice islamique», composé essentiellement des ressortissants des zones sahariennes algériennes. Né en 2007, il a eu à son actif une attaque célèbre : l’opération de Djanet effectuée le 8 novembre 2007 et à la suite de laquelle les autorités algériennes ont ouvert des pourparlers avec le mouvement. Pour ce faire, elles auraient utilisé les services des notabilités locales pour avoir une accalmie. Le mouvement réapparait en septembre 2011 à travers un violent communiqué annonçant que le mouvement prend ses bases dans le nord malien avec pour objectif de s’attaquer au pouvoir algérien. Les combattants de ce mouvement seraient aujourd’hui sous la bannière du MUJAO pour certains, de Ançar Eddine pour d’autres». C’est un mouvement qui voulait jouer le rôle d’Ançar Eddine mais pour le Sud algérien…
Abderrahmane Ennigery du Niger est très connu des services mauritaniens pour avoir participé à plusieurs attaques contre notre pays et pour avoir encadré de nombreux combattants recrutés parmi la jeunesse mauritanienne.
L’opération de In Amenas a finalement coûté très cher à AQMI en la privant des services de quelques-unes de ses figures les plus emblématiques et de ses animateurs les plus déterminés et les plus sanguinaires. Au moment où la communauté internationale accepte enfin de consacrer un effort pour éradiquer le crime organisé dans cette région sahélo-saharienne.
Dans le même journal de l'époque, on concluait sur AQMI :
«Que veut AQMI ? Créer un Emirat islamique qui servira de base pour«combattre les impies», gouvernements jugés à la solde de l’ennemi de l’Islam (l’Occident), populations ne se pliant pas aux «préceptes originels de l’Islam», intellectuels, cadres, femmes dévoilées… et surtout lutter contre la démocratie considérée comme une apostasie, source des malheurs des peuples de la sous-région. C’est du moins l’objectif officiellement exprimée des chefs de l’organisation.
Dans la vie de tous les jours, on les voit se mêler aux trafics les plus illicites : drogue, armes, personnes, cigarettes et même alcool. Et s’ils ont réussi leur insertion sociale dans cet espace sahélo-saharien, c’est bien parce qu’ils ont pu «accompagner», couvrir et promouvoir les activités qui font vivre les populations et qui sont nécessairement des activités illégales.
Avec la prise des grandes villes du nord malien par ses alliés d’Ançar Eddine et ceux de MUJAO, AQMI aura à faire une mutation. De mouvement faisant des montagnes Tegharghar un Tora Borasaharien, AQMI est désormais adressée dans des villes comme Tombouctou, Gao ou Kidal. Peut-être pas ses éléments algériens, mais son élément africain, surtout malien et mauritanien. Est-ce à dire qu’il est plus facile désormais d’éradiquer le mouvement ? Rien n’est moins sûr maintenant qu’elle a de nouveaux armements, des bases fixes et un territoire à défendre.
Les spécialistes ont souvent parlé de la volonté d’Al Qaeda de provoquer l’arrivée sur ses territoires d’opération d’un élément militaire occidental. Cela lui permet à chaque fois de transcender le débat sur la légalité de combattre une armée d’occupation, et en même temps de justifier de nouveaux recrutements. C’est la théorie de «l’ennemi lointain» qu’il faut amener à proximité en combattant «l’ennemi proche» que sont les gouvernements locaux (Jean-Pierre Filiu).
Certains considèrent que les attaques du 11 Septembre ont été une catastrophe pour Al Qaeda et ses protecteurs Talibans, pour ce qu’elle a signifié de désastres, de morts ciblées, de démantèlements de réseaux, de perte d’initiative… D’autres estiment par contre qu’elle a permis à la nébuleuse de vivre une multitude de vies et sur tous les continents.
Qu’en sera-t-il de l’expérience que nous voyons se déployer au Mali ? Va-t-elle servir AQMI en en faisant un mouvement de libération nationale, ou, au contraire, va-t-elle la desservir en mettant à nu son caractère encombrant pour les populations ? En d’autres termes, dans les jours qui viennent, l’enjeu ne sera pas seulement «quelle intervention pour éradiquer le mouvement ?», mais celui de savoir qui des protagonistes présents, aujourd’hui alliés, va servir l’autre (ou le desservir)».

dimanche 20 janvier 2013

de quel côté on est?


Deux logiques peuvent être suivies face à la guerre qui se déroule à nos frontières. La première est celle qui mène fatalement au soutien de l’autorité malienne, donc de l’action de la communauté internationale. La seconde mène quant à elle au soutien des groupes armés qui ont fait main basse sur le Nord malien après avoir frappé les pays de la région.
La première logique «contient» une nuance qui veut que le soutien de toute action visant à rétablir l’intégrité territoriale du Mali et la légitimité politique dans ce pays, n’implique pas forcément un engagement sur le théâtre des opérations. Ce doit être – c’est déjà – la position officielle des autorités mauritaniennes. Lesquelles peuvent – et doivent – rappeler à tous les détracteurs d’hier, que sans les efforts consentis, souvent incompris, la Mauritanie aurait été l’objet des visées de ces groupes qui cherchaient un sanctuaire d’où ils pourraient agir impunément. Le Nord du Mali, le Sud de l’Algérie et tout le Nord-Est de la Mauritanie devait servir de base à leurs visées. Notre pays a réagi à temps. Il est momentanément hors danger aujourd’hui.
La seconde logique est celle développée par une partie de l’intelligentsia religieuse et politique. Elle part de la considération qu’il s’agit d’une nouvelle «croisade» chrétienne en terre d’Islam. Menée par la France contre de «pauvres frères Musulmans», cette guerre est injuste et toute aide des «agresseurs» (la France, les Maliens, les Africains…) est une hérésie. Même si dans leurs litanies, nos penseurs ne poussent pas le bouchon, on en comprend aisément que l’obligation d’aider les «frères» est la moindre des attitudes justes.
Jamais réactions aussi violentes n’ont été faites par cette intelligentsia. Comme si on les avait touchés dans le plus profond d’eux-mêmes.
Aucune guerre ne peut, à mon avis, être moralement justifiée. Aucune ! Mais il est difficile de ne pas essayer de faire la part des choses. Ce qui se passe au Mali est une guerre de libération et non une occupation. Quand les groupes islamistes composés de Maliens (oui), de Mauritaniens, d’Algériens, de Burkinabés, de Nigériens, de Nigérians, de Sénégalais, de Français… sont venus perturber l’innocence au Mali, détruisant le patrimoine culturel, violant tous les sacrés, amputant, flagellant on ne sait au nom de quelle loi… laquelle de ces voix s’est élevée pour dénoncer les auteurs de ces crimes ?
L’effondrement de l’Etat malien a suivi les actions de sape de ces groupes auxquels est venu se greffer le mouvement national touareg. La partition d’un pays voisin sur la base d’une revendication ethnique (très) discutable ne peut être acceptée par un pays comme le nôtre dont la diversité du peuplement pourrait bien susciter des envies.
La guerre provoquée par les agissements inconsidérés de ces bandes armées est légitimée par la demande du peuple malien à travers son gouvernement. Toutes les Fatwas du monde n’y peuvent rien : l’agresseur est bien celui qui a provoqué cette situation de guerre. On peut se demander combien de Maliens se battent aujourd’hui à Djabali, à Konna, combien sont présents à Gao, Tombouctou, Kidal et ailleurs ? et de quel côté ?
Quand les Américains et les forces de l’OTAN sont venus en Irak ou en Afghanistan, ils ont détruit un pays, ils ont écrasé – ou essayé d’écraser – une force nationale de résistance. Ce sont les Irakiens qui se sont battus contre les envahisseurs. En Afghanistan, ce sont des Afghans qui ont fait face. C’est pourquoi ces envahisseurs sont aujourd’hui obligés de quitter ces pays. Mais au Mali ? Qui a occupé qui ? qui a détruit quoi ?
Je comprends qu’une frange de cette intelligentsia pense qu’une guerre au Mali pourrait retarder – ou remettre en cause définitivement – le principe d’une intervention en Syrie. C’est le souci essentiel qui anime une partie de ceux qui se sont prononcés. D’ailleurs ils ne l’ont pas caché dans les communiqués où il est question de la situation catastrophique dans ce pays. A qui la faute ?
On exige l’intervention des Occidentaux pour la Syrie, dernier pays à tenir tête à Israël et à l’hégémonie américaine, aujourd’hui à jamais détruit. Mais on refuse ce droit au peuple malien qui fait face à plus fort que lui.
Ce sont les mêmes avions, probablement les mêmes hommes qui ont détruit la Libye après des semaines de bombardements continus, les mêmes probablement qui occupent le ciel malien. Les voix qui s’élèvent aujourd’hui pour les dénoncer, les avaient bénis à l’époque. Peut-être qu’à leurs yeux, les Bambaras, les Songhaïs, les Touaregs, les Peulhs… toutes les populations du Mali ne méritent pas le secours de leurs alliés quand celui de leurs frères et voisins leur manque cruellement.

samedi 19 janvier 2013

BSA dans le collimateur


Le liquidateur de Mauritanie Airways tient visiblement à avoir sous la main le patrimoine de la société ou ce qu’il en reste. Alors que ce qu’il en reste a été précieusement préservé parce que justement les administrateurs mauritaniens de la société avaient refusa de le confier à un tiers tant que la justice ne s’est pas prononcée.
La semaine dernière, la surprise a été générale quand on appris l’interpellation de Mohamed Ould Debagh, ancien président du Conseil d’Administration de la société. La police économique voulait l’interroger sur ce patrimoine. le fait n’est pas anodin parce que la société est une société privée dont la majorité est détenue par le partenaire tunisien qui avait donc l’effectivité de la gestion. Alors pourquoi Ould Debagh ?
L’affaire est intervenue alors que toutes les sociétés appartenant à l’homme d’affaires Mohamed Ould Bouamatou sont l’objet de mises en demeure pour des redressements fiscaux «injustifiés», selon les responsables de ces sociétés. Mattel, Générale des Banques de Mauritanie (GBM) et toutes les filiales du groupe BSA ont été sommées de payer des montants jugés exorbitants. Le cas BSA Ciment est le plus révélateur de ce qui a vite pris l’allure de l’acharnement.
Il y a trois semaines environ, BSA Ciment recevait une correspondance de la DGI lui intimant l’ordre de payer 1,130 milliard d’ouguiyas. Avant de recevoir le courrier, les responsables de la société ont lu l’information sur des sites d’information. Ce qui les a fait tiquer.
La société a alors décidé de saisir la justice. Le président de la Chambre Civile de la Wilaya de Nouakchott a émis une ordonnance motivée par les articles 2, 5, 26 et 232 demandant à BSA Ciment de déposer une garantie dans un compte d’attente du Trésor en attendant de statuer sur le fond de l’affaire et ordonnant par la même occasion à la DGI de suspendre les mesures coercitives. BSA ciment s’exécuta en présentant une garantie de la GBM qui fut acceptée aussi bien par le président de la Chambre que par le Trésorier de la République. Ce qui n’empêcha pas la DGI de fermer le magasin où se trouve le pont-bascule. Sans autre forme de procès.
Cet acharnement accrédite l’information faisant état d’une rupture totale entre le Président Mohamed Ould Abdel Aziz et celui qui l’a soutenu en 2008 et 2009, l’homme d’affaires Mohamed Ould Bouamatou. Il est difficile de croire qu’un Président a le temps d’orienter ses services contre un opérateur, mais il est facile d’expliquer cet acharnement par un excès de zèle qui doit s’arrêter.

vendredi 18 janvier 2013

Informer sans promouvoir


La journaliste d’Al Jazeera annonce un contact avec Abul Baraa qui serait le chef du commando qui a investi le site gazier de In Amenas. Elle lui donne le temps d’exposer ses motifs et sa méthode d’action, donc sa version des évènements. Bien sûr, il se présente comme le héros qui tente de défendre les intérêts du peuple musulman. Les questions qu’elle lui pose sont d’abord un acquiescement à ce qu’il dit… puis elle lui demande s’il peut lui passer l’un des otages pour parler… ce qu’il accepte immédiatement.
Trois otages seront ainsi «entendus». Ce n’était pas des interviews mais des révélations de victimes visiblement obligées de dire ce qu’ils ont dit. La journaliste ne met pas en garde qu’il pourrait s’agir d’interview sous la contrainte. Elle ne témoigne aucune émotion, aucun sentiment vis-à-vis de pauvres civils menacés de mort… on en sort avec la nette impression que les humains, nos semblables, ceux qui subissent l’arbitraire sont ceux qui tiennent les armes. Les héros du jour sont ceux-là. Ce sont ceux-là qui méritent la sympathie.
L’Algérie ne pouvait pas continuer à souffrir cette situation. Les assaillants pouvaient désormais communiquer avec l’extérieur et donner un aspect acceptable à leur action criminelle. De leur côté, les ravisseurs, conscients des atouts qu’ils ont et assurés de donner les explications qu’ils voulaient, décident d’exfiltrer les otages qui se trouvaient dans la partie habitation du site. Il n’est pas question de les laisser partir avec leurs otages. La décision de détruire tous les véhicules qui essayent de quitter les lieux est prise. Les assaillants s’empressent d’expliquer qu’ils avaient juste l’intention de rassembler leurs otages sur les lieux de l’usine où se trouve déjà le véritable chef du commando, Abderrahmane Ennigeyri (le nigérien). Ils tentent ainsi d’incriminer l’Armée algérienne et de lui faire porter la responsabilité de la mort de tout ce monde.
La couverture quelque peu tendancieuse que cette chaine fait des évènements impliquant les Islamistes – toutes tendances confondues – est beaucoup plus évidente à nos yeux aujourd’hui. Peut-être parce qu’il s’agit de parler d’une zone que nous connaissons mieux… peut-être que la chaine en fait trop. Ou les deux.
Toujours est-il qu’Al Jazeera qui avait eu les premières images de l’occupation du Nord malien par les groupes armés, puis de la destruction du patrimoine culturel et humain de la région, cette chaine couvre les évènements d’aujourd’hui, et pour l’essentiel, par l’angle de l’exode des réfugiés oubliant que 90% de ces réfugiés dont la misère est décrite avec force détails sont là depuis mars 2012. Et quand les journalistes parlent de Konna ou de Djabali, ils n’hésitent pas à insister sur l’hostilité des populations vis-à-vis des «forces d’occupation».
Si Al Jazeera exprime un peu le jeu trouble de «son» pays d’origine, le Qatar, qu’en est-il de nos médias à nous ? ceux-là doivent s'interdire de verser dans la publicité pour des groupes déjà coupables vis-à-vis de notre pays. Au moins!

jeudi 17 janvier 2013

La Mauritanie dans la guerre


C’est apparemment ce que veut une frange de notre élite politico-médiatique. Quand un responsable politique ou un média diffuse une information indiquant que la Mauritanie participe déjà à la guerre, et ce au moment où se déroulait la sanglante et dramatique prise d’otages en Algérie, n’est-ce pas là une manière de «provoquer» chez les terroristes la volonté d’en découdre avec notre pays ?
En réalité la Mauritanie est déjà en guerre. Elle participe déjà à cette guerre qui a commencé le jour où des bandes armées ont fait main basse sur le Nord du Mali et choisi de s’attaquer à notre pays. Elle y est depuis que quelques-uns de nos enfants ont délibérément gagné les camps d’entrainement du GSPC puis AQMI pour s’attaquer à leur pays et aux autres pays de la région. Elle y est depuis qu’une frange de ses religieux a choisi d’apporter plus ou moins clairement, son soutien à ces groupes armés. Elle y est depuis que nos politiques et certains de nos journalistes ont justifié les agissements criminels de ces groupes…
La Mauritanie est en guerre. Elle prend part à cette guerre qui la concerne effectivement. Qui ne peut que la concerner…
Depuis quelques années, des groupes de combattants, résidus d’une guerre abominable menée en Algérie dans les années 90, ces groupes se sont donc retirés dans le Sahara central, côté malien. Ils ont réussi leur insertion sociale et se sont approprié les circuits économiques, y compris ceux des trafics de tous genres. Ils ont créé une nouvelle industrie qui est celle de la traite des personnes par les enlèvements de ressortissants occidentaux.
En s’installant sur ces terres déjà pauvres et ingrates, ces groupes ont détruit les circuits économiques traditionnels et ont ajouté à la misère des populations éprouvées par la mauvaise gouvernance. Ils ont réussi à corrompre le corps social et à saper les fondements de l’Etat malien. Ils s’en sont ensuite pris aux peuples voisins, insistant sur la Mauritanie, maillon faible. Ils ont tué des nôtres à Lemghayti, à Ghallawiya, à Nouakchott, à Tourine… ils ont assassiné des étrangers sur nos terres, mettant en péril ses relations et son image… comme si leur objectif était celui de mettre à genoux notre Etat et d’affamer nos peuples.
Les soldats mauritaniens ne sont peut-être pas dans la catégorie des «pauvres Musulmans» qu’il faille soutenir selon l’entendement de certains de nos Ulémas qui n’ont jamais été remués par les exactions, les tortures, les injustices, les inégalités subies, vécues par leurs compatriotes. Ni 1989, ni 1990, ni 1991, encore moins les épisodes malheureux de 1988 (épuration des Baathistes), de 1984 (épuration des Nassériens)… rien de tout ça ne les a fait bouger. Rien de cela ne mérite la mobilisation et la solidarité.
Tout comme les tueries de Lemghayti, de Ghaalawiya, de Tourine, et pas non plus les malheurs causés par ces bandes dans le Nord malien. Les milliers de réfugiés, le patrimoine détruit, les richesses pillées… tout cela ne mérite pas la colère.
On peut qualifier la guerre qui a commencé au Mali de «survivance coloniale» et la dénoncer, sans pour autant soutenir ou justifier les agissements des groupes armés. Les Mauritaniens, Ulémas, journalistes ou autres n’ont pas le droit d’oublier leurs compatriotes tués de façon abominable par ceux qui sont encore prêts à reprendre le chemin de la guerre contre notre pays. Il leur suffit un prétexte, celui que beaucoup de gens voudrait bien leur donner : une participation «présumée» mauritanienne à la guerre. Utile de rappeler que l’attaque de Lemghayti avait été justifiée par Bellawar par le supposé assassinat par la police mauritanienne de «la militante Zeyneb» lors d’une manifestation. Le fait n’a jamais eu lieu et la réaction à cette rumeur a été dramatique pour des citoyens mauritaniens. Musulmans quand même.

mercredi 16 janvier 2013

Que d’incohérences !


Il a suffi que la guerre commence pour que nos hommes politiques et certains de nos médias perdent le sens de la mesure. Quand on prête à une agence de presse la paternité d’une dépêche qu’elle n’a jamais émise, c’est bien pour donner du crédit à une lecture des évènements qui va dans le sens de la ligne éditoriale choisie par le média qui fait cela. La haine du régime en place justifie tous les mensonges et toutes les manipulations. On l’a vu ces derniers mois… mais il n’y a pas que cela. Il y a aussi ces incohérences que l’on relève et ces folies énoncées quand on entend nos politiques juger la guerre qui se déroule à nos portes et qui ne peut que nous concerner.
Tawaçoul, le parti islamiste sorti fraichement de son congrès refondateur dénonce ce qu’il appelle «ingérence extérieure». Il a peut-être raison de qualifier ainsi l’intervention française. Si l’on oublie que le même parti a demandé, exigé et appuyé l’intervention française en Libye, alors que celle-ci ne bénéficiait aucunement du soutien africain. Au Mali, la France répond à une demande expressément formulée par le Président malien par intérim, et avant lui par la communauté économique ouest-africaine (CEDEAO) et par l’Union africaine qui a introduit le dossier auprès de l’ONU. Comment peut-on bénir et soutenir fortement une intervention très critiquée – celle en Libye – et dénoncer une autre qui bénéficie d’un consensus international ? Le peuple malien qui a souffert de la présence des groupes jihadistes sur son territoire a bien le droit de bénéficier du concours de la communauté internationale, France en tête, pour chasser ces groupes criminels. Le peuple malien a plus besoin (et droit) à cette assistance que le peuple syrien déchiré par une guerre civile qui s’installe avec ses lots de morts et de destructions. Plus aussi que les rebelles libyens qui ont chassé Kadhafi du pouvoir «grâce» justement à l’appui de la France qui a entrainé avec elle quelques puissances occidentales.
J’ai entendu se prononcer quelques figures des anciens Cavaliers du Changement, aujourd’hui cadres de différentes formations. Tous tournaient autour «la guerre impérialiste» menée par l’ancienne puissance coloniale pour des raisons d’intérêts particuliers. Tout engagement d’une Nation trouve sa justification dans la réalisation de visées données. Ce n’est pas nouveau et c’est évident. Mais a-t-on le droit d’aller dans la dénonciation de l’action française jusqu’à la justification de l’entreprise terroriste ?
Hier, sur Al Jazeera, l’une des grandes figures politiques du pays soutenait que l’entreprise française vise à «contenir les revendications légitimes des peuples de la région». Que les groupes armés sont constitués de rebelles dont la sédition a débuté en 1963 et de «militants qui ont fui les dictatures en Algérie et en Mauritanie pour se réfugier dans le Nord du Mali et continuer leur combat contre ces dictatures…» Textuel ! cela ne demande pas de commentaire. Sauf à dire qu’un Mauritanien «normal» (bien pensant et honnête) ne peut pas pencher pour ces groupes criminels contre le peuple malien. Et s’il le fait, c’est qu’il est fou, idiot ou nihiliste, sinon les trois ensemble.

mardi 15 janvier 2013

Choum, le présent du futur


C’est un peu l’autre bout du monde ou si vous voulez une formule usitée, prête à servir n’importe où l’on va dans le nord de la Mauritanie, c’est «le milieu de nulle part». Vous ne savez jamais d’où vous arrivez en entrant à Choum. Vous avez tellement attendu le moment d’y venir, que vous y entrez sans vous rendre compte. Et comme toutes ses entrées se ressemblent, vous finissez par oublier de quelle direction vous venez.
La ville – m’enfin ! le village n’a pas changé. Ou presque pas. A peine on essaye de se retrouver et on est déjà sur la place centrale, le marché, les quelques boutiques qui proposent tout et rien. Et les hommes qui s’agglutinent à cette heure de la journée autour de deux ou trois jeux de «dhamet», le jeu de dames traditionnel de chez nous. De jeunes écolières rentrent de l’école en s’amusant, «dans la joie et l’allégresse» comme dirait un reporter de chez nous. La base de la SNIM qui donne vie à la localité. En fait, c’est autour de la gare du train qui passe ici au moins deux fois venant de Zouératt et deux fois revenant de Nouadhibou, c’est autour de cette gare que s’organise la vie. Toute la vie : l’économie, le social, voire le politique…
Le bruit du train m’interrompt. Une tranche de Modernité en plein désert. Des techniciens supérieurs, parmi lesquels des ingénieurs bien formés et ayant un grand sens de la responsabilité ont eu à gérer la «base de vie» de la SNIM à Choum. Mais ils l’ont ait à la manière des explorateurs et autres conquérants qui ne font qu’effleurer le monde qu’ils ont côtoyé.
Choum voit passer toutes les heures, des camions poids-lourds transportant d’autres poids-lourds en direction des environs, et surtout du Nord. On entend ici parler d’une multitude de prospecteurs dans les environs. De toutes les nationalités.
C’est, sur une trentaine de kilomètres sur la route de Choum, que l’on voit une série de tranchées creusées à partir des contreforts de l’Adrar vers l’ouest. On ne sait pas qui fait ça, pourquoi il le fait et où les tranchées se dirigent. On a comme l’impression que quelqu’un va installer des canalisations. Oudey el Kebsh, Oum Ghreyd, ‘Aggi… tous ces lieux sont traversées par ces tranchées qui obligent les usagers de la route à suivre une seule voie par moment…
On parle encore ici de cet accident récent qui a coûté la vie à un géologue mauritanien travaillant pour le compte d’un privé associé à des opérateurs turcs. Leur voiture s’est renversée non loin de Choum à 16 heures par une journée bien froide. Les secours ne sont arrivés qu’à 20 heures. C’est l’équipe de la SNIM qui a découvert la voiture recherchée depuis l’après-midi par la Gendarmerie avertie à partir de Nouakchott mais ayant reçu de fausse indication sur l’emplacement. L’infirmier de la SNIM a prodigué les premiers soins en attendant l’arrivée d’une équipe médicale de l’Armée et le transfert des blessés graves par avion militaire le lendemain.
On en parle encore pour dire la nécessité de construire la route Atar-Zouératt, une route qui désenclaverait toute la région et qui contribuerait à tranquilliser les dizaines d’étrangers venus chercher les minerais dans la région. Une région qui est en ébullition…
Seulement, cette hyperactivité dans la région, ne cache pas la misère des populations. L’année a été dure ici. «Si la boutique Emel a allégé la souffrance des habitants, ceux parmi eux qui ont du bétail n’ont pas eu de facilités pour alimenter leur bétail pendant toute la saison passée…», nous raconte l’habitant. Qui poursuit : «Ici, les gens semblent avoir l’habitude de souffrir en silence. Le labeur d’antan et les expériences acquises au travers des sécheresses du passé permettent aux populations de cacher leur dénuement, mais la famine menace sérieusement ici».
Si le futur de la région est celui qu’on espère avec toutes ces activités de prospection, son présent est fait de maladies liées au froid et à la malnutrition. Leur venir en aide eu plus vite.

lundi 14 janvier 2013

Les pièges de cette guerre


La guerre a commencé. Une guerre qui nous concerne directement. Pour plusieurs raisons, nous ne pouvons et ne devons être loin de ce qui se passe dans le Nord malien. Cela nous concerne. Plus, cela fait partie des déterminants de notre avenir.
La Mauritanie est le premier pays à souffrir de la présence des groupes terroristes dans le Septentrional malien. Plusieurs attaques ont été perpétrées contre notre pays qui a dû faire face, pratiquement seul, à la menace. Il a fallu payer le prix politique de la réorganisation des forces armées, puis celui de la mise en œuvre d’une stratégie à même de faire reculer la menace. On se souvient des accusations et des attaques politiques subies par les autorités soupçonnées de «mener une guerre par procuration», comme si les morts de Lemghayti, de Tourine, de Ghallawiya et d’ailleurs n’étaient pas des soldats mauritaniens tués dans leur pays alors qu’ils essayaient de remplir leur mission de défense dans les pires des conditions. Et ce sont justement ces conditions qui ont changé ces trois dernières années. La Mauritanie cueille aujourd’hui les fruits de cet effort qui permet de souffler et d’éviter la contamination.
Mais ce n’est pas parce que la France est notre premier allié, ce n’est pas non plus parce que ces groupes ont continué de menacer le pays après l’avoir attaqué plusieurs fois, qu’on peut, sous prétexte d’un consensus international et d’un mandat de l’ONU autour d'une requête malienne, participer directement aux opérations tant qu’une solution globale n’est pas trouvée.
Cela passe par la reconnaissance solennelle des droits des populations du Nord malien (Touaregs, Arabes, Songhaïs, Peulhs…), en même temps que se déroulent les opérations. On doit déjà exiger que soit mise en œuvre une approche qui pourrait satisfaire les doléances légitimes de ces populations qui font partie intégrante de l’ensemble malien. A plusieurs reprises, durant le siècle dernier, on a fait semblant de trouver une solution. Il ne s’agit plus de «faire semblant» mais d’imposer la mise en œuvre de la solution qui aura été l’objet d’un accord entre le Nord et le Sud sous l’égide de la communauté internationale. Enterrer définitivement les causes qui menaient fatalement à cette rébellion cyclique. Mais seul un gouvernement malien légitime peut négocier cette solution, un gouvernement issu d’un consensus de la classe politique (de ce qui en reste) et des acteurs sociaux. Pas celui qui a été imposé au nom d’une légalité mille fois violée. 
En face, le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), dans une moindre mesure le Front des Arabes, ceux de Ansar Eddine qui accepteront de renoncer aux rapports avec Al Qaeda et filiales et donc à la violence et à la sédition, les milices ethniques (Peules, Songhaïs…), devraient être associés à l’accord à trouver. Il s’agit pour le Mali de faire la paix et pour la région d’éviter la partition du Mali et de mettre fin aux activités criminelles des groupes et milices qui sont là depuis trop longtemps.
Le cliquetis des armes et l’ivresse des premières victoires contre des groupes somme toute obligés à abandonner leurs positions sous les coups répétés de l’aviation, ne peuvent faire oublier les problèmes réels qui ont conduit plusieurs fois à la sédition dans ces régions. Ils ne doivent pas non plus occulter un fait : c’est bien sur ce genre de situation où l’intervention occidentale est évidente que se nourrit Al Qaeda. Elle vient donc de réussir la première étape de sa stratégie qui est celle d’amener des forces étrangères sur le théâtre des opérations. Comment éviter la propagande favorable à l’organisation autour de la question ? C’est une question qui devra être rapidement traitée par les parties prenantes, à défaut de quoi elle se retournera contre eux. L’arme de la communication est terrible. Et un appel d’un président par intérim ne suffit pas à lui seul pour légitimer une guerre et une occupation. Surtout que parmi les chefs de guerre ayant occupé Konna figurent bien des fils de la ville. Comment faire pour que cette guerre qui vise effectivement à «sauver» le Mali de la déferlante terroriste venue du Nord, ne se transforme pas en guerre de libération contre un occupant «impérialiste» ?
Notre pays, tout en s’abstenant de participer directement, se contentera de protéger ses frontières pour éviter les débordements inévitables en pareilles circonstances. Tout en apportant son soutien politique et moral à l’effort de la communauté internationale dont le fer de lance est la France, un allié sûr de la Mauritanie, notre pays doit être le plus ferme à rappeler «le principe de l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation» tout en poussant vers la satisfaction des exigences des populations du Nord pour en finir définitivement. C’est, depuis le début, la position de la Mauritanie, celle plusieurs fois exprimée par ses premiers responsables. Il s’agit à présent de travailler pour une rupture avec la gestion et les méthodes du passé. C’est le prix à payer pour une paix réelle au Mali et une sécurisation du Sahel.  

dimanche 13 janvier 2013

Remuer sa langue dans sa bouche


...Le nombre de fois que cela demandera pour éviter de dire ce qu’il ne faut pas en pareilles circonstances. Il serait très aisé de prendre à partie la communauté internationale pour son intervention au Mali, de dénoncer «l’entreprise d’occupation» de l’ancienne métropole coloniale, de crier à la complicité des pouvoirs locaux… et de là d’accuser les uns et les autres de félonie, de subordination vis-à-vis de puissances extérieures… ce sera très facile. Pourtant ce doit être évité.
Notre élite – je parle ici pour la Mauritanie – a tendance à parler sans préjuger de la portée de ses propos. Cette élite a prouvé par le passé qu’elle ne croit pas que ce qui est dit peut porter à conséquence. On dit n’importe quoi. Comme on fait n’importe quoi parce que nous avons comme l’impression que nous ne rendons jamais compte de nos actes.
La guerre qui vient de commencer au Mali suscite une inquiétude légitime des Mauritaniens. Les acteurs politiques ont d’ailleurs anticipé pour condamner, à l’avance, toute volonté de participation de notre pays. Même si la question ne se posait pas et comme pour éviter de regretter tout ce que ces acteurs ont dit des frappes opérées par l’Armée mauritanienne contre cet ennemi qui avait fait du Nord malien une base de refuge, ces acteurs ont choisi de monter au créneau contre une intervention étrangère dans la zone dont les populations sont prises en otage, les économies détruites, les fondements des Etats sapés… les mêmes qui réclamaient une intervention pour la Libye, qui la réclament pour la Syrie, la dénoncent et la refusent pour le Nord malien tombé entre les mains de groupes criminels.
En pareilles circonstances, nous avons besoin d’un consensus qui pourrait conduire au renforcement du front intérieur. Cela demande des efforts de tous. Mais d’abord une relecture de la situation de la part des acteurs politiques. Permettez-moi de partager avec vous cette conclusion du quotidien malien Le Républicain éditorial signé Adam Thiam au lendemain de la prise de Konna par les Jihadistes :
«Le jeu politicien n’est pas l’ennemi de la décence. Quand l’armée est au front comme il l’est aujourd’hui, quand des pères et des mères risquent le deuil ou le vivent, que les batailles à livrer scellent le sort de millions de nos compatriotes, rien d’autre ne devrait compter que la nation. Nous en sommes là. Konna nous l’a brutalement rappelé hier.»

samedi 12 janvier 2013

Le PM devant le Parlement


Le Premier ministre Dr Moulaye Ould Mohamed Laghdaf a présenté jeudi sa déclaration de politique générale devant les députés de l’Assemblée nationale. Un exercice obligatoire qui a toujours occasionné des joutes, parfois agressives, souvent excessives, entre lui et ses détracteurs de l’opposition. Cette fois-ci, on n’a pas assisté à cet excès langagier qui perturbait la cérémonie et poussait au rejet de part et d’autre. Deux raisons probables : les députés de l’opposition, tout comme le Premier ministre, ont acquis une expérience qui leur permet désormais de savoir que déstabiliser l’adversaire ne mène à rien ; deuxièmement, si l’on fait la somme de ce qui a été dit, on est frappé par la vacuité des propos opposés au discours de Ould Mohamed Laghdaf qui a eu tout le loisir à développer sa présentation en toute sérénité.
Nous retiendrons qu’il a fait un exercice de communication plutôt satisfaisant, «finissant tous ses développements par une formule choc», comme dit un observateur. Exemples : quand il finit d’expliquer le dossier d’alimentation en eau de Magta Lahjar, il finit par «…ceci dit, il faut rappeler que plus de cinquante ans après les indépendances, personne avant le Président Ould Abdel Aziz n’a tenu à alimenter Magta Lahjar en eau potable…» ; sur les mauvais choix dans l’octroi des marchés de la santé, «…n’oubliez pas que nous avons envoyé par nous-mêmes l’Inspection générale d’Etat qui nous a fait des conclusions dont nous avons tenu compte pour rectifier, il ne faut pas donc qu’on nous fasse le procès sur la question» ; sur l’initiative de Messaoud Ould Boulkheir et après avoir loué son auteur et ses choix nationaux, «…il ne faut pas retenir seulement l’aspect gouvernement d’union de cette initiative qui vise à apaiser le climat politique et à rendre possible les élections lesquelles dépendent désormais par une CENI complètement indépendante, quel rôle alors pour un gouvernement d’union ?»
Les exemples de formules réussies et qui ont toujours manqué dans les échanges avec les députés sont nombreux et révèlent la grande évolution de Ould Mohamed Laghdaf qui a acquis une expérience certaine. Cela se voyait aussi à travers la maitrise de ses dossiers : à aucun moment, il n’a eu à chercher dans ses notes comme pendant les prestations passées.
L’eau, la santé, l’électricité, les interventions d’urgence… au-delà de la présentation des réalisations et des chiffres, l’exercice auquel le Premier ministre a été soumis a révélé une assurance qui a obligé à plus de mesure et de retenue. Du coup, les incidents des années passées ont été évités. C’est déjà ça de gagné…