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dimanche 2 décembre 2012

Retour de manivelle

En Egypte et en Tunisie, les choses se corsent. Dans les deux pays où ce que l’on appelle pompeusement «le printemps arabe» a éclos, la conséquence immédiate a été le départ des régimes corrompus, dictatoriaux et conservateurs d’avant. Puis l’arrivée, par voie des urnes, des groupes islamistes dits «modérés», parce que moins radicaux vis-à-vis de l’Occident et plus ouverts aux règles de la démocratie. L’euphorie du changement et la libération des opinions publiques ont fait oublier l’essentiel : la révolution restait à faire.
Chacun des deux régimes issus des bouleversements de 2011, doit aujourd’hui faire face à une sorte de retour de manivelle qui est en fait l’expression d’un refus de retour en arrière et d’une soif d’aller à l’avant pour réaliser une partie des promesses des soulèvements populaires ayant abouti au départ des chefs des appareils qui avaient violemment dirigé les deux pays.
En Egypte, l’accointance entre Frères Musulmans et Salafistes donne au nouveau pouvoir un aspect d’« obscurantisme révolutionnaire» qui en fait, non pas une promesse d’avenir, mais un rebus du passé. Avec notamment la tendance à vouloir imposer l’islamisation de la rue, des mœurs et même des fondements de la République. C’est ce qui explique le retrait de certaines composantes de l’espace politique et social de l’Assemblée constituante. D’où la précipitation du Président Mohamed Morsi à vouloir faire passer un texte au référendum et au plus vite. Alors que le pays est encore en ébullition à la suite de sa décision de concentrer tous les pouvoirs entre ses mains. S’il arrivait à faire main basse sur l’Egypte, que feraient les Coptes ? et les libéraux ? et les Jihadistes du Sinaï ?
En Tunisie, la situation est encore plus incertaine. Ici, la paix n’est pas signée entre les Islamistes de Nahda et les Salafistes d’une rare violence. Les évènements de Siliana sont venus confirmer la collision entre revendications sociales légitimes, ambitions politiques de certaines franges des partis politiques traditionnels et la volonté des Salafistes de s’affirmer sur la scène. Il y a lieu de rappeler que la première fois qu’on a parlé de cette ville – et de cette région – c’est quand on a vu les Salafistes chercher à y créer un Emirat islamique. Aujourd’hui ce sont tous les pans de la société qui se révoltent contre le pouvoir central qui est obligé de reculer. On n’en est pas à une émeute près depuis l’avènement du nouveau pouvoir.
C’est qu’en Egypte, comme en Tunisie, les Islamistes se sont confrontés aux réalités du pouvoir, à la gestion quotidienne de la vie publique, à la soif d’avoir tout et tout de suite… le manque de maturité ou tout simplement le calcul – si ce n’est une réalité qui se révèle au grand jour -, ont fait que ce pouvoir qu’on disait «révolutionnaire» et dont on attendait de nettes ruptures avec le passé et des options claires pour la Modernité, ce pouvoir s’avère une rumination de ce que les peuples arabes ont vécu jusqu’à présent. Le risque de voir simplement la révolution se traduire par un changement d’oppresseurs est grand. Dommage. 

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