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lundi 21 mai 2012

Le folklore de chez nous


C’est au cours de la belle émission culturelle présentée par Cheikh Ould Sidi Abdallah à TVM, que j’ai entendu le poète Ahmedou Ould Abdel Kader dire qu’on ne peut pas appeler «folklore» la culture Bidhâne, produite dans l’espace saharien qui nous concerne. Le «poète du peuple» - c’est comme ça qu’on appelait le plus populaire d’entre les poètes de cet espace, pour sn engagement et pour sa langue – disait que les productions de chez nous ont gardé le nom de leurs auteurs, et ne sont donc pas un patrimoine anonyme qui appartient à tous, perdant du coup cette valeur de création individuelle.
On oppose ici «le génie du peuple», anonyme, commun, populaire… à celui de la création individuelle fruit du génie individuel, marque déposée d’une compétence personnelle et preuve d’un état individuel qui aspire à s’élever au niveau de l’expression de l’humaine condition.
«Le folklore (de l'anglais folk, peuple et lore, savoir) est l'ensemble des productions collectives émanant du peuple et se transmettant d'une génération à l'autre par voie orale (contes, récits, chants, musiques, danses et croyances) ou par l'exemple (rites, savoir-faire).» (Wikipédia)
Dans l’espace Bidhâne, il est mal vu de réciter une production poétique sans en connaitre l’auteur. On vous dira que tel récite «une poésie bâtarde» (qui n’a pas de père). Et c’est vraiment dans la poésie dite en Hassaniya que les poètes de cet espace ont le plus exprimé leur génie. Et non dans le classique (Arabe). Même les plus grands parmi eux se sont surpassés en dialectal, tout en restant en-deçà en classique. Les plus doués ont créé une poésie qui allie dialecte et langue classique. Appelée «Zrayga» (mélange hybride), cette poésie a marqué un petit espace au sud-ouest de la Mauritanie, un coin du Trab el Bidhâne…
Il suffit d’écouter les belles productions d’antan, ou celles du siècle dernier. Elles incarnent mieux et plus ce que fut cette société, ses peines, ses joies, ses espérances, son histoire…
Une culture savante qui, en plus d’avoir la popularité d’un folklore, a mis l’écrit à contribution. C’est probablement la seule société nomade où l’écrit a cette forte présence. C’est aussi probablement la seule qui octroie un statut particulier aux praticiens du Verbe et de l’art en général. Pas tous les arts. En fait, c’est seulement la musique et la poésie qui sont pratiquées comme art. D’ailleurs, les deux expressions restent intimement liées.
Un concert de musique – on devrait dire «une séance de musique» - est un moment de création poétique. Un moment culturel et social par excellence. Les barrières générationnelles s’estompent, les réserves disparaissent, les langues se délient…
Aujourd’hui, nous n’avons plus le temps de tout ça. Jusqu’à récemment cependant tout se passait autour d’un hawl. La grande force de nos musiciens modernes, c’est d’avoir «démocratisé» leur art, le faisant passer d’une affaire d’élite à un art pour tous.

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