Pages

mercredi 30 novembre 2011

La Radio en fête


Même si cela s’est passé le 29, la célébration se faisait dans le cadre des festivités marquant le 51ème anniversaire de l’indépendance nationale. C’est d’ailleurs une tradition pour Radio Mauritanie : organiser une soirée à cette occasion. Comme d’habitude il y avait grand monde. Les moments forts de la soirée furent celui des distinctions et celui de la remémoration.
L’on a, entre autres, distingué l’érudit Hamden Ould Tah, la chanteuse Dimi Mint Abba à titre posthume et Abdallahi Ould Mohamedou, l’un des plus grands journalistes du pays qui a eu à diriger la radio et la télévision. D’autres furent distingués parmi lesquels de jeunes talents d’aujourd’hui.
Un programme a été présenté par Mohamed Abdallahi Bezeid, l’un des doyens de la radio. Un programme qui est revenu sur de vieux enregistrements dont le premier datait de 1956. C’était un enregistrement du Cheikh Abdullah Ould Cheikh Sidiya où il donnait une lecture de la société d’avant la colonisation. Suivirent des discours et interviews à des dates précises de l’histoire récente du pays. De quoi mettre en émoi l’assemblée.
Il faut rappeler que le «huna nouakchoot, idha’atu el joumhouriya el islamiya el muritaniya» a été fondamental dans la construction d’un Etat moderne sur cette terre. C’est par là qu’a commencé la construction de la personnalité mauritanienne des premières heures.
Au cours de cette soirée, on pouvait bien regretter la parole donnée au directeur de la Chinguitel pour faire un discours au même titre que les officiels. Ce n’est pas parce qu’il a sponsorisé la soirée qu’il doit avoir le droit d’utiliser un instrument de souveraineté pour faire la promotion de sa société. Surtout que l’on parle beaucoup des manquements de cette société vis-à-vis du fisc mauritanien. Elle est perçue comme un outil de pompage de devises à partir de la Mauritanie sans en payer la contrepartie.

mardi 29 novembre 2011

Les prétextes de la HAPA


Dans un communiqué sous forme de P-V publié en milieu de semaine dernière, la HAPA a essayé d’expliquer les choix qu’elle a faits. Le prétexte choisi pour tout le monde est le suivant : «offre rejetée pour non fourniture de pièces essentielles demandées dans le dossier et ou non constitution suivant les formes et les dispositions de la loi 045-2011, relative à la libéralisation de l’Audiovisuel».
Et pour chacun des «rejetés», la HAPA a envoyé une lettre expliquant son cas. Le dossier présenté au nom de l’Agence mauritanienne de Presse et qui demandait une radio dédiée à la jeunesse (Hit-FM) a été rejeté parce que les identités complètes des administrateurs de la société n’ont pas été fournies. Selon la HAPA, bien sûr. Parce que les filiations, avec copies de cartes d’identités, C-V et tout renseignement pouvant éclairer le parcours, ces informations étaient bien fournies. Mais apparemment, on s’est contenté d’éliminer avant l’étape de la notation, sans prendre la peine de lire le dossier.
Mes amis de Essiaj – journal et site d’informations – m’ont dit qu’ils ont reçu une lettre leur expliquant qu’ils n’ont pas rempli la partie dédiée à la société «en constitution». Bien sûr qu’une société déjà constituée ne va pas remplir les cases pour celle en constitution. Prétexte, là aussi.
On me dit que la plupart des demandes de télévisions ont été rejetées pour des questions liées à la non présentation d’un papier administratif comme le registre commercial. Il aurait été plus judicieux, plus juste, d’octroyer au moins les trois licences prévues (en plus des deux) sous réserve de fourniture du complément du dossier. Mais non !
Pas la peine de s’étaler là-dessus, les prétextes de la HAPA valent ce que vaut tout le reste.

lundi 28 novembre 2011

51 ans, ça se fête comment ?


La Mauritanie officielle a célébré le 51ème anniversaire de son existence par la traditionnelle levée des couleurs à la présidence. La veille, il y a eu la retraite aux flambeaux, l’avant-veille la célébration en grande pompe du 51ème anniversaire de l’Armée.
Des ONG’s et des activistes politiques ont choisi de se rendre sur le lieu où ont été pendus 28 soldats en 1990. La COD, elle, a célébré la journée en faisant «le bilan amer du général». Et c’est sans doute la plus intéressante de toutes les célébrations. Dans la mesure où elle évite de faire le bilan de cette moitié du siècle dont la situation actuelle n’est qu’une conséquence. ni dans le discours du président actuel de la COD, ni dans les présentations des intervenants…
Pourtant.
On ne peut pas oublier les erreurs politiques du début, avec notamment  l’interruption brutale du projet en 1975 avec la guerre du Sahara qui a fini par être la cause directe du coup d’Etat du 10 juillet 1978.
Rien sur la gestion catastrophique qui a suivi et à laquelle nombre de nos politiques les plus en vue ont participé. Et rien surtout sur les deux décennies qui ont le plus coûté au pays (1984-2005). En terme d’exécutions sommaires et sans jugement, d’exécution après jugement «accéléré», de tortures, d’expropriations, de déportations… Tout ce que nous dénonçons aujourd’hui en termes de passifs humanitaires, de bradages des ressources, de pillages des biens… nous vient de la gestion de ces deux décennies.
Les ministres de l’époque, les responsables politiques les soutiens «indéfectibles» - à l’époque, nous avons vu après qu’ils sont «défectibles» -, les Walis qui ont expulsé et exproprié à leur avantage les populations de la Vallée… ceux-là doivent répondre de ces actes et de ces positions avant  de faire la leçon, faire le bilan de ces longues années noires avant toute chose…
Tous ces pans du système auraient pu nous éviter de fêter séparément en acceptant de se retrouver sous la même tente… celle qu’on appelle Mauritanie. Elle mérite le dépassement de considérations égoïstes et de piètres calculs.

dimanche 27 novembre 2011

La COD et Inal

Certaines ONG et mouvements politiques ont décidé d’aller à Inal commémorer la mémoire des 28 soldats négro-africains ont été pendus sous les ordres d’un officier commandant la région à l’époque. Nous étions le 28 novembre 1990. Et c’était sa façon à lui de fêter le 30ème anniversaire de l’indépendance nationale. Une tragédie qui a bien eu lieu dans ce coin perdu et en ce jour symbole. Cela fait partie de ce que l’on appelle communément «le passif humanitaire» et qui pèse encore sur la mémoire collective des Mauritaniens.
Refusant de régler la question, la transition de 2005 l’a laissée en suspens au-dessus de nos têtes. Le gouvernement civil a fait un pas. Puis celui de Ould Abdel Abdel Aziz a engagé un processus de réconciliation qui s’est soldé par la prière de Kaédi (prière du pardon), puis par la réhabilitation des morts et des survivants par la reconnaissance des torts commis. Certes pas assez pour soigner une blessure profonde. Surtout que la question n’a pas fait objet de débats sur la scène nationale. Nombreux sont ceux qui nient aujourd’hui – et de bonne foi – l’existence de telles barbaries.
L’initiative visant la commémoration d’Inal pose visiblement problème au sein des appareils politiques, surtout la Coordination de l’opposition démocratique (COD). L’un des membres du convoi allant à Inal aurait déclaré que le bureau de la COD avait refusé d'accompagner les «visiteurs» d’Inal. Réponse de la COD :
«Certains sites d’information ont fait part hier, d’un refus de la COD de répondre à une invitation pour assister à des activités organisées à Inal par des organisations de droits de l’homme. Nous tenons, à ce sujet, à apporter la précision suivante : - La COD n’a jamais discuté de ce problème au cours de ses réunions».                                                          
La commission  de communication ayant signé ce communiqué le 27 novembre, publie juste après le communiqué qui suit :
«Pour cause de déplacement de certains Présidents de la COD hors de Nouakchott, la cérémonie de commémoration de la fête de l’indépendance nationale qui était prévue ce soir est reportée à demain, lundi 28 novembre 2011 à 17h à l’Hôtel Khater. Merci de votre compréhension». 
Il faut signaler que deux des dirigeants dont le président actuel de la COD, Ba Amadou Alassane, ont fait le déplacement d’Inal. En attendant de savoir à quoi s’en tenir, à signaler enfin ce passage du communiqué de l’Union des forces de progrès (UFP) à cette occasion :
«L’Union des Forces de Progrès (UFP) de Mauritanie, ayant été à l’avant-garde de la lutte, sous toutes ses formes, contre le chauvinisme d’État (1989-1991), l’a condamné avec la dernière énergie, contribuant à la mobilisation large et massive des partis politiques, d’associations diverses de la société civile, de nombreuses personnalités nationales parmi lesquelles le vénérable Bouddah Ould Bousseyri».

samedi 26 novembre 2011

L’unité nationale en question

C’est sur initiative de notre confrère du Rénovateur quotidien, Cheikh Tidjane Dia que la journée a été consacrée à la discussion autour du thème de l’unité nationale.
Respect des préceptes de l’unité nationale dans le dispositif juridique mauritanien, discours politique : antagonismes idéologiques et question nationale, système démocratique et gestion des contradictions, système éducatif et impact sur l’unité nationale, et enfin quelles solutions à la problématique de l’unité nationale.
Présentateurs-introducteurs des thèmes : Bâtonnier Ahmed Salem Ould Bouhoubeyni, Mme Salimata Lam, Sal Amadou, Bilal Ould Hamza et moi-même. Je prends la liberté de vous proposer en lecture la contribution qui a été la mienne. Mais avant, j’aimerai remercier les jeunes organisateurs qui ont ainsi permis un échange riche et fructueux.

Le système éducatif et son impact sur l’unité nationale

Pourquoi moi ? J’ai compris qu’en me confiant cette partie de la réflexion – sur l’impact de l’éducation sur l’unité nationale – mes amis interpellaient l’ancien enseignant plus que le confrère actuel. C’est pourquoi, la paraisse aidant, je m’en vais me limiter à vous proposer quelques questionnements qui m’ont obnubilé tout         au long d’une carrière qui aura duré un peu plus de sept ans dans les classes et deux ans dans l’administration centrale.
J’ai très tôt buté contre un premier écueil : l’absence d’un manuel scolaire pour le programme d’histoire et géographie que j’enseignais en langue française. Recours donc aux manuels en langue Arabe. Des manuels édités par l’Institut pédagogique national (IPN), vivant à l’époque ses dernières heures de gloire.
Je découvris qu’il y avait un découpage de l’Histoire qui épousait mal le processus historique vécu par le pays. L’empire du Ghana était ainsi classé parmi les «Empires des peuples noires de la savane et de la forêt». Dans la présentation, on vous dit qu’il fait partie de l’histoire du Mali. On ne parlait même pas de l’emplacement de sa capitale, encore moins de son aire de développement et de sa population.
Le mouvement almoravide était classé dans le registre des «mouvements de réforme» Maghrébins, côté Maroc et venait dans le prolongement des Croisades (?). Les Almoravides eux-mêmes étaient traités d’envahisseurs venus du nord pour islamiser le pays du Soudan.
L’épopée d’El Haj Oumar Tall était inscrite dans le cadre du commerce des esclaves parce que le combat de ce Saint aurait visé la domination d’un espace qui pourrait le fournir en esclaves vendus plus tard aux européens. Et quand on parle de sa mort dans les chutes du Bandiagara, on n’hésitait pas à dire qu’il a préféré …se suicider au lieu de se rendre. Pour un Mufti, un exégète de la trempe de El Haj Oumar el Fouty, le suicide est un acte de désespoir qui ne peut être que la résultante d’une profonde incroyance en Dieu.
Sur tout l’horaire des classes du collège, seulement trois heures étaient consacrées à l’Histoire et à la Géographie de la Mauritanie. Dans les classes de Lycée, deux heures seulement.
Je me souviens qu’à la suite de ma première inspection au Lycée d’Aïoun, j’ai reçu comme inspecteur le professeur Saydou Kane (rahmatou Llahi alayhi) devant lequel j’ai exposé ce que j’estimais être des insuffisances notoires. Il m’expliqua que les manuels en question avaient été très probablement écrits par les conseillers pédagogiques tunisiens. Leur pays a vu venir les Almoravides au lendemain des Croisades, au moment de leur reflux de l’Andalousie. Ils connaissent mal l’espace sahélien et croient que le Sahara est une barrière absolument infranchissable et qui a séparé les populations de ses deux rives (nord et sud). Que le suicide est un acte de bravoure et de détermination à leurs yeux.
Je compris des échanges que j’avais eus avec le valeureux inspecteur qu’il y avait d’abord un contenu à donner à notre enseignement. Un contenu qui devait permettre aux enfants mauritaniens de connaitre leur pays, son Histoire, ses cultures, ses composantes, son relief, son climat, ses ressources, ses gloires passées, ses potentialités à venir…
Nous étions en 1984. Toutes les années, j’ai fait un rapport que j’ai envoyé à l’inspection avec ampliation au ministère sur la nécessité d’orienter l’enseignement de l’Histoire-géographie sur la Mauritanie, d’y introduire probablement un aspect d’enseignement civique. Nous sommes en 2011 et l’enfant mauritanien d’aujourd’hui est encore plus ignorant de son pays.
Quand on dit système éducatif, on pense d’abord à une stratégie suivie par un pays, une société pour préparer les hommes et les femmes de demain. On pense à une école capable d’être le moule où l’on fabrique la personnalité de demain.
Le fondamental doit avoir pour objectif de former le citoyen, de jeter les bases de la personnalité future. C’est là que les valeurs citoyennes devraient être inculquées : égalité, équité, justice, respect de l’autre, respect de la chose publique, de la loi et des règlements, de l’ordre… C’est là aussi où se cultivent patriotisme et humanisme. A toutes ces valeurs positives devrait s’ajouter la culture de la probité, de la vérité, de la transparence.
Au secondaire et au supérieur, c’est le responsable de demain qui est préparé. La formation assure la constitution d’une élite capable de prendre en charge les problèmes de développement du pays, et capable de se prendre en charge elle-même.
Tout le cursus demande un cadre égal pour tous, une uniformisation des conditions à même d’atténuer les différences d’origine sociale liées soit à la naissance soit à la richesse soit à la fonction occupée par les parents. Où en est-on aujourd’hui ?
Il suffit d’aller devant une école publique de Tevraq Zeina pour voir l’ampleur des dégâts causés par la déconfiture de l’école mauritanienne. Il n’y a que les enfants de gardiens, pour la plupart des Haratines, qui envoient leurs enfants dans les écoles publiques. Les générations de demain évoluent déjà dans un système profondément «fracturé».
Le fait que l’élite envoie ses enfants dans les écoles privées a une autre conséquence qui aggrave le reste : personne ne s’occupe vraiment aujourd’hui de l’amélioration du service public dans le domaine de l’éducation. Le discours des politiques est sensiblement le même et le manque d’action – et de propositions – en la matière est évident.
La réforme de 1999 est intervenue pour :
  1. Unification du système par la suppression des filières linguistiques créées par  la réforme de 1979 ;
  2. Prolongement de la durée de l’enseignement du premier cycle du secondaire de 3 à 4 ans ;
  3. Renforcement de l’enseignement des sciences et introduction de la physique et de l’informatique dans le premier cycle du secondaire ;
  4. Renforcement de l’enseignement des langues étrangères (français, anglais).

Je ne retiendrai ici que le premier point pour expliquer d’où l’on vient. L’une des raisons qui m’ont amené à quitter l’exercice dans les classes était bien cette situation, dramatique à mes yeux, de devoir entrer dans une classe où il n’y avait qu’une des composantes du peuple mauritanien : dans une classe arabe où il n’y avait quasiment que des Arabes ; dans une classe dite bilingue où il n’y avait quasiment que des Négro-africains. Blessant et difficile à assimiler à la longue. La réforme de 1999 a voulu corriger cette grave réalité. Mais entre 79 et 99, des générations de Mauritaniens ont évolué parallèlement, sans contact aucun. Ne nous étonnons point aujourd’hui de voir, au niveau de l’université, des syndicats distincts pour chaque communauté, des revendications distinctes, des préoccupations distinctes…
En 1999, la question était de savoir comment réunir les Mauritaniens dans les mêmes classes. Elle a occulté tout le reste. La politique de l’époque, faite d’improvisations, n’a pas donné à cette réforme les moyens d’être mise en œuvre.
Le gouvernement n’a fait que renvoyer à plus tard la solution du problème. Accentuant du coup ses effets néfastes et nous éloignant un peu plus de la réalisation du meilleur pour nous.
Quelqu’un me disait récemment qu’on enseigne dans les classes de droit que la construction d’un Etat moderne se fait en trois axes : celui de l’unité et de l’organisation où l’égalité des citoyens doit être à la base ; celui de la non-appropriation de l’Etat où la règle de l’équité est de mise ; et celui de la multiplication des centres autonomes de décision où le mérite et le savoir-faire commandent. Et avant tout cela, une école performante est nécessaire pour former le citoyen et l’émanciper de toute pesanteur.
Douze ans après la réforme qui a voulu réunifier les enfants de tous milieux, cinquante-et-un ans après l’indépendance, nous en sommes encore à nous demander quelle école pour nous ?
Dramatique, n’est-ce pas ?

vendredi 25 novembre 2011

Oui, parlons de messages


Ce jour est particulier – j’utilise le terme pour accrocher les plus sceptiques, ceux qui pourraient être choqués par un terme comme «historique». C’est le jour où doit défiler l’Armée nationale en célébrant le jour de sa création. Premier message.
Pendant longtemps, les forces armées mauritaniennes ont fêté le 10 juillet, jour de la prise de pouvoir par un groupe d’officiers ayant jugé que la guerre du Sahara avait trop coûté. Acceptons cette explication. Leur gestion des affaires a été pourtant plus catastrophique pour le pays qui s’en relève encore très mal. En décidant d’une autre date – je ne sais pas qui en a décidé – on normalise un peu la célébration. Mais personne ne semble avoir retenu cela. Avec la parade de ce jour, on vient de consacrer le fait. C’est ancré et c’est tant mieux.
A ce message politique, il faut ajouter celui de la dissuasion. A l’endroit de l’ennemi actuel : le terrorisme et le crime organisé. Perçue comme le maillon faible, la Mauritanie a été dans la ligne de mire des terroristes, des trafiquants de drogue et d’armes, et des marchands de rêves européens à des jeunes toujours prêts à vivre les risques d’une traversée de moins en moins facile.
L’Armée fait la démonstration qu’elle peut dégarnir le front, faire la fête et démontrer toute sa puissance sans risque pour elle de voir l’ennemi s’attaquer au pays. Il y a un an c’était trop risqué. Aujourd’hui, c’est possible. Grâce justement aux multiples actions menées contre les bases terroristes dans le désert malien. La peur a changé de camp.
Message rassurant pour les populations qui savent désormais que les efforts consentis n’ont pas été vains, maintenant que les résultats sont visibles. A ceux qui voulaient tant savoir où passe l’argent destiné à la défense, la réponse a été donnée ce 25 novembre.
Rassurant aussi pour les investisseurs miniers qui craignaient pour la sécurité de leurs biens et qui le faisaient payer en termes d’offres minimales en contrepartie de l’exploitation de nos ressources. L’analyse risque-pays, mettait les nôtres dans une situation de demandeur donc de plus faible.
Un pays comme le nôtre a besoin d’une Armée forte du soutien de son peuple, du volontarisme de ses politiques et de sa (bonne) mise en condition. Une Armée qui a les moyens de remplir la noble mission qui est la sienne, n’a pas le temps de s’occuper de controverses futiles. Elle ne mérite pas non plus d’en être l’objet.

jeudi 24 novembre 2011

Proposition …décente


Le gouvernement a décidé de mobiliser 45 milliards UM pour atténuer les effets du déficit pluviométrique enregistré cette année. Ce sera autour de deux axes : sécurité alimentaire des hommes et aliments de bétail.
Je ne sais pas comment cela s’organise, mais une proposition est à faire. Elle vaut ce qu’elle vaut, mais je l’avance quand même.
La Mauritanie compte 53 départements (Mughataa) en comptant le tout nouveau Nbeyket Lehwash. Enlevons Nouakchott qui en compte 9. Nous reste 44 départements. Prenons 44 milliards sur les 45 et envoyons – sans considération de la taille du département – un milliard par département. Le milliard restant pourrait servir à Nouakchott et calmer ainsi les éventuels appétits.
Un milliard d’ouguiyas injecté dans un département, le résultat sera visible et bénéfique pour tous. D’autant que cela touchera directement les populations. Je ne sais pas pourquoi on n’a pas encore fait une telle proposition, mais rien n’empêche d’essayer ce genre de financements.

mercredi 23 novembre 2011

Education encore


Autour d’un thé à La Tribune, une discussion sur l’éducation. Quelqu’un avait développé l’idée que nous sommes tous responsables de l’état actuel de notre école. En disant que l’élite a préféré envoyer ses enfants dans le privé, ce qui a accentué le désintérêt et la désaffection pour le public. Cela a commencé au début des années 80 quand les premiers responsables ont commencé à envoyer leurs enfants à l’école française, suivis par les patrons, puis par la classe moyenne qui n’avait que les moyens de payer les écoles privées mauritaniennes de plus en plus nombreuses et de moins en moins performantes.
A mon avis cela participe à cette attitude globale qui est au fond une répétition du rejet que nos grands-parents avaient face à l’administration coloniale. Une attitude qui exprime l’absence de foi dans tout ce qui vient de l’Etat. Où est le politique qui fait référence aujourd’hui aux données ou aux chiffres officiels ? Où est le journaliste qui va sur le site du trésor public pour prendre l’information financière à la source ? Où est le cadre, l’homme d’affaires qui envoie ses enfants dans les écoles publiques ?
On oppose que c’est la qualité de ce service public qui dicte ce choix : «Vous n’allez pas choisir pour vos enfants le pire des cadres pour les former». Et de mettre tout sur le compte de la mauvaise gestion des pouvoirs mauritaniens. C’est raisonnable parce que tout relève de la responsabilité du pouvoir en place.
La poursuite de la discussion – modérée par l’ancien ministre Ely Ould Allaf – nous a permis de rappeler qu’à la base il faut rendre à l’école sa vocation de moule formateur de citoyens de demain. Avec le sens de l’intérêt public, du dévouement pour la Nation, de la culture du civisme… Ensuite réhabiliter la mission de formation d’une élite capable de se prendre en charge et de faire tourner le pays. Ce souci de la qualité doit évidemment remplacer celui de la quantité dictée par la «notion de justice» par la recherche de la scolarisation pour tous. Il faut surtout prendre en compte les choix économiques du pays et la demande sur le marché du travail. Nous sommes un pays à ambition minière, pourquoi ne pas orienter la formation vers ce secteur dès à présent ?
Le dernier souci doit être celui de la justice et de l’équité. L’école doit promouvoir l’égalité des citoyens, réhabiliter le mérite… pour cela mettre côte à côte enfants de tous les milieux sociaux, de toutes les composantes…
Espérons que la commission en place pour préparer d’éventuels états généraux de l’éducation, comprenne qu’elle n’est pas obligée d’organiser de telles assises et qu’elle rappelle à tous que la réforme de 1999 doit être améliorée pour être réellement mise en œuvre. 

mardi 22 novembre 2011

Manque de communication


Le président de la HAPA a pris visiblement le premier vol qui quittait Nouakchott au lendemain de l’octroi des premières licences. Personne au sein de l’institution ne semble pouvoir fournir d’explications à ceux qui sont nombreux à exprimer leurs mécontentements et leurs incompréhensions quant aux critères de choix qui l’ont guidé.
Au niveau des licences pour les télévisions, les pouvoirs publics avaient demandé cinq télévisions. Pourquoi le président de la HAPA s’est-il arrêté à deux ? On invoque ici et là le manque d’un papier dans un dossier, la non-conformité d’un autre… mais c’est peu comme prétexte à un moment où la libéralisation est attendue et où elle sert à confirmer la bonne volonté des autorités. N’est-ce pas justement là une manière de décrédibiliser le processus que de faire le choix de «remplir» deux places alors qu’il en reste trois et que les candidats ne manquent pas. Personne ne peut croire que Abdallahi Ould Mohamdy de Saharmédia a concocté un dossier susceptible de rejet. Un vieux professionnel comme lui a déjà un matériel et est actif dans le domaine de la télévision dans les pays voisins. L’octroi de la radio à Saharamédia est simplement une parade. Le projet Chinguitty est actif depuis près de deux ans. Plus celui de DAVA qui est là depuis 2009 et qui a même émis sur autorisation de la HAPA. Le dossier technique était tellement mal ficelé que n’importe qui pouvait le remplir. Mais aussi que n’importe qui pouvait trouver matière à exclure qui il veut. Pour récapituler : pourquoi la HAPA obstrue l’élan d’ouverture actuel ?
Pour les radios, pourquoi rejeter un dossier pour des considérations qui ne peuvent tenir à un moment aussi important et pourquoi surtout ne pas expliquer le système de notation dans le communiqué pour donner ensuite le résultat complet ?
Finalement cette opération ne satisfait personne. Les candidats n’ont rien compris au système préconisé et préfèrent tous parler de manque de transparence dans l’octroi des licences. Les heureux élus qui sont certes de vrais professionnels mais qui n’ont reçu aucune explication sur la suite à donner. L’espace politique qui se voit sevré : à cause des méthodes et du refus d’octroyer cinq licences de télévision au lieu de deux seulement, on a l’impression qu’il y a un calcul politique derrière. Pourtant, et s’est certain, aucune autorité publique n’a essayé d’interférer dans le travail de la HAPA. La HAPA a donc choisi en toute âme et conscience, voilà ce que ça a donné. 

lundi 21 novembre 2011

Opérations communes en vue ?


En avril 2010 et après de fortes hésitations, l’Algérie, le Niger, le Mali et la Mauritanie décidaient de mettre en place un Etat Major conjoint appelé «Comité d’état major opérationnel conjoint» (CEMOC). Le commandement général du CEMOC fut installé à Tamanrasset en Algérie, comme d’ailleurs le centre des renseignements qui fut lui installé à Alger. On avait cru que pour cela, l’Algérie, sans doute le plus puissant et le plus outillé de tous les Etats de la région, allait s’engager franchement dans la lutte contre le crime organisé soit par des frappes ciblées soit par des appuis au cours des opérations menées par la Mauritanie, le Mali ou le Niger. Il aura fallu toute cette crainte déclenchée autour du réarmement à partir de la Libye pour que l’on comprenne que les maquis d’Alger, de l’Aurès et de la Kabylie étaient alimentés à partir de l’activité menée dans l’espace sahélo-saharien. C’est ce qui explique l’actualisation de la nécessité de mener des actions communes.
Cela se passe au moment où c’est le Chef d’Etat Major mauritanien, le Général de brigade Mohamed Ould Cheikh Ahmed Ould Ghazwani qui prend le commandement du CEMOC. La cérémonie de passation de témoin entre le malien, Général Gabriel Poudiougou et son frère mauritanien s’est passée lundi à Bamako, en présence de leurs deux autres collègues du Niger, Général de division Seyni Garba et d’Algérie, Général de corps d’Armée Ahmed Gaïd Salah. L’occasion pour les chefs d’Etats Majors d’évaluer le chemin parcouru et surtout d’envisager l’action future.
Il y a quelques jours, le ministre nigérien des affaires étrangères déclarait à l’AFP que «le Cemoc n'est pas encore opérationnel et il y a lieu de lever les obstacles». Partant du fait de la puissance de l’Algérie, le ministre nigérien a déclaré que les militaires algériens «doivent pouvoir intervenir en Algérie mais aussi au Niger au Mali et en Mauritanie». Selon lui, «il y a une situation de fait que les Maliens ne sont pas en mesure de contrôler l'ensemble de leur territoire», alors que AQMI «a bien sa base dans le nord du Mali».
Au moment de la passation à Bamako, le Général Gabriel Podiougou a déclaré que «la période que nous traversons est marquée par de très grandes préoccupations sécuritaires au niveau international en général et dans la Bande Sahélo-Saharienne en particulier».  Il en a profité pour rappeler les succès de l’opération «Benkan» de mai et juillet 2011.
«La présence régulière des Forces Armées Nationales de la République Islamique de Mauritanie aux frontières a permis non seulement de réduire les activités des bandes armées dans lesdites zones frontalières», selon le Général malien. Le président sortant du CEMOC a confirmé les appréhensions quant à la connexion entre AQMI et Bokou Haram au Nigéria, en disant : «Nous avons relevé ces derniers temps, une dangereuse interconnexion entre les terrorismes évoluant dans les pays du champ et certaines sectes extrémistes subsahariennes. Aussi, il y a lieu d'envisager dès à présent d'étendre notre coopération aux armées des pays concernés».

dimanche 20 novembre 2011

Faut-il empêcher les uns de parler ?


L’un des présentateurs vedettes de la télévision française, Laurent Ruquier, disait pour expliquer son refus de recevoir la patronne du Front National, Marine Le Pen dans son émission culte «On n’est pas couché» : "Tant que rien ne m'y oblige, je choisis les invités politiques que je reçois comme bon me semble. Je veux avoir plaisir à les recevoir et ne souhaite pas livrer mon audience aux idées du Front national, qu'il soit représenté par Marine, Jean-Marie Le Pen ou Bruno Gollnisch. Je n'invite pas les gens qui font de mauvais films. Je ne prends pas non plus ceux qui encouragent les mauvais sentiments et sont un danger pour la cohésion nationale. C'est ma vision du service public".
Je ne peux pas juger des autres, mais pour moi, il y a des idées que je ne peux servir en leur prêtant un support dont leurs auteurs ne pouvaient rêver. Qu’on ne me reproche pas de m’abstenir de parler ou de donner la parole à ceux qui défendent des idées sectaires, racistes, xénophobes et finalement antinationales, à l’opposé du combat qui est le mien.
Oui je crois à la nécessité de préserver le droit à l’expression pour tout un chacun. Oui je défendrai l’exercice de ce droit s’il est menacé dans mon pays. Oui… j’en dénoncerai les abus s’il y a lieu…
Mais je n’accepterai jamais d’être le relais d’idées et de discours haineux dont les porteurs en font un fonds de commerce, un tremplin…
Je le dis surtout à mes confrères, comment je peux combattre pour des idées humanistes, reconnaissant le droit à la différence, pour promouvoir la vérité, l’égalité entre les hommes, la justice sociale, comment se battre contre le racisme, le népotisme, le régionalisme, le tribalisme, le particularisme, contre tous les maux en «isme» et donner la parole à ceux qui les cultivent ?
Cela ne pose aucun problème de conscience à la plupart d’entre nous visiblement. 

samedi 19 novembre 2011

La fin d’une traque ?


Sayf el Islam (le glaive de l’Islam, littéralement), le plus politique, le plus guerrier des fils de Kadhafi vient d’être arrêté dans le sud libyen. Il tentait visiblement de gagner l’espace sahélo-saharien, soit par le Niger où se trouve déjà l’un de ses frères, soit par le Mali.
La première fois où j’ai entendu parler de Sayf el Islam, c’était au milieu des années 90 quand on parlait de lui comme futur successeur de son père. A l’époque on entrevoyait chez quelques-uns des dirigeants arabes une volonté de fonder des dynasties en préparant leurs fils à leurs successions.
Les premiers à traiter avec lui furent les Occidentaux. Naturellement : on ne s’embarrasse jamais ici quand il s’agissait d’intérêts, sonnant et trébuchant du reste. Couvertures de magazines et de journaux, la une de télévisions officielles, réceptions en son honneur… tout y fut. En moins de temps qu’il faut pour le raconter, l’homme devient le chargé des relations publiques auprès des pays européens et américains. Pour son père.
C’est lui qui négocie les arrangements qui vont permettre la normalisation de la Libye avec la communauté internationale. Il discute avec les renseignements anglais et américains, avec les diplomates, les présidents et chefs d’Etats pour trouver une porte de sortie dans le dossier de Lockerbie, de celui de l’attentat du DC 10 d’UTA… Il fait plier son père qui va jusqu’à décider de se plier quant au dossier des armes interdites (chimiques et nucléaires).
Sayf el Islam est présenté comme un homme moderne qui sera la chance de la Libye de demain. Exactement comme ce fut le cas pour Bechar el Assad, Jemal Moubarak…
En février dernier, alors que la Libye connait ses premières révoltes, alors que tout indiquait que le changement tant attendu était nécessaire, Sayf el Islam fait une sortie où il menace le peuple libyen en promettant que beaucoup de sang va couler. Promesse tenue. Largement d’ailleurs.
Même s’il y a lieu de rappeler que Sayf el Islam n’est pas le seul responsable – avec lui l’OTAN, les rebelles et tout son clan à lui -, il faut espérer qu’il soit jugé par la Cour internationale pour laquelle il avait espéré se rendre. Il pourrait avoir le même sort que son père et son frère froidement assassinés, ce qui ajoutera un trauma de plus à la dramatique situation de la Libye. Prions pour qu’il soit épargné pour être jugé.

vendredi 18 novembre 2011

Le printemps qui dure


Le printemps arabe… dès le début on sentait qu’il y avait une arnaque en acceptant d’adopter une appellation aussi optimiste que celle-là. Il est vrai que les évènements de Tunisie ont vite enflammé les rues arabes et même européennes et américaines. D’où ce mouvement mondial de «l’indignation».
Quelques semaines après la fuite de Ben Ali, et c’est le dictateur d’Egypte qui s’en est allé contraint. Quelques mois et c’est Kadhafi qui connait une fin tragique. Cela dure encore au Yémen et en Syrie, dans une moindre mesure au Bahreïn.
Une hirondelle ne fait pas le printemps, dit-on. La Tunisie à elle seule ne peut pas faire le «printemps arabe». Et, malheureusement, il n’y aura que la Tunisie…
Seule la Tunisie semble réussir à pousser le changement au-delà d’un simple lifting du système ayant sévi des décennies durant. Sans doute le niveau d’instruction a-t-il joué dans ce pays qui a, depuis l’indépendance en 1956, joué la carte de la ressource humaine. Il y a certainement aussi la proximité de l’Europe et surtout le bon départ d’une Tunisie libérée des pesanteurs ancestrales par la volonté d’un moderniste visionnaire : Habib Bourguiba.
La place de la femme, le niveau de scolarisation, l’école moderne, la promotion de la culture (arts, écriture, lecture…), le tout a joué maintenant que le pays se trouve à un tournant de son histoire.
Mais il y a un peu plus que cela. Il y a Rachid Ghanouchi, ce leader islamiste qui a fait ses relectures bien avant que la Turquie islamiste ne fasse les siennes. Idéologue du mouvement islamiste tunisien, Ghanouchi a su (et pu) concevoir un mouvement enraciné dans les valeurs traditionnelles et résolument moderniste. Dès la chute du régime Ben Ali, l’homme est rentré n’attendant pas de voir s’exprimer les radicalismes libérés par la disparition d’un régime qui réduisait au silence tous les acteurs. Il est rapidement entré dans le débat interne, choisissant de s’investir lui-même pour contenir les affrontements prévisibles à cause des passions.
La démarche a été payante pour un mouvement qui a eu le mérite de n’avoir jamais composé avec la dictature. Pas un moment. Sa réussite aux élections est une prime à l’opposition, à l’attitude d’objection morale aux trafics politiques ambiants.
Le processus de mise en place d’un gouvernement d’union, plus ou moins consensuel, est le fruit de la maturité d’un mouvement qui a su être autonome. C’est un défi pour tous les mouvements islamiques dans le monde arabo-musulman où la décennie à venir sera celle de la conquête du pouvoir par ces mouvements.
Le processus «révolutionnaire» est beaucoup moins évident en Egypte où il reste otage de vieilles querelles, de visions archaïques (celle notamment des idéologues islamistes du début du 20ème siècle), et surtout du système qui n’a perdu que l’une de ses têtes (visibles).
En Libye, il faudra attendre que se calment les vents annonciateurs d’instabilités politiques et sociales pour parler de «processus révolutionnaire». Au Yémen et en Syrie, l’entêtement des pouvoirs en place continue de mener à la dérive. Au Bahreïn, la confrontation avec l’Iran permet à la minorité Sunnite de réprimer en silence…
Vous avez dit «printemps arabe» ?

jeudi 17 novembre 2011

Le peu qui fâche


On ne peut prendre au sérieux les rumeurs concernant quelques «malaises» dans les relations de la Mauritanie avec certains pays. Notamment le Qatar, les Emirats Arabes Unis, un peu moins le Koweït et l’Arabie Saoudite.
Avec ces pays l’on apprend que la campagne lancée par les disciples de Kadhafi depuis le début des attaques de l’OTAN contre le dictateur libyen, que cette campagne de dénigrement des Emirats du Golfe a bien pris. Insultes à leurs dirigeants, manifestations dans la rue avec des scènes où l’on voit les drapeaux brûlés etc.
Il paraît que les ambassades des deus Etats du Golfe (EAU et Qatar) à Nouakchott ont envoyé des lettres de protestation au ministère des affaires étrangères mauritanien lequel n’a pas daigné répondre.
Pour l’ambassade des Emirats, une lettre parlant du projet de manifestation a même été envoyée au ministère, mais aucun retour n’est venu rassurer ou expliquer que la liberté de manifester et de s’exprimer est ici garantie par la loi. Et que ce qui allait être dit n’engage qu’un petit groupe d’individus affiliés à une vision politique donnée… il y avait quelque chose à dire aux représentations diplomatiques de ces pays. Quelque chose qui pouvait préserver la particularité des liens.
Le pays de l’Emir Cheikh Zayed Ben Sultâne al Nahyane mérite un traitement particulier de la part des Mauritaniens. Nous devons aussi culpabiliser pour l’absence de représentant mauritanien à ses obsèques en 2004. A l’époque, la politique d’isolement menée par le régime conduisait à des comportements de ce genre. Sinon comment comprendre l’absence des Mauritaniens qui ont profité des largesses d’un Etat qui a accompagné leur développement, construisant routes, hôpitaux et écoles ?!? Ce fâcheux précédent nous dicte plus d’attention vis-à-vis des Emiratis. Tout comme le précédent avec le Koweït que nous avons lâché au moment de son occupation en 1990. Et l’Arabie Saoudite dont nous avons célébré l’attaque du territoire (Khafgi) en 1991. Autre époque, autres mœurs politiques.
Aujourd’hui que le pays est lancé sur la voie de la refondation, nous avons intérêt à faire plus attention à ces voisins …lointains, frères tout proches. Ce n’est pas parce qu’on est disciple de Kadhafi que l’on doit oublier que ce que les Emirats, le Koweït, l’Arabie Saoudite, le Qatar et même l’Irak ont donné à la Mauritanie n’est en rien comparable avec l’apport libyen. En terme de réalisations ayant profité aux populations. En terme aussi de soutien moral et politique.
Sans renier notre indépendance de décision ni nos lois garantissant la liberté d’expression, exprimons notre gratitude d’une manière ou d’une autre.

mercredi 16 novembre 2011

L’un des secrets du bonheur


C’est une émission de France 2 qui m’a inspiré. Une émission intitulée : «Leurs secrets du bonheur». L’autre soir, l’actrice, réalisatrice et auteur Florence Foresti s’est prêtée aux exercices proposés par Ilios Kotsou, chercheur en psychologie des émotions, enseignant de notoriété internationale. Il fait partie d’un groupe de chercheurs internationaux qui travaillent sur les secrets du bonheur de manière scientifique, quantifiable. C’est à la lumière d’une récente étude, «Etude Emmons, RA & Mc Cullough (Université de Californie)», qu’il «s’amusait» ce soir-là ç faire des démonstrations simples et utiles. Voir la vie sous un angle positif, optimiste, éviter le stress…
Ce soir-là, deux éléments du secret du bonheur ont attiré mon attention. Le premier, c’est l’expression de la gratitude. Elle rend plus heureux à plus de 25%. Elle permet de mieux dormir, de mieux vivre sa vie en dormant mieux et plus, en s’ouvrant mieux et plus sur l’autre, en subissant mieux le stress… Vous aurez compris que dans une société qui ne cultive pas la gratitude, il est intéressant de savoir cela.
On ne dit pas merci ici. On n’a pas d’exigence vis-à-vis de celui qui vous sert. Quelqu’un me disait l’autre jour que nous avons une société qui ignore les protocoles. Je dirai que c’est plus que ça : nous avons perdu l’habitude de reconnaitre le bienfait de l’autre, l’exigence morale de la reconnaissance, de la gratitude… En perdant le réflexe de dire «merci», on perd aussi une chance d’être heureux.
Deuxième élément, le sourire aux lèvres. Il déterminerait votre bonheur à l’intérieur et tout autour. Nous avons perdu le sourire… depuis longtemps.
Comprenez alors que nous soyons constipés. Des générations de constipés au sein de notre élite. Ce qui explique le recul de la joie, cause principale de certains de nos déboires psychologiques et sociaux.  

mardi 15 novembre 2011

Sans commentaire


Le lien m’a été envoyé par l’un des avocats de Mohamed Lemine Ould Dadde, ancien Commissaire des Droits de l’Homme. Il s’agit d’un article publié le 15 novembre par l’hebdomadaire français L’Express. Sous la plume de l’un de ses grands reporters, Vincent Hugeux et avec pour titre «Un combattant des droits humains embastillé en Mauritanie».
Sans commentaires, je vous propose en lecture des extraits :
«Que reproche un parquet aux ordres à cet activiste libéral, hier farouche opposant au régime autocratique de Maaouiya Ould Taya (1984-2005)? Officiellement, des malversations et détournements d'un montant de 271 millions d'ouguiyas, soit 750000 euros, commis dans l'exercice de ses fonctions. Grief fantaisiste, au regard des incohérences et des à-peu-près d'un dossier d'accusation digne de figurer parmi les études des cas soumises à des étudiants en droit de première année
«Tout indique que ce noble de la tribu des Tagounanet, fils d'un notable érudit, paie avant tout son engagement résolu contre l'esclavage et autres traditions féodales, tels l'excision ou le gavage des jeunes filles promises au mariage. A l'évidence, ses initiatives en faveur des Haratine, serfs négro-africains affranchis, auront irrité une élite arabe attachée à la perpétuation d'archaïsmes socio-ethniques. Mohamed Lemine avait d'ailleurs d'emblée prêché l'exemple, rendant sa liberté à son " frère de lait " Etman, l'esclave qui, conformément aux usages maures, lui fut alloué à sa naissance. Mais voilà: dans la Mauritanie de 2011, les tabous ancestraux font de la résistance

lundi 14 novembre 2011

Participe (passé), participe (présent)…

L’ouverture de la nouvelle session parlementaire m’amène à (re)parler de la participation aux futures échéances et au déroulement du dialogue et surtout aux conséquences du refus de certains d’y participer.
La présence des députés de l’Opposition «refusante» (rabida) du dialogue et de ses résultats interpelle à deux niveaux. Au niveau de la légitimation de la tenue de la session en dehors des délais initiaux qui voulaient que le mandat de la Chambre soit consommé : en acceptant de venir, les députés de l’Opposition (dure) bénissent l’avis donné par le Conseil Constitutionnel sur la possibilité d’étendre le mandat au-delà des délais initialement prévus.
Au niveau aussi de la légitimation des accords passés lors du processus du dialogue. La présente session sera, comme l’a dit le président de l’Assemblée Messaoud Ould Boulkheir, consacrée à l’adoption des textes de loi issus de l’accord intervenu entre les parties prenantes au dialogue. Les discussions autour de ces textes seront l’occasion pour les absents aux assises du dialogue d’apporter les correctifs qu’ils jugent nécessaires. A défaut d’avoir participé en tant que partis et cadres, ils vont le faire donc en tant que députés. Ce sera l’occasion pour les promoteurs de ce dialogue de faire plus de consensus autour de cet accord.
Revenons donc à l’exigence pour nous de savoir si les partis politiques vont pour une fois avoir une ligne de conduite conséquente. Sans mélange de genre.
En attendant, peut-on reprendre ce rappel de notre confrère QDN : "Il s’agit de l’Ordonnance n° 91-028 du 7octobre 1991 portant loi organique relative à l’élection des députés de l’Assemblée Nationale, modifiée par l’ordonnance 91-041 du 8 Décembre 1991 et la loi 2001-28 du 7 Février 2001 qui stipule en son article 2 : « Les pouvoirs de l’Assemblée Nationale expirent à l’ouverture de la cession du mois de Novembre à la cinquième année qui suit son élection. Sauf cas de dissolution, les élections générales ont lieu dans les soixante (60) jours qui précèdent l’expiration des pouvoirs de l’Assemblée nationale."
Qui est complice de quoi dans ce cas ? et qui va finir demain par dénoncer ce dont il est responsable en partie ? 

dimanche 13 novembre 2011

Elections en vue


Il y a quelques mois, on se faisait étriper si on défend l’opportunité d’une participation au dialogue entre Pouvoir et Opposition. Certains partis ont finalement accepté d’engager ce dialogue. Cela a abouti à un accord qui est, quoi qu’en disent ses détracteurs, est une nette avancée sur la voie du raffermissement de la démocratie.
Renforcement des règles de la transparence avec la naissance d’une CENI ayant le contrôle de toute l’opération électorale, augmentation substantielle des taux d’élus à la proportionnelle, volonté de limiter le nomadisme politique, obligation de passer par les partis pour se faire élire, mesures visant à garantir la neutralité de l’administration et de l’Armée…
Les élections dont la date reste à fixer, doivent obligatoirement être prévues avant octobre 2012. Il faut y penser dès à présent. Le refus de participer au dialogue va-t-il dicter le boycott des élections ? Est-ce que les partis du refus seront amenés par la logique de rejet à ne pas participer aux futures élections ?
Des questions qu’on évite de se poser (et de poser) à présent et qu’il va falloir poser un jour.
Nos politiques choisiront certainement le dernier moment pour se poser de telles questions. Comme toujours ils devront répondre dans la précipitation, sous la pression des sentiments. Comme toujours.

samedi 12 novembre 2011

Education, éducation…


La commission chargée de superviser les états généraux de l’éducation a été installée la semaine dernière. J’attendais voir sa composition pour commenter. On a visiblement choisi dans le sérail des enseignants (du supérieur au fondamental). Des techniciens plus que des politiques. Ce qui est louable.
Mais il serait plus «prudent» - au sens de plus «judicieux» - de prévenir la commission en lui disant que la tenue de telles assises n’est pas une fin en soi. Ses membres peuvent se dire que l’installation de la commission est déjà une sorte de concrétisation de la promesse faite par le Président Ould Abdel Aziz. Et qu’on peut s’arrêter là si l’on juge que la réforme de 1999 est valable. Mais qu’elle n’é jamais été appliquée pour manque de moyens.
Il est vrai que cette réforme a été décidée sans études préalables, sous le coup de l’improvisation. Ce n’est pas ce qui lui dénie toute valeur. Je n’en veux pour preuve que les résultats globalement positifs du baccalauréat 2011. En quantité et en qualité.
C’est d’autant plus méritoire que jamais les élèves issus de la réforme n’ont eu droit à des manuels. C’est à peine si leurs enseignants savent ce qu’ils doivent enseigner. Ni programmes, ni manuels.
Toute réforme doit cependant commencer par la restructuration des ministères. La situation actuelle ajoute à la confusion et à la faiblesse du système éducatif. Unifier les départements et le confier à un «poli-technicien» (un homme politique et en même temps un technicien).

vendredi 11 novembre 2011

Toute vérité est bonne à dire


On connait la maxime qui dit le contraire : toute vérité n’est pas bonne à dire. Ce que nous exprimons de façon moins prosaïque en disant que «mentir est proscrit, dire la vérité n’est pas à faire».
De l’une ou l’autre des maximes nous vient notre propension à ne pas dire exactement la vérité, à passer à côté à force de vouloir l’envelopper pour la rendre plus acceptable, plus… vraie pour tous. C’était quand nos valeurs et nos repères nous conditionnaient. Aujourd’hui qu’on s’est libéré de ce joug, l’évolution a été autrement plus hostile pour la réhabilitation de l’autorité et de la légitimité de la vérité.
Essayez sur vous, sur votre entourage la diffusion de deux informations, l’une que vous avez vous-mêmes fabriquée, l’autre qui se rapporte à un fait avéré. Attendez une ou deux heures et essayez d’avoir le retour – le feedback diront les plus branchés. Les intellectuels vous rappelleront que «la mauvaise monnaie chasse la bonne». Ils tenteront de vous prouver que la tendance chez l’homme est celle-là. Ce à quoi j’opposerai que le phénomène est encore plus flagrant, plus vulgaire chez nous.
Vous avez tous en tête l’affaire DSK et ce qu’elle a produit de polémiques et contre-polémiques. Vous n’avez pas oublié que la victime de la suite new yorkaise avait été discréditée parce qu’elle a menti au moins une fois en cherchant à avoir son permis de s’installer aux Etats-Unis. Parce que la vérité est ici le principe sacré. La société s’est approprié cette valeur et l’a imposée. Quand on peut mentir sur un fait, c’est qu’on peut le faire toute la vie. On est donc décrédibilisé.
Qu’en est-il chez nous ? … répondez vous-mêmes.
Je passe à une autre sagesse puisée dans le patrimoine de l’Iguidi : «Il ne faut pas dire tout ce qu’on a sur le cœur, parce que quand on aura tout dit, il ne nous restera plus rien à dire». CQFD.

jeudi 10 novembre 2011

L’urgence d’un plan


On rechigne à parler de «plan d’urgence», cela renvoie à une période et surtout à des pratiques données. On se souvient encore comment le Gouvernement de Sidi Ould Cheikh Abdallahi avait troqué l’appellation contre un banal «Programme spécial d’intervention» (PSI) en 2008. Un PSI dont les comptes n’ont jamais été soldés. Tout comme d’ailleurs le Plan d’urgence de 2003. On ne solde pas les comptes dans notre pays.
A la sortie de la réunion hebdomadaire du gouvernement, le Premier ministre a tenu un point de presse pour expliquer les dispositions prises par son gouvernement en vue de juguler les effets néfastes du déficit pluviométrique de cette année. Il ne s’agit pas d’un programme d’urgence ni d’un PSI, deux expériences dont on ne veut pas faire mention.
Deux axes d’action : la sécurité alimentaire des populations et la disponibilisation d’aliments de bétail en quantité suffisante et à des prix abordables pour les populations.
"Nous avons mis en place un programme pour faire face aux effets de ce phénomène sur les plans de la sécurité alimentaire des populations et de la protection du cheptel qui représente la colonne vertébrale de notre sécurité alimentaire et de notre économie nationale", a précisé le Premier ministre Moulaye Ould Mohamed Laghdaf. Le plan ainsi détaillé est le fruit de deux mois de réflexion d’un comité interministériel qui a défini les mécanismes appropriés.
Dr Moulaye Ould Mohamed Laghdaf a précisé que le programme a choisi de proroger et d’étendre l'opération "Solidarité 2011" dont la pertinence et l'efficacité sont unanimement reconnues sur toute l'étendue du territoire national. Ainsi, le nombre de boutiques passera de 700, ouvertes actuellement, à 2387 qui bénéficieront quotidiennement à 800.000 citoyens parmi les plus vulnérables, en plus d'opérations de distribution gratuites, chaque fois que cela est nécessaire, aux populations les plus pauvres.
Protéger ensuite le cheptel qui contribue, à hauteur de 13%, au Produit intérieur brut à travers la mise à dispositions de l'aliment de bétail, à des prix réduits, sur l'ensemble du territoire national, surtout dans les zones rurales. Cette composante comporte également le forage de puits dans des zones contenant des pâturages et manquant d'eau et de vastes campagnes de vaccination du cheptel.
Le premier ministre a indiqué que ce programme sera "mis en œuvre le plus tôt possible, avec tout le sérieux et toute la transparence" et que son coût est estimé à 45 milliards d'ouguiya, soit 157 millions de dollars américains.
Il a, pour l’occasion, lancé un appel à "nos frères et nos partenaires au développement pour aider au financement de ce programme pour lequel l'Etat a mobilisé tous ses moyens".

mercredi 9 novembre 2011

D’accord avec Taya


Je me souviens que dans une interview accordé à son ami François Soudan de Jeune Afrique – du temps où les poissons parlaient encore -, le Président Ould Taya avait dit que ce qui l’énervait le plus chez ses compatriotes, c’était leur refus d’accorder la priorité à ceux qui y ont droit dans la circulation et de vouloir toujours doubler même en commettant pour cela des infractions.
A l’époque, nous nous gaussions de ces considérations qui ne concernaient que les quelques prédateurs et/ou privilégiés d’un régime. Au milieu des années 80, les problèmes du pays n’étaient pas ceux-là. Avec le temps…
En l’absence de statistiques officielles, nous allons dire qu’il circule en Mauritanie plus de véhicules que de personnes. Surtout à Nouakchott. Que la circulation routière cause plus de dégâts – humains et matériels – que les inondations saisonnières, que les épidémies (connues jusque-là), que toutes les catastrophes que le pays a subies. Une hécatombe pour les hommes et pour les biens.
Depuis un peu plus d’un an, les autorités ont lancé une campagne. Elles ont même créé un corps dédié à la circulation routière et à sa sécurisation (au sens large). Ce corps est en train de prendre la relève de la police, au moins à Nouakchott. «Kelle jdiid lu benna», à chaque nouvelle chose, on accorde une période de grâce. Mais il est incontestable cependant que les jeunes, qui sont dans une phase d’acclimatation sur le terrain, ont réussi à réguler la circulation. Mais quoi qu’ils fassent, il leur restera quelque chose qui demande d’autres actions : la mentalité des usagers chaque jour plus nombreux, chaque jour moins respectueux des règlements. Et c’est là – là seulement – où je trouve que Taya avait raison d’insister là-dessus.
Que signifie s’arrêter à un feu rouge ? C’est accorder un temps (25-30 secondes) à l’autre usager pour qu’il passe. C’est attendre votre tour parce qu’il n’y a pas que vous sur les routes et dans la vie en général. C’est introduire un ordre impersonnel qui vaut pour tous.
Tout commence par là : accepter de partager cet espace avec d’autres que vous suivant des règles préétablies et acceptées par tous. La Modernité, la démocratie, la liberté, le développement, l’accomplissement de soi, le projet de société, l’Etat de droit… tout, absolument tout, commence par ce comportement qui semble anodin.
Comment construire un édifice ensemble, comment vivre ensemble, comment prétendre à une quelconque ambition si vous n’êtes pas capables d’attendre 30 secondes, le temps de laisser un autre usager passer sa route ?
Je propose que TVM plante une caméra à l’un des feux – choisir chaque jour l’un des feux – et qu’elle «flashe» toute infraction. Les Mauritaniens ont horreur de laisser transparaître cette malhonnêteté qui est devenue, depuis quelques décennies, une seconde nature chez eux. Rien de plus dissuasif.

mardi 8 novembre 2011

Le Nouakchott inquiétant


Je suis de Nouakchott. Je connais cette ville qui avait été édifiée avec l’indépendance du pays et qui a finalement fini par être… le pays.
Tout s’y passe, ou presque. En tout cas tout s’y décide. La politique, l’économie, la culture… tout est concentré ici. Et pour conclure, les partis politiques – et les activistes de l’ombre – sont venus s’établir ici. Aux côtés des centres de décision.
La première décennie de l’indépendance a été l’occasion pour les autorités de l’époque de dépenser une énergie énorme pour convaincre la population – pour l’essentiel nomade – à croire en l’avenir de la capitale et donc du pays. Ce ne fut pas facile. D’où l’importance de cet anodin appel : «huna Nwakchoot, idha’atu il joumhouriya il islaamiya el muritaniya» (ici Nouakchott, Radio de la République Islamique de Mauritanie). Quand on écoute les enregistrements de l’époque on se rend facilement compte de la bataille menée pour légitimer cette ville et la faire accepter. La nature fera le reste.
La décennie de la sécheresse – fin des années 60, début des 70 – oblige le pays à inverser les proportions : de 67% de la population nomade, nous passons petit à petit à près de 80% de sédentaires. Nouakchott en reçoit le tiers et même plus. Les premières projections prévoyaient de dépasser le cap des 100.000 habitants dans les années 80, on en était à 300.000 à la fin de ces années-là. On est officiellement à plus de huit cents mille aujourd’hui. Avec les lotissements des quartiers périphériques en cours, il faut s’attendre à un doublement dans les mois à venir. Surtout qu’une nouvelle sécheresse menace le monde rural. On peut toujours espérer que la saison politique prochaine va servir à faire revivre l’intérieur, tout en craignant que ce ne soit qu’un phénomène saisonnier.
Le Nouakchott d’aujourd’hui est inquiétant pour mille raisons. Le nombre de ses habitants et le manque cruel d’infrastructures. Le fait de crouler sous les immondices (une vieille «habitude» avec laquelle la ville semble renouer ces jours-ci). L’agressivité de ses habitants prêts à en découdre pour n’importe quelle raison. L’indescriptible chao que le manque de respect des règles urbaines installe : le refus de respecter les feux, les normes de sécurité, de construction, de respecter l’espace public, de respecter l’autre, l’absence de mentalité de quartier. Le développement de la criminalité. Le chômage. La concentration de toutes les activités du pays dans un espace de plus en plus exigu.
«Les hommes, c’est comme les pommes : ils pourrissent quand on les entasse». Si ce n’est pas un nomade qui a dit ça, ce devrait être quelqu’un qui les connait. Qui les connait très bien, tellement c’est vrai pour eux.
Le Nouakchott d’aujourd’hui n’arrive pas à être une ville parce que la ruralité a rattrapé ses habitants. Ce n’est pas non plus une campagne parce qu’il n’en a pas la tranquillité et la pureté. Pour le Nouakchottois que je suis, cette ville sombre lentement sous le poids de la pression démographique et du manque de vision – pour elle - chez les différentes autorités. Finalement, il est clair que Nouakchott n’appartient à personne parce qu’elle appartient à la Mauritanie, parce qu’elle est la Mauritanie… personne ne s’émeut pour son devenir. Et si quelques objections sont émises de temps en temps, aucune action ne semble venir.