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jeudi 15 mai 2014

Retour au pays

Avec l’âge – je crois -, les liens avec le pays deviennent plus forts et plus pesants. Plus question de s’oublier dans les «délices de Capoue», dans la beauté des paysages toujours verts, dans les cafés toujours pleins, dans les animations d’une société de consommation frénétique… Dès la première semaine de l’absence, on commence à se plaindre, à «manquer de quelque chose» qu’on ne sait pas définir, à chercher «quelque chose qu’on connait»… Même s’il s’agit du Maroc qui est quand même un pays très proche, presque soi-même, on est vite en manque…
Alors le voyage du retour devient un événement majeur, intense, stressant et en même temps enivrant. Le temps pris à gagner l’aéroport, à faire les formalités d’enregistrement, puis les formalités policières et douanières, toutes les étapes se transforment rapidement en désagréments qui, dès qu’ils sont dépassés, sont oubliés parce qu’on aura fait un pas de plus vers cette Mauritanie qui nous manque. Le temps de penser à tous ces compatriotes qui vivent ailleurs pour différentes raisons…
Il y a ceux qui ont quitté pour des raisons économiques, des exilés à la recherche du travail : des qui ont étudié à l’extérieur et qui ont préféré y rester pour continuer dans leurs domaines de compétences. Il y a tous ceux qui, villageois et anciens campagnards, sont partis pour les mêmes raisons – chercher du travail – sans avoir de compétences particulières. Il y a cette jeunesse qui a fui le pays dans les années 80, 90 et 2000 pour absence d’horizons : mal formée, mal préparée, aucune chance pour elle de trouver du travail. Ce sont ces vagues qui se rendaient en Espagne en particulier pour les vendanges, aux Etats-Unis pour les petits boulots. Dans cette diaspora-là, il y a de grandes qualifications : on n’a pas oublié les Rencontres nationales d’experts mauritaniens de l’intérieur et de l’extérieur organisées par l’ANESP. Ce son bien ces Rencontres qui ont recommandé la création d’un département dédié aux Mauritaniens de l’étranger…
Il y a ceux de nos compatriotes qui sont partis pour des raisons politiques de persécutions. Ceux parmi eux qui ne sont pas revenus depuis que le pays est revenu à une situation normale où le danger d’écrire, de manifester, bref de s’exprimer n’existe plus, ceux-là sont restés par manque de confiance en l’avenir ou pour raisons de conforts personnels. Combien sont-ils en Belgique, en France, aux Etats-Unis, et disséminés un peu partout dans le monde ? Personne ne sait, mais ils existent en bon nombre.
A ceux-là il faut ajouter les nouveaux candidats à l’exil qui, pour être acceptés dans les pays riches du Nord, invoquent des raisons aussi farfelues que les persécutions pour «raisons sexuelles» ou «religieuses». Dans la première catégorie, on range ceux qui partent parce qu’ils ne «peuvent pas afficher publiquement leurs orientations sexuelles», autrement dit leur homosexualité. Dans la deuxième, les candidats racontent qu’ils sont poursuivis pour raison de «conversion au christianisme», ce qui est puni par la loi.
Mais la frange de nos compatriotes partant à l’étranger dans des conditions difficiles et parfois dramatiques, ce sont bien tous ces malades accompagnés de leurs familles qui sont obligés de partir en Tunisie, au Maroc, au Sénégal, au Mali pour se soigner souvent pour des maladies qu’on peut bien traiter ici. La présence de plus en plus évidente de malades mauritaniens et l’importance de la facture pour eux et pour l’Etat, doit amener les autorités à réfléchir à une solution au plus vite.
Il y a certes l’effort de moderniser le plateau médical en équipant les hôpitaux. Il y a eu toute l’évolution notoire de l’assurance maladie qui a permis de limiter les évacuations sanitaires. Il y a eu la création de nouvelles structures spécialisées dans la lutte contre des maladies qui tuent de plus en plus en Mauritanie. Mais il reste l’effort à faire au niveau de la ressource humaine, surtout de sa mise à niveau. On a comme l’impression que nos praticiens manquent de tout : expérience, connaissances (parfois), conscience… On peut en parler pendant des jours, ce ne sont pas les exemples ni les indices qui manqueront. Alors ?

En cette veille de campagne pour la présidentielle, la santé doit faire l’objet d’une sérieuse réflexion et de grandes propositions. Elle doit être au centre des débats. Tout comme l’éducation.

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