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lundi 24 février 2014

Le vrai danger

Sur les ondes d’une radio privée de la place, un titre : «le président du Rassemblement des Forces Démocratiques refuse de rencontrer le Premier ministre de Mohamed Ould Abdel Aziz». Puis dans le développement : «Selon des sources dignes de foi, de l’intérieur du parti RFD, le président de ce parti a refusé une invitation semblable à celle adressée par le Premier ministre mauritanien à Mohamed Ould Maouloud. Le refus est consécutif à une réunion avec ses proches qui lui ont conseillé de décliner l’invitation…» Pour étayer et expliquer l’information, la radio invite le porte-parole du parti qui dit en substance : «Effectivement, le directeur de cabinet du Premier ministre a contacté celui du Président Ahmed Ould Daddah pour lui signifier l’invitation. Mais on n’en a pas parlé et aucune décision n’a encore été prise à ce sujet». Formel et catégorique. Pourtant, la speakerine enchaine : «Ainsi dont, le RFD refuse l’offre de dialogue…»
Sur une chaîne de télévision locale, un titre : «Le ministre de la Justice dit ne pas être au courant de l’agression contre Ould Dedew». Développement de l’information, on donne une image, sans le son du ministre lors de son intervention à l’issue du Conseil des ministres de jeudi dernier, puis un passage : «…personnellement je ne suis pas au courant d’une telle agression…» Tout ce qui est avant et après est supprimé. Juste cette phrase. Parce que si l’on écoute ce qu’a dit le ministre, rien à voir avec le titre : «J’ai lu sur le net des choses qui sont fausses, y compris à mon égard, pour cette affaire, rien d’officiel ne me permet d’être au courant à l’heure actuelle, en l’absence d’un officier de police judiciaire et le Shaykh n’ayant pas porté plainte, il n’y a pas eu de poursuites. Donc je ne suis pas au courant officiellement».
A la une de toutes les chaines et des sites : le Président de l’Assemblée nationale a refusé à la presse d’accéder à la Chambre pour suivre ses débats. Renseignements pris : le Président de l’Assemblée veut limiter l’accès de la grande salle aux seuls députés devant y siéger. Pour ce faire, il veut réserver un espace à la presse audiovisuelle d’abord, et à côté à la presse écrite. Il entend redynamiser la direction de la communication pour que la presse ait un interface officiel pour avoir une fluidité et une célérité dans l’information. En attendant, il invite les journalistes à aller dans la partie haute de la salle.
Et le syndicat des journalistes de produire un communiqué qui dénonce le recul de la liberté d’expression au lendemain de la publication du rapport de MSF classant la Mauritanie à la 66ème place. Comme si l’objectif était de porter atteinte à cette image positive.
Ce que je reproche ici au syndicat, c’est d’avoir ignoré tous les appels venus de Ulémas, d’Imams, d’érudits, de simples leaders d’opinion, de vendeurs de téléphones en faillite et même de journalistes travaillant dans les radios, les appels des uns et des autres à limiter la liberté d’expression. Certains n’hésitant pas à stigmatiser des stations. C’est le cas de Sahel TV visée par un communiqué des Ulémas et Imams, de Al Wataniya soumise à la vindicte par les manifestants du vendredi dernier et qui ont participé à des actes de vandalisme dans les écoles de Nouakchott…
Ce sont ces appels répétés qui menacent le plus la liberté d’expression. Vient ensuite le niveau des journalistes et le traitement fait par les médias de l’information.
Chaque heure, sa rumeur. On ne recule devant rien quand on croit pouvoir donner une primeur. On crée si on est à sec. Quant à la diffamation, c’est un art pratiqué avec brio chez nous.
Plus que tout, ce sont bien ces relents d’autoritarisme et d’obscurantisme qui causeront le plus de dégâts. Conjugués au manque d’éthique et de professionnalisme, c’est la mort assurée non seulement de la profession mais aussi de l’exercice de la liberté d’expression.
C’est contre cela (aussi) que tous les syndicats, toutes les organisations de presse doivent faire front. Dénoncer les appels et rester vigilants. 

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