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dimanche 15 septembre 2013

Vieille habitude

Il y a des habitudes qui sont ancrées et qui sont vieilles comme le temps. Par exemple cette tendance chez les nôtres de changer de camp et d’appréciations «quand il le faut», elle est vieille.
Il ya longtemps, très longtemps, l’un des Emirats de cet espace qui deviendra la Mauritanie, connut un vide dans l’exercice du pouvoir : la prétention d’une famille forte mais n’ayant pas la légitimité nécessaire, bloqua la succession. Chaque jour, les Shuyukhs (Sages) de la Jemaa traditionnelle se réunissaient pour trouver un consensus et légitimer cette prétention qui ne pouvait être contrée pour le moment. Mais chaque fois que la réunion commençait, le même monsieur se levait pour dire qu’il n’était «pas question de donner le pouvoir à (untel), parce qu’il n’est pas le plus indiqué : ni son statut dans la famille, ni son sens du courage, encore moins sa geste ou sa prestance… rien ne le prédispose à diriger notre communauté…»
Chaque fois que ce qui est dit est dit, une gêne clouait les présents. Puis il se trouvait toujours l’un d’eux qui proposait de lever la séance pour le lendemain.
Au quatrième jour des conciliabules – qui n’en étaient pas d’ailleurs -, la même scène arriva. Mais rentré chez lui, le candidat à la chefferie choisit l’une des plus belles juments de son écurie, les plus beaux et les plus complets de ses harnachements, un fusil et une bandoulière pleine de munitions et accompagna le tout de deux boubous, l’un blanc et l’autre bleu. Quand la «grande nuit» tomba et que personne ne bougea plus, il amena le tout devant la tente du guerrier contestataire de sa chefferie. Il le réveilla et lui dit : «c’est pour toi». Aucun mot de plus.
Le lendemain, notre homme porta les boubous offerts, enfourcha la jument et prit le fusil sur l’épaule. La Jemaa se retrouva pour discuter de la problématique de la chefferie : à qui devait-elle revenir ? Comme d’habitude, c’est le même qui prit la parole le premier : «Qui peut prétendre à nous guider en ces moments difficiles ? C’est seulement celui qui se trouve être le plus courageux d’entre nous, le plus téméraire, le plus juste, le plus noble, le plus digne, le plus prodigue, le plus craint… il n’y en n’a pas deux. Seul (untel) peut nous guider en ces temps incertains où l’on a besoin de vrais hommes…»
Quelqu’un parmi les présents réfléchissant sans doute en haut : «mais ce ne sont pas tes paroles d’hier !». et notre guerrier de répliquer : «ce ne sont pas non plus mes boubous d’hier, ni ma jument d’hier, ni mon fusil…»

Morale : le tlah-liih n’est pas d’aujourd’hui…