Depuis le début, la question est posée :
qui a intérêt et donc qui veut réellement aller aux élections ? La réponse
est sans appel : personne ou presque.
Le nouveau système électoral, avec notamment l’augmentation
des taux de proportionnelles, assure à tous, même les plus faibles, une part
des sièges à pourvoir. Il est sûr donc que chacun des partis actuellement plus
ou moins bien pourvus, y perdront des plumes.
Côté
Majorité, l’Union pour la
République (UPR) est loin d’être assuré de garder son poids électoral actuel. Héritier
de ADIL, le parti du Président Ould Cheikh Abdallahi, l’UPR n’a pas eu l’expérience
d’une compétition électorale depuis sa création autre que la présidentielle
dont la dynamique était lancée et soutenue ailleurs.
Les partis satellites de l’UPR, comme l’Union
pour la démocratie et le progrès (UDP) ou le Parti républicain pour la
démocratie et la réforme (PRDR) pour ne citer que les plus significatifs en
termes de représentativité électorale, ces partis n’ont pas les moyens de
rééditer leurs exploits passés. La conjoncture a changé et arriver aux mêmes
scores relève de l’impossible pour eux.
Les nouveaux partis, comme ceux des jeunes, n’ont
pas encore l’expérience requise pour être assurés de résultats «acceptables». Ils pourront certes
profiter des mécontentements que susciteront les choix de l’UPR pour récupérer
les plus déterminés des postulants à la candidature. Mais ce ne sera pas
suffisant pour leur donner assez de confiance pour aller aux élections sans
appréhensions sérieuses.
Côté
Opposition, le statut du chef
de file de l’Opposition répond à de nouveaux critères qui écarteront
certainement Ahmed Ould Daddah, le président du Rassemblement des forces
démocratiques (RFD). D’abord l’esprit du Statut consiste à mettre en lace une
Institution et non un homme : l’«Institution
de l’Opposition démocratique» et non le «chef de file». Ensuite, il faut être un élu pour accéder à ce
statut. Le président du RFD est donc sûr de ne pas pouvoir briguer ce poste de
chef de file de l’Opposition. Pas besoin de parler du recul très probable du
parti, ni de l’avancée d’autres partis d’Opposition, les nouvelles règles
suffisent à elles seules pour assurer une alternance à la tête de l’Institution
de l’Opposition.
Avec les évènements d’Egypte, mais aussi le
positionnement quelque peu hasardeux au niveau national, les Islamistes de
Tawaçoul doutent désormais de pouvoir faire le raz-de-marée qu’ils assuraient
depuis deux ans. La récente visite de terrain du Président Ould Abdel Aziz a
démontré combien est factice l’implantation du parti dans certains milieux :
c’est dans les agglomérations «acquises»
- jusque-là à Tawaçoul – qu’il a eu les accueils les lus fervents (le triangle
Rosso-Rkiz-Mederdra). Le reflux «révolutionnaire»,
les prises de position sur la Syrie où la guerre civile a détruit tout un pays
et le changement de stratégie chez les Qataris pèsent déjà sur l’analyse de la
situation favorable jusque-là.
L’Union des forces du progrès (UFP) est poussée
par son élite dirigeante vers le boycott. Même si le «centralisme démocratique» qui dicte au parti d’écouter la base, pousse
déjà vers la participation. Le courant du boycott et du refus de la tenue de
telles élections travaille sérieusement pour empêcher le débat sur la question.
Côté
Opposition participative, on
voit désormais l’initiative lancée par le Président Messaoud Ould Boulkheir
comme une manœuvre visant à reculer l’échéance. Sinon comment comprendre que
celui qui a diligenté le dialogue avec le pouvoir après avoir tout fait pour tenir
ses compagnons à l’écart, qui a abouti à des résultats probants parce que
significatifs pour l’organisation d’élections transparentes et régulières, qui
a participé au tri d’une Commission électorale indépendante chargée d’organiser
ces élections… comment comprendre que cet homme-là cherche aujourd’hui à
reprendre un dialogue «inclusif»,
exige la mise en place d’un gouvernement de consensus (ou d’ouverture, ou d’union)
chargé d’organiser les élections et reconnaisse ainsi l’échec de l’entreprise
menée avec d’autres et dont les résultats ont été loués par tous ?
Finalement, on se rend compte que seuls El Wiam
de Boydiel Ould Hoummoid, le Président Ould Abdel Aziz lui-même, les petits
nouveaux partis qui n’ont pas de grandes influences sur l’opinion publique et
un petit peu Tawaçoul, seuls ceux-là ont intérêt à voir se dérouler ces
élections.
El Wiam parce que c’est un parti qui allie
héritage de Taya, notabilisme et moyens, ce qui l’assure d’aller au-delà de ses
espérances, surtout qu’il ne sera jamais perçu comme «opposition radicale». Ni par le pouvoir qui le traitera en
partenaire et non en adversaire, ni par les éventuels mécontents qui voudront
exprimer leur état d’âme sans aller trop loin.
Le Président Ould Abdel Aziz concoctera une
Majorité à partir de la configuration politique qui apparaitra après les
élections qui seront pour lui un teste avant l’échéance de 2014.
Pour les petits partis,
ce sera l’occasion de profiter (au moins) de la proportionnelle et de se faire
une place sur l’échiquier.