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lundi 14 octobre 2013

Il n’y aura pas de listes UFP

J'ai attendu tard pour savoir si des listes vont finalement être maintenues au nom de l'UFP. Sur les 24 listes initialement déposées au nom de l’Union des forces du progrès, seules cinq ont finalement continué la course au nom d’autres partis (Tawaçoul, Al Vadila et… Çawab). Toutes les autres ont soit retiré leurs candidatures d’elles-mêmes, soit la CENI leur a refusé de se présenter au nom du parti dont la direction a décidé le boycott. En d’autres temps, non loin de nous, le nom du parti aurait été retenu pour lui coller un score qui ne convient pas. Au moins une avancée…
Avec la décision de la CENI, il n’est plus question de parler d’une «participation de l’UFP», on n’a pas fini cependant de parler de cette décision de boycott qui pourrait avoir de graves conséquences pour le parti et pour tous ceux qui ont choisi une telle attitude.
En mars 1992, l’Union des forces démocratiques (UFD, avant d’être «/Ere nouvelle») a boycotté les élections législatives après avoir jugé que le pouvoir sorti des urnes en janvier de la même année, que ce pouvoir était illégitime et qu’il avait volé la victoire du candidat Ahmed Ould Daddah. La décision a été difficile à prendre parce que les composantes – à l’époque cela épousait les contours des groupuscules politiques – n’étaient pas d’accord sur l’opportunité encore moins sur la justesse d’une telle décision.
Ceux du mouvement national démocratique (MND, ancêtre de l’UFP) et ceux du Comité de crise qui allaient constituer plus tard Action pour le Changement avant de rallier l’Alliance populaire progressiste (APP) voyaient dans le boycott un risque de marginalisation pour leur parti et d’interruption du processus démocratique qui sera fatale pour le pays. Des débats passionnés et intenses vont amener à la décision de boycott sous prétexte que le pouvoir est à ses limites, que les Observateurs occidentaux ne reconnaissent pas les élections et que les forces de l’opposition sont au summum de leur popularité. On fera même des variations sur la santé du Président Ould Taya et sur ses capacités à diriger.
Ould Taya dirigera plus de treize ans après et quand viendra le changement, ce sera un changement de l’intérieur où l’opposition de l’époque n’a joué aucun rôle. Parce qu’entretemps, elle a été laminée. Le parti UFD, devenu UFD/EN a éclaté d’abord avec le départ de ceux qui allaient constituer AC puis rallier APP. Ensuite avec le déchirement qui va donner UFD/EN A de Ould Daddah et UFD/EN B qu’animent les amis de Moustapha Bedredine. Le pouvoir servant les deux en interdisant le parti en octobre 2000. Ce qui obligea les uns à créer le RFD (rassemblement des forces démocratiques), les autres l’UFP.
Les désistements continuèrent vidant les partis de leurs cadres. Si bien que quand l’UFP engage «le compromis historique» qui conduit à l’ouverture de contacts avec le pouvoir de Ould Taya, la résistance est nulle et tous les partis sont obligés d’y aller, même s’ils sont convaincus qu’il s’agit d’une mise en scène de plus. Mais douze ans d’exclusion, de tergiversations entre un radicalisme sans moyen et la compromission évidente, douze ans ont suffi pour aplatir la classe politique. Qui sera sauvée, in extrémis, par le coup d’Etat du 3 août 2005 : cette classe politique était déjà prête à abdiquer.
L’absence de programme alternatif explique largement le blanc-seing offert à la junte avec laquelle l’ensemble du personnel politique s’engage sans précautions. Les hésitations de l’UFP seront mises sur le compte du processus interrompu, celles de l’APP sur l’humeur du président Messaoud Ould Boulkheir. Personne ne prêtant attention aux avertissements des deux partis qui sont rapidement dépassés par les évènements. Les yeux sont braqués sur la présidentielle et rien ne peut en détourner l’attention.
Passons l’épisode des «indépendants», celui du «vote blanc» comme ultime tentative de revenir sur le processus de transition et celui des alliances du deuxième tour qui révèle de forts ressentiments entre les leaders de l’opposition traditionnelle. Ce deuxième tour qui met face à face deux jeunes ministres du gouvernement de Moktar Ould Daddah, renversé le 10 juillet 1978. Deux jeunes ministres qui sont entrés à la politique par effraction et qui, avant leur sollicitation n’ont jamais été intéressés (publiquement) par ce qui se passait dans le pays. Exit les ténors des mouvements politiques, ceux qui ont animé la scène une trentaine d’années durant, sinon plus pour certains d’entre eux. Première conclusion : échec et mat pour les groupuscules politiques qui ont été incapables de «produire» une figure charismatique, pouvant fédérer les Mauritaniens. La conclusion ne sera pas tirée par les hommes politiques.
La crise et ce qui s’en suit. L’éclatement des composantes de la toute jeune Institution de l’Opposition démocratique : l’UFP qui fait passer une réforme de la loi sur cette Institution et qui finit par gagner le théâtre des opérations où se déroulent des combats passionnés entre les pans d’un pouvoir qui n’a pas fini de se stabiliser. Le parti est rejoint par Tawaçoul.
L’engagement de ces partis dans une bataille qui n’est pas la leur, perturbe les rapports et renforce les craintes de l’aile militaire du pouvoir qui y voit une tentative de revanche des «victimes du 10 juillet 1978 et de celles du 3 août 2005». Les uns et les autres semblant converger vers la présidence pour «pourrir la pomme de l’intérieur». Les évènements s’accélèrent aboutissant au coup d’Etat du 6 août, qualifié par certains de «rectification». Puis l’Accord de Dakar et le gouvernement d’union nationale chargé d’organiser une élection présidentielle qui voit l’Opposition incapable de s’unifier autour d’une candidature unique encore moins d’assumer ce dont elle est responsable en premier. Elle ne reconnait pas les résultats et cherche à cacher l’échec derrière «l’encre chimique» puis en jouant sur les mots «élection légale» ou «élection légitime».

On revient au syndrome de 1992, sauf qu’il est étalé sur le temps. Le mécanisme d’alors se met définitivement en place avec la décision de boycott de ces derniers jours. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, il ne faut pas s’attendre à un «rebondissement» de l’Opposition radicale à court ou à moyen termes.

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