Il
s’appelle «Hamzo» et il fait du rap. De temps en temps, il sort
apparemment un clip. Plus ou moins réussi. Mais quelque soit le jugement qu’on
peut porter ici ou là sur la qualité du clip – souvent bonne -, sur la voix,
sur les mots, sur les thèmes…, une chose est sûre : il s’agit là d’une
première manifestation de l’absence d’un cadre «officiel» à même de
promouvoir les activités de la jeunesse mauritanienne. Rien n’est fait pour
laisser éclore le génie de cette jeunesse qui se cherche dans un monde
chancelant et indécis. Peu de place pour cette jeunesse assoiffée de modernité,
assoiffée d’ailleurs, aspirant à autre chose qui libère de cette pesanteur qui
nous pétrifie depuis tout ce temps…
Chaque
fois que je vois des scènes du film Tergit, ces jeunes mauresques chantant et
dansant, ce groupe de Kaédi présentant la chanson qui a remporté le prix du
festival de la jeunesse de 1974, et cet orchestre national avec tous ses
éléments : de Hadrami Ould Meydah, un véritable monument de l’art moderne
mauritanien s’il en est, à «Petit Sall», le guitariste, à Ould Sa’oud, à
Mohamed Neyfara…, chaque fois que je les vois, je me dis : «que de
temps perdu, que de talents perdus, que de joies à jamais réprimées…» je me
dis que le malheur du pays, c’est d’abord le recul de la joie, l’absence de la
joie, la répression de la joie qu’on nous impose. Depuis des décennies, nous
avons perdu le réflexe de nous amuser, de laisser parler notre émotion… alors
que c’est l’émotion qui suscite la création. Qui provoque les évolutions qui
annoncent les révolutions.
La
mentalité qu’on nous impose, et qui n’a pas toujours été la nôtre, est celle
qui fait régner une tristesse générale sur les esprits. Ce qui cause «la
constipation» de la société. Au propre et au figuré.
Notre
société a été incapable de digérer son devenir, comme elle n’a pas pu «avaler»
son passé, elle s’est perdu entre deux états : celui d’une société en
rupture avec ce qu’elle fut et sans vision pour ce qu’elle veut être.
Des
jeunes tentent parfois d’innover, de bousculer les habitudes et de rompre le
carcan qui les empêche de se mouvoir. Ils sont immédiatement la cible de
quelques censeurs aigris et constipés. Et qui ne veulent pas du changement.
Seuls
les rétrogrades savent que «chaque fois que les rythmes de la musique
changent, les murs de la ville tremblent». Et quand les murs tremblent, ce
sont tous les ordres qui s’effondrent.
Novateurs,
créateurs libérez-vous et unissez vos efforts. Ne vous en faites surtout
pas : il se trouvera toujours quelqu’un pour apprécier ce que vous faites
et qui vous donnera raison de le faire. Continuez. Rien que pour ça.
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