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jeudi 9 mai 2013

Plutôt bien


Si l’on dépasse les échanges houleux provoqués par le face à face entre Bibekrine Ould Ahmed, faqih, et Samory Ould Bèye, syndicaliste, on peut dire que le débat organisé par TVM était plutôt de bonne facture.
Sur la question de l’esclavage, des vérités ont été dites, avec plus ou moins de pertinence. Mais l’essentiel, c’est que le débat a eu lieu et qu’il a mis face à face intellectuels hassanophones (Haratine ou non).
J’en retiens l’approche d’un jeune professeur d’université que j’avais vu auparavant sans jamais savoir ce qu’il faisait réellement. Bekaye, c’est son prénom, a mis en garde contre deux attitudes qui caractérisent aujourd’hui le débat : l’exagération ou la banalisation de la problématique liée à l’esclavage. En Arabe : ettehwiil wa ettehwiine.
Ceux qui disent qu’il n’y a plus d’esclavage en Mauritanie et que ses séquelles sont à traiter comme tous les problèmes du sous-développement, ceux-là se trompent. Tout comme ceux qui soutiennent que la pratique est généralisée et institutionnalisée.
Les premiers par simplification, occultent la souffrance de centaines d’individus qui vivent encore les affres de la pratique. Ils taisent toutes les frustrations que vivent des milliers de Mauritaniens ayant vécus – ou vivant encore – les effets de la condition servile : ignorance, pauvreté, incapacité, non accomplissement de soi, indignité, marginalisation, non accès à la propriété…
Les seconds passent sous silence tous les efforts qui ont été faits dans le sens de l’éradication de la pratique et de la mise en place d’un système plus équitable, plus juste, capable de soigner les plaies séculaires mais encore vivantes. Ils nient la lutte de l’élite mauritanienne – d’une partie de cette élite – qui a payé de sa liberté, de son temps, de son énergie pour faire avancer les choses sur ce front.
L’esclavage a été criminalisé par des lois consensuelles qui impliquent donc toutes les franges de notre société. Il s’agit maintenant de rendre effective cette criminalisation. Il y a quelques mises en examen, une ou deux condamnations, mais cela ne suffit pas. La nouvelle agence promet d’intervenir et de traduire devant la justice tout fauteur. Il faut donner le ton et au plus vite.
Les séquelles de l’esclavage sont reconnues par tous. une discrimination positive doit être mise en œuvre et au plus vite. Nous avons encore en souvenir les efforts de l’époque de Ould Taya. Quand il lançait ses programmes de crédit agricole, de scolarisation universelle, de lutte contre l’analphabétisme…, il pensait plus ou moins sincèrement à les diriger spécifiquement vers les Adwabas, vers ces communautés d’anciens esclaves qui n’arrivent pas à sortir de leurs conditions de misère faute de politique volontariste. Mais Ould Taya n’avait pas inscrit cette action dans un environnement de rigueur. Les projets ont été détournés au profit des dignitaires du régime. Ils sont partis en fumée sans avoir eu d’effets sur la situation qui a empiré.
Il y a des raisons d’espérer. D’abord l’état des lieux : avec notamment les lois, la volonté politique déclarée (de tous les acteurs), une réelle prise de conscience des enjeux, l’existence d’une élite (de grande valeur technique et intellectuelle) dans les milieux Haratines et l’évolution sociale globale qui transforme la société indépendamment des résistances qui subsistent ici et là.
Reste que l’atmosphère générale du débat est polluée par les «négationnistes» et  les «radicaux». L’équilibre n’est pas à chercher entre la simplification (banalisation) et l’exagération. D’ailleurs l’équilibre n’est pas à rechercher. Ce qui doit être recherchée, c’est plutôt la fermeté dans la mise en œuvre de ce qui a été décidé et dans le refus de l’instrumentalisation de la question

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