C’est
un vieux dossier qui pourrait trouver son dénouement en Mauritanie. Le 31 août
1978, l’Imam Mussa Sadr, un chef Chiite libanais, disparaît sans laisser de
traces, en même temps que ses deux collaborateurs qui l’accompagnaient au terme
d’un périple dans les pays arabes en vue de plaider pour un sommet au lendemain
de l’occupation du Sud-Liban par les forces israéliennes (mars 1978).
Les
autorités libyennes ont toujours soutenu que l’Imam Sadr avait quitté le pays
pour l’Italie. Ce que le gouvernement italien a toujours réfuté.
L’Imam
Mussa Sadr est une autorité du Chiisme, mais aussi l’une des plus grandes
figures politiques et religieuses du pays du cèdre. Là-bas, ce philosophe et
exégète du Chiisme avait promu un dialogue interconfessionnel. Poussant le sens
de l’ouverture jusqu’à assister, en 1963, à l’intronisation du Pape Paul VI. Il
est le premier Chiite (et le seul) à participer à un tel évènement. Autre signe :
sa présence lors de l’inauguration de la cathédrale Saint-Louis de Beyrouth.
Il
a usé de son charisme et de son aura pour stopper la guerre civile qui a
détruit le pays en ces années sombres. Il est même allé jusqu’à décréter une
grève de la faim pour protester contre la constitution d’une milice de
confession chiite (Amal). C’est dire que sa disparition avait suscité un grand
émoi dans les milieux progressistes arabes et particulièrement dans son pays.
A-t-il
été tué par Kadhafi sur demande des Syriens et des Palestiniens qui le
percevaient en adversaire ? a-t-il été liquidé suite à une altercation
avec les autorités libyennes déjà fortement marquées par les humeurs
pathologiques de Kadhafi ? Personne ne peut répondre même si, en février
2011, l’Ambassadeur libyen auprès de la Ligue Arabe, avait déclaré qu’il avait
été tué et enterré non loin de la ville libyenne de Sebha. Au Liban, la
question est toujours d’actualité.
C’est
pourquoi, le pays de Sadr fait des démarches auprès des autorités
mauritaniennes pour avoir de nouvelles informations par Abdallah Senoussi, l’ancien
chef des renseignements libyens arrêté à Nouakchott dans la nuit du 16 au 17
mars 2012. Surnommé «la boîte noire de Kadhafi», Senoussi pourrait
effectivement avoir quelques renseignements là-dessus, lui qui a été de toutes
les basses besognes. Comme quoi la position du gouvernement mauritanien était
plutôt juste.
En effet, en acceptant de livrer Senoussi avant de «faire
le point» avec lui, la Mauritanie se serait privée d’une mine d’informations
concernant l’histoire du Monde arabe et musulman, mais aussi des Amériques, des
mouvements de libération et des activistes de partout… Il faut seulement se demander
si les Mauritaniens ont été intéressés par soutirer à Senoussi tout ce qu’il
sait sur les agissements libyens dans le Sahel, au Sahara, au Moyen-Orient, en
Afrique de l’Ouest, du Centre et de l’Est, en Asie et en Amérique. Si c’est le
cas, ce ne sont pas seulement les Libanais qui seraient attirés par les
services mauritaniens. Sinon, ce serait dommage.