Permettez-moi, chers lecteurs de partager avec vous l’éditorial de
l’édition de la semaine passée de La Tribune :
«L’évènement
politique majeur de cette semaine est sans doute le retour au pays de Mohamed
Ould Maouloud, président de l’Union des forces du progrès (UFP), composante
essentielle de la Coordination de l’opposition démocratique (COD). Pourquoi le
retour de cet homme peut être un tournant dans le processus politique ?
La
personnalité et le parcours de Ould Maouloud font de lui l’un des principaux «politiciens»,
au sens du compromis, de la manœuvre, de l’intelligence, de l’opportunité, de
l’engagement…, bref de tout ce qui fait un homme politique et qui l’empêche de
tourner dans le vide, de faire du surplace et/ou de tourner en rond.
C’est
pourquoi son absence pendant les longs mois qu’il est resté à se soigner à
l’étranger, ont certainement dû peser dans les positionnements politiques.
Notamment de l’opposition dont il est un élément essentiel. Mais comment
l’absence d’un homme peut-elle autant peser ?
Ould
Maouloud est entré très jeune à la politique. Il a été opposant du temps de
Moktar Ould Daddah, puis du régime militaire. Son statut de président du
Mouvement national démocratique (MND) l’a mis au-devant de l’activisme, dans
ses deux phases : la clandestine et la visible à travers les partis.
Le
MND, avec le MDI (mouvement des démocrates indépendants) animés par les jeunes
qui créeront plus tard Conscience et Résistance, comptent parmi les (très) rares
organisations politiques qui ont dénoncé, en leur temps, les évènements de 89
et ceux de 90 et 91. Mohamed Ould Maouloud avait marqué le coup. Il fera partie
des personnalités ayant «bougé» pour provoquer la démocratisation de la vie
publique. A travers les pétitions, puis l’action.
Quand
le pouvoir de Ould Taya se décide, son mouvement fait partie du regroupement
qui crée le Front démocratique pour l’unité et le changement (FDUC) qui donnera
plus tard l’Union des forces démocratiques (UFD), principal parti d’opposition
ayant pu canaliser l’ensemble des forces opposées au régime de l’époque. Les
guerres intestines, les ambitions des uns et des autres, mais surtout les
différentes appréciations de la situation géopolitique par les leaders auront
raison du parti, devenu entretemps l’UFD/ERE NOUVELLE après l’union avec les
partisans d’Ahmed Ould Daddah, candidat aux présidentielles de 1992.
Avec
ses amis, il crée l’Union des forces du progrès (UFP) qui prône immédiatement
le dialogue avec le pouvoir de Ould Taya.
Mais
il va falloir attendre avril 2005 pour qu’une sorte de forum s’ouvre sous la
houlette du Rassemblement pour la démocratie et l’unité (RDU) de Ahmed Ould
Sidi Baba, cousin de Ould Taya. Ce forum se veut un lieu de convergence entre
les partis dits «de la Majorité» et ceux de l’opposition, à mille lieues les
uns des autres.
Le
«compromis
historique» est une attitude mentale chez ceux de l’UFP qui croient très
fort aux vertus du dialogue. Ce sont eux qui poussent vers l’ouverture du
gouvernement Waghef II en 2008, puis vers les Accords de Dakar. C’est
d’ailleurs Mohamed Ould Maouloud qui a dirigé la délégation du pôle du Front
national pour la défense de la démocratie (FNDD), farouchement opposé au coup
d’Etat d’août 2008. Il est mis en minorité par ses partenaires et, comme eux,
le parti glisse vers le radicalisme qui devait aboutir à l’exigence du départ
de Ould Abdel Aziz du pouvoir, après le refus de reconnaitre purement et
simplement les résultats de l’élection.
Quand
Ould Maouloud a été malade, on était au tout début du processus du dialogue qui
devait aboutir à l’engagement de quelques partis de la COD et du refus par les
autres de cette démarche. Tous les mois où les manifestants de la COD ont crié
«Aziz, dégage !», Ould Maouloud était très malade à l’extérieur. Privant
son parti et ses partenaires de la COD de son expérience et de ses capacités en
politique. En quoi peut-il aider à décrisper la situation ?
L’échec
et l’incohérence de la démarche visant à faire partir un président élu au terme
d’une élection consensuelle, sont de plus en plus évidents. Tout comme
l’incapacité de l’opposition radicale à imposer son point de vue.
La
barre a été placée si haut qu’on voit difficilement l’ouverture d’une
quelconque convergence entre les protagonistes de la vie politique en Mauritanie.
L’idée de mise en place d’un gouvernement d’union est pleine de risques pour le
pays et personne, à part ses promoteurs, ne semble la trouver bonne. D’ailleurs
comment peut-on passer d’une attitude de rejet absolu et résolu, vers une
franche collaboration ?
Nous en sommes là et c’est à Ould Maouloud de trouver
la parade qui convient pour ramener ses amis à la table de négociations au
moment où le pays est menacé par le péril qui nous vient du Nord malien».