Réveil
très tôt, le décollage pour Abidjan est prévu à 5 heures et quart. Avec un
groupe de journalistes (publics et privés), nous devons accompagner le
Président de la République Mohamed Ould Abdel Aziz, invité comme observateur au
sommet extraordinaire de la CEDEAO. Le sommet doit traiter des crises malienne
et bissau-guinéenne. La Mauritanie et l’Algérie sont présents comme «pays du
champ».
Sans
le dire, la CEDEAO comprend qu’il ne peut rien se passer sans ces pays du champ
avec lesquels il faut compter le Niger. C’est pourquoi elle tient à leur
présence.
C’est
l’occasion de revoir Abidjan où je n’y suis pas allé depuis cette visite du
Panel du CPS de l’UA chargé de régler la crise postélectorale. Notre pays qui
dirigeait le CPS à l’époque présidait ce Panel de chefs d’Etats. Entre «la
République du Golf» - c’est comme ça qu’on appelait à l’époque le camp du
président élu Alassane Dramane Ouattara, retranché à l’hôtel du Golf sous la
protection internationale -, entre cette République et celle de Gbagbo qui
s’entêtait à vouloir rester au pouvoir, le dialogue était impossible.
En
réalité la mission africaine était piégée par l’engagement de certains de ses
membres. Le burkinabé Blaise Compaoré était le principal soutien de Ouattara,
alors que Gbagbo bénéficiait du soutien indéfectible du sud-africain Zuma. Et
derrière se profilait le marionnettiste Sarkozy qui avait décidé d’en finir
avec Gbagbo. Les pressions venaient de toutes parts pour empêcher tout accord.
Pendant
ce temps, c’était le peuple ivoirien qui souffrait les affres d’une guerre
civile imposée par des agendas extérieurs. Un an après, on veut bien croire que
la légalité retrouvée, tout a changé en Côte d’Ivoire. Il est vrai que les
images des confrontations, des balles perdues, des dommages collatéraux, que
ces images ne sont plus visibles au quotidien. Mais la haine est là. Le désespoir
aussi, ainsi que la perte de foi. Les gens qui circulent dans les rues semblent
réservés, comme s’ils attendaient un signal. Lequel ? Celui de reprendre
le chemin de la guerre ? Pas forcément. Celui de contester la
satellisation de leur pays ? Sûrement pas. Celui de se rebeller à nouveau
pour imposer un ordre nouveau ? Peut-être pas.
Ils
attendent… Au sommet, on est surpris par l’atmosphère qui règne. On n’a pas
l’impression que nos interlocuteurs ivoiriens nous disent tout. Pourtant ils se
plaignent. De la hausse des prix, de l’insécurité endémique, de l’absence de
perspectives politiques et sociales, du chômage, de l’économie qui ne redécolle
pas, de l’espoir qui ne revient pas…
On
tourne tout de suite la discussion vers la victoire de Chelsea, le club anglais
qui compte parmi ses joueurs quelques «éléphants» dont Didier Drogba, l’artisan
de la victoire du club contre la plus belle équipe d’Europe, le Barça. C’est
quelque chose qui fait briller l’étoile ivoirienne en ces temps d’obscurité qui
durent depuis… qui ne finissent pas de durer…