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samedi 20 octobre 2012

Les douleurs du passé


Ce matin, j’ai entendu sur les ondes de RFI, le témoignage d’une dame du nom de Kadiata Touré, ancienne pensionnaire du camp Boiro, une prison de triste renommée qui a servi à Sékou Touré, le premier président de Guinée pour torturer et assassiner ses opposants. L’un des plus célèbres prisonniers de ce camp est sans doute Diallo Telli qui fut secrétaire général de l’OUA avant de mourir le 1er mars 1977 de mauvais traitements. On estime aujourd’hui que 5000 personnes seraient mortes et enterrées dans ce camp.
Les années soixante en Guinée sont marquées par le parachèvement du pouvoir absolu du «révolutionnaire» Sékou Touré qui avait osé dire «non» à la France libérant son pays du joug colonial. Mélange de Castro et de ce qui sera Dadis Kamara, Sékou touré est le promoteur d’une idéologie qui pense qu’on a «surestimé les capacités de compréhension du peuple», ce qui, à ses yeux explique la volonté de passer outre ce peuple et de le traiter comme «chose».
En ces années, le versatile Sékou Touré tergiverse entre la volonté d’ouvrir le pays aux capitaux étrangers et celle de maitriser l’activité économique. Une loi-cadre est promulguée le 8 novembre 1964 en vue d’organiser le secteur économique, principalement le domaine commercial. En déformant la dernière syllabe, les Guinéens obtiennent loi-cafre, pour dire le caractère arbitraire de cette loi qui impose des dépôts en banque aux commerçants. Seules les proches du régime peuvent satisfaire aux exigences énoncées.
C’est aussi la période des longues files devant les magasins en vue d’acheter de quoi manger. Comme de tradition, une délégation des femmes se rend chez Sékou Touré pour poser les problèmes des ménages guinéens. Le Président considère qu’il s’agit là d’une conspiration des maris. Répressions.
Les folies de Sékou Touré lui font dire que si le peuple n’a pas de sucre qu’il «mange le miel», après tout le sucre nous était inconnu avant la colonisation, tout comme le thé ou le café qui doivent être remplacés par la bouillie… Comme faisaient les ancêtres selon lui.
En 1965, il décide, lors de l’un de ses discours fleuve, d’appeler à la création de partis politiques autres que le Parti démocratique de Guinée (PDG) qu’il dirige et qui lui sert d’appareil d’embrigadement. Il s’engage même à subventionner les nouveaux partis à hauteur de 150 millions francs guinéens pour éviter les subsides de l’extérieur.
Un riche négociant du nom de Mamadou Touré et que l’on surnommait «Petit Touré» pour sa taille, crée le Parti de l’unité nationale de la Guinée (PUNG). Il est craint par Sékou qui voie en lui le descendant de l’Almamy Samori, figure emblématique de l’Ouest-africain, aspirant légitime au pouvoir dans une société encore marquée par les gestes glorieuses du passé. Sous la dictée de son mauvais génie, Fodéba Keita, Sékou Touré procède à l’arrestation de plusieurs figures politiques dont Petit Touré qui est immédiatement envoyé au camp Boiré. Son frère le suit immédiatement. Kadiata Touré est l’épouse de ce frère de Petit Touré. Elle va avoir sa part de souffrances.
Elle est arrêtée dix jours après son accouchement et envoyée dans le camp Boiré. Elle survit grâce à la complicité d’un geôlier qui lui passait la nourriture qu’il recevait de chez lui. Huit mois de souffrances dans ce camp. Dans on témoignage, elle a parlé de l’épouse de Petit Touré, aujourd’hui morte, et qui a gardé son enfant qu’elle a eu en prison pendant quatorze ans.
Pathétique témoignage qui rappelle combien était dure la vie sous les dictatures…

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