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samedi 14 juillet 2012

La fête des dattes


Dans sa troisième édition, le festival des dattes de Tijigja n’est pas mieux organisé que pour les deux éditions du passé. Certes beaucoup plus de monde. Surtout les étrangers.
D’abord la guerre des places. Chacun essayant d’être dans les premières rangées, d’y installer son hôte et de le prendre comme prétexte pour rester à ses côtés. Tout le monde, y compris les organisateurs, cherche des chaises pour ensuite les installer. Quelqu’un vient même offrir cinq mille ouguiyas pour avoir un siège. A la foire des dattes tout est à mettre sur le marché apparemment.
Notables, cadres, anciens ou actuels haut dignitaires de l’Appareil d’Etat, tous se démènent pour être au-devant de la scène. Il s’en suit ce que la maire de la ville, Mohamed Ould Biha a appelé «une petite pagaille» et pour lequel il s’est excusé au moment de prendre la parole.
Cette «petite pagaille» prend toutes les formes. Sociologique : les filas de grandes tentes qui ne veulent pas se retrouver à l’arrière de la scène ; politique : les chefs et cadres de partis qui veulent donner l’impression que c’est pour eux et par eux que la cérémonie est ; économique : les opérateurs, parrainant ou non la fête, qui doivent être les plus en vue…
Je parle avec le député de Bababé, Bâ Aliou Ibra du souci de chaque Mauritanien de faire la démonstration publique qu’il n’existe que lui. Cela se traduit à mon sens par le mépris qu’il tient à afficher à l’ordre et la préséance. Il va te marcher sur les pieds sans s’excuser, t’enfumer, te bloquer le passage, peut-être prendre ta place si tu ne fais pas attention… toujours avec une attitude désinvolte qui doit être ressentie par toi comme une marque de puissance de celui qui met en marche toute une mécanique pour te prouver qu’il est le plus fort, le plus beau, le plus influent…
C’est ici un cousin du Président qui tient à se mettre bien en relief comme pour dire : «Je vous l’ai dit, c’est grâce à moi que cette fête a lieu et ma présence est un message fort pour dire la légitimité d’un tel rassemblement». Le trafic d’influence dans tous états.
C’est ici un chef de parti sans existence réelle sur l’échiquier national, et pour qui se présente l’opportunité de «laisser comprendre» qu’il est dans son fief. C’est là un cadre, un opérateur qui veut imposer l’idée qu’il est l’intermédiaire incontournable pour «mobiliser», «rallier», «embrigader»… la région et ses populations.
Au cours de la soirée, j’ai été abordé par un homme respectable qui tenait à me faire le reproche de ne jamais parler assez de la scène politique et de ses occupants, surtout pour en dénoncer les incapacités. «La scène est occupée par les plus incapables, les moins formées, les moins légitimes… c’est à vous journalistes de jouer un rôle de régulateur pour empêcher cela…»    
Je retenais de tout ce qu’il disait le caractère «frivole» du politique et l’absence d’exigence de compétence particulière pour l’ascension sur la scène politique. Je n’étais pas d’accord sur le rôle qu’il donnait aux journalistes qui sont en fait une partie du problème plus qu’ils ne peuvent jouer dans la solution. Et de prendre comme exemple, les dizaines de «journalistes» qui, au nom d’un noble métier, arnaquent les notables à des occasions pareilles. Il pouvait me dire que ce n’est que justice si des gens se sentent assez coupables pour être obligés d’obtempérer aux chantages les plus vulgaires.

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