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samedi 5 mai 2012

AQMI, de moins en moins de Mauritaniens

J’ai vu récemment des articles de presse (d’Algérie) visant à faire passer l’idée consistant à faire croire que la Mauritanie est le principal pourvoyeur de combattants à Al Qaeda au Maghreb Islamique (AQMI). Ce qui est faux aujourd’hui.
En effet, entre 2003 et 2010, on peut dire que les recrutements en milieu mauritanien étaient très intenses. Des dizaines de jeunes, pour la plupart désœuvrés malgré un cursus scolaire parfois réussi, sont partis au Nord du Mali rejoindre les groupes dirigés et encadrés par des chefs de guerre algériens.
Les Mauritaniens fournissaient des combattants mais aussi des exégètes qui avaient une lecture sommaire de l’Islam et de ses textes mais dont l’érudition traditionnelle suffisait pour épater leurs traiteurs algériens. Même s’ils n’ont jamais eu de commandement d’unité, ils se retrouvaient dans le statut de muftis de la Jamaa. C’est le cas de Abu Anas Echinguitty qui a été, jusqu’à son arrestation en Algérie l’année passée, membre du conseil de la Shura de AQMI. Il fut le plus haut gradé des Mauritaniens de AQMI. C’est le cas aujourd’hui de Hammada Ould Mohamed Khayrou au sein du Mouvement pour le Jihad et l’Unicité en Afrique de l’Ouest (MUJAO). Avec cette différence que ce dernier groupe est essentiellement composé de Bidhanes (Arabes sahariens : originaires du Nord malien, du Sahara Occidental, du Niger ou de la Mauritanie). On considère qu’il est une dissidence «ethnique» de AQMI.
On dit que quand les dirigeants algériens de l’organisation ont donné le commandement d’une unité combattante à un Touareg (Abdel Kerim Targui qui dirige une Sariya-unité dépendant de Abu Zeyd, le chef de la Katiba Tarik Ibn Zeyad), les Hassanophones ont demandé un traitement similaire. Les commandants algériens, n’ayant pas trop confiance, ont refusé. Alors, quelques-uns des combattants originaires des tribus sahariennes ont décidé de passer à l’action dans des conditions pour le moins bizarres.
En effet, c’est à la faveur de l’enlèvement de trois humanitaires européens (deux espagnols et une italienne) que le MUJAO s’est fait connaitre. Alors que les services de renseignements de la région et ceux occidentaux braqués sur la zone, pistaient les ravisseurs qui avaient donné rendez-vous, en plein désert malien, à Belawar, le chef de la Katiba des Mulathamine, celui-ci disparaissait des écrans et laissait les «traiteurs» livrés à eux-mêmes. Pourquoi le chef terroriste passé maître dans l’enlèvement et le traitement des otages a-t-il fait volte-face aussi brusquement ? Est-ce la peur des représailles de l’Armée et des renseignements algériens dont le territoire venait d’être violé ? Peut-être, peut-être pas. Toujours est-il que Belawar se cache pour éviter de réceptionner le colis, d’une «denrée» du reste appréciée parce que l’Italie et l’Espagne sont toujours promptes à payer de fortes rançons. Dans les heures qui suivent cette volte-face, le MUJAO revendique l’enlèvement. On apprend du coup son existence et on explique qu’il est une dissidence de AQMI. Deuxième coup, celui de Tamanrasset, troisième celui de Gao qui a visé le consulat algérien. Cette dernière action fait ressortir plus encore le ciblage de l’Algérie.
Au début de l’occupation de Gao par les rebelles touaregs, ceux-ci avaient donné leur assurance au personnel du consulat algérien. Une protection qui ne servira à rien. Les combattants du MUJAO seraient venus armés jusqu’aux dents, avec notamment des ceintures explosives autour des corps. Ils auraient même exigé du MNLA de leur fournir un 4x4 fermé pour transporter les six diplomates algériens. Devant la détermination affichée et après visiblement accord du Consul, le MNLA dut obtempérer. Le MUJAO exige aujourd’hui le versement d’une rançon de quelques millions d’euros contre la libération des diplomates. Le MUJAO est d’abord un «instrument» anti-algérien, utilisé par qui et dans quel but ? On ne peut savoir encore…
Par contre nous savons que depuis 2010, les recrutements de Mauritaniens ont considérablement baissé. On croit savoir qu’il n’y a plus eu de nouvelles recrues de chez nous en 2011 et 2012. C’est certainement le résultat de la stratégie qui a allié réponse sécuritaire au dialogue par l’intermédiaire des Ulémas. Mais l’excitation actuelle est-elle propice à relancer la machine ? Certainement, parce que les mouvements extrémistes se nourrissent des excès. Il n’est pas exclu qu’en ces jours où l’on promeut la confrontation et où l’on vante le sacrifice, des jeunes mal encadrés et mal outillés se mettent à jouer aux kamikazes. Ils auront jugé qu’ils sont à deux doigts du martyr, donc du Paradis. Personne ne dit actuellement le contraire…
Il faut signaler enfin que les Mauritaniens de AQMI ont été décimés par les derniers combats dans le Nord du Mali. De grandes figures comme Ould Meynouh ou Sall Oumar font partie de ces morts, une chair à canon pour les vrais manœuvriers maîtres du jeu, les chefs Algériens. 

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