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jeudi 23 février 2012

En partie pourquoi ça ne marche pas


Hier soir, TVM recevait le ministre d’Etat à l’éducation national pour deux heures de débats. En plus des traditionnelles questions «rassemblées» par la caméra et celles posées par les quelques «chanceux» du téléphone, le présentateur, Sidi Ould Nemine, avait choisi d’amener sur le plateau les représentants des syndicats d’étudiants et d’enseignants (fondamental, secondaire, supérieur et technique). Un grand monde. Et beaucoup de remarques.
Tous les présents étaient des enseignants dont le métier devait être de communiquer un savoir. Le grand absent d’hier, c’était bien la pédagogie. Si bien que les messages étaient embrouillés, mal exprimés – la langue faisant souvent défaut (que ce soit pour l’Arabe ou le Français) -, mal conçus au départ… L’intelligence des problèmes posés à l’éducation ne paraissait pas. On en restait donc à discuter des problèmes matériels qui devaient être secondaires – au moins arriver en deuxième – par rapport aux problématiques pédagogiques.
On attendra une correspondance électronique arrivée de «la Mauritanie profonde» pour faire entendre une vérité essentielle : l’absence totale de programmes et de manuels scolaires. La réforme mise en œuvre en 1999 n’a pas eu de supports pédagogiques. C’est ainsi que les élèves ayant terminé le cursus par le bac 2011, n’ont jamais eu de manuels à leur disposition. Leurs enseignants n’ont jamais eu d’indication pour savoir ce qu’ils doivent enseigner. Ce qui, pourtant, n’a pas empêché les résultats exceptionnels qu’on a eu (admis en qualité et en quantité). C’est l’argument principal en faveur de la réforme de 1999 : il faut la relancer et lui donner les moyens d’être réellement mise en œuvre.
C’est dans un mauvais Hassaniya, mauvais Arabe quand on a parlé Arabe, mauvais Français quand on a parlé Français, qu’on a entendu, toute l’émission, les passions se déchainer à propos des salaires, du logement, des rapports entre administration et syndicats, sur l’instrumentalisation politique des corps des enseignants… mais rien sur de la rhétorique sur les questions pédagogiques. C’était affligeant !!!
Il y a quelques années, je participais à un séminaire international de l’ONG «Publish What You Pay» (publiez ce que vous payez) auquel participaient différentes nationalités africaines dont des Mauritaniens. C’était pour discuter des nouvelles ressources financières que faisaient miroiter les perspectives pétrolières dans nos pays. Quand les Congolais, les Tchadiens, les Comoriens… prenaient la parole, c’était toujours pour émettre des soucis quant à l’utilisation de ces ressources pour construire des routes, des dispensaires, des écoles, pour aller dans la construction d’un pays. Quand ce sont les Mauritaniens qui prennent la parole, c’est toujours pour se demander comment les ressources peuvent permettre d’augmenter les salaires, jamais pour savoir comment s’assurer qu’elles soient utilisées pour le bien-être commun. A méditer…
Pire, la discipline sur le plateau de la télévision manquait cruellement. Tous s’exprimaient avec passion, chacun essayant de couvrir les voix des autres… J’ai imaginé un moment des élèves regardant leurs éducateurs dans cet état-là… Voir le présentateur obligé de les sommer, de les «surveiller», de les faire taire, leur faire subir exactement ce que les enfants subissent.  …Et ce chef de syndicat qui dit : «Dans le temps, l’enseignant était respecté pour les moyens dont il disposait. En public, il pouvait faire étalage de ces moyens, il pouvait se payer tout, quand il demandait la mais (d’une femme), on se précipitait à la lui donner…» Il n’a rien compris celui-là.
Dans le temps, le respect c’était surtout pour le savoir, pour la noblesse de la mission qui est la leur, pour la dignité que les enseignants incarnaient…
L’émission d’hier aura au moins servi à nous faire comprendre que le grand problème de la réforme future restera celui des hommes. C’est déjà ça de gagné.

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