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jeudi 28 juillet 2011

Le «traitre» trahi


Abdel Fettah Younes est l’un des généraux survivants de la révolution verte en Libye. Il est le seul des compagnons de Kadhafi à avoir survécu aux multiples purges et mises à l’écart dont les autres ont été victimes. La confiance que lui accordait Kadhafi était sans faille. Younès a trahi Kadhafi dès les premières semaines de la rébellion, d’abord populaire puis militaire de la Cyrénaïque. On se souvient de l’annonce faite par les rebelles, démentie par Kadhafi lui-même qui préfère recourir au mensonge grossier en commanditant la diffusion de vieilles images comme si elle datait de la veille. Des images on voyait les deux hommes ensembles. C’est dire combien était important le ralliement de Younes. Surtout qu’il permettait à la rébellion qui s’organisait difficilement d’avoir un chef issu des rangs militaires, et à l’OTAN d’avoir à la tête de cette armée en construction, quelqu’un qui ne peut être taxé de sympathisant d’Al Qaeda ou des salafistes jihadistes formant l’ossature des forces rebelles.
C’est donc autour du général Abdel Fettah Younes que l’armée devant conquérir la Libye et chasser Kadhafi du pouvoir, que cette armée a été montée petit à petit. Très mobile sur le front, il a été effectivement le bras de l’aile civile du Conseil national de transition au pouvoir en Cyrénaïque et dans d’autres parties de la Libye.
Ce jeudi, il a été assassiné en compagnie de deux autres officiers de la rébellion. Selon les dépêches d’agences de presse, la mort «suspecte» d’Abdelfatah Younes avait été annoncée par le président du CNT Moustapha Abdeljalil. «Abdel Fetah Younes et deux de ses compagnons ont été tués à Benghazi par des individus armés», avait-il indiqué. Younes revenait de la ligne de front vers Benghazi après avoir été convoqué par une «une commission judiciaire enquêtant sur des questions militaires», selon la déclaration de Moustafa Abdeljalil. Deux explications qui s’offrent à nous.
La première voudrait que l’assassinat soit l’œuvre des sbires de Kadhafi. Auquel cas, il faudrait se résoudre à accepter que la rébellion est fortement infiltré. En effet si Kadhafi peut frapper au cœur du CNT, ce doit être inquiétant pour les amis de l’OTAN. Plus encore pour Moustapha Abdel Jelil, un autre traitre à Kadhafi qui s’est retrouvé président de la rébellion.
La deuxième indique de fortes dissensions internes au sein de la rébellion. Ces dissensions peuvent être de clans. Ce qui est plutôt simple. Mais elles peuvent, et c’est ce qui est dangereux, être idéologiques. En effet, et comme le soutient le régime de Tripoli, l’essentiel des troupes de la rébellion appartient à l’aire idéologique de la Salafiya Jihadiya. Alors que la direction des opérations est pour la plupart issue da l’école nationaliste prônée plus de quarante ans durant par le régime, sinon de la diaspora venant d’Europe et d’Amérique. Entre donc les quelques dirigeants apparents du mouvement, et les hommes d’action et de terrain, il y a un grand fossé dans la vision politique et humaine de l’entreprise menée depuis février dernier. Si les uns prétendent établir un régime démocratique allié de l’Occident sinon à son service, les autres entendent créer un Emirat islamique capable de servir de base d’épanouissement de la mouvance vers toute la région nord-africaine, et pourquoi pas au-delà. Avec les révolutions en cours en Tunisie et en Egypte, la fragilité de la situation en Algérie et plu au sud, au Tchad et au Soudan, plus à l’est l’insécurité dans l’espace sahélo-saharien, c’est tout une perspective qui est ouverte. Dans une telle perspective, Younes et ses hommes sont bien un obstacle. Il fallait donc les éliminer. C’est fait. Quel sera l’acte II ?

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