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mercredi 8 juin 2011

Que reste-t-il du 8 juin 2003 ?

On peut répondre tout de suite : des questionnements. Qui a tué le colonel Mohamed Lemine Ould N’Deyane ? Qui sont les véritables organisateurs du coup ? Quelle relation avec le 3 août 2005 ? Pourquoi Ould Taya n’a-t-il pas réagi dans le sens de l’Histoire ? et beaucoup d’autres questions qui resteront sans réponses tant que les acteurs n’ont pas décidé de parler. Mais je vais quand même oser quelques réponses qui ont valeur de témoignages, de déduction parfois de l’observateur que j’ai été. Qui ont aussi valeur de provocations pour que les langues se délient.
Mohamed Lemine Ould N’Deyane qui bénéficiait d’une grande respectabilité au sein de l’Armée (et des civils) a été la grande victime de l’événement. Mort alors qu’il défendait un régime auquel il croyait appartenir, il n’a pas bénéficié des égards posthumes auxquels il avait droit. Oui, Ould N’Deyane a certainement été tué par des tirs «ennemis» et non «amis» comme on a voulu l’accréditer. Mais au lieu de le célébrer comme celui qui a refusé – les témoignages sont nombreux et concordants – de quitter son PC de l’Etat Major parce qu’il avait peur de «trahir», le pouvoir de Ould Taya l’a ignoré, voire méprisé. Jamais une enquête ne sera ouverte sur les circonstances de sa mort. Ni deuil, ni consécration.
Nous l’avons écrit à l’époque, le véritable cerveau de la machination est le commandant Mohamed Ould Cheikhna. C’est lui qui, se cachant derrière un détachement parfait, avait tout coordonné, planifié. C’est lui qui identifiait les officiers capables ou disposés à faire partie de la conspiration. C’est lui qui centralisait tout et qui tissait donc la toile.
Nous l’avons aussi écrit à l’époque, sans les hommes et le matériel de la division blindée que commandait le capitaine Abderrahmane Ould Mini, il n’y aurait pas eu d’attaques, ni grand bruit. C’est donc lui l’homme de terrain qui a d’ailleurs délibérément choisi d’armer les chars avec des munitions d’entrainement pour éviter le carnage. On a su très tôt que sans cette précaution, le bilan aurait été beaucoup plus lourd qu’il ne l’a été.
Libéré de l’Armée pour sa participation à un projet qui visait l’assassinat de Ould Taya le 28 novembre 1999, l’ancien commandant Saleh Ould Hanenna jouait le rôle d’électron libre, se déplaçant entre les conspirateurs, transmettant les ordres et les plans. C’était plus facile – et plus «romantique» - de coller l’entière responsabilité du coup à un chauffeur de taxi plutôt qu’à des officiers de commandement. Surtout qu’à l’époque, nombre de réseaux de renseignement voulaient épurer l’armée de son élément Beni Hassane en général, et des ressortissants des zones Est (Hodh el Gharby notamment). Le délit de parenté allait frapper. Sur les deux ans que dureront les conséquences du 8 juin, des dizaines d’officiers de ces régions, particulièrement de la tribu de Ould Hanenna furent visés par des mesures de rétorsions. Les civils n’ont pas non plus été épargnés.
C’est ainsi que Ould Taya a été vite enfermé dans cette logique revancharde qui l’a mené à l’aveuglément et au refus de croire que l’heure de l’ouverture avait sonné. Son appareil – politique, financier, administratif – avait été gagné par une boulimie qui a accru ses réflexes de prédation. En quelques mois, et alors que le régime se débattait dans des crises qu’il était incapable de diagnostiquer, des milliards et des milliards furent engloutis. La crise s’intensifia. Et avec elle la nécessité de mettre fin à un pouvoir qui risquait d’entraîner la Mauritanie avec lui dans sa chute. Ce fut le 3 août 2005.

1 commentaire:

  1. J'aurais voulu voir de l'information aussi sur ce joli blog.

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