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mardi 12 mai 2015

L’exemple anglais

La victoire des conservateurs aux législatives de la semaine dernière en Grande Bretagne, cette victoire a fait l’effet d’un tsunami sur la classe politique de ce pays. La plupart des hommes politiques ayant subi la défaite ont été obligés de démissionner pour dire qu’ils avaient tiré la leçon de la débâcle. Du coup, partout en Europe, particulièrement en France, le débat a été ouvert autour de la nécessité d’imposer l’attitude comme une loi.
Pour beaucoup, «c’est la seule façon de provoquer le renouvellement de la classe politique». Pour d’autres, «il est temps d’exiger des acteurs politiques de répondre de leurs mauvais choix, de leurs mauvaises prestations». Car ailleurs, particulièrement en France, les acteurs politiques se comportent en véritables «opérateurs» se permettant les hauts et les bas qui s’imposent à eux, jouant à volonté de la démagogie et du populisme et ne répondant jamais de leurs déboires.
Héritage laissé par la colonisation ou caractéristique sociale «autochtone» ? Le fait de ne jamais répondre de ses actes caractérise aussi l’espace politique mauritanien. Plus qu’ailleurs, l’acteur politique n’est pas tenu ici d’avoir un parcours exemplaire, de payer pour ses choix et ses engagements. D’abord parce que la politique est assimilée à un jeu où la perfidie et le mensonge sont des armes à utiliser. Ensuite parce que la mémoire commune ne retient rien du parcours, souvent chaotique de ces acteurs. Ils s’affranchissent alors de toutes les considérations morales qui devaient leur imposer d’avoir un cursus irréprochable, clair et rigoureux. Deux illustrations.
Monsieur X a longtemps milité dans un parti d’opposition. Il a longtemps joué des coudes pour se faire une place auprès du leader de son parti. Allant jusqu’à manœuvrer pour faire le vide autour de ce leader afin de se présenter comme le plus fidèle des soutiens. Il a réussi à pénétrer l’espace intime du leader. Poussant cette intimité jusqu’à accéder à tous les aspects de la vie personnelle de son chef.
Arrivé à ce stade, et sans transition, Monsieur X nous annonce sa décision de changer de camp. Il rejoint le camp du pouvoir. Commence pour lui une frénétique course de communication. Il lui faut faire la démonstration de son nouveau positionnement. Cela se traduit sur la place publique par des attaques violentes (parfois vulgaires) contre son ancien leader et son parti. En cachette, il doit avoir livré tout ce qu’il sait de la vie cachée de celui dont il a su violer l’intimité.
Mais en général, un comportement comme celui-là finit toujours par «consommer» son auteur. Ses nouveaux maitres ne se pressent pas de le récompenser (même si…). Il attend. Intervient alors un changement. Les maitres ne sont plus les maitres. L’espoir de voir ses anciens «amis» devenir les maitres est grand. Et avec lui la volteface de Monsieur X.
Monsieur Y est un cadre du parti au pouvoir, de tout parti au pouvoir. La dernière fois qu’on l’a entendu publiquement parler, c’était pour vilipender les opposants au régime qu’il défendait. Il montait alors combines sur combines pour diaboliser les opposants, fustiger leurs causes, débaucher leurs militants les plus significatifs, les accuser de tous les maux…
Il participait sans vergogne au sac du pays, à la corruption des mœurs politiques, au pillage des ressources publiques, au détournement des programmes de développement, à la culture de contrevaleurs…
Arrive le moment de la fin d’un cycle. Monsieur Y fait semblant d’être quelqu’un d’autre. Il découvre subitement qu’il y a de l’injustice dans l’exercice quotidien du pouvoir, qu’il y a la mauvaise gestion, qu’il y a les pratiques esclavagistes, qu’il y a des inégalités sociales criantes… Il adopte les causes justes et réussit à faire oublier qu’il a été l’artisan – ou l’un des artisans – du système qu’il dénonce désormais. Il est «militant» et même «victime». Il côtoie à cet effet les honorables défenseurs des causes justes, réussit à les devancer dans le mouvement en occupant les premières lignes, à couvrir de sa voix les leurs.
Dans la Mauritanie d’aujourd’hui, c’est désormais Monsieur X et Monsieur Y qui sont l’incarnation des causes justes, du combat des déshérités, du soulèvement des victimes… après avoir été les bourreaux d’hier, les complices de tout temps… ils confisquent aujourd’hui la grandeur du combat à mener pour l’émancipation de l’homme mauritanien et salissent la noblesse de cette cause.
Monsieur X et Monsieur Y ne sont que des échantillons de toute une classe politique qui refuse se remettre en cause, de se démettre, de quitter la scène malgré ses excès.