Lundi
s’est ouvert à Nouakchott la première revue du portefeuille de coopération
entre l’Union Européenne (UE) et la Mauritanie. A l’image de ce qui se fait
avec la Banque Mondiale, les deux parties entendent évaluer plus de trois
décennies de coopération dans le cadre des accords de Cotonou.
Les
FED – du Fonds européen du développement – se suivent. Nous allons retenir
trois chiffres. Le premier est 669,32 millions euros qui est l’enveloppe
globale qui a été destinée à la Mauritanie depuis le milieu des années 80. Le
deuxième chiffre que nous allons retenir est celui de 191 millions
correspondant à l’enveloppe du 9ème FED qui a couvert la période
allant de 2001 à 2007. Le troisième est celui du 10ème FED qui a atteint
un record avec 209,32 millions pour la période de 2008 à 2014, à 2013 en fait.
On peut y ajouter pour comparaison, le chiffre prévu pour le 11ème
FED, 195 millions couvrant la période de 2014 à 2020, date de l’expiration des
Accords de Cotonou.
Au
titre du 10ème FED, 57 millions soit 27,23% sont alloués
aux infrastructures et aux réformes du secteur du transport, 46 millions pour
l’appui budgétaire et les réformes des finances publiques, 20 millions à la
décentralisation et au développement local, 17,22 millions à la sécurité
alimentaire, 13 millions à la sécurité et au développement (lutte
anti-terroriste), 7 millions pour la Justice et l’Etat de droit, 7 pour la
société civile, la culture et les Droits de l’homme, 6 pour la prévention des
conflits… pour ne citer que l’essentiel.
Pour
comprendre le record du 10ème FED, il faut savoir que l’enveloppe
initiale était de 156 millions seulement. A ce montant, se sont ajoutés des
financements supplémentaires qui ont concerné surtout la sécurité du Sahel pour
25 millions et d’autres interventions pour 28 millions (interventions
européennes à l’occasion de crises d’urgence notamment).
Dans
le jargon des techniciens, on dit que la totalité de l’enveloppe a été
affectée, mais cela ne veut pas dire que l’argent a été alloué ou transféré au
profit de la Mauritanie. La lourdeur des procédures a toujours été décriée par
les deux partenaires.
Les
Européens arguant la faiblesse d’absorption de la Mauritanie qui s’explique par
les lenteurs administratives, le manque de compétence des concepteurs des projets,
l’absence d’efficacité…
Les
Mauritaniens se plaignant de la complexité des procédures imposées par l’UE
pour accéder aux financements. Dont une bonne partie revient souvent à des
sociétés européennes qui remportent facilement les marchés, à des experts qu’il
faut engager pour des études de validité…
Sur
les 209,32 millions du 10ème FED, ce qu’on appelle les «engagements
individuels contractualisés», terme qui désigne dans le jargon consacré
l’engagement par contrats, ce titre a atteint 144,33 millions soit 68,95% du
montant global. Alors que les paiements exécutés n’ont pas dépassé 57,14
millions soit 39,59% de ce montant contractuel.
Il
arrive même que des chapitres prévus ne soient pas touchés. C’est l’exemple ici
du chapitre de la Sécurité et du développement, de la prévention des conflits
(dont les conventions ont été signées seulement le 15 de ce mois), de la
Justice et de l’Etat de droit, de la décentralisation et du développement local.
Aucun euro n’a été déboursé pour ces secteurs malgré la mise en place de
structures de coordination pour les lancer.
Autre
reproche fait à la partie européenne, tout ce qui se rapporte à «l’appui
sectoriel» dans les Accords de pêche et qui n’a jamais voulu dire
grand-chose. Dans le passé, la partie mauritanienne s’est résignée à le voir
gonfler sans vraiment en profiter. C’est que le chiffre servait d’argument aux
Européens pour rester sur certaines positions, notamment le niveau de la
compensation.
La
présente revue doit aussi servir à réinventer la philosophie de la coopération
entre les deux partenaires. Une coopération qui doit prendre en compte la
nécessité d’établir les règles d’un commerce équitable et l’urgence
d’introduire des mécanismes de préservation de la ressource.