C’est le 15 décembre que prend fin le protocole d’accord de pêche
qui lie la Mauritanie à l’Union Européenne (UE). Dans quelques jours, la flotte
européenne devra cesser toute activité dans la zone de pêche mauritanienne. Une
situation inédite qu’il était impossible d’éviter depuis que la partie
européenne avait choisi de reconsidérer la date d’effectivité du protocole en
rejetant la date de la paraphe comme date référence.
On se souvient encore de la crise ouvert entre les deux partenaires
quand, en juillet dernier, la Mauritanie a rappelé que le protocole prenait fin
à la date du 31 juillet, date de la paraphe du protocole, alors de les
négociateurs de l’UE exigeaient de prendre en considération la date de la
ratification par les instance dirigeantes européennes, donc le 15 décembre. Plusieurs
rounds furent nécessaires pour amener à un accord qui stipulait que l’activité
de la flotte européenne prendra en compte les 24 mois prévus initialement :
les bateaux se retireront quand ils auront exploité la période. C’est ainsi que
la flotte ayant pêché depuis le 31 juillet s’arrêta, alors que ceux qui ont
attendu le 15 décembre resteront jusqu’à cette date. A partir de ce moment,
tout nouvel accord devrait attendre la ratification par toutes les instances
européennes pour être effectif. Ce qui fera perdre beaucoup de temps aux
opérateurs de l’UE, mais la faute à qui ? à celui qui a dénoncé la règle
jusque-là respectée de prendre en compte la paraphe dans l’effectivité du
protocole…
Les vraies négociations autour du renouvellement du protocole
pouvaient commencer dès lors que l’accord a été trouvé. Après avoir buté sur de
nombreux écueils, les deux parties n’ont pu aller au-delà de la question de la
compensation financière. Les Européens voulant la rabaisser à 45 millions euros
au lieu des 67 obtenus au terme de l’accord en cours.
Les Mauritaniens estiment qu’ils vendent à leurs partenaires l’accès
à une ressource de qualité, se trouvant en quantité suffisante à proximité des
marchés européens, avec en plus la garantie de leur assurer la priorité dans l’accès
à un quota correspondant à leurs besoins.
C’est bien parce que les deux parties ont trouvé satisfaction dans le
protocole en cours qu’il n’a jamais été dénoncé par l’une d’elle, alors que la
possibilité de le faire est offerte dès que l’un des contractants se sent lésé.
Il est donc évident que ni les Européens ni les Mauritaniens ne se sont
vraiment sentis floués par l’accord et sa mise en œuvre. Alors pourquoi en
changer les fondements ?
Par le passé la partie mauritanienne n’a jamais pu mener les
négociations d’égal à égal avec les partenaires étrangers en général, européens
en particulier quand il s’agit de la pêche. On se souvient encore de la
célérité (empressement, plutôt) avec laquelle, les deux parties signaient les
accords sans vraiment négocier, le plus fort fixant les règles, le plus faible
obligé d’accepter. La faute d’abord aux négociateurs mauritaniens, des
fonctionnaires qui craignent d’abord de revenir sans signer, comme si la
mission pour eux était justement de rapporter un accord, n’importe lequel. C’est
ce qui explique, en plus de la corruption et du manque de compétence, le peu de
profit que le pays a tiré de tous les accords précédents.
La Mauritanie d’aujourd’hui peut supporter toutes les pressions qui
seront exercées par la partie européenne pour l’amener à passer sous ses
fourches caudines. D’ailleurs l’une des raisons expliquant le succès des
négociations passées, est bien le fait de ne pas avoir budgétisé la
compensation européenne lors de l’exercice 2012-2013. Comme si le pays pouvait
s’en passer. La Mauritanie a, depuis, créé un régime de licences libres dont l’acquisition
est ouverte aux non Européens et qui lui rapportent actuellement près de quarante
millions euros, plus de la moitié de la compensation européenne actuelle. Ce qui
lui donne un souffle financier.
En plus, la Mauritanie a évité que les négociations prennent l’allure
d’un marchandage politique : elles ont été confiées à une équipe technique
dont les arguments sont tirés des conclusions des experts (souvent européens)
et d’une évaluation réelle du rapport gagnant-gagnant.
La technicité des experts négociateurs permet d’éviter les
pressions politiques qui s’exerçaient par le passé sur les hautes autorités de
l’Etat qui se trouvaient obligées de se plier devant l’insistance d’un tel ou
tel Commissaire européen et/ou d’un tel ou tel chef d’Etat.
A quelques jours de l’expiration des délais, ni
les Européens ni les Mauritaniens ne semblent pressés de faire avancer le
dossier. Pourquoi ? à suivre…