Elle ne doit pas avoir quinze ans et déjà elle a une voix forte et belle.
Elle s’appelle Khoudja et vient d’enregistrer un clip pour la Mauritanie.
…vawgui raaya khadhra… nal’ab m’a shaabi… maani khaayva… shinhu dha
lihasaas… ngaali ‘annu stiqlaal muritani…
Des mots d’enfant pour décrire ce sentiment ineffable de fierté et d’estime
de soi. Des mots d’enfant pour nous dire que le patriotisme est d’abord un
sentiment, une émotion d’être, un enchantement de soi. Qu’on attribue l’extase
à l’existence d’un symbole, celui de l’indépendance du pays…
A l’approche de chaque anniversaire, les artistes – souvent les griots –
rivalisent de talents pour produire des chansons dédiés à la circonstance. La
chanson de la petite Khoudja est sans aucun doute la plus émouvante, la plus
significative, la plus profonde… malgré la simplicité des mots, malgré la
jeunesse de la chanteuse.
On me dit que son père est l’un des membres du groupe Awlad Leblad.
Tant mieux quand on se rend compte que la petite Khoudja promet d’être autre
chose qu’une petite chanteuse de circonstance. Pour ce faire il lui faut un
encadrement. Lequel ?
Dans un pays qui a depuis longtemps refusé (ou renoncé) à développer la
musique pour lui donner la place qui sied, il n’existe malheureusement pas de
cadre institutionnel pour permettre justement l’éclosion des talents.
On nous parle depuis quelques
années de l’existence d’un institut de musique, mais l’on est en droit de nous
demander à quoi il sert. A-t-il jamais organisé un festival de renom ?
a-t-il créé une école pour l’apprentissage de la musique ? qu’a-t-il fait
pour recueillir, conserver, voire moderniser le patrimoine musical
traditionnel ? On peut chercher partout, interroger les professionnels et
les amateurs, regarder longuement la scène, nulle trace de l’emprunte de cet
institut. Alors ?