Il
y a d’abord la rentrée scolaire qui se prépare. Deux ans après la tenue des
Etats généraux de l’éducation, nous attendons toujours la mise en œuvre de
leurs recommandations. Avec le ministre actuel, Ba Ousmane, on espère que la
réforme tant attendue (et espérée) prendra forme. Malgré la lourdeur de
l’héritage et les difficultés à trouver par où commencer, le défi est bien
celui de donner l’impression que quelque chose sera fait au plus vite. Des
petites actions immédiates : mesures visant l’encadrement plus strict de
l’enseignement privé, c’est par là qu’il faut commencer si l’on veut obliger à
redorer le blason de l’école publique ; imposer la carte scolaire pour
accompagner la politique de regroupement des populations ; exiger
l’assiduité des personnels d’encadrement des établissements ; équiper les
classes, les laboratoires quand il y en a ; s’assurer que les écoles ne
sont pas inondées et qu’elles peuvent recevoir élèves et enseignants ;
lancer un programme de restauration des cantines et internats…
Je
me souviens que pendant des décennies, l’essentiel pour le ministère c’était de
passer l’année sans mouvements de grèves ni chez les élèves ni chez les
enseignants. Rien d’autre ne comptait. Ni le niveau qui baissait
continuellement. Ni le système qui se délitait inexorablement. Ni les
programmes qui disparaissaient fatalement. Ni la qualité qui avait fini par ne
plus être recherchée. Des années durant, nous avons formé des cancres dont la
plupart sont aujourd’hui sollicités pour essayer de remettre le train en
marche. Tellement de choses à faire, à entreprendre pour envisager de penser à
mettre en œuvre une réforme. C’est le challenge pour le ministère en cette
rentrée scolaire.
La
rentrée politique ensuite. Comme on ne sort jamais d’un cycle, on a toujours
l’impression qu’il n’y a pas eu de trêve, de vacance. Même si j’ai entendu
certains leaders prétexter les vacances pour expliquer leur absence de la
scène, il est sûr que la rentrée n’a pas été préparée.
Pour
l’Union pour la République (UPR, chef de file de la Majorité, parti au pouvoir)
il n’y a pas eu de vacances parce que les semaines dernières ont vu la
direction changer de président et de vice-président. Alors que l’Appareil
exécutif est resté le même, avec notamment le nouveau Premier ministre comme
Secrétaire exécutif, ce qui constitue quand même une anomalie. Le prétexte
trouvé est la prochaine implantation du parti qui doit se dérouler en octobre
et qui sera l’occasion de refonder l’UPR sur des bases nouvelles. Du coup, la
réunion d’aujourd’hui servira à discuter de la situation générale et à donner
la parole aux membres du Conseil national – du congrès extraordinaire – qui le
voudraient.
De
l’autre côté, le parti Tawaçoul peine à prendre la place qui lui sied depuis
qu’il a l’Institution de l’Opposition démocratique en mains. Il a fait parvenir
au Conseil Constitutionnel le nom et les qualités de son candidat au poste de
Chef de file de l’Opposition. En attendant l’officialisation de cette
désignation, on ne voit pas encore ce que fera le parti islamiste de
l’Institution de l’Opposition, surtout par rapport à son engagement au sein du
Forum national pour la démocratie et l’unité (FNDU), l’un excluant l’autre. En
effet, le FNDU est né sur les cendres de la COD (coordination de l’opposition
démocratique n’ayant pas survécu aux élections Législatives et Municipales) qui
a été conçue pour contourner voire tuer l’Institution de l’Opposition
Démocratique. La redynamisation de cette Institution passe nécessairement par
la mise à mort du FNDU. Les leaders de Tawaçoul sont les premiers à savoir
combien il est important pour eux de faire revivre l’Institution au moment où
elle parait l’unique cadre de dialogue possible avec le Pouvoir. Comment
vont-ils procéder ?
Pendant
ce temps, la Coalition pour une Alternance Pacifique (CAP regroupant l’APP de
Messaoud Ould Boulkheir, Wiam de Boydiel Ould Hoummoid et Sawab et Abdessalam
Ould Horma) tente de reprendre l’initiative par un appel au dialogue. Sera-t-il
entendu et par qui ?
De
son côté, l’Union des forces du progrès (UFP) entame un nouveau processus de
recherche d’un «compromis national» depuis la dernière réunion de ses
instances dirigeantes. Même si les propos de ses leaders laissent entrevoir une
nette tendance à la quête d’un apaisement, on s’abstient encore de faire le pas
décisif qui signifiera la rupture avec le radicalisme dans lequel confinent les
positionnements antérieurs.
Il
faut compter avec toutes ces expressions inspirées par le communautarisme et
alimentées par les problèmes du présent et les tares héritées du passé récent
ou ancien. Ceux qui, au nom des revendications liées à la cohabitation des
communautés, cultivent des discours qui prennent facilement l’allure de
particularismes dangereux. Tantôt par la stigmatisation d’une ou de plusieurs
communautés, tantôt par l’instrumentalisation de misères et de frustrations
sociales réelles qui méritent d’être une cause pour tous et non pas un slogan
pour quelques-uns.
La
reconnaissance du RAG, bras politique de l’organisation IRA de Birame Ould
Abeidi, et celle des Forces progressistes pour le changement (FPC, anciens
FLAM) est nécessaire à la normalisation de ces expressions qu’on trouve souvent
excessives. Par la formalisation de cet activisme, on pourra espérer alors
qu’un dialogue serein autour de questions somme toutes fondamentales, que ce
dialogue soit possible. L’unique manière de démystifier les dogmes et
d’exorciser les vieux démons.
…Oui, les rentrées sont nécessairement risquées si
le courage, l’abnégation, l’intelligence, la Raison et l’engagement ne sont pas
au rendez-vous. A vos marques donc !