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vendredi 22 août 2014

Un nouveau Premier ministre

Depuis le temps qu’on en parle, cela est arrivé : Dr Moulaye Ould Mohamed Laghdaf a démissionné et a été remplacé à la tête du Gouvernement par Yahya Ould Hademine jusque-là ministre de l’équipement et des transports. Deux questions se posent actuellement : qui est le nouveau Premier ministre et où va aller son prédécesseur ?
Natif du Hodh Chergui (Djiguenni), Yahya Ould Hademine est l’un des premiers ingénieurs de Mauritanie. Il fait partie des premières générations ayant fait leur formation au Canada. Il a travaillé à la SNIM où il a fini par être directeur général de la SAFA (société arabe de fer et d’acier), puis de ATTM (autre filiale de la SNIM spécialisée dans le BTP) avant d’être promu ministre de l’équipement et des transports dans le deuxième gouvernement de Ould Mohamed Laghdaf de l’après-élection 2009.
Travailleur d’une grande compétence, il a vite acquis la confiance du Président Ould Abdel Aziz au nom duquel il a dirigé de grands travaux qui ont permis de lancer un maillage du pays par les routes goudronnées. Ce réseau qui reste encore à terminer, a été au centre du bilan présenté par le Président sortant lors de la dernière campagne présidentielle.
Mais Ould Hademine n’est pas seulement un technicien confirmé, il est aussi un homme politique qui a fait ses preuves au cours de joutes orales dans la sphère du Parlement notamment. Très respecté par les députés de l’opposition de l’époque, Ould Hademine a pu débattre raisonnablement avec les protagonistes du pouvoir qu’il représentait.
Mais ses compétences techniques et son histoire politique seront occultées par son appartenance tribale qui fera certainement l’objet de commentaires plus ou moins sulfureux. Il appartient en effet à l’un des plus grands ensembles de Mauritanie, les Laghlal qui ont cette particularité d’être disséminés sur l’ensemble du territoire national. Jusque-là, la tradition voulait que le Premier ministre ne pèse pas en terme tribal.
On a feint d’oublier, quand il a été nommé, l’identité tribale de son prédécesseur, Dr Moulaye Ould Mohamed Laghdaf qui est lui d’une tribu, les Tajakant, aussi nombreuse, aussi disséminée, tout aussi influente sinon plus. L’homme qui avait longtemps vécu à l’extérieur et qui n’appartenait à aucune faction politique locale, pouvait faire valoir ses qualités intrinsèques pour justifier son choix par la junte au lendemain du coup d’Etat de 2008. Il a depuis servi loyalement le Président Ould Abdel Aziz. Il a été notamment l’homme qui a géré pour lui la difficile transition du gouvernement d’union nationale. Il a été son interface avec l’opposition qu’il a essayé à plusieurs reprises d’intégrer dans le processus. Bref, l’homme Ould Mohamed Laghdaf fait partie du système Ould Abdel Aziz qu’il a accompagné toutes ces années. Il est pour cela difficile de l’imaginer hors-circuit.
Les qualités propres de Ould Hademine, sa parfaite connaissance du pays et son expérience de l’administration en font un Premier ministre à part entière au moment où le nouveau dispositif fixant l’équilibre du pouvoir, doit être réellement mis en œuvre. En effet, la réforme constitutionnelle introduite à l’issue du dialogue de 2012 fait du Premier ministre un véritable chef de gouvernement et le rend responsable devant le Parlement. Ce qui libère le Président de la République de certaines contingences et, au même moment, donne une marge de manœuvre et un pouvoir réel au Premier ministre, chef du gouvernement.
C’est pourquoi il faut s’attendre à ce que les choix du nouveau Premier ministre soient bien les siens. A part pour les affaires étrangères, la défense, l’intérieur, il faut bien croire que Ould Hademine aura son mot à dire dans les choix des personnes pour occuper les autres postes de responsabilité.
C’est à partir de la nomination du gouvernement que nous saurons si oui ou non, Yahya Ould Hademine est un «nouveau»  Premier ministre.