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lundi 9 juin 2014

Carnets de campagne (3)

Aïoun reçoit le candidat Mohamed Ould Abdel Aziz. La capitale du Hodh el Gharbi connait l’effervescence des grands moments. De tous les départements, affluent notables et dignitaires politiques. La région est acquise à Ould Abdel Aziz et elle entend en donner la preuve.
Quelques deux semaines avant, un groupe de grands acteurs politiques de la région dirigé par Mohamed Ould Rzeizim, ancien ministre de l’intérieur et ancien ambassadeur à Addis-Abeba et Ezza Mint Hammam, ancienne députée du département, ce groupe a décidé de quitter Adil pour soutenir le candidat Ould Abdel Aziz. Ce qui a été un grand coup. Surtout que les débauchages de personnalités symboliques ne s’est pas arrêté là. Les premiers responsables du RFD locaux ont aussi décidé de prendre le même chemin. Parmi eux Bah Ould Cheikhna Ould Mohamed Laghdaf, un nom bien connu et pesant lourd dans la symbolique de la politique locale et nationale. Le sénateur et le maire élus sous les bannières de Hatem ont déjà rejoint le camp du pouvoir. De quoi faire le plein pour la présente campagne où chacun des acteurs a retrouvé son groupe d’antan et où la situation est redevenue ce qu’elle était d’avant, avec les mêmes alliances, les mêmes factions unies cette fois-ci pour une seul cause.
L’ambiance est bonne et ça se voit quand le candidat prend la parole. Il se permet quelques pointes d’humour dans une ville où le sens de l’humour est un atout considérable pour embarquer les foules. C’est ce que le candidat va réussir en se libérant des contraintes du discours traditionnel faisant le bilan par chiffres. Quelques sujets porteurs qui permettent de faire réagir la foule avec des ovations des plus fortes (standing-ovations plusieurs fois).
D’abord l’attaque contre l’un des leaders de l’opposition d’aujourd’hui, «celui qui a causé la faillite d’Air Mauritanie» et qui se targue aujourd’hui de demander des comptes et de faire des leçons de morale politique. «Vous le connaissez, tout le monde le connait, je n’ai pas besoin de citer un non…» Mais la foule scandait déjà le nom de l’ancien Premier ministre de Sidi Ould Cheikh Abdallahi, le président de Adil Yahya Ould Ahmed Waqf. Et quand il parle de «ceux qui étaient des Walis ici et qui ont distribué les places publiques et dont le mauvais souvenir est toujours présent dans vos esprits», ce sont plusieurs noms qui fusent : les Walis qui ont sévi ici sont nombreux et militent tous aujourd’hui dans l’opposition comme ténors.
Ensuite la sortie sur l’émiettement de la société. «Chacun veut parler au nom d’un groupe alors que personne ne l’a mandaté. Souvent pour arriver à un dessein personnel. Il y a ceux qui parlent au nom des esclaves, au nom des forgerons, des chérifs, des guerriers, des marabouts, des noirs, des blancs, des basanés, de ceux qui ont les cheveux crépus, de ceux qui les ont lisses… parler au nom d’une faction est devenu un fond de commerce pour les élites perdantes. Ils viennent me voir pour me dire que leurs communautés sont exclus et marginalisées, qu’elles subissent l’arbitraire, je finis par croire que le plus opprimé de tous, c’est bien le Président de la République qui est obligé d’entendre jusqu’au bout ces balivernes qui e convainquent plus et qui sont dangereuses pour l’unité nationale. Notre choix est celui de préserver la liberté d’expression qui ne peut être source de mal, mais c’est à vous de refuser à ces gens de profiter de leurs discours sectaires, d’empêcher la prime à la mauvaise foi…»
Enfin cette sortie contre l’appel au boycott. «Maintenant qu’ils ont perdu leur pari sur la révolution, qu’ils savent que l’échec sera au rendez-vous pour toute leurs tentatives d’imposer une gérontocratie ici, ils décident de prôner le boycott pour déstabiliser la marche du pays vers un mieux-être politique et économique. Quand, comme pendant les législatives et municipales, le taux de participation sera bon, ils auront perdu leur dernier pari, celui de jeter l’opprobre sur la démocratie. C’est pourquoi je vous appelle à venir massivement faire échouer leur funeste projet comme vous l’avez fait par le passé».

Après le discours, le candidat s’est permis un bain de foule alors que ses soutiens se dispersaient dans la bonne humeur. Le soir, il se plia à la tradition d’une soirée et de multiples rencontres avec les notables et les dignitaires locaux. L’occasion de recueillir par lui-même les engagements à le soutenir et faire probablement quelques engagements pour l’avenir.