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dimanche 4 mai 2014

Entre le Maroc et la Mauritanie…

On peut ne pas faire attention à deux faits : l’Ambassadeur du Royaume du Maroc en Mauritanie exerce ses fonctions à Nouakchott depuis près de vingt ans ; pour sa part la Mauritanie n’a pas d’Ambassadeur à Rabat depuis près de trois ans. A eux seuls ces deux faits peuvent attirer l’attention sur l’existence d’un «refroidissement» dans les relations entre les deux pays. Mais par ailleurs, les relations entre le Maroc et la Mauritanie peuvent-elles être jugées à cette aune-là ? Certainement pas. Force est de constater qu’il y a quelque chose qui ne va pas. Quoi ?
Il y a une dizaine de jours, l’intérêt des journaux marocains était capté par le déroulement des discussions du Conseil de Sécurité des Nations-Unies sur le Sahara. Un projet de résolution porté par les Américains a failli passer n’était l’effort titanesque fourni par la diplomatie marocaine. Ce projet voulait élargir la mission de la force onusienne (MINURSO) pour lui donner mandat de surveiller la situation des Droits de l’Homme dans la province saharienne. Les Etats-Unis, allié de premier ordre du Royaume retireront finalement le projet, mais le rapport du Secrétaire général de l’ONU, comportera quelques formules «dérangeantes» pour le Royaume.
Le sujet a occupé une bonne place dans la presse pendant quelques jours. Les opposants au gouvernement l’utilisant pour dénigrer la diplomatie du Royaume, les militants le prenant comme prétexte pour renouveler l’aspect «inaliénable de l’intégrité du Maroc» et la nécessité «d’unir les rangs autour de cette cause sacrée». Certains intervenants, notamment ceux originaires de Saguia el Hamra, n’ont pas hésité à accuser la Mauritanie plus ou moins directement d’être «devenue un allié de l’irrédentisme sahraoui». L’un d’eux est parti jusqu’à dire qu’il ne reste plus que «quelques milliers de personnes dans les camps du Polisario qui ont pu bénéficier du nouvel état civil mauritanien, certainement avec la complicité des autorités mauritaniennes». Dans toutes les déclarations et publications faites à l’occasion, il y avait toujours cette question qui apparaissait à un moment ou un autre du texte : «Le Maroc va-t-il perdre le Sahara comme il a perdu la Mauritanie ?» Dans ce tumulte apparaissent les rôles catastrophiques d’une diplomatie «de l’informel» qui fait qu’entre les deux pays, des émissaires privés vont de part et d’autre colporter mauvaises informations et analyses tronquées. Ceux-là ont plus d’influence de part et d’autre que les diplomates des deux pays.
En discutant ici et là, on se rend compte de la défiance de plus en plus grandissante entre les deux pays qui sont pourtant condamnés à vivre dans le même sillage. Ni la Mauritanie ni le Maroc ne doivent se résoudre à croire qu’ils peuvent prospérer l’un sans l’autre. L’un et l’autre sont des versants (Sud quand il s’agit de la Mauritanie pour le Maroc, Nord du Maroc pour la Mauritanie), des interfaces dont la complémentarité découle de l’Histoire et de la géographie des deux Nations.
Toute analyse qui mène à adopter à une attitude de défiance est préjudiciable à l’un et l’autre des pays. Pour la Mauritanie, l’existence d’un Maroc dynamique et prospère a certainement un effet bénéfique pour l’économie, pour le rôle sous-régional, pour les équilibres intérieurs… Pour le Maroc, la stabilité de la Mauritanie est un gage de sécurisation et d’ouverture sur le Sud. Elle est aussi un facteur de stabilité intérieure et d’épanouissement vers l’Afrique de l’Ouest.
Nos frères du Nord, Marocains comme Algériens, ont toujours oublié (ou fait semblant d’ignorer) que toute solution de la question du Sahara passe par une forte implication de la Mauritanie sans laquelle rien de pérenne ne sera fait dans la région. On peut toujours continuer à isoler la Mauritanie, à croire à sa chute imminente, à se convaincre que l’effondrement de ce pays peut mener à une résolution des différents maghrébins, mais une vérité historique et sociologique résistera à toutes les analyses : de part son positionnement géostratégique et humain, toutes les clés de l’intégration maghrébine et africaine se trouvent en Mauritanie.