A
peine ouverte, la première session du dialogue entre les pôles politiques
mauritaniens se referme sur une atmosphère d’incompréhension et de rejet. Le Forum
nationa pour la démocratie et l’unité a prétexté l’absence du gouvernement pour
refuser de venir au premier round. Puis le ministre de la communication a été
envoyé ouvrir les négociations. Son retrait juste après son mot d’introduction
a été un nouveau prétexte pour les représentants du FNDU pour se retirer. Ils ont
considéré qu’il s’agissait là d’un manque de considération, peut-être d’une «preuve de mauvaise volonté de la part du
gouvernement». Il est vrai que le ministre aurait pu attendre la réponse
solennelle des représentants du FNDU, quitte à se retirer ensuite. Comme il est
vrai qu’il s’agissait d’une séance d’ouverture d’un round destiné à élaborer un
ordre du jour pour «passer aux choses
sérieuses» avec d’autres vis-à-vis et dans d’autres circonstances. Tout ça
est léger, n’est-ce pas ?
Le
jeu qui se déroule devant nous cache (mal) les défis qui sont lancés à chacun des
protagonistes qui savent qu’il s’agit là d’une occasion pour eux.
Pour
le Président Mohamed Ould Abdel Aziz, il s’agit de s’assurer de la présence
dans la course de candidats de poids (ou non) à même de légitimer l’élection et
d’éviter au mandat prochain d’être vicié à la naissance. Il sait que personne
ne menace son pouvoir et qu’il peut ouvrir le jeu comme il se doit sans risquer
grand-chose. Il est prêt donc à faire toutes les concessions qu’il faut et qui
pourraient être demandées dans le cadre d’une élection. Même s’il ne peut pas
reculer les dates et même s’il refuse à constituer un gouvernement d’union, il
reste visiblement ouvert à toutes les autres perspectives (CENI, audit de la
liste électorale…). Mais son personnel est-il au même degré de donscience des
enjeux, surtout au même niveau de confiance ?
Pour
le FNDU, la perspective d’un candidat unique est impossible à envisager et a d’ailleurs
été abandonnée lors du lancement du forum. Il reste que l’élection future
constitue une voie de retour pour les principaux partis de l’opposition
radicale, ceux qui avaient boycotté les législatives et municipales et
subissent aujourd’hui les conséquences néfastes d’un tel positionnement. C’est
le cas de l’Union des forces du progrès (UFP) et du Rassemblement des forces
démocratiques (RFD), les deux plus grands (et plus significatifs) de l’ensemble.
Pour ces partis, la mise en route de plusieurs candidats peut mettre en danger
le candidat Ould Abdel Aziz, quitte à se retrouver plus tard, dans un second
tour qui pourrait être décisif pour toutes les parties. Il y a donc quelque
chose à jouer dans la participation. Surtout qu’il n’y a rien en perspective
dans le positionnement actuel qui les met hors-jeu. S’ils peuvent par exemple
imposer l’idée d’une reprise des élections législatives et municipales, ce sera
pour ces partis l’occasion de revenir dans le jeu. C’est déjà ça de gagné. Mais,
les divergences tactiques et les «intérêts
égoïstes» peuvent-ils attendre ?
La
CAP est un peu l’arbitre dans le jeu. C’est elle qui va faire pencher la
balance d’un côté ou de l’autre, en apportant son soutien à l’une ou l’autre
des positions. On sait que la CAP a déjà mené le même exercice avec la Majorité
et qu’elle en est sortie avec des réformes fondamentales qui ont été à la base
du système politique qui a permis les dernières élections. Elle peut imposer
aux deux parties le retour aux accords de 2012 pour les enrichir par de
nouvelles propositions. Ce qui permettra la recomposition de la CENI, le
renforcement de son rôle et de son indépendance.
On peut – et on doit – rester optimiste parce que
chaque partie est convaincue de l’utilité pour elle de faire aboutir le
processus actuel. Les politiques finiront par trouver la voie. On l’espère du
moins.