Le 14 février dernier, ici même : «Il y a comme une odeur
de magouilles internationales. Le monde bouge et se recompose. Encore suivant
le clivage Est-Ouest. Cette fois-ci l’Est englobe tout l’Orient, avec des
puissances comme la Russie, la Chine, le Japon et de grands pays comme l’Inde, le
Pakistan, l’Iran… une aire de civilisation qui en commun l’espace et le fond
culturel. L’Ouest quant à lui, c’est en gros l’espace de civilisation
judéo-chrétienne. C’est l’Europe (Union Européenne), l’Amérique (USA, Canada).
Le monde «civilisé» a besoin de redistribuer les rôles et les cartes. C’est
ce qui est en train de se passer sous nos yeux. Les déchirements en Egypte, en
Libye, en Syrie, au Bahreïn, au Yémen, mais aussi en Centrafrique, au Kenya, au
Soudan, au Congo, au Nigéria…, ces déchirements ne sont que des manifestations
de cette lutte d’influence. Chacun voulant garder son pré-carré, sa zone
d’influence. Les engagements sont parfois directs, parfois par pays ou par
factions interposées. Dans ce jeu, les monarchies du Golfe jouent le rôle du financier
après avoir essayé vainement de jouer celui du gendarme.
Autour des pourparlers de Genève (I et II), c’est la carte du Monde qui est
dessinée par les puissances. A la Russie on abandonnera une zone d’influence
donnée : la Syrie au Moyen-Orient et dans une moindre mesure l’Egypte,
l’Asie centrale et une partie de l’Europe de l’Est. La Chine pourra prendre
pied en Afrique et dans des enclaves du Golfe. Le reste reviendra à l’aire
d’influence occidentale.
Dans ce jeu des puissances, nous avons à réfléchir à ce que nous pesons.
Autant dire rien. Avec trois millions d’habitants, nous ne constituons pas un
marché attractif. Nous avons été incapables jusque-là de cultiver ce que nous
savons le mieux faire : le sens du commerce et des affaires pour jouer pleinement
notre rôle de charnière entre les deux bords du Sahara. Nos choix dans
l’éducation ont donné un résultat catastrophique : nous n’avons même pas
pu former pour les marchés d’aujourd’hui.
Que faire pour continuer à exister dans un monde sans état d’âme ?»
Ce qu’il y a à ajouter et qui se précise de plus en plus : 1. Dans le
Monde arabe, on évolue rapidement vers l’éclatement du Conseil des pays du
Golfe, avec tout de suite un clivage Arabie Saoudite-Qatar, et plus tard un
troisième front autour du Koweït et des petits Sultanats qui ne voudront pas
prêter le flanc aux nouveaux positionnements de l’Iran. La dérive du Conseil
prendra effet avec la fin de la guerre en Syrie qui va certainement être à l’avantage
du régime en place.
2. La
crise ukrainienne est d’abord un affrontement entre la Russie de Poutine et l’Union
Européenne. Le rêve de Poutine est de créer un ensemble genre «Union Eurasie»
qui comprendra certaines parties de l’Empire russe et qui pourra faire face à l’UE
et probablement signer son reflux, pour ne pas dire sa décadence en tant qu’ensemble.
Le rôle de
la Russie dans ces deux conflits est crucial. Le premier résultat sera
peut-être la réorientation de l’aiguille qui n’indiquera plus le Nord et l’Ouest,
mais l’Est et le Sud. La réforme tant attendue de l’ONU s’imposera alors d’elle-même.
La beauté
du Monde est la rapidité avec laquelle les évènements se déroulent.