Cette après-midi, on apprend que le Rassemblement des forces
démocratiques (RFD) a décidé de «geler»
sa participation au forum de l’Opposition qui doit s’ouvrir ce vendredi (28/2).
Sous prétexte que le parti est «sous-représenté» dans les commissions d’organisation
qui doivent fixer l’agenda et les objectifs de ce forum.
En réalité, on craint au RFD que «l’on ne soit victime, une
fois de plus de machination visant à reléguer au second plan le parti et ses
choix stratégiques». Les cadres les plus loquaces n’hésitent pas à rappeler
que «chaque fois, le RFD a adopté une feuille de route décidée et mise en œuvre
par d’autres, tantôt les Islamistes, tantôt l’UFP, ou le RDU ou l’UNAD ou… ou… à chaque fois il s’est retrouvé coincé entre la
nécessité pour lui de recadrer les objectifs et le souci de rester avec les
autres». Conclusion : «il est temps pour le parti de décider
lui-même de la direction à suivre».
Le malaise est là depuis qu’il est question de discuter la
perspective du candidat unique. Toute évolution vers un accord du genre est
sentie comme une forme d’exclusion pour le chef du parti, le Président Ahmed
Ould Daddah. Surtout qu’il est question de fixer des critères dont le consensus
autour de la candidature et l’absence de précédent dans la course pour la
présidentielle. Le consensus autour de la personnalité de Ould Daddah est
impossible à avoir dans un microcosme où l’on considère le chef du RFD comme «l’ennemi
principal». C’est après tout la position vis-à-vis de l’homme Ould Daddah
qui a déterminé le parcours de tous les leaders actuels de l’opposition (dans
toutes ses composantes).
Ceux qui collaboraient avec Ould Taya et qui sont les plus actifs
aujourd’hui dans ce camp, ont participé à sa diabolisation et à la formation
des aspects négatifs de l’image que l’opinion publique a de lui : homme du
Sud n’aimant les gens de l’Est, voulant assouvir les soifs de vengeance
ethniques, homme politique dédaignant tout sauf la présidence… tous ces clichés
qui fondent une certaine idée qu’on peut avoir de lui ont été créés et
véhiculés par eux.
Ceux qui l’ont accompagné à un moment ou un autre au sein de l’Union
des forces démocratiques (UFD) et qui ont fini par se dresser contre lui à un
moment à un autre, souvent à un moment crucial de son parcours.
Certains pensent cependant que la décision du RFD relève plus de la
manœuvre que de l’acte déterminé. Mais un parti comme le RFD ne «clique»
pas sur des aspects du genre : «nous ne sommes pas assez représentés,
nous voulons telle ou telle présidence de commission…». Quand il réussit à
imposer ses visions, il y va normalement. Alors qu’est-ce qui peut bien gêner
le RFD ?
Bien sûr la question du candidat unique qui est sentie comme un
piège : si le RFD accepte de la discuter, il ne peut maîtriser l’issue des
débats, encore moins la décision à prendre ; s’il refuse alors qu’elle est
déjà posée, il apparaitra comme source de blocage à l’entente générale et, du
coup, confirmera ce qu’on dit du parti «qui ne veut que la présidence». Alors
mieux vaut surseoir à la participation en attendant d’assurer les arrières pour
éviter toute mauvaise surprise.
Il y a aussi la question de la participation à la présidentielle
qui, aux yeux du RFD, doit être précédée de préalables significatifs pouvant
justifier le retournement après le boycott des législatives et municipales. Comment
expliquer aux anciens députés et maires du RFD qu’on refuse de les laisser
participer au nom d’une exigence de transparence qui disparait quand il s’agit
de la présidentielle ? Il faut donc placer la barre très haut et amener le
forum à adopter une feuille de route «forte» : pourquoi ne pas
demander le renoncement de Ould Abdel Aziz à se présenter ?, exiger les
demandes concernant la stricte neutralité des chefs militaires, de l’administration,
réorganiser fondamentalement la CENI, défaire le Conseil Constitutionnel, la
Cour Suprême, distribuer équitablement le temps d’antenne dans les médias
publics, annuler des dernières élections, mettre en place un gouvernement «neutre»…
Autant de conditions qui seraient plausibles si le rapport de force
était autre et si certains partenaires du RFD ne cherchaient pas à trouver une
issue à la crise qu’ils traversent depuis leur décision de boycott. C’est le
cas, pour certains cadres du RFD, de l’Union des forces du progrès dont le
Président Mohamed Ould Maouloud s’est «empressé de répondre à l’invitation
du Premier ministre et qui a loué les entretiens qu’il a eus avec lui».
Le forum se tient déjà sans la Coalition pour l’alternance
pacifique (CAP) formée par les partis de l’opposition ayant participé au
dialogue avec la Majorité en 2011 et 2012 (Al Wiam de Boydiel Ould Hoummoid, Alliance
populaire progressiste de Messaoud Ould Boulkheir et Sawab de Abdessalam Ould
Horma).
Si les partenaires du RFD au sein de la COD ne
réussissent pas à ramener le parti de Ould Daddah dans les débats du forum, il
sera impossible d’en faire un événement majeur. Déjà qu’il est «amoindri»
par la rencontre entre le Premier ministre et le Président de l’UFP, le voilà sérieusement compromis par le gel de la
participation du RFD.