Il
y a eu d’abord l’épisode de la plate-forme commune. Celle qui a vu tous les
partis se réunir et définir ensemble les contours d’une plate-forme
revendicative rassemblant les sujets autour desquels le dialogue doit s’engager
avec la Majorité. C’est à ce moment-là qu’il faut situer aussi la volonté –
plus ou moins évidente – de faire «hiberner»
l’Institution de l’Opposition en attendant de lui donner la mort («clinique» et dans un deuxième temps «biologique»). Pour la remplacer par un
regroupement dont on peut discuter, le moment venu, de la légitimité ou de la
légalité.
Suivra
l’épisode qui verra une partie de cette Coordination de l’opposition
s’affranchir de ses engagements, poser «la
réalisation de préalables» pour tout dialogue avec la Majorité et décider
de ne pas participer au processus qui s’ouvre en grande pompe au Palais des
Congrès. Avec la participation de deux grands partis de la COD : Alliance
populaire progressiste (APP) de Messaoud Ould Boulkheir par ailleurs Président
de l’Assemblée nationale, et Al Wiam de Boydiel Ould Hoummoid, qui seront
rejoints par le parti Sawab des Baaths dirigés par Abdessalam Ould Horma. En
fait, les partis qui formaront la Coalition pour une alternance pacifique
(CAP).
Vient
ensuite l’épisode des «initiatives»
qui a vu les groupes, les individus, les partis et même les regroupements de
partis s’embarquer dans tentatives de «réconciliation politique».
La plus emblématique de ces initiatives était celle proposées par le Président
Messaoud Ould Boulkheir. Elle comportait le traitement de vraies questions de
fond, mais l’on n’en retiendra que le volet «constitution d’un gouvernement national». Malgré les déclarations
publiques du Président Ould Abdel Aziz, de nombreux leaders vont s’accrocher à
cette idée de gouvernement de consensus. Cela va occasionner une ruée de petits
partis qui se trouvaient à l’étroit ailleurs vers la CAP et, en même temps,
encouragera les composantes de la COD à trainer. Alors que l’échéance
électorale se rapprochait inexorablement.
Entretemps,
il semblait que le pays revenait à cette configuration de 2009 où la scène se
divisait en trois «pôles politiques» :
la Majorité (qui est la même), la CAP (qui ferait le rôle du FNDD) et la COD
(un peu plus que le RFD de l’époque). Comme s’il suffisait d’avoir cette
configuration qui rappelle celle d’avant, les leaders ont commencé à croire que
le Destin mènera droit vers un accord comme celui de Dakar. Tout semblait aller
de soi. Nouvelle source de nonchalance. Le temps passe.
Vint
enfin le temps du rabattage. Il faut l’appeler comme ça parce qu’il correspond
à une étape où il fallait rabattre le maximum d’acteurs pour légitimer les
élections et, éventuellement, laisser se débattre à la marge les plus caciques
des protagonistes.
Cela
a commencé par les avances faites par le Président de la République à Néma.
Mais au lieu de croire à une porte ouverte, la COD est entré dans un cycle de
débats internes qui ne menaient visiblement nulle part. Tout le monde savait
que ce qui unit ces partis, ce n’est pas une vision commune du monde, ce n’est
pas un parcours commun, ce n’est pas une tradition commune du combat, ce n’est
même pas une espérance commune d’un avenir commun… Rien que la haine d’un homme
qui a commis deux actes fondamentaux : le 3 août 2005 et le 6 août 2008.
Les deux actes mettaient fin à l’hégémonie de certains clans dont la grande
partie, «blanchie» (comme on blanchit
l’argent sale) entretemps, se trouvait dans les premières lignes de la COD.
Le
rabattage se fait en deux temps : le temps de la rumeur sur les éventuels
reports, les faiblesses du pouvoir qui «est
obligé de lâcher du lest face aux pressions occidentales», la mauvaise
humeur de ses partenaires de la CAP qui sont «sur le point de casser» et l’ouverture d’une fenêtre avec la
décision de composer des délégations en vue de discuter. Un dernier service
rendu au pouvoir qui n’en avait déjà plus besoin. Visiblement Ceux qui ont
décidé de participer l’avaient préparé bien avant. Sinon comment comprendre que
Tawaçoul dépose plus de 150 listes aux communales et l’UFP une quarantaine
(dont certaines ont malheureusement été déposées après heure) ? Pourquoi
avoir trainé tout ce temps ?
Parce
qu’il faut le dire, la question de la participation ne devait jamais être
posée. Les leaders islamistes ont raison de le dire. C’est une question de
principe qui ne doit jamais être remise en cause. Il fallait donc se concentrer
sur les conditions de l’organisation des élections de manière à en assurer la
régularité. Avec des propositions concrètes et non des principes généraux comme
celui «d’un gouvernement de consensus».
Et les préparer comme il faut.
Comme
par le passé, les politiques ont cru que le temps aura raison de l’adversaire
qui sera obligé de revenir au processus suivant le chronogramme qu’ils auront
choisi. Une fois de plus, ils se seront trompés. Tant pis pour eux et dommage
pour la démocratie en Mauritanie.