L’avion présidentiel atterrit vers onze heures trente du
matin. Les pluies du matin et celle de la veille humidifient l’atmosphère et
rafraichissent l’atmosphère, empêchant la chaleur «naturelle» de Néma de frapper comme à l’accoutumée. L’intérêt de
venir ici en cette période est celui-là aussi : la clémence de la nature
qui offre tout ce qu’elle a de beau et de bien. Cela se reflète sur la nature
et sur ses habitants.
A l’aéroport de Néma, véritable gâchis pour un pays pauvre
qui possède une telle infrastructure sous-utilisée, des centaines de gens
s’agglutinent pour saluer le Président. Le fameux «toucher présidentiel» qui procure à son auteur une immense fierté,
comme s’il s’agissait d’une baraka qui fera l’effet d’une onction bénie. Le
Président tient à saluer tout le monde. Chacun tient à saluer le Président.
Résultat : les rangs se défont pour se refaire un peu plus loin. Cela
prend le temps qu’il faut : une bonne heure.
L’accueil est fastueux du point de vue de la présence
humaine et du déploiement des traditionnels défilés de cavaliers et de
chameliers. Ils sont venus de partout de la région pour crier leur «timjida», ce patronyme qui colle à
chaque ensemble pour le distinguer des autres et qui sert à exciter la
communauté et les individus dans les moments où l’on a besoin d’exciter en eux
bravoure et générosité.
C’est «Ejom»
quand on passe devant les Ijoumâne, «Ejad»
pour les Kounta, «Dicko» pour les
guerriers en général (ici les Awlad Dawoud), «Babiih» pour les Tajakant… chaque ensemble veut marquer sa
présence. Parce que chaque ensemble est supposé mobilisé autour de l’un ou de
plusieurs de ses ressortissants qui se trouvent être des cadres de la
République. Il faut bien que l’on sache, là-haut, que ces cadres ont «fait venir» les leurs. Extrêmement
important pour eux, surtout qu’il a été question du «boycott par les populations de la visite». Aucune adversité ne
semble perturber pourtant le cours de la visite. Sur le tracé du parcours, des
milliers de gens, marchant, à dos de cheval ou de chameau, portant des
portraits du Président Ould Abdel Aziz… aucune manifestation hostile quelle
qu’en soit l’ampleur.
La capacité hôtelière de la ville est presque nulle :
deux hôtels d’une trentaine de lits. Des milliers de gens arrivent des autres
régions de Mauritanie. En plus de la délégation présidentielle. On fait comme
on peut. C’est l’habitant qui reçoit et on doit se suffire de ce qu’on trouve.
C’est ce qui permet de résorber les problèmes de résidence : personne ne
s’attend au faste et au confort absolu et chacun aura sa portion d’aise qui lui
permettra de rester le temps de participer à la fête.
La fête, c’est ce soir, c’est le face-à-face avec le Président. Que
va-t-il dire ? comment va-t-il le dire ? qui posera les questions en
plus des journalistes sélectionnés pour le faire ? quelles questions
seront posées ?