Les
évènements de Kaédi, ceux de Dowshliya (près de Mederdra) viennent nous
rappeler combien il est dangereux de continuer à cultiver la haine entre les
différentes composantes de notre société déjà fragilisée par les agressions d’une
vie toujours plus difficile à mener.
Kaédi.
Il a suffi d’une banale bagarre pour une place au marché entre deux individus
pour ouvrir la voie à une confrontation ethnique qui aurait pu prendre une
ampleur autre n’était le refus de la grande majorité de la population de suivre
les belliqueux.
Dowshliya.
Il a suffi d’une controverse religieuse d’un autre temps pour voir des
populations, jusque-là modèles de passiveté et de modération, s’affronter violemment.
A
l’origine des deux évènements, il y a cette culture de la violence que l’élite
adopte depuis un certain temps et qui ne laisse plus de place aux ressorts
traditionnels de règlement des conflits. Il y a aussi ce laisser-aller instauré
au nom de la liberté d’expression et de manifestation et qui est en fait une
tentative sournoise de décrédibiliser la démocratie et la liberté. En les
laissant s’apparenter à un chao général.
Les
débuts de tous les renversements relèvent toujours de l’anecdotique. Cela commence
très souvent par une banale histoire qui finit par alimenter une atmosphère
déjà pourrie par la rumeur et les analyses les plus saugrenues.
Le
plus grand drame que les Mauritaniens ont vécu ces dernières décennies est bien
celui des «évènements de 1989». Cela a
commencé par une bagarre entre des éleveurs Peulhs (Mauritaniens) et des
agriculteurs Soninkés (Sénégalais). Cela s’est terminé par les plus grands massacres
de part et d’autre, le déplacement de milliers de pauvres citoyens de part et d’autre,
la fermeture des frontières pendant près de trois ans et une fracture qui n’arrive
pas à cicatriser.
Pourtant
des évènements comme celui de Diawara le 9 avril 1989, relèvent du quotidien
dans cette région frontalière. Mais la bagarre est intervenue à un moment où les
esprits sont pourris par la propagande raciste et xénophobe et où les
consciences sont neutralisées par la culture de la haine. C’est le contexte qui
a créé 89 et non la bagarre de Diawara.
En
Mauritanie, ces derniers temps, tout tourne autour du rejet de l’autre, autour
de sa culpabilisation… Le reflux des idéologies unitaires et la pauvreté du
discours politique en général exacerbent le recours (le retour) aux réflexes
primaires dont celui de tout construire autour d’un particularisme. La Raison
disparait devant le réflexe épidermique.
La
haine aveugle toute l’élite et corrompt tous les discours.
Vous
allez être surpris de constater combien l’élite a été indifférente aux
évènements de Kaédi (et de Dowshliya). Quels sont les partis qui ont
immédiatement réagi ? quels sont les sites, les chaines ou les journaux
qui ont dépêché des correspondants sur place pour en savoir plus ?
L’Egypte
intéresse plus tout ce monde. Pourtant, ce sont là des évènements qui
pourraient être annonciateurs de mauvais lendemains, qui sont déjà révélateurs
d’un présent incertain.