C’est
un peu David contre Goliath, dans cette guerre que livre l’Espagne à l’Accord
de pêche signé entre la Mauritanie et l’Union Européenne (UE).
Le
29 mai dernier, les Espagnols obtenaient leur première victoire par le vote
contre l’Accord de 13 membres de la commission contre 9. Le résultat du vote
était attendu vu la configuration du collège qui comprend 7 élus espagnols dont
un préside la commission pêche en question. Une victoire qui leur permet de
présenter un rapport d’évaluation plein de contre-vérités au Parlement qui doit
entériner l’Accord. Pour mieux comprendre, je vous invite à voir dans l’édition
de cette semaine de La Tribune.
Parce
que les «envoyés spéciaux» n’ont pas suffi, le gouvernement espagnol a
commencé à «couper» dans le budget de la coopération avec la Mauritanie.
Il y a deux semaines, il se réunissait pour annoncer l’annulation d’une enveloppe
de …deux millions d’euros destinés à aller dans un volet de la coopération. Lequel ?
un festival ? un hôpital ? une grande route structurante ? des
puits ? un projet agricole ? Je ne sais pas…
Le
dernier souvenir d’un grand projet financé par les Espagnols au profit de notre
pays est l’alimentation en eau de Magta Lahjar que l’Etat mauritanien a
finalement été obligé de réaliser par lui-même après près de trois ans d’attente
inutile.
Il
y a eu bien sûr l’épisode de «l’avion de surveillance» offert en grande
pompe à la Mauritanie pour l’aider dans sa stratégie de lutte contre le
terrorisme. Cet avion qui est tombé en panne à Néma lors de son premier voyage.
On
se souvient qu’il a été inclus dans la transaction passée pour libérer les
humanitaires espagnols enlevés par AQMI et relâchés contre une rançon de près
de huit millions d’euros. Au cours des négociations, le gouvernement
mauritanien avait exigé la reprise du vieux rafiot par l’Espagne. Ce qui fut
fait.
M’enfin,
nos «amis» du Nord sont encombrants, exigeants et inéquitables dans les
traitements qu’ils font. Les Espagnols par exemple ont beau savoir qu’une
pirogue de 50 clandestins coûte au contribuable espagnol la facture de 3
millions d’euros, ce n’est pas pour autant qu’ils sont près à verser une
redevance de plus de 2 millions à la Mauritanie, au Sénégal ou au Maroc. Ici il
faut négocier chaque centime qui doit compenser le pillage systématique de nos
ressources, systématique et historique parce qu’il s’agit d’un phénomène qui a
duré dans le temps (et qui dure encore). Alors que pour arrêter le flot des
migrants, on dépense sans compter.
Dans
le «temps normal», les Européens (les Espagnols les premiers)
reconnaissent que l’effort de pêche menace dangereusement la ressource de pays
pauvres comme la Mauritanie. Mais quand il s’agit de chercher à ouvrir le champ
à ses opérateurs-pilleurs, on oublie le danger si on ne l’occulte pas derrière
de considérations pseudo-scientifiques.
On
sait, les Européens savent que depuis 1996, date de l’Accord incluant les
céphalopodes dans l’activité de pêche européenne, il y a eu une raréfaction de
la ressource extraordinaire. Cela ne relevait pas de la conjoncture, mais bien
d’une surpêche qui a eu l’effet d’une prédation. Les conclusions et les
recommandations européennes en la matière sont édifiantes. Je me rappelle ici
du temps où ce sont les institutions spécialisées européennes qui ont sonné l’alarme
pour limiter justement l’effondrement de la ressource mauritanienne. Je ne
parle ici que de la pêche céphalopodière réglementée, pas de celle qui se fait
dans l’illégalité, sans respect des lois et règlements existants. Le volume des
infractions avérées et multiformes commises par les céphalopodiers espagnols
dans la zone exclusive mauritanienne sont encore dans les esprits.
L’Espagne
qui fait pression sur la Mauritanie profite déjà de l’Accord : depuis
juillet dernier, 27 navires espagnols opèrent tranquillement dans les eaux
mauritaniennes. En fait ce qui les fait bouger c’est l’accès aux céphalopodes…
et pour cette question, le choix de la Mauritanie est irréversible : seuls
les pêcheurs mauritaniens auront accès à cette ressource.