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mardi 11 juin 2013

Les pressions espagnoles

C’est un peu David contre Goliath, dans cette guerre que livre l’Espagne à l’Accord de pêche signé entre la Mauritanie et l’Union Européenne (UE).
Le 29 mai dernier, les Espagnols obtenaient leur première victoire par le vote contre l’Accord de 13 membres de la commission contre 9. Le résultat du vote était attendu vu la configuration du collège qui comprend 7 élus espagnols dont un préside la commission pêche en question. Une victoire qui leur permet de présenter un rapport d’évaluation plein de contre-vérités au Parlement qui doit entériner l’Accord. Pour mieux comprendre, je vous invite à voir dans l’édition de cette semaine de La Tribune.
Parce que les «envoyés spéciaux» n’ont pas suffi, le gouvernement espagnol a commencé à «couper» dans le budget de la coopération avec la Mauritanie. Il y a deux semaines, il se réunissait pour annoncer l’annulation d’une enveloppe de …deux millions d’euros destinés à aller dans un volet de la coopération. Lequel ? un festival ? un hôpital ? une grande route structurante ? des puits ? un projet agricole ? Je ne sais pas…
Le dernier souvenir d’un grand projet financé par les Espagnols au profit de notre pays est l’alimentation en eau de Magta Lahjar que l’Etat mauritanien a finalement été obligé de réaliser par lui-même après près de trois ans d’attente inutile.
Il y a eu bien sûr l’épisode de «l’avion de surveillance» offert en grande pompe à la Mauritanie pour l’aider dans sa stratégie de lutte contre le terrorisme. Cet avion qui est tombé en panne à Néma lors de son premier voyage.
On se souvient qu’il a été inclus dans la transaction passée pour libérer les humanitaires espagnols enlevés par AQMI et relâchés contre une rançon de près de huit millions d’euros. Au cours des négociations, le gouvernement mauritanien avait exigé la reprise du vieux rafiot par l’Espagne. Ce qui fut fait.
M’enfin, nos «amis» du Nord sont encombrants, exigeants et inéquitables dans les traitements qu’ils font. Les Espagnols par exemple ont beau savoir qu’une pirogue de 50 clandestins coûte au contribuable espagnol la facture de 3 millions d’euros, ce n’est pas pour autant qu’ils sont près à verser une redevance de plus de 2 millions à la Mauritanie, au Sénégal ou au Maroc. Ici il faut négocier chaque centime qui doit compenser le pillage systématique de nos ressources, systématique et historique parce qu’il s’agit d’un phénomène qui a duré dans le temps (et qui dure encore). Alors que pour arrêter le flot des migrants, on dépense sans compter.
Dans le «temps normal», les Européens (les Espagnols les premiers) reconnaissent que l’effort de pêche menace dangereusement la ressource de pays pauvres comme la Mauritanie. Mais quand il s’agit de chercher à ouvrir le champ à ses opérateurs-pilleurs, on oublie le danger si on ne l’occulte pas derrière de considérations pseudo-scientifiques.
On sait, les Européens savent que depuis 1996, date de l’Accord incluant les céphalopodes dans l’activité de pêche européenne, il y a eu une raréfaction de la ressource extraordinaire. Cela ne relevait pas de la conjoncture, mais bien d’une surpêche qui a eu l’effet d’une prédation. Les conclusions et les recommandations européennes en la matière sont édifiantes. Je me rappelle ici du temps où ce sont les institutions spécialisées européennes qui ont sonné l’alarme pour limiter justement l’effondrement de la ressource mauritanienne. Je ne parle ici que de la pêche céphalopodière réglementée, pas de celle qui se fait dans l’illégalité, sans respect des lois et règlements existants. Le volume des infractions avérées et multiformes commises par les céphalopodiers espagnols dans la zone exclusive mauritanienne sont encore dans les esprits.

L’Espagne qui fait pression sur la Mauritanie profite déjà de l’Accord : depuis juillet dernier, 27 navires espagnols opèrent tranquillement dans les eaux mauritaniennes. En fait ce qui les fait bouger c’est l’accès aux céphalopodes… et pour cette question, le choix de la Mauritanie est irréversible : seuls les pêcheurs mauritaniens auront accès à cette ressource.