Pour résumer la nouvelle position de la COD, celle qui est
exprimée depuis la remise de la réponse à l’initiative du Président Messaoud,
on pourrait dire : La COD répond «positivement» à l’initiative mais
a deux exigences, concernant le lancement immédiat et solennel d’un «nouveau
dialogue» et la mise en place d’un gouvernement d’union national ayant de «larges
prérogatives».
Concernant le premier point, la COD voudrait amener les
deux autres parties à faire table-rase du dialogue réalisé l’année passée et à
oublier ses résultats pour se remettre autour d’une table suivant de nouvelles
dispositions. Une manière de réaliser un double coup : revenir à la case
départ et amener les deux autres pôles à se désavouer. Un jeu d’enfants qui n’a
pas ses raisons.
Autre lecture plus ou moins explicite : «Nous
refusons de revenir sur l’exigence du départ du régime, mais nous demandons l’organisation
d’élections consensuelles où le pouvoir va se démettre et abandonner toutes ses
prérogatives pour permettre la mise en place d’un gouvernement d’union
nationale qui aura tout en main. Si nous réussissons à le chasser par les
urnes, c’est tant mieux, sinon on reviendra à notre position initiale. Parce que,
pour nous, Ould Abdel Aziz n’est plus apte à diriger le pays».
En fait, l’exigence du départ de Ould Abdel Aziz a été un
choix politique catastrophique pour le processus dont on aurait dû vouloir la
restauration au lendemain de la crise ouverte en 2008-2009. Personne n’a voulu
faire de cette restauration un objectif à réaliser.
Rappel nécessaire. Certains
ont cru pouvoir amener le pouvoir issu de l’élection de juillet 2009 à s’ouvrir
et à les impliquer un peu plus, un peu mieux, dans la gestion des affaires.
Reconnaissant immédiatement les résultats, ils ont accepté – sans attendre que
ce soit une demande officielle – de prendre langue avec le pouvoir. Cela s’est
traduit pour eux par quelques nominations dans les sphères moyennes de
l’administration : une grande direction par-ci, un projet par-là…, parfois
dans des postes de conseillers proches de l’Exécutif.
Ce fut le cas de Tawaçoul qui ira dans sa démarche jusqu’à
établir des listes communes avec l’UPR, le parti au pouvoir pendant le
renouvellement du tiers du Sénat qui va suivre. C’est bien une coalition
UPR-Tawaçoul qui arrache le siège de Boutilimitt au RFD. ADIL qui était encore
dans l’atmosphère du FNDD (front national pour la défense de la démocratie),
prit le même chemin tout en engageant plus tard des négociations avec la
Majorité.
D’autres sont restés dans leur position de rejet des
résultats des élections qu’ils ont pourtant cogérées. Jusqu’au jour où, au
lendemain de l’attaque mauritanienne contre un camp de AQMI au Mali (12 juillet
2010), il y eut la fameuse rencontre entre le chef de file de l’Opposition
démocratique, Ahmed Ould Daddah et le Président Mohamed Ould Abdel Aziz. Le dialogue
informel était renoué sans condition. Le processus formel était lancé.
La COD qui ne comptait pas encore Tawaçoul en son sein, établit
une feuille de route, une sorte de plate-forme qui devait être défendue par le
président de la COD, Me Mahfoudh Ould Bettah et celui de l’Assemblée nationale,
Messaoud Ould Boulkheir. On passera par la demande solennelle faite par le
Président Ould Abdel Aziz le 28 novembre 2010, par les discussions au sein de
la COD, l’échange de plusieurs correspondances…
Quand éclatent les évènements de Tunisie, d’Egypte et de
Libye. Selon une lecture des évènements, il s’agissait d’un phénomène qui
allait inévitablement toucher tous les pays de la région. Pas besoin de
continuer à vouloir une évolution «calme», le régime est appelé «à
disparaitre nécessairement». C’était mal évaluer les capacités des uns à
pouvoir provoquer la chute d’un régime, fut-il au bord de l’effondrement (on
oubliait ici l’expérience du putsch de juin 2008, quand le pouvoir était dans
la rue et que personne n’a daigné essayer de le récupérer). C’était surtout mal
connaitre le mental des Mauritaniens qui partagent une aversion extraordinaire
pour tout changement comportant des risques. La situation n’amenait pas non
plus à adopter une attitude suicidaire, surtout que l’exemple libyen n’a pas
tardé à tourner vers une guerre indéfinissable.
Le pays nage depuis dans une atmosphère de flou politique
qui arrange visiblement tous les acteurs. Pour le pouvoir, ce sera toujours un
prétexte de décrédibiliser ses adversaires et d’amener les plus virulents d’entre
eux à se retrancher dans les positions les plus radicales, parfois les plus
incongrues…, les éloignant un peu plus de la réalité des rapports de force… C’est
certainement ici qu’il faut situer le grand problème de nos hommes politiques :
l’incapacité à pouvoir évaluer un rapport de force, alors que la démocratie est
d’abord une situation dynamique de rapports de force.
Autre «valeur» (ou facteur déterminant) de la
démocratie, c’est le respect de l’autre. Pas la peine de pérorer là-dessus,
nous savons où est-ce que nous en sommes. La demande de vérité n’existe pas,
parce que la rumeur à remplacé l’information sur le fait… On dépense désormais
plus d’énergie à entretenir une rumeur, à expliquer une action imaginaire qu’à
élaborer un programme alternatif convainquant et emballant pour une grande
majorité d’entre nous.
Les messages
émis sont de plus en plus flous. Pas seulement parce qu’ils sont mal conçus au
départ, mais parce que le médium choisi n’a pas les compétences nécessaires
pour les faire parvenir. Veut-on vraiment les faire parvenir ?