Dans quelques jours, se tiendra une nouvelle session de la haute
commission mixte mauritano-marocaine. Elle devra évaluer les relations entre
les deux pays et essayer de les approfondir et de les développer.
Cette session arrive à un moment important, vital pour les deux
pays et pour la région en général. Elle est l’occasion pour les deux pays de
dépasser les incompréhensions, certes passagères mais lourdes pour l’avenir des
rapports entre eux.
Dans le passé, la relation entre la Mauritanie et le Maroc a été
gérée dans une espèce de convivialité qui a détruit le caractère officiel et
solennel de cette relation. Les individus, les particuliers essayant de se
substituer aux ensembles que sont les Etats.
A un moment donné, des particuliers ont effectivement cherché à
passer outre les Ambassades et les représentations de deux pays. Ce n’était
plus l’Ambassade du Royaume du Maroc à Nouakchott ou celle de Mauritanie à
Rabat qui demandait à l’Agence marocaine de coopération internationale de «bourser»
tel ou tel étudiant, mais des particuliers. Ce sont des écrits de particuliers
qui nous renseignaient périodiquement sur l’état de ces relations, essayant
parfois d’interférer pour les tendre ou les assouplir.
Quand les deux pays décideront de revenir à un cadre officiel et à s’y
tenir, ce sera la fin de certaines sources d’incompréhensions. La commission
mixte pourra alors faire évoluer les choses vers la suppression des visas.
Il n’y a pas de raison d’avoir un visa entre la Mauritanie et le Maroc.
Pour quelque raison que ce soit. Les relations historiques, sociales, humaines,
politiques, économiques dictent plutôt l’institution d’un régime de
libre-échange, pas l’obligation d’un visa d’entrée.
Pendant longtemps, c’est la Mauritanie qui a demandé le maintien du
visa. A un autre moment, c’est le Maroc. Il est temps pour les deux pays de
supprimer cette obligation pour permettre la création d’un espace de libre
circulation qui pourrait être le noyau de ce Maghreb, rêve de tous.
Une trentaine d’années de «tâtonnements diplomatiques»
qui nous a fait perdre nos vocations naturelles, notre âme, nos choix
stratégiques, notre Histoire et surtout notre géographie. Pendant une trentaine
d’années, l’autorité a travaillé pour faire de la Mauritanie un îlot de
conservatismes primaires (ostracisme, racisme, «arriérismes»…). Pour faire de nos frères des étrangers, de nos
voisins des extraterrestres, de nos amis des ennemis. L’extravagance est passée
par là. Et avec elle les décisions les plus incongrues et les plus
graves : crises avec les pays voisins, sortie de la CEDEAO, établissement
de relations avec Israël, coupure de relations avec l’Irak, volte-face
fréquent, inconsistance, instabilité, imprévisibilité…
Nous
avons donc à réhabiliter notre vocation première qui est celle d’être une terre
africaine et arabe, une terre de convergence ; d’être un pays profondément
établi dans son arabité et fier de son enracinement africain. Cultiver cette
double appartenance dans l’humilité et les bonnes prédispositions vis-à-vis de
nos frères et de nos amis. En fonction de cela faire ses choix stratégiques de
relations.
Je
pense personnellement que l’adossement de la Mauritanie à un Maghreb fort et
uni, son appartenance à part entière à une Afrique de l’Ouest intégrée dans la
CEDEAO et son maintien de relations privilégiées avec l’Europe à travers la
France, l’Espagne et l’Allemagne, avec l’Asie à travers la Chine et le Japon,
avec l’Amérique (Etats-Unis et Canada d’une part, Brésil et Venezuela d’autre part),
tout cela peut garantir la survie du pays dans un environnement de plus en plus
exigeant en matière de production, de qualité de vie, de concurrence…
Notre
relation avec le Maroc ne doit pas être dictée par les intérêts bassement
matériels de quelques individus vivant sur les embrouilles. Elle ne doit non
plus être conditionnée par le bon vouloir des frères algériens. L’inverse est
tout aussi vrai.