Une quarantaine de figures plus ou moins connues du
salafisme en Mauritanie ont émis un avis dénonçant la guerre «menée par la France
chrétienne» contre «les Musulmans du Mali». Parmi eux se trouvaient
certes quelques vénérables Shaykhs comme Mohamed Lemine Ould Hacen, mais cela n’a
pas donné une grande ampleur au mouvement. Puis vint la position très tranchée
du Conseil mondial dirigé par Youssouf Qaradawi, le Shaykh établi au Qatar dont
il cautionne tous les agissements. Et enfin notre vénérable Shaykh Mohamed el
Hacen Ould Deddew est entré en ligne pour exprimer la même attitude de
condamnation violente d’une «croisade» contre les Musulmans du Mali.
Il se trouve, en plus de ce que nous avons déjà dit,
que le Haut conseil islamique du Mali, seul représentant de l’expression
musulmane dans le pays, bénit parfaitement l’intervention française. Aujourd’hui,
le président de ce Conseil, Mahmoud Dicko qui, faut-il le souligner pour le
lecteur mauritanien n’a pas d’équivalent ou de concurrent au Mali, a déclaré
devant la presse que cette guerre vise la reconquête et donc la libération d’une
partie du Mali occupée par des bandes armées «qui n’ont rien d’islamique» même
si elles revendiquent le contraire.
Le porte-parole – légitime et légal – s’est dit outré
par l’attitude exprimée par les Salafistes d’Egypte, le Président Mohamed Morsi,
le gouvernement de Tunisie, le Shaykh Qaradawi et le Qatar qu’il a accusé d’avoir
une position équivoque vis-à-vis des groupes agissant au Nord du Mali.
«Le Haut Conseil islamique du Mali constate avec
regrets que depuis le début de la crise du Nord le 17 janvier 2012, le Mali,
pays membre fondateur de l’OCI n’a pas bénéficié du soutien de la communauté
musulmane». Et de rappeler que c’est le Mali qui a été agressé et que sa
population a subi la loi de «bandes de criminels» agissant au nom de l’Islam
et bénéficiant visiblement de la complicité de certains pays de la Oumma
islamique. Avant de conclure : «Tous les Musulmans du Mali apprécient
hautement l’intervention militaire française qui vise à mettre fin à l’occupation
d’une partie de leur territoire».
Et comme cela ne suffit pas pour convaincre nos
shuyukh (pluriel de shaykh) de revenir sur leurs propos qui sont finalement un
encouragement pour les groupes armés, voilà venir le temps des dissensions au
sein de l’organisation principale qui justifie cet alignement : Ançar
Eddine. Avec la naissance du Mouvement Islamique de l’Azawad, nous avons le
premier «coup de gueule» au sein de la nébuleuse créée par Iyad Ag Ghali. La
dissidence exprime naturellement sa volonté d’«aller vers une solution pacifique». Le mouvement, «indépendant»,
«composé exclusivement de nationaux», affirme «de la manière la plus
solennelle qu’il se démarque totalement de tout groupe terroriste, condamne et
rejette toute forme d’extrémisme et de terrorisme et s’engage à les combattre».
Le nouveau groupe dirigé par l’une des figures locales Algabas Ag Intalla qui a
participé aux différentes rencontres de Ouagadougou, «lance un appel aux
autorités maliennes et à la France pour un arrêt des hostilités dans les zones
que nous occupons, à savoir les régions de Kidal et Ménaka (nord-est du
Mali) et (pour) créer un climat de paix qui va nous permettre d’aller
vers l’établissement d’un dialogue politique inclusif».
A ceux qui se sont empressés pour se
ranger du côté des vrais assaillants d’appeler les groupes armés à déposer les
armes, de demander aux combattants algériens, mauritaniens, nigériens,
nigérians, libyens, égyptiens, tunisiens, européens ou nord-américains, de leur
demander de quitter ce pays qui n’est pas le leur et de laisser sa population
vivre en paix. Eux qui semblent écoutés par ces jeunes en rupture avec leurs
sociétés d’origine, doivent dire la seule bonne parole qui vaille : parce
que la solidarité des «frères» (de tous genres) a fait défaut, le Mali avait
le droit de faire appel à ses alliés pour continuer à exister et pour refaire
son unité. Les criminels, les vrais, sont ceux qui ont mis la région à feu et à
sang. Depuis quelques mois déjà et qui ont préparé le coup depuis quelques
années déjà.